Commission d'enquête chargée d'évaluer les recherches, la prévention et les politiques publiques à mener contre la propagation des moustiques aedes et des maladies vectorielles

Réunion du mercredi 10 juin 2020 à 16h00

Résumé de la réunion

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La réunion

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COMMISSION D'ENQUÊTE CHARGÉE D'ÉVALUER LES RECHERCHES, LA PRÉVENTION ET LES POLITIQUES PUBLIQUES À MENER CONTRE LA PROPAGATION DES MOUSTIQUES AEDES ET DES MALADIES VECTORIELLES

Mercredi 10 juin 2020

La séance est ouverte à seize heures.

(Présidence de Mme Sereine Mauborgne, vice-présidente de la commission d'enquête)

La commission d'enquête chargée d'évaluer les recherches, la prévention et les politiques publiques à mener contre la propagation des moustiques Aedes et des maladies vectorielles procède à l'audition, en visioconférence, de Mme Clara de Bort, directrice générale de l'agence régionale de santé (ARS) de la Guyane, Mme Valérie Denux, directrice générale de l'ARS de la Guadeloupe, de Saint-Martin et de Saint-Barthélemy, M. Olivier Coudin, directeur général adjoint de l'ARS de la Martinique, M. Alain Blateau, directeur de la santé publique au sein de l'ARS de la Martinique et Mme Laurence Déluge, directrice de cabinet en charge de la communication, de la coopération internationale et de la gestion du cabinet au sein de l'ARS Martinique.

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Mes chers collègues, nous poursuivons les auditions de la commission d'enquête chargée d'évaluer les recherches, la prévention et les politiques publiques à mener contre la propagation des moustiques Aedes et des maladies vectorielles.

Nous allons entendre aujourd'hui les directeurs généraux des agences régionales de santé (ARS) des départements français d'Amérique, qui doivent faire face au risque d'épidémie d'arboviroses, en plus de l'épidémie en cours.

Par ailleurs, le décret du 29 mars 2019 a doté les ARS de compétences renforcées en matière de lutte anti-vectorielle (LAV) depuis le 1er janvier 2020, alors que les modes de mise en œuvre et de financement de ces actions sont divers dans ces départements.

Nous accueillons Mme Clara de Bort, directrice générale de l'ARS de la Guyane, Mme Valérie Denux, directrice générale de l'ARS de la Guadeloupe, de Saint-Martin et de Saint-Barthélemy, M. Olivier Coudin, directeur général adjoint de l'ARS de la Martinique, M. Alain Blateau, directeur de la santé publique au sein de l'ARS de la Martinique et Mme Laurence Déluge, directrice de cabinet en charge de la communication, de la coopération internationale et de la gestion du cabinet au sein de l'ARS Martinique.

Mesdames et messieurs les directeurs, je vous souhaite la bienvenue et je vous remercie de prendre le temps de répondre à nos questions.

Je vais vous passer la parole pour une intervention liminaire de quelques minutes chacun qui précédera notre échange sous forme de questions et de réponses.

Je vous remercie également de nous déclarer tout intérêt public ou privé de nature à influencer vos déclarations.

Auparavant, je vous rappelle que l'article 6 de l'ordonnance du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires impose aux personnes auditionnées par une commission d'enquête de prêter serment et de dire la vérité, toute la vérité et rien que la vérité. Je vous invite donc, mesdames et messieurs, à tour de rôle, à lever la main droite et à dire, « je le jure ».

Les personnes auditionnées prêtent serment.

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Valérie Denux, directrice générale de l'ARS de la Guadeloupe

Je vous entends très mal, je ne suis pas sûre de pouvoir participer à l'audition.

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Nous vous entendons très bien, je vous invite à faire votre déclaration liminaire.

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Valérie Denux, directrice générale de l'ARS de la Guadeloupe

Cela devait être interactif, je suis désolée, mais je ne peux pas travailler dans ces conditions. Je vous prie de m'excuser, mais nous pourrons convenir d'un nouveau rendez-vous, si vous le souhaitez.

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Clara de Bort, directrice générale de l'ARS de la Guyane

Vous connaissez la situation épidémiologique en Guyane et l'indisponibilité totale des équipes qui sont mobilisées depuis trois mois, six à sept jours sur sept, par l'épidémie de Covid-19 qui arrive cette année en même temps qu'une épidémie de dengue.

Mon propos liminaire sera très court pour souligner l'expertise et l'équipement de la Guyane en recherche, avec le centre national de référence (CNR) Arbovirus, le CNR Paludisme en collaboration avec l'Organisation mondiale de la santé (OMS) et le vectopole amazonien de l'Institut Pasteur de Guyane.

Des projets très importants sont mobilisés par l'ARS de la Guyane, notamment le projet anti-vectoriel Réseau d'expertise et mobilisation participative (Rempart) porté par la Croix-Rouge. C'est un projet international de l'ensemble des pays du plateau des Guyanes, c'est-à-dire la Guyane française, le Surinam et le Guyana, puisque les questions de lutte anti-vectorielle dépassent largement les frontières, avec un travail très intéressant autour de la mobilisation sociale et des volontaires.

Nous devions également communiquer sur un autre projet, dont l'échéance a été reportée à cause de la Covid-19. Ce projet nommé Malakit touche les orpailleurs clandestins qui sont au fond de l'Amazonie, auxquels nous distribuons des kits sur le paludisme leur permettant de se tester et de se soigner. Là aussi, nous avons d'excellents résultats, que je ne pourrai pas détailler, étant donné l'indisponibilité totale des équipes.

Je peux vous indiquer que la lutte anti-vectorielle est évidemment un élément majeur de la santé publique, notamment dans notre territoire. Ce n'est pas le seul, nous partageons bien sûr l'ambition du législateur quant à la mise en place d'un véritable pilotage stratégique de la lutte anti-vectorielle.

Je peux me faire le porte-parole de ma collègue Mme Valérie Denux, qui n'a pas pu rester connectée à cause de problèmes techniques, mais nous avons bien la même conviction : les ARS ne doivent surtout pas être chargées de la gestion opérationnelle de la lutte anti-vectorielle, qui nécessite une présence de terrain, assise notamment sur les maires des communes, bien qu'ils soient en effet peu équipés, comme l'a indiqué Mme la rapporteure.

Nous avons néanmoins la conviction que l'ARS doit se positionner dans un travail autour de la recherche, de la stratégie et de l'animation. Mais pour simplifier, ce n'est pas l'ARS qui nettoiera les gouttières. Il est très important qu'il y ait une distribution et une coordination des activités.

À ce titre-là, le décret du 29 mars 2019 est intéressant. Il ne s'appliquera en Guyane qu'à compter de 2023, mais cette entrée en vigueur pourra être avancée. Il s'agit, j'ose le dire, d'une certaine révolution culturelle qu'il faut comprendre et accompagner, notamment pour l'opérateur historique qui travaille depuis des années sur la lutte anti-vectorielle, la collectivité territoriale de Guyane (CTG), qui peut avoir des difficultés à accepter le fait que le pilotage qu'elle a assumé pendant très longtemps revienne désormais à l'État. Cela n'est pas facile, cela nécessite aussi une transformation profonde des modes de gestion, puisque jusqu'à présent, la CTG recevait une subvention de l'ARS très limitée, trop limitée selon elle, d'environ 600 000 euros pour un coût estimé par la CTG à 6 millions d'euros. Bien sûr, les 600 000 euros ne correspondent qu'aux activités déléguées par l'ARS à la CTG, mais sans un véritable pilotage.

