Votre question est complexe. Ce qui est sûr, c'est que nous pouvons parler d'une association. Nous sommes en train d'y travailler. Quelques études essaient actuellement de déterminer quelle est l'association. Il semblerait que le virus ait une part de responsabilité, avec une modification de certaines molécules appelées des cytokines qui sont associées à l'élément dépressif, sans que nous soyons certains de qui a causé quoi.
En tout cas, pour avoir vu un certain nombre de patients, l'élément chronique induit des difficultés sociales, des difficultés sexuelles aussi. C'est un non-dit des patients quand on les voit en cabinet de consultation, mais on comprend certaines difficultés conjugales pour certains. J'ai certainement un biais de regard parce qu'évidemment, je vois peut-être les cas plus complexes. En tout cas, les gens parlent, et quantité d'éléments aboutissent à des composantes dépressives. Certains ont même eu des idées suicidaires.
Certains sont confronté à une situation de maladie professionnelle non reconnue. J'ai vu un certain nombre de patients qui ont rattrapé le chikungunya dans le cadre de leur exercice professionnel, en particulier des soignants, des kinésithérapeutes qui ont arrêté parce qu'ils n'arrivent plus à travailler, des infirmières qui n'arrivent plus à exercer. J'ai à l'esprit un salarié d'une compagnie de transport qui a été obligé d'arrêter sa carrière à 58 ans. Les formes les plus complexes ont vraiment un impact psychique et, même pour des formes qu'on qualifie de simples, c'est une vie qui change.