Si l'article 54 de la LPM avait résolu tous les problèmes, cela se saurait ; ce n'est malheureusement pas le cas. Les rapporteures Anissa Khedher et Laurence Trastour-Isnart ont très clairement dit que la reconnaissance de la présomption d'imputabilité n'avait pas eu l'effet escompté.
Je l'ai indiqué dans mon propos introductif et dans mon rapport : bien entendu il existe des dispositifs de soutien qui permettent aux blessés d'avancer dans le parcours de reconnaissance et de réparation. M. Marilossian a évoqué la maison numérique des blessés ou le dispositif ATHOS. Très bien. Mais ce que vous n'avez pas dit, c'est que les anciens militaires n'en bénéficient pas. Et c'est un problème car on sait que le syndrome de stress post-traumatique (SSPT) peut se déclarer après cinq ou dix ans, et donc quand le blessé a déjà quitté l'institution.
En effet, une simplification de la procédure est assumée dans cette proposition de loi, au détriment de certaines subtilités. La question de sa constitutionnalité a été évoquée. Il est exact qu'une distinction entre blessés psychiques et blessés uniquement physiques est opérée, sachant qu'en pratique beaucoup de blessés physiques sont également des blessés psychiques. Mais cette distinction ne me paraît pas disproportionnée au regard de l'objectif de simplification. Je fais le pari que le juge constitutionnel aurait également cette lecture, parce que cette distinction ne change que la procédure et ne fait perdre de chance de réparation ou de reconnaissance à aucun blessé.
Pour répondre aux questions du président Chassaigne, l'évaluation du taux d'invalidité se ferait de la même manière qu'actuellement et la proposition de loi n'interdit pas au commandement de faire parvenir au SSA des éléments circonstanciés pour établir la justification du lien avec le service. La modification porte sur le fait qu'il n'appartiendrait désormais plus au blessé de s'inscrire dans deux procédures, l'une médicale, l'autre administrative ; mais rien n'empêche que le SSA demande les pièces justificatives du lien avec le service. Le commandement n'est donc évidemment pas privé de son rôle en la matière.
De nombreux orateurs, notamment de la majorité, ont utilisé l'argument du taux d'agrément de 93 % des dossiers pour dire que le système fonctionne. Je n'ai jamais dit que les blessés n'obtenaient pas l'indemnisation ou la reconnaissance qui leur est due. Mais le parcours qu'ils doivent suivre pour cela est trop complexe et générateur de souffrances pouvant empêcher ou gêner leur reconstruction. Votre argument ne s'applique donc pas s'agissant de cette proposition de loi, qui traite du parcours de reconnaissance et d'indemnisation. La multiplication et la sédimentation des dispositifs depuis 1918, voire avant, ne fait que complexifier les choses et rendre encore plus touffu le code des pensions militaires d'invalidité – et il ne s'agit en aucun cas au travers de cette observation de remettre en question leur qualité ou leur générosité.
M. Gouttefarde a critiqué la proposition de loi au motif qu'elle porterait sur des détails de niveau réglementaire et infra réglementaire. Rappelons-le, notre assemblée a tout de même voté l'interdiction du téléphone mobile à l'école, ce qui relève à mon sens du domaine réglementaire. S'il est possible d'exonérer le requérant de fournir lui-même toutes les pièces justificatives, pourquoi cela n'est-il pas déjà fait ? Si une loi n'est pas nécessaire, pourquoi un texte réglementaire relevant du ministre de la défense n'est-il pas publié pour résoudre ce problème ? Faisons-le. Chiche !