Nous avons décidé en 2019 d'augmenter cette subvention à hauteur de 1 million d'euros et de prendre l'engagement en commun de transformer le mode de gestion pour arriver, à partir de 2020, à un système d'appel d'offres et de présentation d'un projet, d'unités d'œuvre, de coût, de rapport d'activité et d'utilisation du système d'information dédié à la prévention des maladies vectorielles et à la lutte antivectorielle (SI-LAV) par des agents de la CTG. Nous étions prêts à lancer cet appel d'offres en février, quand l'épidémie de Covid-19 nous est tombée dessus, nous avons donc dû reporter ce basculement à 2021.

Ce ne sera pas facile pour la collectivité territoriale. Elle estime, et c'est bien sûr fondé, être à la manœuvre sur ces opérations depuis des années, mais aussi ne pas être forcément en mesure d'apporter des informations dont nous avons besoin pour un rapport d'activité ou même pour la comptabilité analytique.

Enfin, nous avons donc, je le disais, de grandes ambitions. Je suis convaincue, ainsi que mes collègues, que c'est bien le rôle des ARS que de piloter ces éléments à un niveau stratégique. Néanmoins, l'ARS de Guyane, ce sont 75 agents et un seul agent dédié à la lutte anti-vectorielle, agent de catégorie C. Je suis en train d'essayer de recruter une deuxième personne, mais quoi qu'il en soit, il n'est pas d'ambition sans les moyens nécessaires.

Je pense qu'à ce moment-là, il n'est pas raisonnable de poser des ambitions trop élevées compte tenu des immenses autres enjeux de santé publique que nous avons à relever et des effectifs et compétences qui sont à notre disposition, puisqu'il n'est pas uniquement question de nombre. Le pilotage stratégique demande des compétences d'encadrement supérieures.

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Olivier Coudin, directeur général adjoint de l'ARS de la Martinique

Juste quelques propos d'introduction pour vous rappeler la situation de la Martinique qui est un peu particulière. Je pense d'ailleurs que chacun des trois territoires a sa singularité.

En Martinique, existe depuis 1968 un service commun de l'ARS et de la collectivité territoriale de Martinique (CTM), le Centre de démoustication et de recherche en entomologie et de lutte anti-vectorielle (CEDRE-LAV). Il s'agit d'un service de 34 agents, dont les deux tiers sont des agents de l'État, tandis que son directeur appartient à la CTM. Cela permet une mutualisation de l'ensemble des moyens, mais environ 60 % des moyens financiers sont fournis par l'ARS.

La convention de partenariat date de 1991 et aujourd'hui, nous pouvons considérer que ce service fonctionne correctement, malgré des moments de crispation, notamment liés aux différences de statuts des agents qui composent ce service.

Le problème de la lutte anti-vectorielle, de la lutte contre les arboviroses, en Martinique comme en Guadeloupe et en Guyane, est un problème majeur, face auquel nous nous rendons bien compte qu'aucun partenaire ne peut efficacement agir seul. Nous avons besoin des collectivités locales, que ce soit la CTM, mais aussi de l'intervention et du positionnement des communes, pour pouvoir mener des actions, parce que nous sommes sur un territoire où les enjeux sont forts dans plusieurs domaines : la santé publique, le développement économique avec le sujet du tourisme, et un enjeu de société avec l'impact que le moustique peut avoir sur le cadre de vie et sur le mode de vie de la population.

Pour l'ARS Martinique, le sujet récurrent est celui de la gouvernance du service commun CEDRE-LAV, avec une évolution que nous souhaitons, qui s'inscrit totalement dans le cadre du décret du 29 mars 2019 : l'ARS Martinique souhaite en effet s'orienter vers un rôle de pilotage – comme cela a été dit par ma collègue en Guyane – de coordination et d'animation dans la lutte contre les moustiques, qu'ils soient vecteurs ou non vecteurs, et beaucoup moins dans un rôle opérationnel.

C'est aussi lié à une évolution réglementaire, mais très concrètement, sur le terrain, cette évolution est liée aux compétences des agents qui sont aujourd'hui affectés à ce CEDRE-LAV. Parmi les 34 agents, le renouvellement des générations s'est fait progressivement ces dernières années ; des agents, qui sont plus souvent des techniciens, ont une volonté de travailler sur la communication, sur des opérations d'envergure de lutte contre le moustique, plutôt que d'être sur le terrain à faire de la pulvérisation.

Clairement, notre volonté à échéance 2022-2023 est d'être dans l'épure du décret de 2019. À ce stade, la CTM n'a pas encore clairement exprimé son positionnement par rapport à l'orientation et à l'évolution qui est souhaitée par l'ARS.

Je souhaite aussi préciser que la Martinique rentre en phase épidémique cette semaine, compte tenu des chiffres toujours croissants du nombre de personnes contaminées sur le territoire. Dans cette idée de déléguer nos missions opérationnelles à un opérateur, qu'il soit public ou privé, je pense qu'il sera important au niveau national d'inscrire les moyens financiers nécessaires à cette délégation de service vers un opérateur public, si c'est la CTM et les communes qui se positionnent, ou vers un opérateur privé.

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Alain Blateau, directeur de la santé publique au sein de l'ARS de la Martinique

Je souhaiterais juste insister sur la situation actuelle de la dengue en Martinique. L'épidémie a progressé lentement depuis la fin de l'année dernière. Nous pensions que le confinement lié à la Covid-19 allait pouvoir limiter un peu cette épidémie parce que les personnes confinées à domicile avaient tout le loisir d'éliminer tous les gîtes à moustique et autres. Or, à la période du déconfinement, force est de constater que nous n'avons pas eu ce tassement et qu'au contraire, le processus épidémique s'accélère plutôt. L'épidémie a été déclarée à la fin de la semaine dernière.

Le suivi de la dengue d'une manière régulière se fait au travers d'un document qui s'appelle le programme de surveillance, d'alerte et de gestion des épidémies (PSAGE) de dengue. La dengue étant endémique chez nous, c'est une surveillance permanente qui ne s'arrête jamais et est toujours active pour bien suivre l'évolution de ces phénomènes endémiques, avec des épidémies qui apparaissent régulièrement tous les trois, quatre ou cinq ans.

Cela faisait dix ans que nous n'avions pas eu d'épidémie de dengue. Cependant, entre-temps, nous avons connu une épidémie sévère de chikungunya et une épidémie sévère de Zika.

Les arboviroses reviennent à peu près tous les trois ou quatre ans. C'est vraiment un déterminant de santé fondamental dans les outre-mer, en particulier dans les Antilles.

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Ramiati Ali, rapporteure

Je vais vous poser des questions nous permettant de préciser les choses, même si vous en avez déjà évoqué certaines.

Pouvez-vous nous présenter les actions de lutte anti-vectorielle menées par l'ARS ?

Les épidémies de dengue en cours ont-elles conduit à la mise en place de plans de prévention de crise spécifiques en matière de lutte anti-vectorielle ?

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Alain Blateau, directeur de la santé publique au sein de l'ARS de la Martinique

La lutte anti-vectorielle à la Martinique est organisée autour d'un service commun de l'ARS et de la collectivité territoriale de Martinique.

Au sein de l'ARS, existe un pôle surveillance qui appartient à la direction de la santé publique. Nous allons surveiller les cas suspects, les cas confirmés, etc. Ces informations sanitaires orienteront ainsi les opérations de lutte anti-vectorielle.

Ces opérations sont menées par le CEDRE-LAV, qui est également rattaché à la direction de la santé publique au sein de l'ARS de la Martinique. Les activités qui sont menées sont des activités intra-domiciliaires tout d'abord, c'est-à-dire que nous allons chez les cas qui ont été identifiés pour procéder à un examen de l'ensemble de l'habitat pour éliminer les gîtes. Éventuellement, nous faisons également des pulvérisations d'insecticides dans ces zones. Autour des cas, nous faisons des enquêtes entomo-épidémiologiques, c'est-à-dire que nous visitons toutes les maisons voisines autour du cas pour faire la même démarche, relever les gîtes et éventuellement faire des pulvérisations, si nécessaire.

