Intervention de Geneviève Darrieussecq

Réunion du mercredi 6 octobre 2021 à 9h00
Commission de la défense nationale et des forces armées

Geneviève Darrieussecq, ministre déléguée :

Madame Roques-Etienne, pour répondre à vos questions le plus concrètement possible, nous avons voulu sortir d'une logique de coup de pouce pour mettre en œuvre une méthode plus affirmée et plus stable dans le but de redonner confiance au monde combattant. Au 1er janvier 2022, la valeur du point PMI passera de 14,70 euros à 15,05 euros – le coût de cette hausse est estimé à 32,8 millions d'euros. Ce point évolue toujours en fonction des indices de traitement de la fonction publique – cela ne changera pas ; il s'agit, en l'espèce, de prendre en compte, de surcroît, l'évolution de l'inflation. Concrètement, la retraite du combattant passera, au 1er janvier 2022, de 764,40 euros à 782,60 euros. Quant aux bénéficiaires d'une PMI de 500 points, qui sont majoritaires, ils profiteront d'une augmentation annuelle de 175 euros, leur pension étant portée de 7 350 à 7 525 euros par an.

À la suite du succès de la troisième édition de l'appel à projets services numériques innovants destinés au tourisme de mémoire, dont les lauréats sont connus depuis le 4 mai, j'ai souhaité abonder l'enveloppe financière correspondante, qui passera de 80 000 à 92 000 euros. Il s'agit de soutenir des projets innovants pour la transmission mémorielle, qui ont un impact important sur le tourisme de mémoire puisqu'ils contribuent à mettre en valeur certains lieux de façon différente. Le ministère se trouve ainsi en lien avec d'autres acteurs de la valorisation mémorielle comme des associations, des communes ou des offices de tourisme. Il existe un label Qualité Tourisme spécifique aux lieux de mémoire. Les nouveaux vecteurs de mémoire, comme le numérique, dont l'approche interactive facilite la compréhension dynamique des lieux, et les anciens se complètent de manière intéressante.

Monsieur Delatte, je vous remercie pour vos propos. La commission tripartite regroupe des associations – la Fédération nationale des anciens combattants en Algérie, Maroc et Tunisie (FNACA), l'Union française des associations de combattants et de victimes de guerre (UFAC), la Fédération nationale des anciens des missions extérieures (FNAME) – et, en principe, un représentant de l'Assemblée nationale et un représentant du Sénat. Je regrette que ce dernier n'ait désigné personne et qu'aucun sénateur ne se soit impliqué au sein de cette commission. Si je trouve important que le Parlement participe à ces travaux, comme nous l'avions souhaité, il faudrait encore que les personnes pressenties le veuillent.

Pourquoi la revalorisation du point PMI n'est-elle pas automatique ? C'est un sujet très complexe et très technique. Il se trouve que l'évolution de l'inflation n'est absolument pas linéaire. Ainsi, si j'avais retenu comme point de départ, non pas 2018, mais 2017, année de ma prise de fonctions, le montant de la revalorisation aurait été ramené à 13,5 millions d'euros car, en 2017, nous subissions une déflation. L'évolution n'étant pas linéaire, nous devons faire le point de façon régulière, tous les deux ans. Comme vous pouvez le constater, il y a derrière cette décision une vraie raison technique.

Monsieur Michel-Kleisbauer, vous êtes un éminent rapporteur et vous suivez vos dossiers avec beaucoup d'attention, tant sur le terrain que sur le plan national. Au 31 décembre 2014, 293 pupilles de la nation étaient accompagnées par l'ONACVG, pour un budget d'environ 871 000 euros, soit un peu moins de 1 500 interventions financières. Au 31 décembre 2020, on dénombrait 966 pupilles accompagnées par l'Office, pour un budget de 3 665 000 euros et 5 300 interventions financières. Ainsi, entre 2015 et 2020, le nombre de pupilles a progressé de 230 % et le montant qui leur est consacré de 320 %. Cette augmentation est liée aux attentats, puisque les enfants des victimes d'attentats sont pupilles de la nation.

La proposition de loi visant à consolider notre modèle de sécurité civile et à valoriser le volontariat des sapeurs-pompiers et les sapeurs-pompiers professionnels, adoptée en première lecture par le Sénat le 23 septembre, tend à créer le statut de pupille de la République et prévoit un accompagnement identique à celui des pupilles de la nation. Ce statut concerne notamment les enfants des soignants décédés des suites de la covid-19, mais aussi ceux des agents décédés dans des conditions particulières et qui pourraient bénéficier du statut de mort au service de la République. L'important, c'est la reconnaissance et la prise en charge des enfants dont les parents sont décédés dans des conditions dramatiques, au service de la République.

