La mission « Immigration, asile et intégration », dont les crédits augmentent globalement de 36 millions d'euros, soit une hausse de 2 %, par rapport à 2020, se structure autour de trois axes : la maîtrise des flux migratoires, l'intégration des personnes en situation régulière et la garantie du droit d'asile.
L'évolution des crédits est principalement due à l'actualisation des besoins en matière d'allocation unique aux demandeurs d'asile (ADA), en hausse de 11 %, et à la création de 4 000 places en CPH, qui se traduit par une hausse de 23 %.
Le programme 303 « Immigration et asile », qui est lui en hausse de 2,5 %, poursuit trois objectifs : optimiser la prise en charge des demandeurs d'asile, réduire les délais de traitement des demandes d'asile et améliorer l'efficacité de la lutte contre l'immigration irrégulière.
S'agissant du premier objectif, force est de constater que nous courons toujours après les règles que nous nous sommes fixées, en raison d'un manque de moyens, notamment dans les préfectures.
Si la réduction des délais de traitement des demandes d'asile par l'OFPRA puis par la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) à six mois en moyenne peut apparaître comme un progrès, il n'en demeure pas moins qu'entre le dépôt de leur demande et la décision définitive, les personnes réfugiées ne disposent d'aucuns droits, de sorte qu'elles sont incapables de subvenir à leurs besoins, d'autant que les hébergements manquent. Cette situation nous permet, certes, de mesurer la générosité de nos compatriotes, mais elle traduit les carences de notre système d'accueil.
Quant à la lutte contre l'immigration irrégulière, force est de constater que les flux ont diminué, qu'en raison de la pandémie, les centres de rétention administrative (CRA) ne sont pas pleinement occupés – j'ai pu l'observer en visitant celui de Marseille, la semaine dernière – et que les retours sont limités à certains pays : Maroc, Algérie, par bateau lorsque le départ a lieu à Marseille, et Albanie, par avion. Le délai de rétention se trouve de facto réduit par les difficultés de retour, de nombreux pays refusant par ailleurs d'accueillir leurs ressortissants en raison de la pandémie.
Le programme 104 « Intégration et accès à la nationalité française » est stable. Chaque année, environ 100 000 étrangers issus de pays extra-européens arrivent en France régulièrement ; ils souhaitent s'y installer durablement et signent le contrat d'intégration républicaine. Les bénéficiaires de la protection subsidiaire, qui représentent 26 % de ces étrangers, sont majoritairement non-francophones, souvent vulnérables, car venant d'une zone de guerre : Syrie, Libye, Afghanistan, et ont un niveau de qualification généralement inférieur à celui des primo-arrivants.
Une simple lecture du budget ne permet pas d'appréhender cette question dans toutes ces dimensions : il manquera toujours la dimension humaine que nous donnent à mesurer les parcours que doivent emprunter celles et ceux qui s'inscrivent pourtant dans le cadre légal que nous avons fixé.
Je citerai deux exemples qui illustrent l'écart séparant les bonnes intentions de la réalité du terrain. Premièrement, les jeunes ayant obtenu le statut de réfugié ou bénéficiant de la protection subsidiaire ne peuvent plus prétendre à l'ADA et se retrouvent alors sans ressources dans l'attente, qui peut être longue, de la convocation de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) en vue de la signature de leur contrat d'intégration républicaine, lequel leur donnera droit aux cours de français et aux quatre jours de formation citoyenne.
Deuxième exemple : un demandeur d'asile n'a, en principe, pas accès au marché du travail et ne peut donc ni travailler ni s'inscrire sur la liste des demandeurs d'emploi auprès de Pôle emploi ni bénéficier des prestations du service public de l'emploi. Dès lors, même s'il est accompagné par un centre d'accueil de demandeurs d'asile (CADA), aucun des prescripteurs autorisés par la loi ne peut le faire bénéficier d'une mise en situation professionnelle : seuls ont accès au dispositif de droit commun en la matière les personnes ayant la qualité de réfugiés ou bénéficiant de la protection subsidiaire.
Tout cela ne fait qu'encourager la clandestinité. En imposant de tels parcours, non seulement nous provoquons de la souffrance mais nous gaspillons également des deniers publics – or ce budget court toujours après les besoins.
Le groupe Libertés et Territoires votera donc contre les crédits de cette mission.