Nous intervenons également au niveau des quartiers. Lorsque nous avons plusieurs cas regroupés dans un même quartier, nous menons des interventions de deux types : soit des opérations de type « coups de poing » en lien avec les municipalités, c'est-à-dire que nous allons, un samedi par exemple, là où les gens sont véritablement présents chez eux, faire une démarche maison par maison, pour éliminer les gîtes et pour lutter contre les réserves d'eau. Nous pouvons aussi avoir des pulvérisations d'insecticides dans les quartiers à l'heure où les moustiques Aedes sont actifs, c'est-à-dire en fin de journée, à la tombée de la nuit.

Puis nous avons aussi une activité très importante en matière de communication sociale. Nous allons au-devant de la population pour apporter des informations.

À côté de toutes ces activités opérationnelles de terrain, nous communiquons activement dans les médias et en direction de la population. La communication est portée par le cabinet au sein de l'ARS de Martinique.

Je ne sais pas si j'ai totalement répondu à la question.

Lors du confinement nécessité par la Covid-19, nous avons été obligés de revoir toute cette stratégie de lutte anti-vectorielle, puisque nous ne pouvions plus faire de visites domiciliaires. Nous avons donc été obligés de réorienter nos actions en direction des pulvérisations d'insecticides au sein des quartiers, avec des véhicules et des pulvérisateurs autoportés. Nous avons également été obligés de nous orienter essentiellement vers la recherche des gîtes majeurs qui sont les plus gros producteurs d' Aedes : ce sont par exemple des vides sanitaires sous des bâtiments HLM ou des bâtiments publics importants.

Dans cette phase, nous avons beaucoup communiqué en direction du grand public pour essayer de sensibiliser la population à intervenir autour de chez elle. Mais nous avons eu, comme je le disais tout à l'heure, relativement peu de succès et nous sommes un petit peu déçus.

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Olivier Coudin, directeur général adjoint de l'ARS de la Martinique

À propos de la LAV, je voudrais juste indiquer une action importante, qui est menée en lien avec les communes du département, puisqu'aujourd'hui, chacune des communes a un correspondant LAV avec lequel des réunions régulières sont organisées pour pouvoir coordonner l'action des collectivités locales dans la lutte anti-vectorielle.

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Clara de Bort, directrice générale de l'ARS de la Guyane

Pour la Guyane, il faudrait interroger la collectivité territoriale de Guyane qui assure cette activité.

Puisque j'ai la parole, je me permets d'ajouter un point que j'ai omis dans mon intervention liminaire.

Je suggère que nous n'oubliions pas d'envisager ce que la lutte contre la Covid-19 permettra peut-être d'améliorer dans la lutte contre les maladies vectorielles. Je pense en particulier au système d'information de dépistage SI-DEP qui « aspire » les données des laboratoires, les résultats positifs à la Covid-19, ce dont nous rêvons depuis des années pour les maladies vectorielles, car le dispositif de déclaration obligatoire par le médecin sur papier, une fois qu'il a reçu les résultats, est beaucoup trop lourd, beaucoup trop incertain et beaucoup trop tardif surtout, pour être efficace dans la lutte anti-vectorielle.

Enfin, j'ai indiqué à mon arrivée au laboratoire départemental de Guyane que j'espérais qu'il progresse dans le fait de pouvoir faire les analyses de dengue sur le territoire et non pas en métropole. Je comprends qu'ils aient des contraintes certainement très légitimes, mais il est un fait qu'avoir un délai de dix jours pour savoir si un prélèvement est positif à la dengue ou pas est clairement une perte de chance.

Je regrette que nous n'ayons pas à ce jour d'outil juridique nous permettant d'imposer un délai de rendu de résultats pour ce type de maladie. Je suggérerais que votre assemblée puisse nous aider.

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Pourrions-nous envisager dans ce cadre-là une mutualisation régionale ? Comment cela se passe-t-il avec la Martinique ? Envoient-ils aussi leurs prélèvements en métropole ?

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Alain Blateau, directeur de la santé publique au sein de l'ARS de la Martinique

Nous avons un laboratoire au niveau du centre hospitalier universitaire qui réalise toutes les analyses possibles pour la dengue. En Guyane, nous avons le centre national de référence pour les arboviroses à l'Institut Pasteur, avec lequel nous travaillons également. Les laboratoires de ville travaillent actuellement avec les trois laboratoires en métropole, Pasteur, Mérieux et Cerba avec des envois réguliers vers la métropole et une récupération automatique des résultats via Santé publique France. Le circuit met effectivement quatre ou cinq jours.

Actuellement, nous sommes en train de travailler à la mise au point du test de transcriptase inverse – réaction en chaîne par polymérase (RT-PCR) pour les arboviroses avec les deux groupements de laboratoires de ville en Martinique, Bio Santé et Biolab. Ils étaient sur le point d'acquérir cette technique au mois de mars, mais avec l'arrivée de la Covid, cela a été un petit peu chamboulé. Cela sera complètement opérationnel avant la fin de l'année. Il faut juste sortir de l'épidémie de Covid-19.

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Clara de Bort, directrice générale de l'ARS de la Guyane

L'institut Pasteur de Guyane fait les tests sur place, il n'y a pas de difficulté du tout, mais nous n'avons pas d'outils juridiques pour contraindre les laboratoires privés à fournir ce type de résultats dans un délai prescrit, qui les amènerait évidemment à envisager toutes sortes de coopérations.

Je pense que pour le moment, dès l'instant qu'il n'y a pas de possibilité de contraintes, d'autres dimensions entrent en ligne de compte – qualité des analyses, accréditation par le Comité français d'accréditation (Cofrac) – sur lesquelles il faudrait peut-être les interroger, pour savoir ce qui les a amenés à préférer l'envoi en métropole plutôt qu'à devoir développer ou maintenir la technologie sur place.

Ceci provoque des retards dans le repérage du démarrage de foyers épidémiques, retards d'autant plus importants que nous devons passer théoriquement par des déclarations par le médecin qui a prescrit le test.

Nous avons donc une sous-optimisation du processus biologique dans la lutte anti-vectorielle.

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Oui, d'autant qu'avec les distances à parcourir en Guyane pour arriver jusqu'à Cayenne, j'imagine cela peut parfois prendre quinze jours en tout.

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Clara de Bort, directrice générale de l'ARS de la Guyane

Heureusement que nous avons des avions et des hélicoptères.

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Ramiati Ali, rapporteure

Comment se passe la surveillance entomologique au niveau des points d'entrée, ports et aéroports ? Est-il nécessaire, du fait du caractère insulaire du territoire, d'avoir une surveillance entomologique spécifique ?

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C'est une question pour la Guadeloupe, puisqu'en Guyane, nous n'avons pas de caractère insulaire.

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Alain Blateau, directeur de la santé publique au sein de l'ARS de la Martinique

Nous avons effectivement, au sein du CEDRE-LAV, une équipe qui est bien identifiée, qui fait la surveillance des points d'entrée – ports, aéroports – et qui surveille également une bande de 400 mètres autour du port et de l'aéroport. Cette équipe de deux personnes vérifie cette zone, essaie de traquer tous les gîtes et fait surtout une surveillance des types de moustiques que nous trouvons dans cette zone-là, parce que c'est aussi là que nous allons trouver des anophèles ainsi que de nouveaux moustiques, si jamais ils devaient arriver. Nous pensons en particulier à Aedes albopictus, le moustique tigre qui est actuellement absent des Antilles, mais qui pourrait coloniser ces territoires, puisque nous le trouvons déjà à Haïti, dans la Caraïbe.

