Mon propos rejoint certains points évoqués par la FCPE. La continuité pédagogique a été mise en œuvre de manière très inégale d'un enseignement à l'autre et d'un établissement à l'autre. Les enseignants en autorisation spéciale d'absence ou malades n'étant pas remplacés, certains enfants sont restés totalement sans cours. Nous avons eu l'impression de ne pas avoir été assez accompagnés par le corps d'inspection sur la mise en œuvre de cette modalité d'enseignement, qui s'avère complexe et pas nécessairement adaptée à tous les enfants.
Abordons à présent les problèmes de moyens matériels et d'accès aux différents supports et plateformes. Pour les familles, il était très compliqué d'articuler télétravail et accompagnement scolaire. Sans compter les familles qui n'en avaient ni les moyens matériels ni les moyens intellectuels au sens large, ne serait-ce que par la barrière de la langue, par exemple. En temps normal, le monde de l'éducation est déjà très compliqué à appréhender pour la plupart des familles. Les difficultés ont augmenté avec le nombre d'enfants dans la fratrie. L'on n'équipe pas un enfant de 3 ou de 8 ou 9 ans d'un ordinateur portable personnel. En outre, nos équipements internet familiaux ne sont pas conçus pour supporter trois, quatre ou cinq connexions internet à haut débit, telles que le demandent les visioconférences. D'autres supports pédagogiques comme Lumni ont été mis en œuvre. Cela dit, les enseignants n'étaient pas non plus accompagnés pour apprendre à s'en servir comme support. Ces dispositifs n'ont donc pas ou peu été exploités.
Nombre de leçons pourraient être tirées de cette période. Pourtant, beaucoup trop souvent, les remarques des familles ont été perçues comme des reproches par les enseignants, ce qui n'a pas permis d'essayer de construire ensemble des solutions mieux adaptées au cas où nous aurions à nouveau besoin d'instaurer cette continuité pédagogique à distance. Elle pourrait aussi servir aux enfants malades et leur permettre de poursuivre, à distance, leurs enseignements avec leurs camarades.
La gestion de la crise Covid-19 fut difficile à comprendre pour les familles, particulièrement lors du retour à l'école. Les incompréhensions furent nombreuses, de même que les angoisses. Certaines familles souhaitaient que leurs enfants retournent à l'école, mais s'en voyaient refuser l'accès. D'autres ne le souhaitaient pas, soit par manque d'informations, mais aussi parce que les organisations proposées étaient parfois anxiogènes, voire très complexes ou totalement infernales pour les familles. Différents enseignants pouvaient se succéder sur la même semaine, ou n'être présents que quelques demi-journées.
Le travail avec les représentants de parents fut quasi inexistant. Celui-ci s'effectuait au bon vouloir des mairies pour les écoles et des chefs d'établissement pour les collèges. Il en est de même avec les inspecteurs d'académie, les recteurs, les préfets, qui ont étroitement travaillé avec les maires, mais pratiquement jamais avec les parents, alors que nous recevions de nombreuses questions des familles, que nous connaissons bien les établissements et que nous étions en mesure de soumettre des propositions.
Nous regrettons aussi que cette crise sanitaire n'ait toujours pas permis aux collectivités territoriales de prendre conscience du manque crucial d'hygiène dans les locaux, en particulier pour les structures de moyenne et de grande importance, qui sont sous-dotées en sanitaires. Les collectivités disposaient de tout l'été pour engager des travaux, mais rares sont celles qui en ont véritablement profité pour rénover des sanitaires en mauvais état ou en créer d'autres pour augmenter leur nombre.
Les parents s'interrogent sur la position des adultes, qui continuent d'exiger que les élèves se déplacent à chaque interclasse, plutôt que les enseignants. Pourtant, cette solution présente beaucoup d'autres vertus, en matière sanitaire, mais aussi sur le plan pédagogique, en évitant que les élèves ne courent dans les couloirs, avec parfois un cartable très lourd sur le dos.
La non-reprise en lycée général suscite également de l'incompréhension, alors que certains élèves avaient besoin de préparer l'entrée dans l'enseignement supérieur. Nous regrettons aussi l'absence de réel travail pour le lycée professionnel, contrairement aux annonces.
La place des élèves est à l'école, avec leurs enseignants, et non devant des écrans, quels qu'ils soient. Néanmoins, nous devons imaginer des solutions mieux adaptées lorsque la situation contraint à la mise en place de l'enseignement à distance. À cet égard, il nous semble que l'on ne prend pas le recul nécessaire et que l'on ne cherche pas à co-construire cette modalité pédagogique de substitution, alors qu'elle pourrait aussi être envisagée – par exemple – pour mieux scolariser les enfants malades.
La place des représentants de parents doit être réaffirmée. Ils connaissent les locaux et sont des relais auprès des familles, surtout lorsqu'elles sont éloignées de l'école. Dans l'enseignement public, ce sont aussi des élus de la République comme les autres, et il devient urgent de les reconnaître comme tels.