Intervention de Stéphanie Blandin

Réunion du lundi 24 février 2020 à 15h00
Commission d'enquête chargée d'évaluer les recherches, la prévention et les politiques publiques à mener contre la propagation des moustiques aedes et des maladies vectorielles

Stéphanie Blandin, responsable du groupe Réponses immunitaires chez les moustiques vecteurs de maladies à l'IBMC de Strasbourg :

Il y a différents types de moustiques génétiquement modifiés.

La technique RIDL – la version OGM de la TIS – est par exemple auto-limitante, puisqu'elle consiste à répandre des moustiques incapables de se reproduire. Des fuites peuvent cependant survenir, car la reproduction des moustiques n'est pas bloquée à 100 %. Oxitec – pour Oxford Insect Technologies –, la firme qui a mis au point la méthode et répandu ce moustique, ne s'en est pas cachée ; elle a même contribué à une étude récente qui a montré que des petits morceaux de génomes issus des laboratoires étaient passés dans la population sauvage. Quoi qu'il en soit, les risques induits par cette technique sont très limités, à la fois pour les populations et pour l'écosystème – sauf à considérer que le moustique visé occupe une place importante dans l'écosystème, et que son éradication produirait donc un déséquilibre. Néanmoins, il y a généralement plusieurs espèces de moustique dans une niche donnée, et de nouvelles peuvent venir s'y placer. Le risque serait donc plutôt qu'une nouvelle espèce s'installe qui serait aussi vectrice de maladie ; il faudrait alors créer une nouvelle série de moustiques selon la méthode RIDL pour l'éradiquer.

Concernant la méthode du forçage génétique, nous n'en sommes encore qu'au stade des expériences en laboratoire. D'une logique similaire à celle de la technique RIDL en ce qu'elle vise l'éradication de l'espèce, elle pourrait néanmoins se répandre plus rapidement et à une échelle beaucoup plus étendue, jusqu'au monde entier. Il est donc légitime de se demander dans quelle mesure sa mise en œuvre pourrait engendrer des problèmes pour les écosystèmes. À nouveau, il faut bien distinguer les moustiques invasifs des moustiques locaux. Ces derniers sont endémiques d'une zone qu'ils ont envahie il y a très longtemps, et ils ont leur place dans l'écosystème ; à l'inverse, les moustiques invasifs du type Aedes albopictus ou Aedes aegypti sont arrivés plus récemment et ne font donc pas peser les mêmes contraintes sur le milieu.

Enfin, pour évaluer l'efficacité et les risques potentiels de ces technologies, nous devons mener des expériences à la fois en laboratoire et en conditions semi-naturelles, par exemple dans de grandes moustiquaires déployées sur le terrain. Ce dernier type d'expérimentation est nécessaire pour dissiper toute incertitude quant aux risques, même s'ils ne sont pas identifiés a priori.

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