Cette cellule de veille sera renforcée dans son action dans le cadre de la réorganisation prochaine de l'ARS de Martinique. Nous allons avoir une équipe intégrée qui assurera le contrôle sanitaire aux frontières jusqu'à cette surveillance des points d'entrée – port, aéroports et bande des 400 mètres – de manière intégrée, avec des mesures d'hygiène généralisée dans le cadre du Règlement sanitaire international.

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Pour la Guyane, les 800 kilomètres de frontière doivent être un petit sujet pour vous, madame la directrice.

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Clara de Bort, directrice générale de l'ARS de la Guyane

J'ai peu de détails à vous apporter sur ce sujet, mais il y a bien une surveillance entomologique aux points d'entrée. Je ne vous donnerai pas les détails, mais cette surveillance existe dans toute la mesure de nos possibilités, par rapport à la taille du territoire.

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Ramiati Ali, rapporteure

Mme Annelise Tran nous a présenté, lors de son audition, les outils de modélisation des populations d' Aedes albopictus Albocarto et Alborun et indiqué que ces modèles avaient été développés en partenariat avec l'ARS de l'océan Indien. Est-ce que vous utilisez ces outils ? Si oui, s'avèrent-ils efficaces ?

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Alain Blateau, directeur de la santé publique au sein de l'ARS de la Martinique

Comme je vous l'ai dit tout à l'heure, l' Aedes albopictus n'est pas présent en Martinique. L' Aedes albopictus n'a pas forcément la même écologie que l' Aedes aegypti, présent chez nous. Nous ne pouvons donc pas nous appuyer sur ces outils.

Par contre, des outils de modélisation commencent à être développés au niveau du CEDRE-LAV, en lien avec l'Institut Pasteur de Paris.

Cela ne rentre pas tout à fait dans ce cadre, mais actuellement, une doctorante travaille sur la compétence en matière de transmission de la fièvre jaune de l' Aedes aegypti de Martinique. À travers le travail de cette doctorante martiniquaise, il y a des rapports très étroits entre l'Institut Pasteur de Paris et le CEDRE-LAV de Martinique.

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Ramiati Ali, rapporteure

Et en Guyane ?

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Clara de Bort, directrice générale de l'ARS de la Guyane

Je n'ai pas d'information sur ce sujet.

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Ramiati Ali, rapporteure

Certaines campagnes de lutte contre les moustiques font l'objet de recours administratifs de la part d'associations, notamment pour insuffisance de l'évaluation des incidences Natura 2000. Comment intégrez-vous ces critiques ? Avez-vous des liens avec le monde associatif ?

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Alain Blateau, directeur de la santé publique au sein de l'ARS de la Martinique

Je ne connais pas bien les espaces protégés sur le plan de l'environnement Natura 2000, je pense que nous n'en avons pas chez nous en Martinique.

Cependant, le monde associatif est très sensible à l'utilisation des pesticides. Vous savez les soucis que nous avons avec la chlordécone. Nous sommes très vigilants sur une gestion économique des insecticides dans le cadre de nos interventions de lutte anti-vectorielle. Actuellement, très peu de molécules sont disponibles pour assurer la lutte anti-vectorielle chimique, c'est un problème. Il y a des questions de résistance que nous sommes obligés de suivre. Au sein même du CEDRE-LAV, une équipe est chargée du suivi de la résistance.

Des études sont actuellement menées par l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses) pour essayer d'identifier de nouvelles molécules, il serait bien d'avoir le choix entre plusieurs molécules pour pouvoir faire ces interventions de lutte anti-vectorielle chimique, pour éviter une trop grande résistance.

Nous essayons le plus possible cependant d'avoir des opérations de destruction de gîtes physiques plutôt que d'interventions avec des insecticides.

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Olivier Coudin, directeur général adjoint de l'ARS de la Martinique

Nous insistons vraiment sur l'aspect recherche du service CEDRE-LAV. Il y a un laboratoire de recherche dans les locaux de la CTM et tous les produits utilisés font l'objet d'une grande vigilance de la part du service, pour s'assurer de l'innocuité des produits utilisés.

Nous n'avons pas de contacts réguliers avec des associations de protection de l'environnement, mais en tout cas, à chaque fois que des collectifs ou des mouvements se manifestent pour obtenir des réponses sur la qualité des produits utilisés, nous faisons en sorte qu'ils aient systématiquement une réponse.

Compte tenu du contexte martiniquais sur l'utilisation de produits chimiques, nous sommes extrêmement vigilants sur l'impact que pourrait avoir l'utilisation de certains produits, sur l'environnement.

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Ramiati Ali, rapporteure

Et en Guyane ?

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Clara de Bort, directrice générale de l'ARS de la Guyane

C'est la CTG qui gère ce genre de choses. J'ai peut-être un avis, mais il n'est pas assez étayé, je n'ai pas les équipes autour de moi, je n'ai pas pu leur demander quoi que ce soit. Je vous remercie d'interroger la CTG sur ces sujets.

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Ramiati Ali, rapporteure

Comment gérez-vous les questions d'information au public ?

Quel bilan faites-vous des campagnes de sensibilisation et quels messages sont les plus efficaces ?

La formation des citoyens à la lutte anti-vectorielle, notamment du fait du caractère endémique de l'épidémie de dengue dans vos territoires, s'avère-t-elle efficace ?

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Alain Blateau, directeur de la santé publique au sein de l'ARS de la Martinique

La dengue est endémique en Martinique et nous avons des interventions permanentes. Le problème est d'arriver à les graduer pour être toujours en avance de phase par rapport à la situation épidémique et épidémiologique.

Tout au long de l'année, un certain nombre de temps forts balisent l'action : une journée contre le moustique, des journées « coups de poing », une journée spéciale « fête des mères » – c'est un moment où l'on offre beaucoup de fleurs, or les pots de fleurs sont des gîtes à moustiques –, une opération spéciale au moment de la Toussaint, au mois de novembre, parce les pots à fleur dans les cimetières peuvent être des gîtes importants. Ces temps forts dans la communication habituelle, tout au long de l'année, permettent de remotiver la population.

Nous avons des moments forts d'information, à chaque fois qu'il y a un changement dans le processus épidémique qui se développe, soit à chaque changement de phase.

Nous commençons une campagne de communication d'envergure parce que nous venons de passer en phase épidémique, avec un communiqué de presse commun à la préfecture, l'ARS et la CTM, puis une campagne de communication, aussi bien sur les réseaux sociaux qu'à la télévision locale.

Pour ce qui est de notre interprétation de l'impact auprès du public, nous savons avec certitude que la population de Martinique connaît le moustique, les gestes qu'il faudrait faire et l'écologie du moustique. Par contre, le passage à l'acte suscite des difficultés importantes. La modification des comportements est quelque chose de compliqué, qui prend en général beaucoup de temps. Nous savons que nous avons des marges de progrès à ce niveau-là.

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Laurence Déluge, directrice de cabinet au sein de l'ARS Martinique

Pour compléter les interventions de M. Blateau, les messages de communication se divisent en trois temps. Dans la phase inter-épidémique, nous sommes essentiellement sur de l'éducation sanitaire, nous relayons régulièrement les messages de prévention. Dans la deuxième phase pré-épidémique, nous insistons sur la suppression des gîtes et la protection des personnes. Enfin, dans la phase épidémique, nous recommandons essentiellement sur une protection individuelle.

Effectivement, au fur et à mesure de l'évolution du phénomène et des chiffres de la dengue, le message est de plus en plus important auprès de la population. Nous avons souvent une volonté de « hausser le ton » au fur et à mesure, puisque la population connaît les gestes, mais le passage à l'acte est difficile.

