Mes chers collègues, permettez-moi tout d'abord de vous dire à quel point je me réjouis de vous retrouver tous ici physiquement, après cette période si particulière. Notre contrôle parlementaire s'est quand même effectué, de manière assez dense, mais à distance.
Il nous appartient de respecter toutes les précautions sanitaires usuelles et je vous remercie d'accepter le port du masque et de ne l'enlever que lorsque vous aurez la parole. Je demanderai d'ailleurs aussi à nos invités de se soumettre à la même règle s'ils le souhaitent.
Avant d'aborder la thématique inscrite à l'ordre du jour, je voudrais accueillir un nouveau commissaire et procéder à une nomination.
Je souhaite la bienvenue à notre nouvelle collègue, membre de notre commission, Nathalie Serre, qui remplace Patrice Verchère, élu maire de Cours. Je rappelle également que Laurent Furst, élu à la mairie de Molsheim, devrait également nous quitter très rapidement. Je ne sais pas si son suppléant viendra siéger à nos côtés.
Je remercie nos deux collègues députés qui étaient très présents à la commission, et également, pour Patrice Verchère, à la délégation parlementaire au renseignement pour le travail accompli en commun.
Par ailleurs, la démission de Didier Baichère de notre commission a rendu disponible la fonction de rapporteur pour avis sur la mission défense du projet de loi de finances pour 2021, environnement et prospective de la politique de défense, c'est-à-dire le programme communément appelé le 144.
Cet avis revenant au groupe La République En Marche (LaREM), ce dernier m'a fait part de la candidature de Fabien Gouttefarde. S'il n'y a pas d'opposition, il en est décidé ainsi.
Je vous propose maintenant de revenir à notre ordre du jour et à nos invités. Le thème retenu pour notre table ronde aujourd'hui est certes inspiré de la crise Covid-19 et de son retour d'expérience, mais il se veut aussi et surtout prospectif. Il tient en une question : quel modèle d'armée, pour quelles menaces ?
Pour nous aider à réfléchir sur cette thématique, nous avons le plaisir d'accueillir aujourd'hui trois spécialistes des questions de défense, de stratégie et de prospective, en l'occurrence M. Michel Goya, ancien officier des Troupes de marines, chercheur indépendant, M. Martin Motte, directeur d'études à l'École pratique des hautes études, chef du cours de stratégie à l'École de guerre et enfin M. le lieutenant-colonel Jérôme de Lespinois, chef de la division études prospectives et publications du centre des études du rayonnement et des partenariats de l'armée de l'Air (CERPA).
Colonel, Messieurs, au nom de mes collègues, je vous remercie de venir devant nous aujourd'hui pour faire état de vos réflexions sur ce sujet majeur de l'adaptation de nos armées aux menaces auxquelles nous devons et nous devrons faire face. Cette étude nécessite une connaissance du passé ainsi qu'un effort d'anticipation, de lucidité sur les menaces actuelles, les menaces futures, ainsi qu'agilité et honnêteté intellectuelle pour interroger nos structures, nos organisations et nos moyens militaires chargés d'y répondre.
La crise actuelle du Covid-19, bien que principalement sanitaire, a révélé par ailleurs qu'il ne suffisait pas d'anticiper un type de crise, une pandémie par exemple, en doctrine, mais bien de savoir mobiliser les ressources disponibles (structures et moyens) prévus en planification au moment le plus opportun.
Interrogé en audition le 22 avril dernier, dans le contexte particulier de la crise sanitaire, le chef d'état-major des armées, le général François Lecointre soulignait que la crise démontrait que nos armées doivent être taillées, non pas pour ce qu'elles font au quotidien, mais pour ce qu'elles peuvent être amenées à accomplir dans des circonstances exceptionnelles.
Il nous disait également qu'il était nécessaire de revenir à un modèle d'armée complet, c'est-à-dire agissant sur l'ensemble du spectre des opérations dans un contexte mondial toujours plus dangereux, en citant notamment l'activisme chinois ou un probable repli américain précipité.
Par ailleurs, lors de sa récente audition du 17 juin dernier, le chef d'état-major de l'armée de terre, le général Burkhard, nous a présenté le cap qu'il souhaite donner à l'armée de Terre pour les dix ans à venir. Dans sa vision stratégique, il note que le retour des rapports de force entre états et l'évolution très rapide de la conflictualité doit, je cite, « nous amener à durcir l'armée de Terre pour qu'elle soit capable de faire face à des conflits encore plus difficiles que nos engagements actuels, déjà bien éprouvants ».
Prenant acte de la montée des tensions aux frontières même de l'Europe, le chef d'état-major de l'armée de Terre (CEMAT) estime que les prochains conflits pourraient être d'une plus grande ampleur et d'une forme nouvelle, avec un emploi de la force assumée par de nombreux acteurs qui n'hésitent plus à se déployer militairement, à tester, à intimider, agissant sous le seuil du conflit ouvert avec des actions non revendiquées et dans le champ informationnel qui devient un véritable espace d'influence et d'affrontement.
Colonel, Messieurs, nous aimerions connaître vos avis et analyses sur l'état des menaces pour notre pays, leurs évolutions à court et moyen terme, ainsi que les conséquences qu'il convient d'en tirer pour les hypothèses d'emploi et le modèle des forces.
Vos expériences et vos formations sont diverses, selon les armées et je suis sûre que la complémentarité de vos approches sera pour nous une utile source de réflexion.
Colonel, Messieurs, vous disposez de toute l'attention des membres de la commission qui expriment ce besoin de faire un arrêt sur image.
Mes chers collègues, je vous informe que vous avez sur vos bureaux une synthèse de l'ensemble des travaux que nous avons menés pendant toute cette période, qui pourra vous être utile pour communiquer sur la qualité de l'engagement de nos forces armées et la capacité de résilience de nos industries.
Messieurs, je vais vous céder la parole. Il y aura, comme d'habitude un débat qui se fera sous la forme de questions-réponses, avec énormément de questions, je présume.