Intervention de Olivier Bogillot

Réunion du jeudi 7 octobre 2021 à 17h30
Commission d'enquête chargée d'identifier les facteurs qui ont conduit à la chute de la part de l'industrie dans le pib de la france et de définir les moyens à mettre en œuvre pour relocaliser l'industrie et notamment celle du médicament

Olivier Bogillot, président de Sanofi France, président de la Fédération française des industries de santé (FEFIS), président du comité stratégique de filière des industries et technologies de santé (CSF-ITS) :

Le portefeuille de Sanofi est de nature très diverse : il comporte de l'automédication, de la médecine générale, de la médecine de spécialité (sur des populations très ciblées et avec des produits très pointus) et des vaccins. Je souhaite souligner que la relocalisation de principes actifs ne doit pas uniquement concerner les médicaments issus de la chimie essentiels et peu coûteux. Il faut aussi prévenir une dépendance sur les produits innovants, les médicaments de demain, qui sont souvent produits aux États-Unis ou dans d'autres pays. Les interleukine-6 sont produits aux États-Unis. S'ils fermaient leurs frontières comme l'ont fait les Chinois, cela créerait une dépendance sur une molécule innovante. Il faut également considérer leur relocalisation.

75 % des principes actifs de médecine générale de Sanofi, ainsi que 57 % des médicaments de spécialité et 15 de nos 17 vaccins sont produits en Europe. Concernant les produits finis, 70 % de nos médicaments de médecine générale, un tiers de nos médicaments de spécialité et 70 % de l'automédication sont produits en France, et quasiment la totalité en Europe.

Sanofi a fait le choix de ne pas délocaliser sa production, en ventilant son risque en Europe grâce à des productions en Allemagne – où se trouve notre premier centre de production d'insuline –, en Italie, en Pologne, en Hongrie et en Espagne. Cela nous permet d'être peu dépendants des principes actifs produits en Asie ou en Inde. Mais la production de médicaments de spécialité y est plus faible, car ce sont des médicaments très innovants qui proviennent davantage des États-Unis, y compris dans le portefeuille de Sanofi. Le dynamisme autour des sciences du vivant se situe actuellement en Chine pour l'innovation et beaucoup aux États-Unis.

Dans le CSIS, le Président de la République propose une logique de pôle d'innovation ou cluster. La France ne possède aucun cluster de taille mondiale. 5 des 10 premiers clusters mondiaux sont américains. Boston notamment génère 70 milliards de dollars de chiffre d'affaires sur 6 kilomètres carrés. À San Diego, 900 entreprises travaillent ensemble sur des technologies innovantes autour des sciences de la vie. Il y a le Maryland, il y a New York. La France doit disposer de deux ou de trois clusters de taille mondiale. Sanofi s'est engagé en vue de la création d'un cluster avec l'Université Paris-Saclay, l'École Polytechnique et l'Institut Gustave Roussy autour de la cancérologie. Il rassemble les meilleurs mathématiciens, cliniciens, et spécialistes des données (data scientists), ainsi que notre expertise industrielle pour inventer les meilleurs médicaments de demain, dans cette aire thérapeutique particulière.

Maintenir ces usines de production en Europe offre des capacités de réinvestissement dans les usines. Le premier investissement dans une usine est très important à long terme. C'est que ce que comprennent très bien les Américains, les Canadiens ou Singapour. Ils savent que quand on installe une usine, on en a pour 30 à 40 ans et qu'il s'agit d'un bon investissement sur le long terme. Entre 2019 et 2021, Sanofi a consacré 1,3 milliard de dépenses d'investissement (capital expenditure) à ses usines françaises. Il s'agit d'un montant considérable que nous avons en quelque sorte payé deux fois. Nous aurions pu délocaliser ! Nous sommes restés dans un environnement fortement régulé, avec des niveaux d'imposition plus forts, avec des impôts de production élevés. Mais nous pensons que notre société a un rôle à jouer dans les territoires ET maintenir un taux d'emploi fort. J'aurais parfois apprécié que la puissance publique et l'opinion publique le reconnaissent davantage. L'opinion publique est parfois un peu dure avec Sanofi…

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