Monsieur Gassilloud, la résilience est un très beau sujet, un thème qui me tient à cœur, surtout dans la période que nous vivons. Nous avons traversé une crise sanitaire d'une ampleur inédite, notamment par son impact sur l'économie et notre vie quotidienne. Mais notre histoire nationale est marquée par de nombreux grands moments de crise : la défaite militaire et la guerre civile en 1870 et 1871, la guerre totale faisant 1,7 million de morts en 1914-1918, la défaite humiliante, l'occupation du territoire et la tragédie de la déportation et de la Shoah pendant la seconde guerre mondiale, la mobilisation du contingent dans une guerre longue en Algérie et la crise politique majeure qu'elle a provoquée. Le souvenir de ces crises et conflits, dont nous transmettons la mémoire, a un impact fondamental sur la capacité de résilience de la nation. Il est nécessaire de savoir d'où nous venons pour déterminer où nous allons et, surtout, comment nous y allons. Notre pays a traversé des épreuves dont il s'est relevé souvent plus fort. Nous souhaitons que notre mémoire nationale fasse place à un dialogue et à une compréhension mutuelle de nos différentes mémoires, dans le respect de la vérité historique. C'est un vecteur de cohésion, et la résilience de la nation passe par la cohésion nationale.

Nous parlerons beaucoup, dans les mois à venir, du conflit d'Algérie. À l'initiative de l'ONACVG, sont organisées, devant des élèves de troisième ou des lycéens pour lesquels la guerre d'Algérie est au programme, des présentations à quatre voix regroupant un ancien combattant, un ancien indépendantiste, un ancien harki et un ancien rapatrié, venus dire tous ensemble leur mémoire et expliquer, de façon simple et apaisée, ce qu'ils ont vécu ainsi que leurs différences d'approche. C'est un bon exemple de ce pour quoi nous œuvrons. Nous devons promouvoir ce genre d'actions afin que nos mémoires ne se combattent pas mais se respectent. Elles sont différentes : respectons les différences ! Je suis très favorable à la multiplication de ce genre d'actions, car elles ont un sens fort pour notre résilience nationale puisqu'il s'agit de sujets franco-français.

Monsieur Lassalle, oui, les anciens jouent un rôle important dans nos territoires. Ils favorisent notre cohésion nationale et font partie de notre mémoire commune. Il est vrai que, juste après les conflits, les événements sont tus par tous. Les rescapés des camps de la mort pendant la Shoah n'ont livré leurs témoignages que bien longtemps après les faits, certainement à cause d'un effet de sidération mais aussi pour des raisons psychologiques. Nous devons continuer à accorder une attention particulière à nos anciens combattants et les impliquer dans la réflexion sur la résilience de la nation, car au-delà de leur mémoire, les valeurs qu'ils défendent sont importantes.

Monsieur Lachaud, vous ne pouvez pas dire que la revalorisation du point PMI a été décidée en vue de l'élection présidentielle. Regardez l'action que nous avons menée pendant quatre ans : la carte 1962-1964, par exemple, a été créée dès le début du quinquennat. Tous les ans, nous réalisons des avancées selon un engagement que j'avais pris et que nous avons collectivement tenu.

Nous avons créé un véritable parcours pour l'accompagnement des blessés, y compris pour les blessés psychiques. Il existe pour eux des droits à réparation spécifiques. S'agissant de l'exemple que vous mentionnez, il ne m'est pas possible de vous répondre, même si je suis médecin. Est-il impossible de recevoir ce blessé en consultation, ou bien les médecins ont-ils simplement jugé qu'une visite tous les trois mois suffisait ? Je ne peux pas savoir. Mais il est certain que le service de santé des armées connaît les mêmes problèmes de manque de médecins que le reste de la nation, car les armées ne sont pas hors sol. Quoi qu'il en soit, les blessés psychiques bénéficient d'un accompagnement très privilégié assuré par nos services de psychiatrie, d'autant que nous avons développé un nouveau service pour compléter encore le soutien à ces blessés. Je veux parler du dispositif Athos, qui vise à réinsérer les blessés psychiques sur le plan psychosocial, dans la vie quotidienne, est expérimenté sur deux sites – l'un à Cambes, en Gironde, l'autre à Toulon. Ce nouveau dispositif, que nous enrichissons en permanence, entend prendre en charge le blessé dans tout son parcours de la façon la plus attentive et la plus efficace possible. Tout n'est pas parfait, mais l'effort des hôpitaux, des commandants d'unités et de l'ONACVG, qui prend en charge certains blessés sur le long terme, est important.

Vous m'avez également interrogée sur les PCRL. Entre 2011 et 2014, la France s'est engagée en Afghanistan, sous mandat de l'ONU, pour maintenir la sécurité. Nous avons eu recours à des personnels civils recrutés localement pour aider nos armées. Entre 2013 et 2015, avec le désengagement progressif de la France, des campagnes d'accueil pour les anciens employés et leurs familles ont été organisées, compte tenu des risques encourus par ces personnels s'ils restaient en Afghanistan. Plusieurs centaines de personnes ont choisi de rejoindre la France, tandis que d'autres ont souhaité rester dans leur pays. En 2017, le Président de la République a souhaité que la situation des PCRL soit reconsidérée et qu'un nouveau dispositif d'accueil soit organisé. En 2021, un autre dispositif a été déployé par le ministère des affaires étrangères pour les agents de droit local employés par l'ambassade ayant eu le statut de PCRL. Le Président de la République a indiqué clairement, le 16 août dernier, que tout serait fait, dans la mesure du possible, pour permettre l'évacuation des Afghans qui ont aidé la France. La majorité des ex-PCRL ayant travaillé au service de nos armées et ayant demandé à être évacués sont désormais en France avec leur famille, en sécurité.

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