Intervention de Jean Lassalle

Réunion du mercredi 7 juillet 2021 à 10h10
Commission de la défense nationale et des forces armées

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean Lassalle, co-rapporteur :

Toujours sur le plan capacitaire, nous avons également identifié deux enjeux complémentaires. D'une part, il nous semble que la France, et ses alliés européens, ne pourront pas se permettre de manquer les prochaines ruptures technologiques sur le segment des drones. Plusieurs champs doivent ainsi être explorés, ou continuer de l'être quand notre pays bénéficie d'une certaine avance. C'est le cas dans le domaine des drones de combat – pour lequel nous disposons du démonstrateur NEURON de Dassault – comme dans celui des drones pseudo-satellites – dans lequel Airbus et Thales Alenia Space ont développé des projets de premier plan. Mais aurons-nous les ressources budgétaires nécessaires pour aller plus loin ?

D'autre part, il nous faut absolument identifier les voies et moyens d'assouplir les processus d'acquisition des armées, et d'innover non seulement dans les domaines capacitaires et technologiques, mais également en matière financière et administrative. Le cadre rigide des programmes d'armement n'est en effet pas adapté à un secteur aussi évolutif, en particulier sur le segment des mini et micro drones. Nous pensons donc nécessaire de privilégier les acquisitions expérimentales, et d'adopter des logiques de flottes pour les plus petits drones, renouvelables régulièrement par paquets. Plus concrètement, les armées devraient pouvoir s'équiper en drones comme elles s'équipent en téléphones portables ou en tablettes.

J'en viens à présent à nos deux derniers points d'attention, sur lesquels je passerai plus rapidement.

Le renforcement de la filière française et européenne de drones constitue notre troisième point d'attention. Il est à nos yeux un gage de souveraineté, alors que nous avons été contraints de composer avec la dépendance imposée par nos acquisitions sur étagères.

À ceux qui ne le savent pas, je rappelle ainsi qu'au Sahel, ce sont des personnels américains qui font décoller et atterrir nos Reaper block 1. Et rien n'empêcherait les États-Unis de nous interdire de les déployer où nous le souhaiterions ! À titre personnel, je trouve cette situation insupportable.

Sur le segment des plus petits drones, nous disposons d'industriels de premier plan, avec notamment Novadem et Parrot. Le leader incontesté du marché reste un industriel chinois, auprès duquel le ministère des Armées refuse de s'approvisionner, en raison des doutes qui subsistent quant aux risques d'espionnage qu'ils véhiculent. Je note que tel n'est pas le cas des forces de sécurité intérieure.

Il n'en demeure pas moins qu'une large part de l'innovation pourrait échapper aux armées, en raison de leur forte dimension civile.

Nous pensons donc que le ministère des Armées gagnerait à accentuer ses efforts dans deux directions. D'une part, mieux connaître l'environnement civil, grâce notamment à l'action de l'Agence de l'innovation de défense. D'autre part, mieux faire connaître les armées à l'environnement civil, afin d'attirer vers elles les acteurs les plus disruptifs et les plus performants, au travers de salons comme le SOFINS ou de concours divers.

Enfin, notre dernier point d'attention concerne les questions éthiques et juridiques. Je ne reviendrai pas sur les premières, qui ont largement trait au développement de l'intelligence artificielle et de l'autonomie, et ont été longuement abordées par nos collègues Gouttefarde et de Ganay dans le cadre de leur rapport sur les SALA.

Sur le plan juridique, nous préconisons de faciliter l'insertion des drones dans le trafic aérien civil. Des travaux sont en cours ; il faut les approfondir.

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