Intervention de M'jid El Guerrab

Réunion du mercredi 31 mars 2021 à 9h30
Commission des affaires étrangères

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaM'jid El Guerrab, rapporteur :

Sous un intitulé qui semble technique, le texte est très attendu par les professionnels de la bijouterie, de la joaillerie et de l'horlogerie des deux pays. Il permettra de fluidifier les échanges dans des secteurs très dynamiques de la relation commerciale bilatérale, tout en garantissant la protection des consommateurs.

Afin de mieux saisir les enjeux de la présente convention, je me permets de vous rappeler brièvement ce qu'est un poinçon, à quoi il sert, et la réglementation stricte à laquelle est soumis le commerce des métaux précieux, compte tenu de leur valeur et des risques de tromperie et de recel. Les objets en argent, en or ou en platine présentent en effet des poinçons permettant de déterminer leur qualité et leur provenance. Ces poinçons certifient les teneurs des métaux précieux qui composent les ouvrages.

Le système de poinçonnage des objets est différent selon les pays. En France, depuis ses prémices au XIIIe siècle, la législation sur les poinçons a connu de nombreuses évolutions. Aujourd'hui, tout ouvrage en métaux précieux doit comporter deux poinçons : le poinçon de maître – pour les fabricants – ou de responsabilité – pour les importateurs –, qui assure la traçabilité de l'origine des ouvrages et engage le professionnel à respecter les règles de garantie ; et le poinçon de garantie, qui certifie la teneur en or, en argent ou en platine. Il s'agit d'un poinçon figuratif, comme la tête d'aigle pour l'or et la tête de Minerve pour l'argent.

Au sein de l'Union européenne, en vertu du principe de libre circulation, la reconnaissance mutuelle des poinçons officiels s'applique pour la majorité des États membres : les ouvrages européens sont ainsi dispensés du poinçon de garantie français et du poinçon de garantie de leur pays d'origine. Réciproquement, les ouvrages français bénéficient de la même dispense lorsqu'ils sont exportés.

En vertu d'une convention de 1987, la Suisse bénéficie de la reconnaissance réciproque des poinçons officiels, mais celle-ci ne s'applique qu'aux ouvrages en métaux précieux – l'or, l'argent et le platine. Les ouvrages multimétaux, constitués d'un métal précieux et d'un métal commun, comme l'acier, sont ainsi exclus du champ conventionnel.

En élargissant le bénéfice de la reconnaissance réciproque des poinçons officiels aux ouvrages multimétaux, la présente convention fluidifiera les échanges dans les secteurs de l'horlogerie, de la bijouterie et de la joaillerie, en simplifiant les procédures. Concrètement, les opérateurs n'auront plus à faire poinçonner leurs ouvrages multimétaux lorsqu'ils entreront dans le territoire du pays voisin, si le poinçon a déjà été apposé dans le territoire national. Cette disposition se traduira par une réduction des coûts pour les opérateurs français, le poinçonnage étant soumis à taxation en Suisse. En outre, les marques des fabricants déjà enregistrées en France sont dispensées d'enregistrement en Suisse, et réciproquement. Cette fluidification des échanges ne portera pas atteinte à la protection des consommateurs, la convention prévoyant un système de contrôles et d'échange d'informations.

Ainsi, l'élargissement du champ conventionnel permettra d'accompagner des échanges très dynamiques dans les secteurs de la bijouterie, de la joaillerie et de l'horlogerie. Le marché suisse constitue en effet le premier marché d'exportation de ces secteurs, pour lesquels la balance commerciale était excédentaire ces dernières années. En 2018, elle était même supérieure à la balance commerciale tous secteurs confondus. Pour la Suisse, il importait que les montres dites bicolores – généralement en or et en argent –, fabriquées dans son territoire, soient couvertes par la reconnaissance réciproque des poinçons officiels.

En outre, compte tenu de la forte présence du secteur horloger dans le Jura suisse et français, le développement des échanges dans ce domaine pourrait se traduire par des retombées économiques positives pour les territoires frontaliers. À titre d'illustration, en 2018, l'industrie horlogère représentait quelque 2 000 emplois directs dans le département du Doubs, principalement dans les ateliers de fabrication et de montage auxquels sous-traitent des maisons horlogères françaises et suisses.

Au bénéfice de ces observations, je vous propose d'adopter le présent projet de loi.

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