Nous avons dressé un constat alarmant à propos de la rentrée de 2020, que ce soit ma collègue du SNICS ou ma collègue du SNIES. Nous avons également identifié plusieurs difficultés.
Tout d'abord, nous avons observé une régression psychoaffective de certains enfants. Après six mois d'arrêt, cette rentrée a été complexe et a mis en exergue une régression psychoaffective chez certains enfants en école élémentaire et en début de collège. Cette régression a engendré des comportements de surattachement familial et des troubles socio-comportementaux. Des enfants avaient des difficultés à quitter leur maman, ce qui a pu engendrer des absences qui ont ensuite dégénéré en décrochage scolaire.
Nous avons également repéré un accroissement des phobies scolaires, en lien avec des troubles psychologiques préexistants ou qui sont apparus lors de cette rentrée 2020.
Nous avons également constaté des conflits familiaux et des incompréhensions intergénérationnelles. Les entretiens infirmiers à notre initiative et demandés par la communauté éducative ou les élèves eux-mêmes, ont révélé les conséquences de cette pandémie en soulevant des problématiques de conflits intrafamiliaux ou d'incompréhension intergénérationnelles.
Nous avons aussi repéré un point qui est très important dans nos missions, il s'agit des violences intrafamiliales. Nous entendons de plus en plus souvent dans nos infirmeries et depuis la rentrée des enfants qui nous demandent de ne pas alerter leurs parents. Cela révèle un renforcement du conflit de loyauté, mettant à mal la dénonciation de violences ou de négligences parentales.
Nous avons aussi observé des mutilations, de plus en plus de mutilations. Elles traduisent des souffrances psychologiques qui explosent. Ce mal-être est souvent incompris, voire inconnu des parents. Ces derniers sont débordés, angoissés par leur activité professionnelle ou leur situation financière, en lien avec la crise sanitaire.
L'augmentation des comportements à risque (tabagisme, consommation de stupéfiants) est un autre point relevé chez les élèves, plutôt en fin de collège et au lycée. Nous le relions à un délabrement psychique, avec une crise identitaire majorée pendant ce confinement et qui ne pouvait pas trouver d'écho auprès des pairs. Le confinement a vraiment révélé des impossibilités pour les jeunes de communiquer leur mal-être entre eux.
Nous avons aussi repéré pour certains l'appréhension d'une consultation de santé. Comme l'a souligné ma collègue, le contexte de crise sanitaire exacerbe les craintes. La crainte d'aller voir le médecin, qui était déjà présente chez certains, a été renforcée par la peur de se faire contaminer en se rendant à une visite, voire de saturer les services de santé.
Les délais trop longs de disponibilité des professionnels de santé engendrent souvent des reports et des annulations, qui peuvent provoquer des aggravations de pathologie chez des enfants qui ont besoin d'être suivis.
Je pense qu'une solution qui pourrait être envisagée serait la prescription infirmière. Elle devrait être inscrite dans le Code de santé publique et serait à prévoir pour certains soins et dispositifs tels que les vaccins, les préservatifs, les dépistages de maladies sexuellement transmissibles, ou les tests de grossesse. Cette solution répondrait à des situations observées couramment dans les infirmeries et permettrait d'élargir l'accès aux soins et de réduire les zones blanches médicales.