Je pense avoir répondu à toutes les questions de Michel Herbillon. Bruno Joncour a évidemment souligné la problématique de l'unité européenne - sur laquelle je pense être suffisamment revenue - et de l'influence chinoise dans les instances multilatérales mais qui est finalement le reflet de sa puissance économique et de sa puissance politique. Malheureusement cela se passe ainsi, un pays qui devient puissant avec un fort PIB a le droit de siéger dans certaines instances. Cela pose un certain nombre de problèmes, on l'a vu notamment sur l'OMC, le grand sujet qui a appuyé sur les problématiques de déséquilibre économique c'est l'arrivée de la Chine dans l'OMC et puis la fin de la participation américaine qui a paralysé l'OMC. On a vu la crise sur le multilatéralisme que l'on vient de vivre. Ça commence à aller un peu mieux après les élections américaines, mais on n'a pas encore réussi à tout rétablir. Il est vrai que les évènements chinois et le modèle politique chinois n'aident pas à mettre en place un système multilatéral efficace.
Pour Alain David, je pense qu'il n'y avait pas de question. Il est revenu sur le sujet du rival systémique, que l'Europe a formulé. Il faut savoir que les Chinois ont été très affectés par cette formulation. D'ailleurs l'ambassadeur de Chine en France, quand il a rencontré le bureau de la commission, l'a formulé. On a rencontré l'ambassadeur représentant la Chine auprès de l'Union européenne, qui vient d'ailleurs d'être démis de ces fonctions et qui nous avait bien expliqué qu'il ne comprenait pas que l'Europe puisse utiliser un tel terme. Nous critiquons souvent les Chinois parce qu'ils sont stratégiques, tenaces, ils disent les choses, mais quelque part peut-être que nous devons faire notre propre critique. Parce que nous n'avons pas été stratégiques, nous avons été naïfs, on a pensé qu'ils allaient changer pour devenir des gens différents. Quelque part nous touchons aussi à notre propre responsabilité.
Pour finir, après ce qu'il vient de se passer avec la Covid-19, tant au niveau de la population qu'au niveau des décideurs politiques, il y a eu une certaine révélation des enjeux de pouvoir avec la Chine et du coup une modification politique. Mais maintenant il faut que l'Europe soit plus efficace et plus rapide dans ses décisions.
Aina Kuric, promouvoir l'idée du Buy European Act, tu as totalement raison parce qu'en Chine et même aux Etats Unis, on n'a pas le droit d'aller sur les marchés publics, par contre tous ces gens-là viennent allégrement remporter des marchés sur le sol européen. Je crois que c'est 2 milliards d'euros en 2020 qui ont été remportés par les Chinois sur des marchés publics européens. A plusieurs reprises il y a eu des tentatives, le président Nicolas Sarkozy avait par exemple porté ce projet auprès de l'Union européenne pour introduire ce Buy European Act. Emmanuel Macron vient de le faire aussi, mais cela n'est pas accepté par la Commission européenne, l'Europe fonctionne avec plusieurs têtes or la Commission européenne ne veut pas aller dans ce sens-là. On se demande jusqu'où il va falloir aller pour qu'ils réalisent qu'il faudrait effectivement aller dans ce sens-là.
Frédérique Dumas, « schizophrène », c'est lorsque l'on décide d'être équilibrés, c'est d'ailleurs la décision qu'ont prise l'Europe et la France par rapport au problème chinois, on peut parfois avoir l'impression de ménager la chèvre et le chou. C'est-à-dire essayer d'exposer des faits et essayer de ne pas obérer l'avenir en permettant des discussions qui pourraient finalement changer les choses. Je l'ai dit d'ailleurs dans mon exposé, je n'ai pas pu voter dans l'hémicycle quand il y a eu la résolution sur la condamnation du caractère génocidaire des politiques chinoises envers les Ouighours, parce que j'étais en audition, je n'ai malheureusement pas pu le faire, mais je suis complètement d'accord avec mes collèges, il faut dire les choses. En même temps, il faut discuter aussi avec les Chinois. Vous savez il faudrait que les Américains le fassent aussi. Quand on regarde ce qu'il se passe entre les Etats-Unis et la Chine, on a l'impression d'une confrontation permanente, que les deux pays sont sur le point de se faire la guerre, et pour finir derrière ces apparences on a une montée en puissance des partenariats économiques qui se fait de manière très importante. La Chine et les Etats-Unis continuent à travailler de manière très importante et sur des sujets sensibles tels que les nouvelles technologies, sur lesquelles nous sommes plus prudents. Il y a des choses qui peuvent se passer en apparence, c'est vrai que c'est peut-être un peu schizophrène, puis il y d'autres choses qui se passent en dessous. Mais quelque part, il ne faut pas qu'on se mette hors-jeu, parce que premièrement nous sommes divisés, et deuxièmement nous ne serons pas entendus. Ce n'est pas pour ça qu'il ne faut pas le dire.
J'en termine Monsieur le Président avec votre remarque sur Hong Kong, car nous y avons consacré un encadré spécial. Nous avons fait des encadrés spécifiques pour toutes les problématiques sensibles, pour une lecture plus facile. Concernant ce que vous avez dit sur le titre, je n'ai pas du tout identifié les choses de cette manière-là, donc évidemment dit comme ça, ça parait même stupide. J'avais plutôt identifié un titre qui parlait de la relation franco-chinoise qui couvre de nombreux domaines et qui a été élevée au rang de partenariat stratégique global.