Intervention de Yann Renault

Réunion du jeudi 17 septembre 2020 à 9h00
Commission d'enquête pour mesurer et prévenir les effets de la crise du covid-19 sur les enfants et la jeunesse

Yann Renault, vice-président Éducation populaire du Comité pour les relations nationales et internationales des associations de jeunesse et d'éducation populaire (CNAJEP) :

Je vous remercie pour cette commission d'enquête sur la question des enfants et des jeunes. Il me semble essentiel aujourd'hui de regarder l'impact de la crise du covid-19 par ce prisme et c'est ce dont j'essaierai de rendre compte.

Le CNAJEP regroupe 75 organisations de jeunesse et d'éducation populaire. Il s'adresse donc à différents publics : les enfants, les adolescents, les jeunes et les familles. Il nous semble essentiel de parler ici, aujourd'hui, de ces quatre publics.

Les membres du CNAJEP ont pris de nombreuses initiatives pendant et après le confinement pour animer un contact permanent avec les enfants et les jeunes dans l'ensemble des territoires. Ils ont bien sûr aussi pris part à l'accueil quotidien lors du confinement des enfants de soignants ou des personnels réquisitionnés. Dans le cadre du déconfinement, ils ont participé avec les pouvoirs publics à l'accueil des enfants et des jeunes aux côtés de l'école, après l'école et durant les vacances d'été. Ces vacances sont également une période post-confinement importante à examiner. Nous sommes en septembre, étudier les vacances d'été est encore compliqué, mais la période sera à regarder de près.

Trois sujets principaux ont émergé : le premier sujet, que nous avons appelé « En famille », concerne la question des relations intrafamiliales ; le deuxième sujet s'intitule « Inégalités ». Cette crise, au-delà de peut-être amplifier des inégalités, a révélé des inégalités qui préexistaient, et c'est un élément à prendre en compte. Enfin, le troisième sujet porte sur la « Vie sociale », pendant le confinement et après le confinement.

Nous aurons des propositions à faire, mais je propose que nous en parlions lors des échanges plutôt que lors du propos liminaire.

Regardons cette crise au prisme de ce que nous ont dit les enfants et les jeunes, puisque le CNAJEP et ses membres ont animé du lien, des enquêtes et des espaces d'expression tout au long du confinement, pour recueillir la parole des enfants et des jeunes sur ce qu'ils vivaient. Nous ne dressons pas un tableau tout à fait noir de cette période.

Sur le thème « En famille », soyons conscients que des enfants étaient très contents de passer du temps avec leurs parents, de les voir enfin, car la question du travail des parents et de la conciliation entre la vie familiale et la vie professionnelle n'est pas toujours simple dans un certain nombre de familles. Par contre, les enfants ont passé du temps en famille dans des logements trop petits, où la promiscuité était forte, où les espaces pour souffler étaient inexistants. Ceci a créé des situations de relations intrafamiliales extrêmement tendues, voire plus.

Toutefois, les enfants nous renvoient aussi le message que la famille est plus large que les relations familiales de proximité, qu'elle inclut aussi les grands-parents. Ne pas pouvoir voir les grands-parents a été pour les enfants un moment difficile, ainsi que de ne pas pouvoir faire le deuil en famille, en proximité, lorsque l'une des personnes de la famille décédait. L'impact psychologique sur les enfants est sans doute à étudier de près.

Sur le sujet des inégalités, révélées ou amplifiées, j'insisterai sur deux inégalités, et d'abord sur l'inégalité de l'accès au numérique. Nous avons parlé de la question de l'école. Enfants et parents nous renvoient que suivre les cours a été, pour certains, un parcours du combattant.

Evoquons également l'inégalité numérique dans l'accès aux loisirs. Le numérique est devenu pendant le confinement un espace d'accès aux loisirs. Les associations membres du CNAJEP ont proposé, tout au long du confinement, des ateliers, des mises en relation d'enfants, des discussions à visée philosophique. Ces initiatives ont permis à la fois de faire des activités en famille et de faire se rencontrer des enfants par le biais du numérique. Cette rupture numérique fait que certains enfants y avaient accès et d'autres moins.

Cette inégalité numérique vient du matériel, des logiciels, mais aussi des connexions. Après cette crise, nous devons nous interroger sur la 5G. J'entendais encore ce matin des opérateurs dire que, si les prix étaient trop hauts, ils ne pourraient pas équiper l'ensemble du territoire. Si tel est le cas, cette rupture numérique sera encore plus forte demain.

Nous constatons également des inégalités dans l'emploi, l'insertion professionnelle. Les plus touchés sont les jeunes. Le public le plus précaire s'est encore plus précarisé.

Enfin, sur le sujet « Vie sociale », des ruptures ont eu lieu dans l'accès aux loisirs, à tous les loisirs, qu'ils soient sportifs ou culturels. C'est un espace de vie sociale important pour les enfants, les adolescents et les jeunes. Nous notons également une rupture des engagements qu'il nous faut regarder de près : rupture des engagements de jeunes impliqués dans des associations, de jeunes en service civique, malgré l'animation, de jeunes qui préparaient des projets pour l'été avec des amis.

En contrepartie, de nouvelles formes d'engagement sont apparues ainsi que des accélérations de l'engagement de certains jeunes pour prêter main-forte aux pouvoirs publics. C'est un double aspect, mais cet engagement qui s'est créé pendant le confinement est souvent un engagement individuel alors que les ruptures d'engagement ont été des ruptures d'engagement collectif. Nous souhaitons alerter sur cette question.

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