Intervention de Antoine Reveilleau

Réunion du jeudi 28 octobre 2021 à 11h30
Commission d'enquête chargée d'identifier les facteurs qui ont conduit à la chute de la part de l'industrie dans le pib de la france et de définir les moyens à mettre en œuvre pour relocaliser l'industrie et notamment celle du médicament

Antoine Reveilleau, président de Seratec, administrateur de Polepharma :

Les producteurs de principes actifs sont peu nombreux au sein de Polepharma, soit une douzaine sur environ 360 d'adhérents. De plus, peu d'entreprises ont des capacités de chimie thérapeutique – c'est-à-dire orientées sur les principes actifs pharmaceutiques – du développement de la molécule à sa mise sur le marché. Par ailleurs, dans ce domaine fortement réglementé, l'échelle est plutôt européenne ou internationale, avec par exemple des syndicats et des fabricants européens, tels que l' Active Pharmaceutical Ingredients Committee (APIC).

Seratec est une entreprise familiale initialement destinée à des produits de biochimie. Ma formation de pharmacien m'a amené à travailler avec l'assistance publique, pour couvrir des besoins de médicaments indisponibles sur le marché. Nous avons développé une activité de procédés de fabrication et de contrôle pour de « petites fabrications ». Cette activité de synthèse à façon s'est développée en Europe et sur le marché américain, nous amenant à construire notre propre usine dans l'Eure-et-Loir en 2003. Notre clientèle à l'export nous demandait, jusque dans les années 2000, des certifications de bonnes pratiques que nous ne pouvions pas obtenir en France, mais uniquement, bien plus tard lorsque qu'un régime de déclaration puis d'autorisation a été mis en œuvre, en particulier auprès de l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM). À l'époque, la seule instance à même de nous auditer et de nous fournir des accréditations était la Food and Drug Administration (FDA), agence fédérale américaine des produits alimentaires et médicamenteux. Les années 2000 ont été majeures pour l'élaboration de lignes directrices internationales dans l'activité de chimie pharmaceutique, avec le conseil international d'harmonisation des exigences techniques pour l'enregistrement des médicaments à usage humain ( International Conference of Harmonisation – ICH) entre l'Amérique du Nord, l'Europe et le Japon. Nous nous sommes démarqués grâce à notre capacité d'innovation alliée à un niveau de contrôle et d'assurance qualité d'excellence – c'est-à-dire supérieur aux niveaux requis. Notre succès tient également au fait que nous offrons à nos clients une solution clé en main, du développement de la molécule à la rédaction des dossiers, afin de protéger nos savoirs.

En outre, la concurrence asiatique a évolué, avec une nette progression en termes de qualité. Certaines installations asiatiques sont désormais performantes. Néanmoins, l'Asie a profité de la désindustrialisation de l'Europe lorsqu'elle était dans une logique « moins-disante » (sur le volet économique, environnemental et qualité), conduisant à son accaparement des marchés. Aujourd'hui, c'est cette capacité globale (du développement expérimental à la mise sur le marché et à la commercialisation) qui est l'élément différenciant assurant le succès de mon entreprise, au-delà de l'assurance qualité et de l'expertise scientifique.

Je dirige Seratec – que je détiens totalement – depuis trente ans, qui regroupe une quarantaine de personnes et génère 4,5 millions d'euros de chiffre d'affaires. Nous avons eu quatre opportunités de molécules innovantes, qui ont très souvent été vendues à des sociétés du National Association of Securities Dealers Automated Quotations (NASDAQ). Nous intervenions du développement expérimental à la mise sur le marché, mais nous rencontrions des difficultés lors de l'étape de la fabrication industrielle. D'une part, elle demandait un investissement trop important à supporter et, d'autre part, les prix indiens étaient largement inférieurs aux nôtres. La difficulté, aujourd'hui, est de pouvoir porter le développement de la molécule – qui génère de l'innovation – jusqu'à sa commercialisation. Polepharma permet de trouver des partenariats – à tous niveaux, scientifique, logistique, et y compris pour l'emballage – et de constituer des réseaux. Nous perdons souvent des produits innovants, car ils sont captés lors de la phase d'industrialisation. Nous devons parvenir à valoriser nos savoir-faire de mise à disposition de principes actifs de la meilleure qualité possible.

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