Nous avons souvent des temps un peu plus forts de communication pour inciter la population à nettoyer et à détruire les gîtes.

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Olivier Coudin, directeur général adjoint de l'ARS de la Martinique

Dans cette communication, au-delà de la communication institutionnelle et des actions évoquées, je voudrais juste insister sur la nécessité d'aller vers la population. Beaucoup d'actions sont menées avec des associations locales et des collectivités, avec notamment un bus démoustication qui permet d'aller dans les quartiers pour expliquer à en proximité les gestes à faire.

Avec la phase épidémique, nous avons prévu dans les prochaines semaines le recrutement de volontaires de service civique qui iront directement à la rencontre de la population dans les quartiers pour rappeler les bons gestes pour éviter la propagation de la maladie et la prolifération des moustiques.

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Madame la directrice générale de l'ARS de Guyane, cela vous fait-il rêver comme dispositif ?

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Clara de Bort, directrice générale de l'ARS de la Guyane

Oui, nous avons chacun nos spécificités.

Je tiens vraiment à souligner l'investissement de la CTG depuis des années sur l'ensemble de ces sujets et le fait que le partenariat et les basculements de compétences doivent se faire dans la souplesse et le respect du travail déjà fait.

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Laurence Déluge, directrice de cabinet au sein de l'ARS Martinique

Je souhaiterais juste ajouter une chose. À partir du moment où nous rentrons en phase épidémique, et même avant, la communication se fait véritablement de concert entre la préfecture, la collectivité territoriale de Martinique et l'ARS de la Martinique. Toutes les décisions liées à la communication sont partagées dès l'annonce des premiers cas de dengue.

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Ramiati Ali, rapporteure

Existe-t-il une collaboration entre vos trois agences en matière de lutte anti-vectorielle, notamment entre l'ARS de la Guadeloupe et l'ARS de la Martinique ?

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Alain Blateau, directeur de la santé publique au sein de l'ARS de la Martinique

Il y a des échanges réguliers sur les modes opérationnels entre les deux services de lutte anti-vectorielle, mais aussi sur les modalités de surveillance de la dengue au travers de la cellule de Santé publique France, qui est une unité qui intervient en même temps sur la Martinique et sur la Guadeloupe. Cette unité de Santé publique France anime un réseau local Martinique et Guadeloupe, qui est très performant. Nos échanges d'informations sont vraiment très réguliers.

Nous avons aussi des relations assez régulières avec la Guyane, en particulier à travers le CNR.

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Clara de Bort, directrice générale de l'ARS de la Guyane

Nous nous voyons tous les mois, avec mes collègues des ARS des outremers.

Nous avons des organisations extrêmement différentes. Le point de départ est vraiment très différent. Les organisations et la répartition des compétences, les effectifs que nous avons dans nos agences compte tenu de l'histoire de nos territoires sont vraiment extrêmement différents.

Nous partageons bien sûr, mais en tenant compte de ces différences absolument majeures.

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Ramiati Ali, rapporteure

Le décret du 29 mars 2019 confie aux ARS de nombreuses compétences en matière de démoustication, notamment en matière de surveillance des vecteurs et de lutte anti-vectorielle, à rebours du transfert de compétences vers les départements opéré en 2004.

L'essentiel de ces dispositions est entré en vigueur au 1er janvier 2020. En dépit de ce temps d'application encore réduit, quel regard portez-vous à ce stade sur cette recentralisation ?

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Olivier Coudin, directeur général adjoint de l'ARS de la Martinique

Compte tenu de la situation de la Martinique, nous avons un délai de trois ans pour la mise en œuvre de ce décret.

L'orientation que nous souhaiterions avoir, et je pense que c'est dans cette direction que souhaitent aussi aller les autres départements, est celle d'une recentralisation du pilotage, de l'animation et de la coordination. Nous ne souhaitons pas une recentralisation de l'ensemble des activités et des missions de lutte anti-vectorielle, mais nous souhaitons pouvoir avoir un mandat clair sur le pilotage du dispositif et être associés à des opérateurs, qu'ils soient publics ou privés, qui auraient eux, une mission plus opérationnelle.

Je pense que c'est important que l'État puisse vraiment être dans la définition de la stratégie et des grandes orientations et que cela puisse après s'organiser avec des opérateurs de terrain.

Il s'agit d'une recentralisation donc, mais pas de l'ensemble des activités. Elle porte sur la prise de décision et la définition de la stratégie, mais avec une possibilité d'être en délégation sur les activités de terrain.

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Clara de Bort, directrice générale de l'ARS de la Guyane

C'était le cœur de mon propos liminaire, à savoir un délai de mise en route, le fait que cette bascule doit se faire dans le partenariat, la souplesse et le respect du travail déjà réalisé. Il s'agit, pour la Guyane, d'une certaine révolution culturelle, y compris, et peut-être même surtout, dans la notion même de pilotage à travers des résultats et à travers des coûts.

La comptabilité analytique n'étant pas complètement installée, cela n'est pas facile d'installer un pilotage avec un donneur d'ordres et un opérateur qui les réalise, sachant que cet opérateur estime avoir fait le travail depuis bien longtemps et même bien avant la décentralisation de 2004.

C'est la spécificité de la Guyane. Il n'y a pas eu de décentralisation puisque c'était déjà une activité réalisée, ce qui fait dire à la CTG que cela n'est pas forcément complètement juste ni même équilibré au plan financier.

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Ramiati Ali, rapporteure

Vous avez dû gérer en même temps l'épidémie de dengue et celle du Covid-19.

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Clara de Bort, directrice générale de l'ARS de la Guyane

Vous pouvez encore poser votre question au présent.

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Ramiati Ali, rapporteure

C'est aussi vrai pour l'océan Indien... Ce transfert de compétences du département vers l'ARS a-t-il permis une réponse plus efficace en matière de lutte contre l'épidémie de dengue ou au contraire posé des problèmes s'agissant de la mobilisation des compétences sur le terrain ?

Les deux agences disposaient-elles de suffisamment de compétences humaines et techniques pour répondre à ces deux défis ?

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Clara de Bort, directrice générale de l'ARS de la Guyane

Le basculement est prévu en 2023 donc il n'est pas encore fait.

L'épidémie ne fait que démarrer, la question au passé ne peut pas encore trouver une réponse.

Cette double épidémie est de nature à surcharger énormément notre système de santé, nos capacités de pilotage, nos capacités de biologie, nos capacités de réanimation.

La mobilisation sociale sur la dengue est quasiment impossible, en ce moment, tant la Covid-19 sature l'espace.

À de très nombreux égards, la prise en charge d'une double épidémie dépasse très largement les enjeux de ce décret du 29 mars 2019.

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Ramiati Ali, rapporteure

Pour la Martinique ?

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Alain Blateau, directeur de la santé publique au sein de l'ARS de la Martinique

Effectivement, cette double gestion est particulièrement compliquée.

Pendant la phase de confinement, nous avons été obligés de revoir totalement notre stratégie d'intervention autour des cas de dengue. Nous avons arrêté tout ce qui est enquête à domicile, intervention à domicile, recherche de gîtes, élimination de gîtes au sein même des espaces de vie.

Nous avons donc défini une nouvelle stratégie pendant cette phase de confinement, basée sur des pulvérisations d'insecticides dans les quartiers, sur le suivi des gîtes majeurs tels que les gros vides sanitaires ou les stations d'épuration et avec une communication renforcée sur les réseaux sociaux.

Comme toute ARS, nous avons été mis en plan de continuation d'activité. Des agents de la lutte anti-vectorielle étaient intégrés dans ce plan de continuation de l'activité et faisaient les opérations a minima.

