Intervention de Michèle Victory

Réunion du mardi 27 octobre 2020 à 21h00
Commission des affaires culturelles et de l'éducation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMichèle Victory :

Je passerai rapidement sur ce qui semble bien fonctionner dans les crédits de cette mission, à savoir l'effort de l'État vers le secteur des médias, du livre et des industries culturelles.

L'abandon du projet de loi relatif à la communication audiovisuelle et à la souveraineté culturelle à l'ère numérique à la suite de la crise sanitaire et le dessaisissement du Parlement au profit du Gouvernement afin de mener à bien ce qui restait de la réforme a entraîné inquiétude et frustration dans le monde des médias. Les enjeux de ce projet de loi étaient la régulation d'un marché numérique qui a vu ses bénéfices exploser au profit de plateformes gloutonnes ; la lutte contre le piratage, qui n'a pas encore les moyens européens de ses ambitions ; et la rémunération des œuvres et des artistes, qui est loin de rétablir un équilibre satisfaisant.

Des actions fortes doivent également être menées autour du livre et du CNL vers des éditeurs, des auteurs, des libraires, qui ont souffert de la crise et d'une concurrence difficile. C'est pour cela que nous défendrons un amendement visant à revenir de façon temporaire sur le rabais de 9 % accordé aux collectivités territoriales pour l'achat de livres. Ces crédits sont estimés à moins de 12 millions, mais ils pourraient être une respiration importante pour ce secteur – la rapporteure pour avis en a parlé.

Lire mieux et lire plus, c'est aussi ouvrir plus longtemps les bibliothèques en ville et à l'université. Il me semble avoir constaté qu'une heure d'ouverture représentait déjà plus de 20 millions d'euros. Nous devrons veiller à ce que cet objectif de favoriser l'accès aux bibliothèques atteigne son but. Nous doutons que les 2 millions ajoutés en 2021 au programme 224 de la mission « Culture » soient suffisants.

Tout aussi essentiel est le soutien aux radios commerciales et associatives locales, qui, par leur rôle de médiateur social et de proximité, ont contribué à maintenir le lien avec les populations depuis le début de cette crise, dans l'Hexagone et en outre-mer. Si le nombre de ces radios bénéficiant d'une aide sélective au titre du programme 180 a légèrement baissé, elles sont près de 700 sur l'ensemble du territoire à développer leurs actions. Il est important qu'un pourcentage de l'aide apportée par le ministère soit clairement identifié pour abonder les crédits de ces radios.

Le secteur du cinéma est aussi en difficulté avec la crise, même s'il résiste. Pour poursuivre en ce sens, nous avons besoin d'un Centre national du cinéma et de l'image animée (CNC) armé, en soutien.

Une question majeure demeure s'agissant de la stratégie du Gouvernement en matière d'audiovisuel public – plusieurs d'entre nous l'ont évoquée. Nous dénoncions déjà la stratégie du Gouvernement pour l'audiovisuel public dans les budgets précédents et les prémices du projet de loi audiovisuel. La cure d'austérité se poursuit cette année encore. Alors que les recettes publicitaires sont en chute libre, la perte du chiffre d'affaires publicitaire est estimée à 55 millions d'euros par rapport aux prévisions initiales. L'audiovisuel public doit en outre faire face à des coûts supplémentaires liés à la crise.

Compte tenu de l'inflation, une baisse de 2,63 % des crédits de paiement est prévue pour l'audiovisuel public en 2021, après une baisse de 3,36 % en 2020 et de 2,56 % en 2019. Radio France voit ses crédits baisser de 2,15 %, en tenant compte de l'inflation, après une baisse de 2,34 % l'année dernière. Quant à France Télévisions, ses crédits baissent de 3,23 % après une baisse de 3,9 % en 2020.

En pleine crise économique, le Gouvernement maintient ses objectifs de réduction d'emplois. Les effectifs de France Télévisions devront diminuer de près de 20 % jusqu'en janvier 2023. Tous les secteurs sont affectés par le double effet du plan de départ et de la crise sanitaire, le réseau régional de France 3 étant particulièrement touché.

Comment comprendre cette stratégie pour France Télévisions, alors qu'elle a pour objet d'être proche de la jeunesse, ambitieuse et accessible ? France 4, qui s'est révélée être un formidable outil pédagogique pendant le confinement, doit-elle être supprimée ? Quand la société doit être près de ses territoires et favoriser la proximité et l'inclusion, le Gouvernement a arrêté les programmes de France Ô. Alors qu'elle vise à soutenir la création française, les dépenses en faveur d'œuvres audiovisuelles européennes et de création originale française sont en baisse.

Nous sommes convaincus que tous ces objectifs ne peuvent être atteints que par une revalorisation des crédits de l'audiovisuel public. Pour ces raisons, nous ne voterons pas ce budget.

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