Intervention de le général de brigade Yves Métayer

Réunion du mercredi 10 juin 2020 à 15h00
Commission de la défense nationale et des forces armées

le général de brigade Yves Métayer, commandant supérieur des forces armées de la zone sud de l'océan Indien :

Je puis difficilement répondre aux questions relatives au service militaire adapté, puisque, tout au long de l'année, il ne relève pas des commandements interarmées mais est rattaché au ministère des outre-mer. C'est plutôt du côté du commandement du SMA au ministère des outre-mer que des réponses pourraient être apportées.

Pour la zone sud de l'océan Indien, le SMA a joué un rôle important, sachant toutefois que c'est l'encadrement technique qui a contribué à l'opération Résilience. Dans un souci de protection sanitaire des populations, il a été décidé d'interrompre la formation professionnelle au début de la crise. Du coup, tous les volontaires stagiaires, aussi bien à La Réunion qu'à Mayotte, sont rentrés à leur domicile pour ne pas rester concentrés dans les quartiers et risquer de créer des clusters. Mais les cadres et les volontaires techniques ont représenté pour les FAZSOI un renfort considérable de plus de 500 militaires à La Réunion et de près de 200 à Mayotte.

Ce rôle indirect a été très positif. À Mayotte, le chef de corps du régiment de service militaire adapté a organisé des tournées pour reprendre contact avec les stagiaires dans les localités de Mayotte afin de les sensibiliser à la crise du covid, lesquels ont constitué des relais pour sensibiliser la population aux gestes barrières et pour l'informer. En outre, grâce aux capacités de formation professionnelle, nous avons pu réaliser une grande partie du transport des 5 millions de masques dans les deux départements.

Le SMA vise à répondre aux besoins grâce à ses compétences techniques diversifiées. À La Réunion, il propose 37 formations différentes, de nature à accompagner au mieux les jeunes vers l'emploi. Toutefois, dans la mesure où les volontaires stagiaires n'ont pas participé à l'action, ils n'ont pas accumulé d'expérience susceptible d'être valorisée.

Il ne m'appartient pas de répondre à la question sur les difficultés d'approvisionnement en équipement de protection dans les outre-mer, puisque je n'étais pas dans le circuit de décision. Les armées ont contribué à la réception de ces capacités. Les centres hospitaliers de La Réunion étaient suffisamment équipés en respirateurs et remarquablement organisés.

Nous étions véritablement préparés. La situation et les actions en métropole, engagées dix jours plus tôt, nous ont servi de référence. Grâce à un léger temps d'avance, nous avons pu prévoir nos réactions et indiquer aux autorités préfectorales ce que nous pouvions apporter, nonobstant les particularités propres aux territoires ultramarins.

Concernant le respect des frontières et la lutte contre l'immigration clandestine à Mayotte, vers la fin du mois de mars ou le début du mois d'avril, nous n'observions plus d'arrivées d'embarcations de type kwassa-kwassa en provenance d'Anjouan. Cet arrêt était certainement lié à un facteur psychologique, la perception par la population comorienne, par la caisse de résonance médiatique mahoraise, de l'arrivée de l'épidémie à Mayotte. Qu'il s'agisse des trajets habituels, pour raison de santé ou pour les trafics, les gens ont eu peur de rejoindre Mayotte. Par la suite, compte tenu des liens familiaux et amicaux entre les îles, les gens ont été rassurés et les traversées ont repris. Plus que le respect des frontières, c'est le facteur psychologique qui a stoppé pendant un temps les arrivées de kwassa-kwassa à Mayotte.

Néanmoins, nous avons densifié nos actions en mer et à terre à la demande du préfet de Mayotte qui souhaitait assurer le plus strict contrôle sanitaire possible des entrées sur le territoire : il aurait été paradoxal de fermer l'aéroport de Dzaoudzi et de laisser débarquer sur les plages sans contrôle sanitaire des arrivants d'origine inconnue. Nous n'avons pas observé d'augmentation des flux depuis Anjouan. Certaines embarcations ont été repoussées et sont reparties vers Anjouan, d'autres ont été interceptées et prises en charge, ce qui a permis des contrôles sanitaires à Mayotte, même si les reconduites vers Anjouan n'ont pas encore repris.

Des gens avec lesquels nous avons l'habitude de travailler sont venus nous aider à concevoir la protection sanitaire de la force, car je n'avais pas de structure dédiée au sein de l'état-major. Des réservistes ont conduit cette action déterminante pour la protection des FAZSOI. Nous n'avons pas eu besoin de faire appel aux unités de réserve puisque, au travers de la mission Jeanne d'Arc, des unités de l'armée de Terre projetées dans la zone sud de l'océan Indien et de la mise sous contrôle opérationnel des régiments de service militaire adapté, nous avons quasiment doublé les effectifs des FAZSOI pendant la crise covid. Je n'avais aucune difficulté d'effectifs pour répondre aux différentes missions.

La Réunion est un territoire propice à l'engagement dans les unités d'active comme dans les unités de réserve. L'unité de réserve du 2e régiment parachutiste d'infanterie de marine est suffisamment volumineuse pour que nous étudiions le fait de la scinder en deux. Nous n'avons pas de difficulté de recrutement sur nos territoires, bien au contraire.

Dans la zone sud de l'océan Indien, l'isolement est un réel frein à la coopération internationale. Cela étant, les États riverains de la zone sud de l'océan Indien, les États de l'Afrique australe et les États de la Commission de l'océan Indien étant accaparés par la situation sanitaire, l'irruption de l'épidémie et son traitement, toutes les activités de coopération ont été interrompues : on a assisté à un véritable recroquevillement de tous les partenaires. Quant aux grands partenaires de l'océan Indien, nous avons très peu d'interactions : du côté ouest de l'océan Indien, l'Australie, c'est très loin ; avec l'Inde, la coopération opérationnelle est croissante, mais ce pays-continent a dû affronter des défis tels qu'il était peu probable qu'il nous sollicite pour des coopérations internationales. Toutefois, un bâtiment indien est récemment venu faire de l'assistance sanitaire et humanitaire au profit des Seychelles, de Maurice et de Madagascar.

Pourquoi la Nouvelle-Calédonie n'a-t-elle pas été touchée ? Je ne suis pas en mesure de répondre à cette question.

Concernant l'intensification de l'engagement, nous considérons les forces de souveraineté comme des points d'appui capables d'agir les premières heures ou les premiers jours de la crise en attendant la projection de renforts depuis la métropole. Engager simultanément des moyens aux Antilles, en Guyane, dans le sud de l'océan Indien, en Polynésie et en Nouvelle-Calédonie représentait un défi considérable. Si nous devions faire face à une crise plus concentrée comme celle d'Irma, ces capacités de gestion centrales seraient toujours disponibles. Le concept est bon, même s'il est parfois mis à mal par la distance et les délais de projection. C'est précisément la raison pour laquelle nous disposons de forces dédiées au sein des forces de souveraineté.

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