Maintenant, nous sommes dans la phase de reprise globale de l'activité de l'ARS, nous avons donc été obligés de solliciter les instances représentatives du personnel pour voir dans quelles conditions nous pouvions remettre les agents sur les activités de base de la lutte anti-vectorielle, que sont les enquêtes domiciliaires et les enquêtes autour des cas.

A priori, nous avons plutôt un avis qui va dans le sens d'une reprise globale de cette activité. Nous sommes en train d'organiser la reprise effective dans les jours qui viennent.

Il est vrai que gérer deux épidémies en même temps est très lourd. Même si nous avons très peu de cas de Covid-19, cela nous mobilise énormément. Ce sont les mêmes équipes de la direction de la santé publique qui sont sur les deux secteurs.

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Olivier Coudin, directeur général adjoint de l'ARS de la Martinique

Je parlais en introduction des moyens. C'est vrai que dans des ARS comme les nôtres, ce sont les mêmes personnes qui sont à la fois chargées du Covid-19, de l'épidémie de dengue, de l'arrivée des sargasses et de la préparation de la saison cyclonique.

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Ramiati Ali, rapporteure

Dans le même temps, ce décret octroie des prérogatives nouvelles aux maires. Celui-ci peut ainsi prescrire aux propriétaires de terrain comportant des mares ou des fossés à eau stagnante au voisinage d'habitations de mettre en œuvre les mesures nécessaires pour lutter contre le développement des moustiques vecteurs. Il peut également désigner un référent technique chargé de ces questions.

J'ai compris que c'est déjà le cas en Martinique.

Dans quelle mesure vos relations avec les maires sont-elles amenées à évoluer à la suite de ces nouvelles dispositions ?

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Clara de Bort, directrice générale de l'ARS de la Guyane

Je n'ai pas d'avis, il faut voir avec la CTG.

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Alain Blateau, directeur de la santé publique au sein de l'ARS de la Martinique

Nous vous avons dit que nous avons déjà une organisation avec toutes les communes de Martinique. Sur les 34 communes en Martinique, toutes ont au moins un duo de référents. Ces duos de référents sont constitués d'un responsable politique et d'un responsable technique. Certaines communes sont allées au-delà de ce minima et ont de véritables équipes pour lutter contre les moustiques – appelées brigade environnement ou brigade verte, selon les communes, mais la mission est toujours la même : apporter un appui à la lutte anti-vectorielle.

Nous réunissons ces référents démoustication au moins deux fois par an. À la fin de l'année 2019, nous les avons réunis pendant plusieurs séances pour travailler à la mise au point d'une convention de partenariat entre chaque commune, la CTM et l'ARS pour structurer leurs interventions en matière de lutte anti-vectorielle et pour que nous ayons un support juridique pour mener des actions communes.

Ces conventions sont prêtes. Plusieurs communes les ont déjà adoptées dans leurs conseils municipaux. Cependant, la campagne électorale pour les municipales est arrivée et nous n'avons pas pu procéder, avant les élections, à la signature de l'ensemble de ces conventions. Quand les municipalités seront toutes en place, nous allons relancer le circuit de signature de ces conventions.

Je pense que ce sera un élément important pour bien fédérer toutes les communes autour d'un projet commun porté par la CTM et l'ARS.

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Ramiati Ali, rapporteure

La délégation aux collectivités territoriales du Sénat a présenté la semaine dernière un bilan critique de la coordination entre les collectivités territoriales et les ARS.

Ces critiques vous semblent-elles pertinentes, en particulier à l'échelle de vos territoires ?

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Olivier Coudin, directeur général adjoint de l'ARS de la Martinique

Nous allons être en difficulté pour répondre à cette question parce que nous n'avons pas pris connaissance du bilan critique de la coordination entre les collectivités et les ARS. Je ne sais pas quelle est la teneur des critiques qui ont été adressées et des réserves qui ont été émises sur la collaboration entre les collectivités et les ARS.

Il ne nous semble pas, sur la lutte anti-vectorielle, que nous ayons des difficultés qui soient particulièrement gênantes pour l'action commune de lutte.

Je l'ai dit tout à l'heure, ce n'est pas un long fleuve tranquille. Les choses ne sont pas forcément très simples, notamment au niveau de la gestion des équipes, parce que nous avons des personnes avec des statuts différents et nous avons une convention qui nécessite aujourd'hui une actualisation, une fois que nous aurons clairement pris des décisions concernant la gouvernance.

Il ne nous semble pas, dans l'action au quotidien sur le front de la lutte anti-vectorielle, que nous ayons des difficultés majeures avec les collectivités.

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Clara de Bort, directrice générale de l'ARS de la Guyane

Les relations avec la collectivité territoriale de Guyane sont nourries sur l'ensemble des sujets de la santé et du secteur social. La lutte anti-vectorielle n'est qu'un des aspects de cette politique de partenariat. Il est essentiel que nous trouvions des compromis sur l'ensemble de nos sujets.

Il y a des hauts et des bas, mais c'est plutôt très positif.

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Ramiati Ali, rapporteure

Que pensez-vous de la répartition des compétences entre communes, départements et État – préfets et ARS – proposée par la proposition de loi relative à la sécurité sanitaire, adoptée par le Sénat ?

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Alain Blateau, directeur de la santé publique au sein de l'ARS de la Martinique

Les maires ont la police en matière de salubrité publique depuis très longtemps et cette police est effectivement beaucoup utilisée en matière de lutte anti-vectorielle, puisque c'est la police des déchets, des écoulements d'eau et de tous les petits désagréments qu'il y a sur le territoire.

Je pense que le niveau de la commune est le bon pour régler ces petites difficultés de terrain.

En matière de lutte anti-vectorielle, actuellement, un espace est laissé vide, celui de la coopération intercommunale. Les EPCI pourraient avoir une mission en matière de lutte anti-vectorielle. Ils ont souvent en effet la compétence en matière de collecte et de traitement de déchets. Cela pourrait être quelque chose qui soit lié.

Cela étant, je ne pense pas que les mesures répressives doivent relever de la compétence de l'ARS. Je ne pense pas que nous ayons une police à ce niveau-là. Les mesures de police que nous avons, que ce soit en matière d'eau ou d'habitat, se font par délégation du préfet. Honnêtement, je ne vois pas pourquoi l'ARS aurait des compétences de police à ce niveau-là. C'est un point de vue personnel, nous n'en avons pas discuté au sein même de l'ARS.

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Clara de Bort, directrice générale de l'ARS de la Guyane

Pour ma part, je crois qu'il faut surtout s'intéresser à la qualité du service, quelle que soit la répartition des compétences.

Régulièrement, des Guyanais nous écrivent sur les réseaux sociaux parce qu'à côté de chez eux, une piscine n'est pas entretenue, que des travaux ont été interrompus par le confinement et que les moustiques se développent.

Il est parfois difficile pour eux de comprendre la répartition des compétences et surtout de savoir quoi faire.

Nous ne pouvons pas seulement leur expliquer que nous ne sommes pas compétents pour qu'en fin de compte, ils se rendent compte qu'on ne peut soi-disant rien faire parce que c'est dans un espace privé.

Le fait de ne pas pouvoir mettre à disposition facilement les outils, non pas pour assurer la sécurité des citoyens, mais pour signaler et faire intervenir qui de droit, est d'une complexité folle dans la lutte anti-vectorielle.

La population serait prête à aider, mais il faut croire que rien n'est fait, à travers ce prisme-là, sur le plan de l'organisation du droit et des compétences.

Peu importe qui fait, mais il faut que cela soit facile pour l'utilisateur final.

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Ramiati Ali, rapporteure

Le décret du 29 mars 2019 permet aux ARS de confier les mesures de lutte anti-vectorielle à des organismes privés, sur habilitation.

Où en est l'ARS de Martinique dans cette évolution réglementaire et pratique ?

