Nous sommes liés à la République de Djibouti par le traité de coopération en matière de défense (TCMD) qui a été signé en 2011, ratifié en 2014 et dont la validité court jusqu'en 2022. Nous réfléchissons donc actuellement, avec le ministère de l'Europe et des affaires étrangères, au moment le plus opportun pour le renégocier.
Nous abordons la renégociation du traité avec des atouts.
En ce qui concerne la présence américaine à Djibouti, l'énorme différence par rapport à la France, c'est que nos militaires y sont installés avec leurs familles, tandis que nos amis américains viennent seuls et séjournent un an à l'intérieur du camp Lemmonier. Au contraire, pour les Français, nos familles vont faire leurs courses en centre-ville, elles vont visiter le lac Assal et nos enfants sont scolarisés à l'école française, fréquentée en majorité par des Djiboutiens et des Franco-djiboutiens. Bref, nous vivons au milieu de la population, ce qui change tout.
Ensuite, il y a ce qui s'appelait naguère l'assistance médicale gratuite (AMG), rebaptisée aujourd'hui assistance médicale aux populations (AMP) – car soigner les gens a en réalité un coût pour le budget de l'État. Il n'y a pas un jour où le Centre médical des forces françaises à Djibouti n'accueille pas des patients djiboutiens, comme d'ailleurs l'hôpital militaire français de Gao, qui accueille quotidiennement plusieurs dizaines de patients maliens. Fort heureusement, nous n'avons pas des blessés tous les jours, et les médecins militaires français déployés en Afrique consacrent beaucoup de temps à soigner les populations.
Il y a enfin tout ce qui relève de l'action civilo-militaire, c'est-à-dire les dons réguliers ou l'organisation d'activités, le soutien aux écoles et la facilitation de l'aide régionale ou locale. Par exemple la ville de Poitiers a un très grand tropisme africain et conduit nombre d'actions au Burkina Faso ou au Tchad. Il en va de même pour les villes jumelées avec des villes africaines, et, lorsque nos régiments y sont déployés nous partons avec des caisses de livres, de médicaments, ou de ballons de football.
Quoi qu'il en soit, comme l'a dit le Président de la République au sommet de Pau, le second pilier de notre stratégie au Sahel doit être bâti sur la coordination des actions de capacité, le capacity building ou soutien aux armées partenaires, et ces progrès dans la coordination sont aujourd'hui notre principal défi.
Nous devons concentrer nos efforts sur la coopération dans le domaine de ce qu'on appelle la Security Force Assistance (SFA), qui renvoie à tous les aspects non cinétiques. C'est un vrai défi et nous cherchons des solutions, sachant qu'il ne faut jamais perdre de vue, d'une part, la question de la souveraineté nationale et, d'autre part, celle des liens bilatéraux ; en d'autres termes, quand certains pays veulent agir au Niger, s'ils n'entendent pas nous en informer, ils ne nous informent pas.
Les États, y compris les États-Unis, n'ont plus assez de temps, d'argent ou d'hommes pour se permettre de dupliquer les efforts.
Pour ce qui concerne enfin la base d'écoutes, c'est évidemment un domaine qui relève de la souveraineté nationale. En revanche, la coopération avec les États-Unis en matière de renseignement n'a jamais connu d'équivalent dans l'histoire récente des relations militaires franco-américaines. Le chef d'état-major des armées accueillera d'ailleurs jeudi prochain douze de ses homologues européens et américains sur le sol français pour évoquer ces questions de coordination –, ce qui signifie que nous n'ignorons pas la National Defense Strategy américaine, les objectifs italiens ou les enjeux politiques espagnols.