Monsieur Kokouendo, le sommet de l'Union africaine s'est bien déroulé puisqu'il lui a permis de prendre position sur des sujets économiques essentiels et d'élire le président sénégalais Macky Sall à sa tête. L'objectif du sommet UE-UA est de concrétiser l'alliance nouvelle avec le continent africain annoncée par le Président de la République lors du sommet de Montpellier, par l'engagement d'actions en matière de connectivité et de mobilité, de redéploiement économique, de politique vaccinale – en s'appuyant sur les capacités de production de vaccins en Afrique du sud, au Sénégal, au Rwanda, en Égypte et peut-être au Ghana –, mais aussi en matière de sécurité. L'appui de l'Europe à la sécurité africaine est déterminant. Le sommet sera peut-être l'occasion de prendre des initiatives. Les Africains doivent s'approprier ce sujet de la sécurité.
Madame Le Peih, la boussole stratégique tourne bien. Elle vise à définir l'ambition et les grandes orientations stratégiques de l'Union européenne en matière de sécurité et de défense, et à les décliner au travers de propositions concrètes, tangibles, assorties d'échéances précises pour la prochaine décennie. Ce Livre blanc européen pour la défense devrait revêtir une importance particulière en raison de l'actualité internationale, notamment en Ukraine. En tout cas, nous sommes en bonne voie pour recueillir l'unanimité autour de ce projet de boussole stratégique en mars prochain.
Si la France sortait de l'OTAN, elle serait isolée et fragilisée au sein de l'Union européenne qui en perdrait son unité. Nous avons intérêt à rester dans l'OTAN et à y jouer notre partition, d'autant que la boussole stratégique devra être articulée avec le concept stratégique de l'OTAN, qui sera décidé au prochain sommet de l'OTAN à Madrid, en juin. La France, hors de l'OTAN, perdrait son rôle de locomotive dans les discussions, même si elle préside l'Union européenne.
Monsieur Maire, le moment politique le plus fort pour moi dans ce quinquennat fut l'adoption à l'unanimité de la loi de programmation relative au développement solidaire et à la lutte contre les inégalités mondiales, à l'Assemblée nationale comme au Sénat. Chacun aura pu participer à sa rédaction et nous sommes parvenus, non sans difficulté, à aboutir à ce texte qui a recueilli l'assentiment général. Pour une loi d'une telle importance, ce n'est pas si fréquent.
Madame Clapot, le renforcement de la souveraineté numérique européenne est un enjeu essentiel et l'une des priorités de la présidence française. La réunion qui s'est tenue la semaine dernière a été décisive. La souveraineté passe par la souveraineté numérique et nous devons nous donner les moyens de l'acquérir. Nous sommes prêts à apporter notre soutien à l'Ukraine, aux côtés de l'Union européenne, en cas de cyberattaque majeure. Reste à déterminer à partir de quel seuil on considère qu'une atteinte est portée à l'intégrité d'un pays. Nous sommes en relation à ce propos avec les Ukrainiens.
Monsieur Barbier, pour ce qui concerne la résilience européenne en matière énergétique, nous ne faisons pas cavalier seul. Dans notre réflexion sur les sanctions à proposer, nous veillons à ce que la résilience européenne soit préservée, pour éviter toute distorsion de situation entre les différents pays et ne pas perdre cette unité européenne que je n'ai pas cessé de louer. Certains pays sont beaucoup plus dépendants que d'autres du gaz ; il faut en tenir compte et réfléchir en Européen, pas uniquement en Français.
S'agissant de l'Afghanistan, nous restons mobilisés pour apporter aux Afghans qui la demandent notre protection, mais je ne vous cache pas que les conditions de travail sont difficiles. Nous avons pu rapatrier, depuis le 10 septembre, 400 Afghans et Afghanes menacés ainsi que leur famille, grâce au soutien du Qatar, ce que je ne crains pas de reconnaître. C'est en effet le Qatar qui facilite les opérations de mobilité sur la base des indications que nous lui fournissons. Il est extrêmement difficile d'obtenir les autorisations des autorités talibanes, d'autant plus qu'à présent elles imposent la présentation d'un passeport à l'exclusion de tout autre document d'identité, alors même que le bureau des passeports est en général fermé. Il ne s'ouvre que par intermittence. Nous avons donc des dossiers en attente que nous réglons difficilement. Les talibans ne tiennent pas les engagements qu'ils avaient pris pour laisser ceux qui voulaient partir libres de le faire.
Monsieur Fuchs, je suis content que vous posiez la question du Yémen, car on n'entend souvent qu'un seul point de vue. J'ai pris soin, la dernière fois, de retracer l'histoire du Yémen pour mettre en évidence la responsabilité des Houtis dans la chute d'un gouvernement légitime – certains, absents aujourd'hui, pensaient le contraire et prenaient fait et cause pour les Houtis. Cela étant, cette guerre est horrible et il faut essayer de trouver une solution avec l'envoyé spécial du secrétaire général des Nations unies. Je n'entends pas justifier les actions militaires intempestives des acteurs de la riposte mais, aujourd'hui, ce sont les Houtis qui attaquent, non seulement l'Arabie saoudite mais aussi les Émirats arabes unis. Nous avons apporté un soutien opérationnel, dans le cadre de l'accord de défense que nous avons signé avec les Émirats arabes unis, qui s'appuie sur notre dispositif permanent à Abu Dhabi, et nous avons pu obtenir que le Conseil de sécurité qualifie ces attaques de terroristes. Nous continuerons à exercer une pression sur les Houtis pour briser cette logique devenue insupportable et préoccupante.
Pour ce qui est du Belarus, un dispositif de sanction existe déjà, qui est d'ordre individuel et concerne notamment le président Loukachenko et son entourage ainsi que plusieurs entités, dont des compagnies aériennes. Les mesures ont été prises à cinq reprises par l'Union européenne, notamment après les offensives autoritaires du président Loukachenko et les élections truquées. Les sanctions envisagées contre la Russie sont différentes. Pour l'instant, nous ne déplorons pas d'actes de la part du Belarus, simplement des manœuvres entre ce pays et la Russie, ce qui n'est pas interdit. La donne changerait en cas d'intervention militaire contre l'Ukraine ce qui, heureusement, n'est pas le cas.
Monsieur Hammouche, quand on additionne toutes les aides au développement des Européens en Afrique, ceux-ci ressortent comme les plus gros contributeurs au développement de l'Afrique, bien au-dessus de la Chine. Malheureusement, nous ne le faisons pas suffisamment savoir. Après en avoir discuté, nous avons convenu qu'il fallait améliorer la communication de la Team Europe pour donner de la force à notre discours européen. Dans le domaine des vaccins, nous avons largement dépassé tous les autres contributeurs mais, contrairement à certains, nous ne sommes pas adeptes de la diplomatie vaccinale du tarmac – poser les vaccins sur le tarmac, les photographier et s'en tenir là. Ce n'est pas ainsi que les Européens se comportent et ils devront faire des efforts pour témoigner de la réalité de leur contribution.