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Olivier Coudin, directeur général adjoint de l'ARS de la Martinique

Pour l'instant, les discussions en sont vraiment à leurs débuts avec la CTM, puisque nous devons avancer de concert sur ce sujet. Nous avons clairement fait savoir à la CTM que nous souhaitions prendre cette orientation d'aller vers un opérateur et nous leur avons « ouvert » l'option de se positionner ou d'aller vers un opérateur privé.

Ces discussions ont été interrompues par la crise due à la Covid-19.

Pour l'instant, la CTM ne nous a pas clairement fait savoir qu'elle souhaitait devenir opérateur. Nous attendons sa réponse. Nous aurons ensuite à prendre une décision en fonction de cette réponse.

Nous avons quand même une inquiétude. Vous posez juste après la question des difficultés qui pourraient apparaître, liées à d'éventuelles résistances si nous confions ces missions à des entreprises privées. Notre première préoccupation est de trouver les entreprises privées qui seront en mesure de mener ces missions sur le territoire. Nous n'avons pas a priori d'entreprises que nous pouvons d'ores et déjà pressentir comme étant en mesure d'intervenir dans ce champ d'activité.

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Ramiati Ali, rapporteure

L'article 2 de l'arrêté du 23 juillet 2019 prévoit que l'ARS établit un programme annuel de surveillance entomologique, en concertation avec le préfet et les collectivités territoriales.

Comment avez-vous mis au point ce programme ? Pouvez-vous nous en présenter les grandes lignes ?

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Clara de Bort, directrice générale de l'ARS de la Guyane

Sur ce plan, les ambitions de notre équipe ne sont pas faciles à exprimer parce que nous ne sommes pas équipés. Je n'ai qu'un seul agent de catégorie C sur le sujet, il n'est donc pas possible de développer et même de penser un programme de surveillance entomologique. Ce n'est donc pour le moment pas possible de mettre toute l'énergie que nous voudrions.

Je vais être obligée de vous quitter parce que j'avais prévu de partir en réunion sur la Covid-19 à midi.

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Alain Blateau, directeur de la santé publique au sein de l'ARS de la Martinique

La surveillance entomologique va surtout s'adresser à l'introduction de nouvelles espèces qui pourraient être vectrices de maladies. Au niveau de la Martinique, nous sommes très sensibles à l'arrivée du moustique tigre ( Aedes albopictus ) qui est déjà dans la Caraïbe et pourrait nous arriver. C'est pour cela que nous avons une surveillance renforcée au niveau de tous les points d'arrivée en Martinique.

Une autre inquiétude est liée à l'apparition du virus du Nil occidental, transmis par le culex. Au niveau du CEDRE-LAV, nous avons des équipes sentinelles, puisque vous savez que le virus du Nil occidental a un passage chez les chevaux ou chez les oiseaux avant d'arriver à l'homme. Nous avons des oiseaux sentinelles, nous avons également un indice de surveillance avec les vétérinaires au niveau des chevaux. Tout cela constitue le système de surveillance entomologique.

Cette question est suivie par le CEDRE-LAV et activée en permanence.

Je ne sais pas si sous le terme surveillance entomologique, vous aviez une autre idée que celle à laquelle j'ai répondu.

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Ramiati Ali, rapporteure

Vous avez répondu, monsieur.

D'après vos observations, quels types d'installation posent le plus de problèmes ?

Les normes de construction sont-elles adaptées ? Selon vous, faut-il imaginer des normes de construction et des normes d'entretien afin d'éviter la création de gîtes larvaires ?

Qui pourrait avoir la charge du contrôle et de la police en matière de lutte contre les gîtes larvaires et avec quelle répression envisageable ?

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Alain Blateau, directeur de la santé publique au sein de l'ARS de la Martinique

Sur cette question, le référent aux Antilles se trouve en Guadeloupe. Le service de lutte anti-vectorielle de Guadeloupe a beaucoup travaillé sur les adaptations des normes de construction en matière de lutte anti-vectorielle.

Je ne voudrais pas parler pour ces collègues, vous pourriez leur poser la question. Ils ont beaucoup travaillé sur les gouttières, sur les canalisations souterraines, sur les regards et d'autres dispositions. Franchement, ils ont fait un travail remarquable et je pense qu'il faut les solliciter directement sur ce sujet.

Pour la police en matière de lutte contre les gîtes larvaires, dans le cadre de cette construction, il faut faire appel à la même police administrative que celle de la construction.

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Ramiati Ali, rapporteure

Merci, nous allons nous rapprocher d'eux, à moins que monsieur le directeur ait quelque chose à dire.

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Olivier Coudin, directeur général adjoint de l'ARS de la Martinique

Je précise juste qu'il s'agissait bien des communes et que de notre point de vue, c'est vraiment à ce niveau-là, au niveau de proximité, qu'il faut peut-être une action un peu coercitive, puisque les équipes qui vont sur le terrain se rendent compte que de passage à l'autre, elles retrouvent des retenues d'eau qui sont faites par les riverains et les mêmes difficultés. Dans les mêmes quartiers, elles retrouvent les mêmes pratiques favorables à la prolifération du moustique.

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Ramiati Ali, rapporteure

L'épidémie de dengue étant endémique dans vos territoires, quels sont les plans de gestion de crise que vous mettez en œuvre ?

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Alain Blateau, directeur de la santé publique au sein de l'ARS de la Martinique

La dengue est endémique dans nos territoires : nous n'avons pas un plan qui va se déclencher à un moment donné, mais un programme permanent de surveillance, d'alerte et de gestion des épidémies (PSAGE) de dengue, avec quatre différents niveaux. Nous sommes actuellement au niveau 4 de l'épidémie.

À chaque niveau, ce programme identifie des actions proportionnées au niveau épidémiologique.

Ce programme de surveillance est un document qui a été signé par les différents responsables, dont évidemment le préfet, le directeur général de l'ARS, mais aussi l'Association des maires de Martinique, les forces armées des Antilles, l'Union régionale des médecins libéraux, l'Union des biologistes de la Martinique, l'Ordre des médecins, l'Établissement français du sang, les centres hospitaliers et l'Institut Pasteur de Guyane.

Il s'agit d'un document fédérateur qui rassemble tous les intervenants et qui permet d'avoir une réponse graduée à la situation.

Ce document est vraiment la base de nos actions : il comprend aussi bien des actions de lutte anti-vectorielle que des actions de surveillance, des actions d'intervention au niveau de l'hôpital ou de prise en charge et des actions de communication.

Ce document est en vigueur depuis dix ans aujourd'hui, puisque la dernière version date de mai 2010, mais sa première version a été signée en 2004. Cela fait déjà plus de 15 ans que nous travaillons avec ce document.

Il a été revu à la suite de l'épidémie majeure de dengue que nous avons eue en 2010 aux Antilles, puis les épidémies de chikungunya et de Zika.

Ce document doit être remis à jour maintenant, parce que les épidémies de chikungunya et de Zika nous ont montré la nécessité d'avoir un programme de surveillance, d'alerte et de gestion des épidémies d'arboviroses d'une manière générale, qui inclurait la dengue, mais aussi le chikungunya et le Zika, avec un programme bien établi que nous avons déjà testé depuis 15 ans.

À côté de cela, nous aurions besoin d'un autre programme de surveillance, d'alerte et de gestion des émergences de nouvelles arboviroses. Nous pouvons aussi imaginer l'émergence d'autres épidémies comme la fièvre de Mayaro ou d'autres virus. À ce moment-là, il faut que nous ayons la capacité de détecter ces nouvelles épidémies dans un contexte où les autres arboviroses sont déjà endémiques.

