Intervention de Frédérique Dumas

Réunion du mercredi 9 février 2022 à 9h30
Commission des affaires étrangères

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFrédérique Dumas :

Je trouve la présentation du rapport très schizophrénique. On parle évidemment de méconnaissance de la Chine, et je suis entièrement d'accord avec vous : c'est évident que l'on connaît mal la Chine, comme il est évident qu'on connaît mal la plupart des pays étrangers quand on est en France car ce n'est pas une habitude de les connaître. En revanche, je pense aujourd'hui qu'il ne s'agit pas de diaboliser la Chine et les Chinois, qui sont une grande civilisation et un grand pays, mais il s'agit de considérer les dirigeants actuels du parti communiste chinois. Il est vrai que vous avez indiqué qu'il « participe à la cohérence et à l'efficacité ». C'est sûr, un système centralisé participe à la cohérence et à une certaine efficacité. Vous avez dit vous-mêmes que l'ambition de la Chine était de devenir la première puissance mondiale d'ici 2049, puissance militaire, économique, et surtout d'être une alternative à la démocratie. Donc je trouve particulièrement intéressant de placer les États-Unis sur le même plan puisque vous dites que l'Union européenne n'aurait vraisemblablement rien à gagner à s'aligner sur l'allié américain dans un combat qui n'est pas le sien. Évidemment, si le combat n'est pas celui de la démocratie et des droits de l'Homme, je comprends votre point de vue : je pense que nos intérêts économiques à court terme seront de toute façon avalés par une puissance qui a décidé d'exporter son modèle. Je vous rappelle les mots du ministre des Affaires étrangères qui a lui-même dit qu'on avait affaire à un système de surveillance et de répression institutionnalisé à grande échelle. On le dit, on le constate, mais on en tire la conclusion immédiate qu'il faudrait surtout se rapprocher de ce pays, en coopérant de manière plus forte pour pouvoir rééquilibrer nos rapports avec les Américains. De mon côté, j'ai choisi mon camp : je pense que les Américains ne sont pas sans reproches, mais sur le sujet de la démocratie je suis de leur côté. Quand on parle de division, le Royaume-Uni n'étant plus membre de l'Union européenne, Aukus n'est pas une division de l'Union européenne puisque c'est une alliance qui ne concerne pas d'État membre de l'Union européenne

Sur vos propositions, vous proposez de renforcer ce que je n'appelle non pas une coopération mais une collaboration avec un système qui n'est pas le nôtre et dans lequel nous ne voudrions pas voir nos enfants grandir. Nous sommes en train de contribuer à faire arriver ce que nous redoutons. Je pense que tout ce qui est proposé sont des vœux pieux : on propose de se cacher derrière l'Union européenne, or on sait pertinemment que l'Union européenne ne sera jamais unie sur le sujet. Donc toutes les initiatives prises uniquement au sein de l'Union européenne - je ne dis pas qu'il ne faut pas en prendre - sont une manière de ne jamais vraiment en prendre au niveau national : bien sûr qu'il y a des choses à faire sur le plan national. Dernièrement, j'ai eu le malheur de voir ma proposition de résolution sur le risque sérieux de génocide à l'encontre des populations ouïgoures, qui avait une chance d'obliger l'Etat à agir en s'appuyant sur la Cour de justice internationale, être retirée de l'ordre du jour de la séance publique. Dernièrement, lors de l'examen de la proposition de loi que j'ai déposée sur la lutte contre les prélèvements forcés d'organes, on nous a expliqué que le dispositif proposé était compliqué à mettre en œuvre, car comme on ne pouvait pas aller voir ce qu'il se passe dans les hôpitaux en Chine, il fallait continuer à coopérer. Pour mieux connaitre la Chine, j'aimerais bien effectivement qu'on puisse avoir des enquêtes indépendantes comme l'OMS l'a demandé concernant l'origine de la pandémie de covid-19, et de même dans le Xinjiang.

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