Intervention de Stéphane Baudu

Réunion du mercredi 7 juillet 2021 à 10h10
Commission de la défense nationale et des forces armées

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaStéphane Baudu, co-rapporteur :

Cher Fabien Gouttefarde, s'agissant des essaims de drones, les réponses que j'ai pu apporter aux premières questions posées ne concernaient pas exactement le même sujet. D'une certaine manière, nous pourrions dire qu'il y a finalement deux types d'essaims de drones. D'abord, les essaims de petits drones, susceptibles d'être mis en œuvre sur le territoire national, pour attaquer soit un site sensible, soit une manifestation. Comme je l'indiquais en réponse à M. Ferrara, c'est ce sur quoi nous devons concentrer nos efforts, car les réponses sont insuffisantes. C'est le cas dans d'autres pays, mais ce n'est pas une raison pour nous en contenter.

En outre, vous avez évoqué les 400 drones du SOFINS, mais on pourrait également parler des 2 000 drones des manifestations chinoises d'il y a un an ou deux à l'occasion des fêtes de fin d'année. C'est très spectaculaire et l'on voit bien que de tels essaims pourraient être utilisés de manière très massive et coordonnée. Des réflexions sont en cours s'agissant de l'emploi militaire des essaims de drones. Elles portent notamment sur le couple qui pourrait être constitué par un hélicoptère et des drones, tant sur le plan offensif que sur le plan défensif. Il faut toutefois continuer à travailler et très rapidement, car les évolutions de la technologie comme des emplois sur différents théâtres d'opérations nous bousculent. Pour répondre dès maintenant au sujet du Haut-Karabagh : je n'ai pas vu d'images. Il ne s'agissait pas d'un conflit de haute intensité aérienne, mais les retours d'expérience ont bien démontré l'utilisation de drones à des fins de saturation des défenses aériennes, à partir de produits détournés de leur usage initial, ou pouvant être considérés comme jetables et perdables. Je n'utiliserais pas le terme de drones « kamikazes », car la situation n'est pas comparable avec certains modes opératoires employés, par exemple, pendant la Seconde Guerre mondiale. Toutefois, il nous faut appréhender cette menace dans la perspective de conflits futurs. Car d'autres pays que le nôtre n'en font pas un cas de conscience et demain, il nous faudra être en mesure d'adapter notre réponse – la défense – mais également d'apprécier dans quelle mesure – et le rapport du Sénat va un petit peu plus loin que nous sur le sujet – nous pourrions utiliser des drones qui soient, peut-être, jetables. Avec ce type de systèmes, nous ne sommes plus très loin du missile. De notre point de vue, la vraie limite tient à l'autonomisation et à l'automatisation. La question est celle de la place de l'humain. Doit-on considérer que l'humain doit toujours décider de la projection de ce type de drone et de leur utilisation en tant qu'arme, ou doit-on basculer dans un mode d'autonomie, où la machine est capable de reconnaître une cible et de « décider » de la frapper ?

La position française est claire, je l'ai dit, et nous la partageons. Mais force est de constater que les évolutions en la matière sont très rapides. Les progrès de l'intelligence artificielle permettront de grandement améliorer l'identification de la cible et, demain, d'être mieux armé pour apprécier les situations. L'évolution vers davantage d'autonomie, en particulier pour la frappe, pose en revanche d'autres questions auxquelles nous devons être vigilants. Car pour reprendre un exemple régulièrement mis en avant, il est particulièrement difficile pour un drone de distinguer un berger portant une kalachnikov en bandoulière afin de surveiller son troupeau et de se protéger des brigands d'un terroriste armé.

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