Il s'agit de quelque chose de relativement complexe. Nous travaillons là-dessus avec Santé publique France. Une des priorités que nous avons au niveau de la santé publique est de réécrire le programme de surveillance, d'alerte et de gestion des épidémies d'arboviroses tout en travaillant sur les nouvelles émergences.

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Ramiati Ali, rapporteure

Lors de son audition, M. Fabrice Simon, chercheur à l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm), a alerté notre commission d'enquête sur le fait que nous avions pris du retard dans la gestion post-crise concernant les épidémies de chikungunya, notamment dans la réponse post-épidémique.

Qu'en pensez-vous ?

Est-ce vrai pour les autres épidémies ?

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Alain Blateau, directeur de la santé publique au sein de l'ARS de la Martinique

Je ne vois pas bien à quoi il est fait allusion. Il est vrai qu'avec le chikungunya, il y a des formes chroniques que nous avons un peu de mal à suivre, en particulier dans une population martiniquaise vieillissante, où les formes chroniques de douleurs articulaires, d'arthrite ou d'arthrose sont déjà particulièrement importantes en dehors du chikungunya.

Effectivement, il y a peut-être une difficulté à suivre les impacts à long terme du chikungunya. C'est peut-être quelque chose à creuser.

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Olivier Coudin, directeur général adjoint de l'ARS de la Martinique

Puisque vous posiez la question des autres épidémies, l'ARS assure un suivi pour les femmes enceintes qui ont accouché durant la période de l'épidémie de Zika et les enfants qui sont nés.

Sur le chikungunya, je rejoins complètement M. Blateau, c'est extrêmement difficile d'évaluer ce qui est attribuable aujourd'hui au chikungunya dans les douleurs chroniques que peuvent ressentir les patients martiniquais.

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Ramiati Ali, rapporteure

Vous avez évoqué votre collaboration avec Santé publique France. Ma question est de savoir quels sont vos rapports avec Santé publique France et comment fonctionne la cellule de Santé publique France qui se trouve au sein de l'ARS. Cette collaboration est-elle utile ?

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Olivier Coudin, directeur général adjoint de l'ARS de la Martinique

De mon point de vue, d'ailleurs partagé par mes deux collègues, la collaboration avec Santé publique France est de bonne qualité. Nous avons régulièrement, sur les différents sujets épidémiologiques, à travailler avec Santé publique France.

Santé Publique France et l'ARS sont également ensemble quand il s'agit d'avoir des échanges avec les établissements hospitaliers, avec la Caisse générale de Sécurité sociale (CGSS), avec les autres acteurs du territoire sur les sujets que nous avons en commun.

Nous avons une plateforme commune de veille sanitaire qui fonctionne également très bien, avec des réunions hebdomadaires pour faire le point sur la situation épidémiologique de la Martinique. L'échange d'informations se fait, y compris de manière informelle, sur des données précises qui doivent être publiées. Nous avons souvent des échanges avant même la publication de ces données régulières par Santé publique France.

Cette collaboration très étroite est fructueuse et utile et permet vraiment de travailler de concert sur ces aspects épidémiologiques, sur la veille comme sur les actions à mener pour pouvoir faire face aux épidémies et aux maladies qui peuvent toucher le territoire.

De mon point de vue, c'est une très bonne collaboration de bonne qualité qui s'est confirmée et qui continue d'ailleurs à se confirmer avec la crise due à la Covid-19, puisque nous travaillons vraiment de manière très étroite sur tous les évènements liés à la crise, et ce depuis le début de cette crise.

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Alain Blateau, directeur de la santé publique au sein de l'ARS de la Martinique

Nous avons une organisation très ancienne en Martinique, depuis la création de l'ARS, qui consiste à avoir un lien privilégié avec Santé publique France.

Nous faisons des réunions de plateformes tous les jeudis matin pour étudier tous les signaux de la semaine et pour voir la situation épidémiologique sur tout un tas d'autres pathologies que nous suivons. Cela va de la grippe à la varicelle en passant par les conjonctivites, la dengue ou les autres arboviroses.

Il y a vraiment une collaboration sans faille depuis plus de dix ans qu'existe l'ARS. C'est un appui particulièrement important pour la validation des données, pour avoir des informations fiables sur lesquelles nous pouvons nous appuyer pour bâtir ensuite une gestion efficace.

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Olivier Coudin, directeur général adjoint de l'ARS de la Martinique

Santé publique France a des compétences que nous n'avons pas à l'ARS.

Une complémentarité s'établit entre les compétences que nous avons à l'ARS et les compétences qui sont réunies à Santé publique France du fait de leurs choix de recrutement qui leur permettent d'avoir des médecins épidémiologistes, des spécialistes du sujet de la santé publique que nous avons aussi à l'ARS, mais avec des profils un peu différents.

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Ramiati Ali, rapporteure

Quelles évolutions institutionnelles, mais également en termes de moyens humains et techniques préconiseriez-vous pour une plus grande efficacité et réactivité ?

L'ARS Martinique devrait-elle avoir, du fait de sa spécificité territoriale, des compétences et/ou des moyens spécifiques ?

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Alain Blateau, directeur de la santé publique au sein de l'ARS de la Martinique

Aujourd'hui, notre difficulté porte sur cette gouvernance partagée qui montre parfois ses limites.

Nous avons une collectivité territoriale de Martinique qui est une collectivité avec des décisions qui sont techniques et administratives, mais aussi des décisions politiques avec des élus de cette CTM qui ont aussi besoin, ponctuellement, de marquer le terrain et de marquer les esprits politiquement. Nous nous situons uniquement sur un terrain technique, administratif et de recherche de l'intérêt général.

Cette double appartenance, avec parfois des hésitations du côté de la CTM et parfois des aspects qui peuvent interagir et qui nous échappent un peu, peut avoir un impact sur la clarté des positions à prendre.

Nous défendons le fait que l'État, sur ces sujets de LAV, puisse être en pilotage, en coordination et en animation pour que nous puissions donner des orientations claires et que ces orientations claires puissent ensuite être déclinées en termes d'actions concrètes et d'actions de terrain et d'opérationnalité.

Les moyens dont nous souhaiterions disposer sont ceux de pouvoir définir clairement les orientations politiques et stratégiques dans la lutte anti-vectorielle.

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Alain Blateau, directeur de la santé publique au sein de l'ARS de la Martinique

Je pense qu'il faut faire attention à tout ce qui concerne les moyens humains. Actuellement, nous avons une vingtaine d'agents. Pour une moitié, ce sont des techniciens et pour l'autre des adjoints sanitaires.

Si nous recentrons les activités de l'ARS sur les questions de pilotage, de stratégie et d'animation, nous allons avoir un changement des métiers de la lutte anti-vectorielle.

Les agents les plus récemment recrutés ont des profils sur lesquels nous allons pouvoir avoir une évolution et une progression de compétences.

Par contre, pour un certain nombre d'agents, un peu plus anciens, nous n'aurons pas de solution pour eux si nous nous recentrons sur le pilotage et la stratégie. Il est vrai que le corps des adjoints sanitaires est un corps en phase d'extinction, mais il faut quand même être vigilant, dans le cadre du changement des métiers en matière de lutte anti-vectorielle.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je vous remercie beaucoup, madame et messieurs, pour cette audition riche d'enseignements.

La réunion s'achève à dix-sept heures trente.

Membres présents ou excusés

Commission d'enquête chargée d'évaluer les recherches, la prévention et les politiques publiques à mener contre la propagation des moustiques Aedes et des maladies vectorielles

Réunion du mercredi 10 juin 2020 à 16 heures

Présents. – Mme Ramlati Ali, Mme Sereine Mauborgne

Excusés. – Mme Ericka Bareigts, M. Alain David, M. Jean-Philippe Nilor, M. Jean‑Hugues Ratenon