J'aimerais rebondir sur les interventions de Mme Voy-Gillis, qui m'ont semblé très intéressantes. Tout d'abord, je souligne que la baisse des impôts de production a été compensé et les dotations des collectivités sont parfaitement stables depuis quatre ans, et qu'elles seront maintenues au même niveau en 2022.
Nous avons encore une marge de progression au niveau des impôts de production mais la question centrale est le financement des pertes de recettes sur le budget de l'État – nous avons commencé à y travailler dans le plan Industrie 2025.
Je pense que pour que le dialogue social prenne son essor, il faudra restaurer la confiance. D'après le dernier baromètre social qui vient d'être publié, 62 % des Français n'accordent pas leur confiance aux syndicats. Ils n'en voient même pas l'utilité. Une obligation à se syndiquer serait équivalente à mes yeux à rendre le vote obligatoire aux élections politiques.
Bien entendu, il ne s'agit pas de recréer l'industrie du passé mais de penser l'industrie du futur, compte tenu des contraintes environnementales et technologiques. Vous avez évoqué la territorialisation de l'industrie, qui répond certes à une logique environnementale mais qui dépend aussi de mécanismes économiques comme les interactions entre les prix et les salaires. Le fait de réinternaliser certaines industries pourrait entretenir l'inflation, structurellement, car les boucles prix-salaires pourraient s'installer et devraient être traitées au niveau européen.
Votre collègue Philippe Aghion en parle beaucoup, mais j'aimerais connaître votre opinion au sujet de l'idée de créer une agence pour les projets de recherche avancée de défense – Defense Advanced Research Projects Agency (DARPA) à l'européenne. Le modèle américain a montré qu'il était possible de mieux faire sur les innovations de rupture, et d'accélérer le développement des industries du futur. Mais nous ne pourrons certainement pas obtenir ce résultat seuls au niveau français.
Pouvons-nous nous passer d'un État stratège ? Je ne le pense pas. Je pense également que nous devons prendre nos distances avec l'héritage gaulliste et que nous construisions des modèles plus actuels. Pourquoi le plan de 30 milliards d'euros d'investissement est-il aussi long à mettre en place ? Parce que la France n'est pas toute seule pour le construire. Lorsqu'il s'agit de financer la fabrication de batteries pour voitures électriques, nous devons en discuter avec l'Allemagne. Airbus n'est pas un succès purement français, mais européen.