Intervention de élisabeth Borne

Réunion du jeudi 23 novembre 2017 à 9h35
Commission des affaires européennes

élisabeth Borne, ministre des transports :

Monsieur Bourlanges, nous sommes parvenus à trouver un compromis sur la révision de la directive relative au travail détaché, mais il n'en reste pas moins qu'il existe parmi les États membres des visions très différentes – que l'on ne peut pas résumer à une opposition entre est et ouest, la géographie est plus compliquée et inclut la péninsule ibérique. Certains États ont voulu bâcler la discussion sur le transport routier en l'incluant dans la révision de la directive sur le travail détaché. Diverses propositions ont ainsi circulé, qui incluaient des changements de règles pour le cabotage, par exemple, ou de longues périodes de non application de la directive sur les travailleurs détachés au transport routier.

Notre priorité a été de réaffirmer que les règles de la directive de 1996 s'appliquent au transport routier, et cela a été accepté. Les modalités et les règles particulières – car on peut entendre qu'il peut y en avoir – seront débattues dans le cadre du paquet mobilité, en prenant le temps nécessaire ; les changements ne peuvent pas être imposés brutalement, comme certains ont essayé de le faire.

Au cours de ces discussions, nous défendrons le principe « à travail égal en un même lieu, salaire égal », donc l'application au secteur du transport routier de la directive sur le travail détaché. Il ne fait pas l'unanimité ; les débats seront nourris.

Le Parlement européen va également travailler sur ce sujet, et le choix des rapporteurs peut laisser penser que notre tâche ne sera pas facile.

Pour notre pays, la loi Macron de 2015 s'applique, et elle est très protectrice pour les salariés du transport routier.

Monsieur Pichereau, des discussions ont lieu depuis décembre 2015, en vue d'un toilettage des règles de l'AESA, auquel nous sommes favorables.

En matière de drones, nous sommes favorables à une réglementation européenne, à condition qu'elle soit proportionnée : la proposition du rapporteur d'immatriculer tous les appareils pesant plus de 250 grammes – c'est-à-dire de jouets ! – nous paraît excessive. Cela ferait courir un risque d'embolie administrative.

La répartition proposée des compétences entre les États et l'AESA nous paraît adéquate, à condition d'éviter les mouvements brutaux, en matière de certification notamment. Un minimum de régulation par les États est nécessaire.

Le règlement comporte des avancées sociales. En revanche, les dernières initiatives du rapporteur, qui visent à encadrer le droit de grève, nous semblent inappropriées.

Monsieur Straumann, vous avez raison, les reports de trafic routier vers le réseau français sont importants dans votre région. La directive Eurovignette vise à assurer une certaine harmonisation de la tarification, ou en tout cas de ses principes, à l'échelle européenne. Dans le cadre des réflexions menées en vue de la loi de programmation sur les infrastructures, nous devons réfléchir à une stratégie, et à des ressources. Pour les raisons que vous évoquez, mais aussi par simple logique, les poids lourds, notamment ceux qui sont en transit, doivent participer au financement des infrastructures. Cela permettra, je l'espère, d'améliorer la situation dans le Haut-Rhin et le Bas-Rhin.

Vous évoquez également la liaison entre Colmar et Fribourg. Le Président de la République en a parlé avec les élus lorsqu'il s'est rendu dans la région Grand Est, où je suis moi-même allée récemment. Les transports transfrontaliers sont un enjeu majeur pour ces régions. Nous regrettons parfois que l'Allemagne n'ait pas réalisé des travaux destinés à donner au TGV Est toute sa pertinence ; inversement, les Allemands regrettent que nous n'ayons pas réalisé certains travaux sur les lignes TER. Nous devons renforcer la coordination entre régions et entre États, afin que les frontières cessent de constituer des obstacles pour les transports de la vie quotidienne.

Nous sommes aujourd'hui loin du compte, et nous devrons prêter une attention particulière à ce point dans l'établissement de notre stratégie d'infrastructures. Nous devons réfléchir à des outils qui permettent un meilleur ajustement avec nos voisins, notamment le Luxembourg, la Belgique, l'Allemagne… Avec la Suisse, de façon un peu paradoxale, c'est plus facile : je pense en particulier au nouveau RER transfrontalier, le CEVA (Cornavin-Eaux-Vives-Annemasse), en cours de construction.

Monsieur Naegelen, je veux vous rassurer, le Gouvernement n'a nullement l'intention de remettre en cause les arrêts du TGV dans les villes moyennes. J'ai pu m'en entretenir avec les associations d'élus concernées. En revanche, il faut être conscient qu'un modèle dans lequel le TGV non seulement circule sur des lignes à grande vitesse, mais irrigue les territoires au-delà, a un coût. Il suffit de regarder les offres Ouigo de la SNCF, qui portent uniquement sur les lignes à grande vitesse, pour constater que les écarts de coût par voyageur sont importants.

Il faut être conséquent : on ne peut pas demander au TGV de verser des péages comme s'il ne remplissait pas aussi une mission de desserte des territoires. On ne peut pas avoir à la fois des TGV qui aillent partout, des péages élevés et des billets moins chers. Le Gouvernement souhaite établir une stratégie ferroviaire cohérente ; en particulier, il faut cesser de renvoyer la dette entre SNCF-Mobilités et SNCF-Réseau. N'attendons pas que les péages TGV s'envolent, comme on a eu trop tendance à le croire ces dernières années.

La loi de programmation des infrastructures, que je présenterai au Parlement au début de l'année prochaine, permettra de débattre des équilibres que nous souhaitons pour nos investissements : quelle part pour les très grands projets, pour les lignes à grande vitesse notamment ? Quelle part pour « désasphyxier » les métropoles qui ne bénéficient pas d'un système de RER similaire à celui de l'Île-de-France ? Nous aurons inauguré quatre TGV au cours des dix-huit derniers mois, et dans le même temps nous avons 5 300 kilomètres de ralentissements sur nos lignes ferrées classiques. Enfin, peut-on terminer l'aménagement de notre réseau routier national, pour lutter contre l'enclavement de certains territoires ? C'est un débat important qui se tiendra au Parlement l'an prochain.

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