Vous connaissez la situation épidémiologique en Guyane et l'indisponibilité totale des équipes qui sont mobilisées depuis trois mois, six à sept jours sur sept, par l'épidémie de Covid-19 qui arrive cette année en même temps qu'une épidémie de dengue.
Mon propos liminaire sera très court pour souligner l'expertise et l'équipement de la Guyane en recherche, avec le centre national de référence (CNR) Arbovirus, le CNR Paludisme en collaboration avec l'Organisation mondiale de la santé (OMS) et le vectopole amazonien de l'Institut Pasteur de Guyane.
Des projets très importants sont mobilisés par l'ARS de la Guyane, notamment le projet anti-vectoriel Réseau d'expertise et mobilisation participative (Rempart) porté par la Croix-Rouge. C'est un projet international de l'ensemble des pays du plateau des Guyanes, c'est-à-dire la Guyane française, le Surinam et le Guyana, puisque les questions de lutte anti-vectorielle dépassent largement les frontières, avec un travail très intéressant autour de la mobilisation sociale et des volontaires.
Nous devions également communiquer sur un autre projet, dont l'échéance a été reportée à cause de la Covid-19. Ce projet nommé Malakit touche les orpailleurs clandestins qui sont au fond de l'Amazonie, auxquels nous distribuons des kits sur le paludisme leur permettant de se tester et de se soigner. Là aussi, nous avons d'excellents résultats, que je ne pourrai pas détailler, étant donné l'indisponibilité totale des équipes.
Je peux vous indiquer que la lutte anti-vectorielle est évidemment un élément majeur de la santé publique, notamment dans notre territoire. Ce n'est pas le seul, nous partageons bien sûr l'ambition du législateur quant à la mise en place d'un véritable pilotage stratégique de la lutte anti-vectorielle.
Je peux me faire le porte-parole de ma collègue Mme Valérie Denux, qui n'a pas pu rester connectée à cause de problèmes techniques, mais nous avons bien la même conviction : les ARS ne doivent surtout pas être chargées de la gestion opérationnelle de la lutte anti-vectorielle, qui nécessite une présence de terrain, assise notamment sur les maires des communes, bien qu'ils soient en effet peu équipés, comme l'a indiqué Mme la rapporteure.
Nous avons néanmoins la conviction que l'ARS doit se positionner dans un travail autour de la recherche, de la stratégie et de l'animation. Mais pour simplifier, ce n'est pas l'ARS qui nettoiera les gouttières. Il est très important qu'il y ait une distribution et une coordination des activités.
À ce titre-là, le décret du 29 mars 2019 est intéressant. Il ne s'appliquera en Guyane qu'à compter de 2023, mais cette entrée en vigueur pourra être avancée. Il s'agit, j'ose le dire, d'une certaine révolution culturelle qu'il faut comprendre et accompagner, notamment pour l'opérateur historique qui travaille depuis des années sur la lutte anti-vectorielle, la collectivité territoriale de Guyane (CTG), qui peut avoir des difficultés à accepter le fait que le pilotage qu'elle a assumé pendant très longtemps revienne désormais à l'État. Cela n'est pas facile, cela nécessite aussi une transformation profonde des modes de gestion, puisque jusqu'à présent, la CTG recevait une subvention de l'ARS très limitée, trop limitée selon elle, d'environ 600 000 euros pour un coût estimé par la CTG à 6 millions d'euros. Bien sûr, les 600 000 euros ne correspondent qu'aux activités déléguées par l'ARS à la CTG, mais sans un véritable pilotage.
Nous avons décidé en 2019 d'augmenter cette subvention à hauteur de 1 million d'euros et de prendre l'engagement en commun de transformer le mode de gestion pour arriver, à partir de 2020, à un système d'appel d'offres et de présentation d'un projet, d'unités d'œuvre, de coût, de rapport d'activité et d'utilisation du système d'information dédié à la prévention des maladies vectorielles et à la lutte antivectorielle (SI-LAV) par des agents de la CTG. Nous étions prêts à lancer cet appel d'offres en février, quand l'épidémie de Covid-19 nous est tombée dessus, nous avons donc dû reporter ce basculement à 2021.
Ce ne sera pas facile pour la collectivité territoriale. Elle estime, et c'est bien sûr fondé, être à la manœuvre sur ces opérations depuis des années, mais aussi ne pas être forcément en mesure d'apporter des informations dont nous avons besoin pour un rapport d'activité ou même pour la comptabilité analytique.
Enfin, nous avons donc, je le disais, de grandes ambitions. Je suis convaincue, ainsi que mes collègues, que c'est bien le rôle des ARS que de piloter ces éléments à un niveau stratégique. Néanmoins, l'ARS de Guyane, ce sont 75 agents et un seul agent dédié à la lutte anti-vectorielle, agent de catégorie C. Je suis en train d'essayer de recruter une deuxième personne, mais quoi qu'il en soit, il n'est pas d'ambition sans les moyens nécessaires.
Je pense qu'à ce moment-là, il n'est pas raisonnable de poser des ambitions trop élevées compte tenu des immenses autres enjeux de santé publique que nous avons à relever et des effectifs et compétences qui sont à notre disposition, puisqu'il n'est pas uniquement question de nombre. Le pilotage stratégique demande des compétences d'encadrement supérieures.