Intervention de Marc Le Fur

Réunion du mercredi 25 novembre 2020 à 9h30
Commission des affaires étrangères

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMarc Le Fur, rapporteur pour avis au nom de la commission des finances :

. Merci, madame la présidente, mes chers collègues, de m'accueillir au sein de votre commission. J'en suis très honoré comme je suis très heureux de travailler avec Jean François Mbaye.

La commission des finances a souhaité se saisir de ce sujet et a donné un avis favorable à cet accord. Je ne répéterai pas ce qu'a très bien exposé Jean François Mbaye, je me limiterai à ajouter quelques éléments.

C'est une évolution sans être une rupture, sachant que d'autres évolutions sont intervenues par le passé et que, progressivement, la part relative de la France a décliné. La France n'a jamais eu une fonction de censure, son rôle était de participer aux instances.

Par ailleurs, parmi les évolutions importantes, la principale, qui a le plus touché les opinions, est celle intervenue en 1994 et qui s'est traduite par une dévaluation de moitié de la valeur du franc CFA. Si ce franc CFA disparaît et évolue, ce n'est pas le cas d'autres monnaies. Peut-être l'Afrique centrale connaîtra-t-elle demain une telle évolution, mais à ce stade, une demande de cette nature n'existe pas.

Parmi les quatre principes fondamentaux constituant le franc CFA, deux disparaissent, deux sont maintenus. Disparaissent donc la représentation du Trésor français dans les principales instances de gouvernance et l'obligation faite à la Banque centrale, située à Dakar, de centraliser la moitié de ses réserves de change à Paris. Demeure très explicitement la parité, naguère entre le franc CFA et le franc, désormais entre l'ECO et l'euro. Cette parité reste fixe. La garantie du Trésor français est maintenue.

Il convient de retenir que l'essentiel est préservé. Premièrement, ces pays ont décidé de partager cette monnaie depuis soixante ans. Deuxièmement, cette monnaie commune est un préalable et un outil efficace de commerce entre ces pays. À l'inverse de l'Europe qui a créé son marché avant la monnaie, ces pays ont fait leur monnaie avant leur marché. Mais le marché intra-africain évolue, même s'il est encore relativement limité. Troisièmement, la monnaie commune est une garantie contre l'inflation, un facteur de poids pour les populations, en particulier les plus modestes. Jean François Mbaye l'a parfaitement expliqué : même en des périodes très troublées, à l'instar de celle que nous connaissons dans le Sahel, la monnaie reste un élément de stabilité, sa valeur ne décline pas ; c'est un élément majeur.

L'évolution du nom est importante en termes politiques. C'est également une évolution dans les relations avec la France. Toutefois, deux ou trois problématiques restent en perspective, qu'il ne faut pas nier. Cette monnaie a-t-elle vocation à devenir une monnaie de la zone commerciale qu'est la CEDEAO avec des pays gigantesques comme le Nigeria et le Ghana qui n'obéissent pas du tout aux mêmes logiques puisque leur monnaie n'est pas fixe ou avec des pays, en particulier le Nigeria, dont l'économie est calée sur l'exportation d'une matière première qui est le pétrole alors que la majorité des autres pays africains sont plutôt acheteurs de cette même matière première ? Les intérêts peuvent donc diverger, sans oublier le poids relatif du Nigeria qui est écrasant.

Autre évolution, qui ne nous concerne plus, mais qu'il convient d'avoir présent à l'esprit : le passage, qui est loin d'être aisé, d'une monnaie à une autre. Il faudra convertir les billets contre d'autres billets, mais également répondre à d'autres exigences. Nous savons que l'économie africaine ne se limite pas au fiduciaire, l'économie numérique est en pleine croissance, grâce au téléphone en particulier. Il n'empêche qu'en raison de son caractère très technique, la conversion constituera un exercice compliqué qui exigera du temps.

Nous nous situons à un moment important dans l'histoire de nos relations avec ces pays. L'évolution sera considérable, tout en restant cependant dans une logique partagée par les deux zones. Elle comptera pour les opinions dans la mesure où, physiquement, la monnaie changera de nature : si les opinions sont soucieuses que les noms changent, elles souhaitent également que les réalités de stabilité demeurent.

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