Intervention de Jean-Louis Bourlanges

Réunion du mercredi 20 janvier 2021 à 9h00
Commission des affaires étrangères

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Louis Bourlanges :

Le groupe MODEM votera bien entendu la décision du Conseil soumise à notre approbation et félicite notre rapporteur ainsi que le rapporteur de la commission des affaires européennes pour la qualité de leurs travaux. On peut se reconnaître pleinement dans les propositions qui nous sont faites.

Sur le fond, c'est-à-dire le plan de relance Next generation EU, M. Anglade a dit ce qui devait être dit à propos de l'innovation quantitative et qualitative qu'il constitue et l'importance de l'événement. Nous devons, à cet égard, saluer le succès du couple franco-allemand – et, dans une certaine mesure, sa résurrection, car il a été un peu aux abonnés absents –, qui a joué un rôle décisif dans des conditions politiques dont il faut rappeler qu'elles étaient très difficiles. De fait, il n'était pas aisé de faire céder M. Rutte, qui a la réputation justifiée d'être obstiné, ou une personnalité aussi forte que M. Orbán, qui s'inquiétait des menaces pesant sur ses prérogatives en matière de droits de l'homme. Le couple franco-allemand a donc véritablement joué son rôle.

Nous souscrivons également aux propos de M. Anglade sur le rôle du Parlement européen. Le contrôle parlementaire est un tout. Celui que nous exerçons dans cette assemblée, notamment au sein de la commission des affaires étrangères, est essentiel, mais nous ne devons pas le considérer comme antinomique avec celui du Parlement européen. Celui-ci a joué son rôle, et c'est heureux car, pour une partie des décisions, la ratification de la seule Union européenne – et non celle des parlements nationaux – est nécessaire.

Sous l'aspect des ressources propres, le bilan est plus mitigé. Certes, on peut voir le verre à moitié vide ou à moitié plein. Mais, selon moi, l'Union européenne, c'est une succession de verres remplis au dixième ; il faut donc patienter avant que le verre soit plein. En Europe, le diable n'est pas tant dans les détails que dans les délais… En l'espèce, on le voit bien, on commence par le plus facile : la « taxe plastique ». Très bien, mais c'est tout sauf une ressource propre. Cette taxe vise à sanctionner un défaut de vigilance des États en matière de recyclage, de sorte que, si ces derniers se comportent bien – ce que l'on peut souhaiter –, la ressource devrait fondre. Les véritables ressources, les plus importantes, sont celles issues de l'impôt sur les sociétés. Or, sur ce point, les Néerlandais notamment sont très prudents. D'abord, on va harmoniser l'assiette, les ressources demeurant nationales. Seront-elles ensuite transférées à l'Union européenne ? La question est renvoyée aux calendes grecques – ou néerlandaises !

De même, la grande ressource tant attendue qu'est l'ajustement carbone aux frontières est un immense chantier. C'est aussi un grand projet d'avenir, incarnant notre façon à nous de peser sur la transition énergétique qu'exige le réchauffement climatique mondial. Si nous savons ce que nous sommes, l'essentiel des émissions carbone provient de la Chine et des États-Unis ; l'ajustement aux frontières nous offrira, en quelque sorte, un fusil à tirer dans les coins. Toutefois, les difficultés techniques et politiques sont considérables.

La pierre de touche de cet ensemble est la taxation des transactions financières, me semble-t-il. M. Lecoq ironisera sans doute à ce sujet, estimant qu'il s'agit d'une Arlésienne dont on parle beaucoup et qu'on ne voit jamais. Je ne partage pas ce scepticisme. Il est très difficile de progresser sur les ressources propres car la décision exige l'unanimité des gouvernements et la ratification des parlements. Dans le cadre de la coopération renforcée que la Commission européenne prévoit d'adopter, nous pouvons avancer. Nous pourrons d'autant plus avancer que nous ouvrirons aux États membres – cette piste a été évoquée au sein de plusieurs commissions, et M. Beaune a dit que le gouvernement français la retenait – la possibilité de rembourser ainsi leur quote-part. Tel est, me semble-t-il, notre objectif.

Pour toutes ces raisons, nous sommes favorables au présent projet de loi. La devise officieuse de l'Union européenne est plus que jamais contenue dans le titre d'un ouvrage de Jean Paulhan peu connu, mais remarquable, comme tous ceux qu'il a écrits : Progrès en amour assez lents.

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