Intervention de Françoise Dumas

Réunion du mercredi 20 novembre 2019 à 9h40
Commission de la défense nationale et des forces armées

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFrançoise Dumas, présidente :

Mes chers collègues, Messieurs les directeurs, je suis très heureuse d'accueillir aujourd'hui deux éminents spécialistes des relations internationales, M. Manuel Lafont Rapnouil, directeur du centre d'analyse, de prévision et de stratégie (CAPS) du ministère des Affaires étrangères, et M. Thomas Gomart, directeur de l'Institut français des relations internationales (IFRI).

Cette audition est ouverte à la presse et sera consacrée à l'évolution de la conflictualité dans le monde à l'horizon 2050. Elle ouvre un cycle, souhaité par le nouveau bureau de notre commission, consacré aux problématiques géostratégiques. Cette réunion sera suivie jusqu'en janvier prochain par des auditions plus spécialisées sur les différentes régions en tension. L'année 2050 n'est bien sûr pas à prendre au pied de la lettre. Il s'agit avant tout de nous livrer à un exercice de prospective.

Le président de la République Emmanuel Macron en faisait le constat à l'occasion de son discours, lors de la dernière conférence des ambassadeurs : l'ordre international est bousculé de manière inédite. Nous assistons à un grand bouleversement qui a lieu, sans doute pour la première fois dans notre histoire, à peu près dans tous les domaines, avec une magnitude profondément historique. Nous essaierons donc ce matin de ne pas sous-estimer cette nouveauté et d'essayer de mieux la comprendre, en dépit de l'instabilité et de l'imprévisibilité croissantes du monde que nous observons chaque jour. C'est un monde multipolaire, où les alliances renvoient de moins en moins à des affrontements de valeurs et deviennent par conséquent moins permanentes, plus aléatoires et davantage de circonstances.

Les menaces hybrides se multiplient et les puissances traditionnelles ne peuvent plus prétendre imposer ou rétablir aisément un ordre extérieur, comme en témoigne l'exemple des États-Unis face aux talibans, à l'Iran, à la Corée du Nord ou encore au Venezuela. C'est un monde interdépendant qui doit faire face de plus en plus à des questions transversales. La sécurité sanitaire, environnementale et économique, alimentaire, sont autant de préoccupations qui alimentent la conflictualité. Les conflits ne surgissent plus seulement d'une compétition classique entre les puissances. Les relations internationales ne sont plus simplement le jeu des États, mais sont influencées par les actions de multiples acteurs : les entreprises transnationales, les organisations non gouvernementales (ONG), les nébuleuses terroristes et des trafiquants en tout genre qui se jouent complètement des frontières.

Bref, tous ces éléments concourent à une volatilité de plus en plus grande, où la puissance devient une notion de plus en plus aléatoire, et où le danger provient également de l'accentuation de faiblesses, notamment celle des États, comme au Yémen ou au Mali. Le traitement militaire des crises ne suffit donc pas à gagner la paix et doit se conjuguer avec d'autres interventions sociales, économiques et humaines.

Face à ce monde devenu de moins en moins lisible, il m'a semblé important de faire appel à des personnalités éminentes qui puissent nous donner quelques clés de lecture, dégager des lignes de force, et nous dire quelle marge de manœuvre il reste aux politiques afin qu'ils ne soient pas simplement spectateurs du monde, mais bien des acteurs à même de créer l'évènement et de susciter des marges de manœuvre. Le directeur du centre d'analyse et de prévision et de stratégie m'a paru le plus à même de nous aider dans cette entreprise. Le CAPS a été créé en 1973 par Michel Jobert comme le « poil à gratter du Quai d'Orsay » en complément des directions géographiques, en charge notamment de la prospective à court, moyen et long terme. L'IFRI est l'un des plus importants think tank s d'Europe ; il commente et accompagne les bouleversements du monde depuis plus de quarante ans.

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