Intervention de la directrice centrale du SSA

Réunion du mercredi 22 avril 2020 à 11h00
Commission de la défense nationale et des forces armées

la directrice centrale du SSA :

Les militaires peuvent librement choisir leur mode de prise en charge, le SSA n'a donc pas connaissance de tous les cas. J'ai instauré une consultation obligatoire au retour dans l'unité afin de nous assurer de la guérison et porter cette mention au dossier médical. Nous comptons au 21 avril, plus de 6 000 cas confirmés, probables et possibles, dont 1 500 cas confirmés (y compris les cas du porte-avions). Une quinzaine de militaires sont en réanimation, et plus d'un millier sont d'ores et déjà guéris.

Le Centre d'épidémiologie et de santé publique des armées (CESPA) est en train de modéliser l'évolution qu'aurait connue l'épidémie en absence d'intervention. Les résultats de l'étude épidémiologique portant sur le groupe aéronaval seront également riches d'enseignements, car il était très probablement indemne avant son escale à Brest, bien que les incertitudes sur les durées d'incubation et de guérison imposent la plus grande prudence. La ministre a indiqué qu'elle partagera ces résultats avec vous. L'équipe médicale à bord du porte-avions a contribué aux décisions du commandement concernant l'escale à Brest du 13 au 16 mars. Les recommandations faites aux marins étaient très volontaristes au regard des données connues alors : ainsi, les familles n'ont pas été autorisées à monter à bord. Mais le groupe aéronaval remplit des missions très longues, et pour préserver le moral des marins, il est difficile de les maintenir pendant des mois confinés à bord.

La quatorzaine est une mesure préventive, appliquée aux patients asymptomatiques avant qu'ils ne partent en mission. Elle doit être combinée à la réalisation de tests afin de réduire le risque dans les unités très opérationnelles. Les données d'immunité sont encore très balbutiantes, nous avons procédé à de nombreux prélèvements sur les militaires atteints et leur analyse est en cours.

L'opération Résilience a démontré la capacité de nos armées à s'organiser pour répondre aux besoins de la nation. Le SSA s'est adapté aux spécificités de chaque armée pour apporter son soutien. Les entraînements et les exercices conjoints sont essentiels à l'efficacité du SSA. La fonte des effectifs nous a amenés à prioriser le soutien médical aux armées au détriment de notre préparation opérationnelle, que nous devons restaurer. À cette fin, le développement des compétences techniques est essentiel ; nous avons donc tout intérêt à travailler avec des hôpitaux civils. Les médecins des forces et les infirmiers assument un nombre important de gardes en milieu civil, et ils sont allés renforcer les hôpitaux civils dès le début de la crise.

Un A400M sanitaire a été mis à notre disposition par l'Allemagne pour procéder au transfert de deux patients. Nous allons développer nos propres capacités en la matière en installant dans nos A400M Atlas un kit de réanimation baptisé MÉROPE : Mérope était la dernière fille d'Atlas et l'acronyme signifie « missions d'évacuation en réanimation opérationnelle ».

Cette crise a considérablement accéléré les innovations et la télémédecine au sein du SSA. Les téléconsultations sont à la base de la proximité avec les armées, qui ne peut pas être uniquement géographique : le SSA n'a pas les moyens de placer un médecin dans chaque emprise militaire. Pour être efficaces, les effectifs de nos 200 antennes médicales doivent être complétés. Elles ne comptent parfois qu'un seul médecin, alors qu'il en faudrait cinq pour compenser les départs en opération extérieure, en formation ou en congé maternité.

Certaines antennes médicales sont extrêmement vétustes alors que notre personnel devrait disposer de conditions de travail ultramodernes. Les budgets de rénovation des infrastructures sont toujours insuffisants, et les travaux financés doivent être exécutés plus rapidement. Des rénovations s'imposent aussi dans certains hôpitaux, notamment l'hôpital Laveran, à Marseille, dont l'utilité est démontrée. L'importance du budget nécessaire ne doit pas remettre en question son existence, comme cela a été le cas du Val-de-Grâce. Ce dernier a été totalement démantelé, il serait extrêmement coûteux de le rouvrir, mieux vaut développer les huit autres hôpitaux militaires.

Nous avons du mal à recruter pour compenser le départ de 180 médecins en quelques années de déflation. Le développement des compétences, les pratiques infirmières avancées et les délégations de tâches offrent un recours, car des infirmiers en opération extérieure ont démontré leur capacité à maintenir en vie des blessés graves. Les élongations de l'opération Barkhane, imposant parfois d'attendre quatre-vingt-dix minutes un hélicoptère d'évacuation, contre vingt en Afghanistan, ont obligé à accroître les capacités de réanimation de l'avant de nos médecins. C'est une opportunité formidable de développer les délégations de tâches pour nos infirmiers, en collaboration avec le ministère des solidarités et de la santé.

Le développement d'hôpitaux militaires de campagne est prévu dans notre contrat opérationnel ; j'espère obtenir les budgets nécessaires. Les épidémies virales émergentes vont se reproduire, nous devons donc être capables de déployer d'autres unités de réanimation. C'est une des leçons à tirer de cette crise.

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