Intervention de Stéphanie Blandin

Réunion du lundi 24 février 2020 à 15h00
Commission d'enquête chargée d'évaluer les recherches, la prévention et les politiques publiques à mener contre la propagation des moustiques aedes et des maladies vectorielles

Stéphanie Blandin, responsable du groupe Réponses immunitaires chez les moustiques vecteurs de maladies à l'IBMC de Strasbourg :

En ce domaine, la législation est relativement satisfaisante ; nous pouvons travailler correctement sur les moustiques et sur les virus et parasites qu'ils sont susceptibles de transmettre. Des améliorations sont cependant possibles.

Par exemple, le parasite Plasmodium falciparum est classé P3* dans la législation européenne et française, ce qui correspond au niveau 3 de sécurité biologique, et requiert pour le manipuler de travailler dans un laboratoire de niveau correspondant. Un astérisque a été ajouté parce que ce parasite n'est a priori pas infectieux dans l'air. Une telle imprécision peut toutefois entraîner des problèmes d'application sur le terrain. Je recommanderais de laisser ce parasite ou les virus de la dengue ou du chikungunya au niveau de sécurité biologique 2 quand ils sont manipulés en culture cellulaire, car ils ne présentent alors pas de risque plus important que le virus du sida, mais de les classer P3 quand ils se trouvent dans les moustiques, car le risque est alors plus important – on ne contrôle pas nécessairement la trajectoire ni le comportement du moustique. Il est également incohérent de classer la dengue P3 alors que Zika est P2 ; à cet égard, la réglementation des risques gagnerait donc à être simplifiée.

S'agissant de l'expérimentation sur les humains pour l'étude de la transmission, nous n'y sommes pas encore, et les modèles animaux restent nécessaires.

En matière de manipulation génétique, il peut être également compliqué d'avancer. Les collègues de La Réunion ont voulu mettre en œuvre la technique de l'insecte stérile sur l'île, mais le caractère imprécis de la législation a beaucoup retardé leurs recherches et leurs possibilités d'action. Je crois que l'expérience est sur le point d'être conduite, mais il faudrait prendre les devants pour que de tels travaux soient facilités à l'avenir.

Pour ce qui est du forçage génétique et des moustiques génétiquement modifiés, la communauté internationale réfléchit actuellement à l'instauration de normes supranationales dans le cadre de réunions auxquelles participe notamment le Haut Conseil des Biotechnologies (HCB), car les moustiques ayant subi un forçage génétique sont susceptibles de se répandre et d'éradiquer une espèce complète à l'échelle du monde entier. La collaboration internationale est donc évidemment souhaitable, d'autant que les maladies sur lesquelles nous travaillons sont endémiques non pas en France métropolitaine mais dans certains pays étrangers, avec lesquels nous sommes donc amenés à coopérer – par exemple le Brésil pour Zika et la dengue, ou le Cameroun pour le paludisme. Nous nous efforçons de mettre en place des formes de coopération, bien que nous ne bénéficiions pas toujours des soutiens nécessaires.

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