Je pense à la suppression de la réserve parlementaire que vous, membres de la majorité, nous avez imposée alors qu'elle permettait d'aider, à hauteur de 45 millions d'euros, les associations pour mettre en place des projets structurants. Elle n'était pas la seule source de financement ni même suffisante pour faire vivre les associations bénéficiaires, mais elle était salutaire pour les plus petites. L'affectation de 25 millions d'euros au Fonds pour le développement de la vie associative est loin de compenser cette perte. On a beau refaire les calculs dans tous les sens, on est loin du compte. Pour faire simple, les crédits dont bénéficiaient les petites structures ont été divisés par deux.
Le crédit d'impôt de taxe sur les salaires a été transformé, dans le projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2018, en baisse des cotisations pour les organismes non lucratifs qui ont des salariés. C'est évidemment une aide salutaire. Toutefois, par définition, ce soutien financier ne touche pas les petites associations, qui ne peuvent pas avoir de salariés. Il s'agit donc, encore une fois, d'une mesure qui contribue à renforcer la fracture territoriale au détriment des territoires ruraux et de ce que d'aucuns nomment « la France périphérique ».
S'agissant de la crise des vocations, je l'ai dit, si le bénévolat reste fort, il stagne avec les années et est très inégal entre petites et grandes associations. Ce manque de moyens humains, ce sont les plus modestes qui le subissent, notamment les associations qui avaient recours aux contrats aidés. Aujourd'hui, celles-ci ne savent pas encore comment continuer. Pour faire face à ce manque de personnel, je propose de créer un contrat de travail associatif, afin de permettre aux associations de continuer à embaucher partout où elles pallient l'absence de l'État.
C'est aussi en voyant leur travail facilité que les associations pourront plus facilement recruter des salariés comme des bénévoles. Vous proposez la professionnalisation de l'action associative, c'est-à-dire une amélioration des conditions de travail, grâce à un meilleur partage des bonnes pratiques et en dotant les associations d'outils pour mieux organiser leur activité. Pourquoi pas ?
Ce n'est cependant pas suffisant, car l'engagement a évolué au cours des dernières années. Il est plus diffus, à la carte et plus marqué par une aide ponctuelle. Ceux qui s'impliquent au quotidien, comme c'était le cas auparavant, se font de plus en plus rares. La réflexion à laquelle vous invitez le Parlement et la société civile doit donc porter sur le sens de l'engagement associatif et sur tout ce qu'il peut apporter en termes d'enrichissement personnel à ceux qui se consacrent à ces activités.
Cette réflexion doit également viser à faciliter concrètement la vie de ceux qui veulent avoir un engagement citoyen et solidaire auprès de publics en difficulté, par exemple, pour les salariés, par l'aménagement de leur temps de travail. Avoir plus de souplesse dans sa journée en négociant du temps avec son employeur, c'est avoir toutes les cartes en main pour concilier engagement bénévole et vie professionnelle.
C'est notre rôle d'élus de la République de penser aux solutions qui nous permettront d'enrayer la crise du bénévolat. Tous ceux qui ont envie d'aider ou de fournir une activité concrète à destination d'autrui devraient savoir comment s'engager. Nous avons encore beaucoup de travail à fournir pour améliorer l'information, inciter à s'engager et faire en sorte que tout le monde puisse s'impliquer dans une cause dès le plus jeune âge. On peut d'ores et déjà envisager de mieux intégrer le bénévolat dans les cursus obligatoires à l'école, de mieux sensibiliser à toutes les options ou de mieux présenter les réalités des associations.
Même si le bénévolat, par sa nature, n'attend aucune contrepartie, il est temps de reconnaître et de récompenser ce travail de terrain. L'an dernier, ma première proposition de loi visait à créer un statut du bénévole associatif, qui n'existe pas encore en France, en vue de permettre la reconnaissance du travail fourni au service des autres et de la société. Si l'expérience dans le secteur associatif peut, il est vrai, déjà être valorisée par un certificat ou une VAE, cette solution n'est cependant pas forcément pertinente pour tous les bénévoles. De plus, cette reconnaissance reste insuffisante par rapport aux efforts fournis. C'est pourquoi j'ai proposé de valider des trimestres de retraite après plusieurs années d'engagement au sein d'une association.
Cet été, j'ai demandé au bureau de l'Assemblée nationale la création d'un groupe d'études, qui n'existait pas jusqu'alors, afin d'approfondir ces pistes pour aider au développement du tissu associatif.
La seule mesure claire, concrète et précise de votre proposition de résolution est le renforcement du rôle des associations dans la co-construction de certaines politiques publiques. Il est évident que nous devons entendre la voix des associations dans la mise en oeuvre de ces politiques dans de nombreux domaines. Nous ne pouvons légiférer correctement qu'à partir du travail qui est réalisé sur le terrain.
Autre piste abordée par votre texte : le lancement d'une consultation conjointe des parlementaires et de la société civile pour réfléchir à la place du secteur associatif dans la société française. Pourquoi pas ? Votre texte restera toutefois incantatoire sans la volonté politique du Gouvernement qui, espérons-le, saura être attentif aux retombées du travail que nous entamons aujourd'hui.
Une initiative plus urgente, et que vous manquez d'aborder ici, est l'évaluation des modifications les plus récentes du bénévolat. Qu'il s'agisse de la création de la réserve civique, du compte engagement citoyen et du congé d'engagement ou de l'assouplissement de l'accès au service civique, les innovations n'ont pas manqué en la matière. Or il n'y a rien à ce sujet dans votre proposition de résolution. Comment la mise en place de ces innovations a-t-elle été reçue par les publics ciblés ? Avons-nous trouvé un moyen de lutter contre la crise des vocations ?
Cette proposition de résolution semble partir d'un bon sentiment et pose les premières bases de travail. Elle reste cependant insuffisante sans rien inventer. Le groupe Les Républicains ne peut s'opposer à un texte qui a de bonnes intentions mais qui, au fond, ne contient pas grand-chose ou presque, et finit par laisser un goût d'inachevé. Toutefois, les acteurs du monde associatif sont les artisans du vivre-ensemble et méritent, à ce titre, la mobilisation de chacun d'entre nous.