Voilà qui est difficile pour nous. Comment dire aux sénateurs que leur proposition ne nous convient pas ? En fait, je voudrais dire deux choses.
La première concerne la situation de Mayotte qui est totalement différente de celle de la quasi-totalité des autres régions métropolitaines ou d'outre-mer. Pourquoi ? Parce que Mayotte, c'est tout petit. L'ARS de Mayotte travaille avec seulement 17 communes, 5 intercommunalités, un seul conseil départemental pour 300 000 habitants. C'est donc assez facile pour l'ARS, à Mayotte, de territorialiser son action, de savoir exactement ce qui se passe sur le terrain, de connaître individuellement chaque maire, chaque DGS et pratiquement de se faire une idée de la crédibilité des associations qui travaillent sur le terrain. J'imagine que c'est très différent quand vous êtes le directeur général de l'ARS de Provence-Alpes-Côte d'Azur ou de l'ARS Occitanie.
Nous sommes donc confrontés ici de plein fouet à cette situation étrange qui conduit d'ailleurs les ARS à subir des pages entières de critiques dans Le Canard Enchaîné de cette semaine. Qu'est-ce qu'il se passe ? On crée une agence régionale de santé avec des délégations départementales qui sont réduites à leur plus simple expression. Pour de nombreux de départements, le délégué départemental est le seul bras armé, je dirais, du ministère de la Santé sur le territoire. Il est souvent seul. Vous imaginez donc bien que la territorialisation des politiques, le dialogue avec les maires, n'a rien de commun. Comment reprocher aux ARS qui ne sont pas dotées de services territoriaux de ne pas être assez présentes sur le terrain ?
Nous sommes dans une situation étrange où le maire, qui a des services municipaux, qui connaît parfaitement les situations, qui sait où sont les endroits qui posent problème, se verrait invité à simplement signaler les situations à risque à l'ARS, qui est parfois localisée à 200 kilomètres de distance et qui n'a pas les services territoriaux pour agir.
Soit on territorialise l'action de l'ARS, ce qui me paraît nécessaire – après tout, l'agriculture, l'équipement, etc. ont toujours eu des services départementaux – soit on repositionne l'ARS sur son rôle de concepteur de politiques publiques, de stratège, d'accompagnateur, d'appui des collectivités, ce qu'avait souhaité le législateur. Mais on ne peut pas convenir que l'ARS, informée de tous les dysfonctionnements sur un territoire qui couvre parfois dix ou onze départements, va pouvoir mettre en demeure chaque propriétaire ou chaque entreprise sur les dysfonctionnements constatés.
Je pense personnellement qu'une partie du travail devrait être au contraire de responsabiliser les maires et de leur donner la boîte à outils pour la prévention, pour l'intervention de terrain, avec de la formation de leurs agents, avec de la conception de documents adaptés à leur territoire, l'actualisation des cartes et la mutualisation des informations de façon à leur permettre de savoir exactement où sont les moustiques et les cas de dengue par exemple. C'est le dialogue avec les maires qui me paraît important, ce n'est pas que les maires se défaussent sur les ARS qui sont parfois beaucoup trop loin de la réalité de terrain et qui n'ont pas les moyens d'intervenir.
Encore une fois, je soutiens totalement ce qu'a dit François Cheize tout à l'heure sur le contenu du décret. Si l'on admet que les questions de santé, de sécurité sanitaire sont largement aussi importantes que d'autres politiques confiées aux maires, le maire doit empoigner ce sujet et non peut l'empoigner s'il le désire.