Intervention de Yasmine Degras

Réunion du jeudi 29 octobre 2020 à 14h15
Commission d'enquête pour mesurer et prévenir les effets de la crise du covid-19 sur les enfants et la jeunesse

Yasmine Degras, cheffe de la mission mineurs non-accompagnés au sein du ministère de la justice :

En effet, je suis responsable de la mission portant sur les mineurs non-accompagnés au sein de la direction de la protection judiciaire de la jeunesse (DPJJ) du ministère de la justice. A ce titre, nous avons essentiellement un regard sur ce qui relève de la répartition nationale de ces mineurs.

Une fois que des personnes se sont présentées auprès des conseils départementaux pour être mises à l'abri, leur minorité et leur isolement sont évalués par les services des conseils départementaux ou par les associations habilitées. Lorsque la minorité est déterminée, le procureur de la République du lieu où la personne a été évaluée est saisi.

Notre mission débute à ce moment-là. Nous sommes saisis par le parquet en tant que cellule nationale d'orientation, qui a pour objectif de répartir l'ensemble de ces jeunes et de ces enfants sur tous les conseils départementaux du territoire hexagonal. L'objectif premier est de faire jouer la solidarité nationale afin que ces jeunes ne soient pas systématiquement pris en charge là où ils ont été identifiés.

La répartition est effectuée selon une clé attribuée à chaque territoire. La consultation des rapports d'évaluation nous permet d'amender cette répartition mécanique. Pour ce faire, nous cherchons dans ces rapports des éléments qui nous permettraient de trouver un lieu de prise en charge plus adapté à leurs besoins et à leur intérêt.

Par exemple, dans le cas d'un jeune pour lequel on constate dans le rapport d'évaluation qu'il a eu des problèmes de santé pendant la période de mise à l'abri, que des soins ont débuté, on proposera au parquet, si cela est possible, de maintenir ce jeune sur le lieu où il a déjà passé plusieurs jours, plusieurs semaines, voire plusieurs mois.

Dans d'autres situations, on pourra identifier qu'un jeune a fait état d'alliés ou de parents dans un des territoires de l'hexagone. Tout en maintenant l'équilibre de cette clé, on préconisera au parquet, qui se chargera de prendre la décision finale, de procéder à un placement dans tel territoire qui serait le plus adapté.

Evidemment, on ne travaille qu'avec les éléments que l'on peut recueillir dans le rapport d'évaluation. C'est pour cela que nous sommes très liés à tous les travaux interinstitutionnels et interministériels, qui ont, l'année dernière, eu notamment pour objet d'aboutir à une évaluation qui soit la plus pertinente, la plus complète et la plus homogène possible sur le territoire national. Ces travaux permettent de recueillir tous les éléments qui sont utiles non seulement à l'orientation, mais aussi à la prise en charge sur le lieu où le jeune sera placé.

Cette mission que je dirige est composée de cinq personnes chargées de mission. Elle n'a pas institutionnellement à connaître ce qu'il se passe avant que le rapport d'évaluation soit finalisé. Elle est sollicitée exclusivement par le parquet. Elle rend sa recommandation au parquet, qui décide de suivre les propositions que nous lui faisons. Très clairement, nos propositions d'orientation sont suivies dans 99,99 % des cas.

Lorsque ces jeunes sont pris en charge par leurs conseils départementaux d'orientation, nous, protection judiciaire de la jeunesse (PJJ), n'avons plus à les connaître, puisqu'une prise en charge débute alors dans le cadre de la protection de l'enfance et en matière civique.

En revanche, cette clé de répartition a quand même un intérêt pour nous et pour les institutions avec lesquelles nous travaillons, que ce soient les conseils départementaux, le ministère de la santé et des solidarités, la direction générale de la cohésion sociale (DGCS), voire le ministère de l'intérieur.

L'intérêt est que nous sommes à une place, je ne dirais pas centrale, mais qui est en quelque sorte un réceptacle des difficultés que peuvent rencontrer un certain nombre de conseils départementaux et de juridictions. Même si cela ne fait pas nécessairement partie de notre portefeuille d'interventions, nous avons des remontées sur des situations difficiles dont nous faisons part à l'ensemble de nos partenaires. Cela peut être par exemple des services de conseils départementaux qui évoquent des saturations dans leurs dispositifs d'accueil et de mise à l'abri, ou qui éprouvent des difficultés dans leurs services de prise en charge.

Nous recueillons des éléments de façon quasi informelle à la faveur des échanges que les chargés de mission entretiennent avec l'ensemble des départements pour vérifier que tous les jeunes pour lesquels il y a eu une prise en charge ont bien été enregistrés. Tous ces éléments qui nous permettent chaque mois de vérifier l'équilibre de cette clé de répartition nous donnent également un paysage global sur ce qu'il se passe au niveau national avec des remontées qui ne sont pas objectivables mais qui nous donnent quelquefois un sentiment ou une tonalité.

Au sein de la mission MNA, nous établissons chaque mois une alerte, c'est-à-dire un état global de la situation de notre cellule nationale et de la mission. Nous disposons également de retours plus ou moins étayés concernant les départements.

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