Intervention de Philippe Desprès

Réunion du jeudi 13 février 2020 à 14h30
Commission d'enquête chargée d'évaluer les recherches, la prévention et les politiques publiques à mener contre la propagation des moustiques aedes et des maladies vectorielles

Philippe Desprès, professeur et chef de l'unité « Interactions Moléculaires Flavivirus-Hôtes » de l'Institut Pasteur :

Ces maladies sont complexes du fait qu'il y a beaucoup de partenaires, beaucoup de contingence. La problématique est un peu la même que pour le coronavirus. Ces virus, que l'on appelle zoonotiques, ont un réservoir animal, avec des vecteurs de transmission. Il n'est donc pas possible qu'une seule structure soit en mesure de répondre globalement. Cela demande une synergie qui pourrait d'ailleurs peut-être être à la base, dans le futur, d'une agence spécifique des arboviroses ; ce serait peut-être un futur idyllique. Cette agence regrouperait des personnes travaillant sur le vecteur, des personnes spécialistes du pathogène, des spécialistes de la clinique, capables de comprendre la physiopathologie, capables de comprendre le diagnostic et la vaccinologie.

Dans le futur, des structures de taille européenne pourraient être capables d'interagir ou de travailler ensemble sur ces différents volets. On ne peut séparer l'ensemble puisque les questions sont complexes et multiples. Nous sommes toujours en retard, du fait que ces virus évoluent. Je ne sais pas d'où viendra la prochaine émergence après le Zika. La première était le virus West Nile, suivie de Zika dix ans plus tard. Dans les cinq prochaines années, quel sera le suivant à apparaître ? Je ne sais pas. Nous avons des petits candidats, comme le virus Usutu, qui semblent se manifester, puisque nous le trouvons en Europe maintenant. Cela veut dire aussi une gestion de la globalisation de l'économie, des échanges. L'exemple du coronavirus montre à quel point ces solutions sont extrêmement complexes à résoudre et ne peuvent pas l'être uniquement par les scientifiques ou les spécialistes. Cela doit être intégré dans une politique globale, ce que l'on faisait à l'époque où j'étais au conseil national de la recherche. Cela doit se faire en partenariat avec les agences de santé. Il faut apprendre à se connaître, à dialoguer, à préparer des stratégies. Vous avez tout à fait raison.

Je pense que les prochains enjeux seront d'avoir ce que l'on appelle maintenant le One Health, qui est un très beau terme, mais qu'il faut désormais mettre en perspective. C'est un énorme chantier et il nécessite d'avoir de jeunes scientifiques formés qui s'intègrent dans ce dispositif, qui est un peu différent des dispositifs de la seule excellence académique, telle qu'elle est prônée, un peu trop peut-être. Nous avons maintenant des difficultés à avoir des scientifiques intéressés par ces globalisations, à répondre à des problèmes de santé publique, puisque l'on privilégie beaucoup l'excellence. C'est très bien, mais tout ne se résume peut-être pas uniquement à l'excellence.

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