COMMISSION DES AFFAIRES CULTURELLES ET DE L'ÉDUCATION
Mardi 27 octobre 2020
La séance est ouverte à vingt‑et‑une heure cinq.
(Présidence M. Bruno Studer, président)
La commission poursuit son audition, dans le cadre du projet de loi de finances pour 2021 (seconde partie), de Mme Roselyne Bachelot, ministre de la Culture, puis examine les crédits de la mission « Culture » (Mme Valérie Bazin-Malgras, rapporteure pour avis), et de la mission « Médias, livre et industries culturelles » et du compte de concours financiers « Avances à l'audiovisuel public » (Mme Céline Calvez, rapporteure pour avis).
Nous poursuivons l'examen pour avis de la mission « Culture » avec les questions à Mme la ministre.
Madame la ministre, des financements sont nécessaires pour maintenir notre patrimoine rural, garant de notre identité, et particulièrement les églises de nos communes, aujourd'hui en danger. Les sites classés bénéficient parfois d'une exposition importante, qui leur permet de profiter d'effets de levier financier. Malheureusement, cette manne atteint rarement nos églises rurales.
Dans les Hauts-de-France, cette belle région dont je suis originaire, des initiatives locales sont prises pour sauver ce patrimoine en péril, à l'exemple du dispositif « Sauvons nos clochers » dans le département de l'Oise. Néanmoins, les enveloppes budgétaires telles que la dotation d'équipement des territoires ruraux ne permettent plus de répondre à l'ampleur de la demande, et le reste à charge pour les communes apparaît bien souvent insurmontable. Les crédits présentés ne prennent pas en compte cette situation. Allez-vous relever ce défi pour nos générations futures ?
Il existe un problème mais il ne relève pas de la responsabilité de l'État : les communes sont les propriétaires. Le rôle de l'État est parfaitement défini dans ce domaine et les charges qui s'imposent à lui sont déjà colossales. Il reste que l'entretien du patrimoine religieux, qui structure le paysage de nos communes, est évidemment important.
Protégés au titre de leur intérêt artistique et historique, un tiers des monuments historiques sont des monuments religieux. Églises, temples protestants, synagogues et mosquées, toutes les religions sont représentées. Certains lieux sont d'ailleurs des sites touristiques d'importance nationale, notamment les grandes cathédrales, ou les abbayes du Mont-Saint-Michel et de Vézelay. Une assistance est apportée aux propriétaires de ce patrimoine pour assurer l'entretien et la restauration du patrimoine religieux.
Mais il ne faut pas nous payer de mots, la restauration du patrimoine religieux suscite des conflits dans l'opinion publique. En raison de leur usage exceptionnel, du fait de la fréquentation en berne des églises, certains groupes laïcs s'offensent que de l'argent public soit alloué aux monuments religieux. Le ministère de la culture s'oppose aux projets de démolition ou d'utilisation banalisante de ces monuments. Il est désolant de voir des églises transformées en brasserie, en café ou en solderie.
Un fonds incitatif et partenarial est prévu pour les monuments historiques des collectivités à faibles ressources. Le problème que vous soulevez concerne le patrimoine non inscrit et non protégé. D'autres collectivités territoriales que l'État peuvent intervenir dans ce domaine.
Madame la ministre, je vous félicite pour la détermination dont vous faites preuve afin de soutenir la culture dans cette crise.
Le monde de la culture inclut le secteur événementiel, qui vit une crise majeure et ne doit pas être oublié dans les arbitrages. Le soutien de l'État est plus que jamais nécessaire pour sauvegarder notre offre culturelle et permettre l'émergence de nouveaux talents. Le soutien à l'emploi artistique et aux jeunes artistes est l'un des axes forts de ce budget. Dans le cadre du plan de relance, vous avez annoncé un programme exceptionnel de commandes artistiques dans tous les domaines, dédié en priorité aux jeunes créateurs. Comment vont se décliner ces dispositifs ?
Comment envisagez-vous de soutenir à long terme l'émergence de nouveaux talents ? Cette jeunesse créative, ces nouveaux talents en formation, sont essentiels pour notre pays. Il serait dramatique de leur laisser penser que nous n'avons pas besoin d'eux.
Merci de votre avis élogieux sur ma détermination à soutenir le secteur de la culture et à gagner des arbitrages. Il faut être à la manœuvre pour défendre les priorités culturelles.
Nous allons aider les jeunes artistes grâce au programme exceptionnel de 30 millions d'euros de commandes publiques prévu dans le plan de relance, qui concernera toutes les disciplines : arts visuels, spectacle vivant, littérature, cinéma, architecture, métiers d'art. Nous voulons inventer un nouveau mode d'intervention créative, au cœur de la société, qui impliquera directement les citoyens : ce programme de commande donnera l'occasion à la société française de s'exprimer sur les valeurs qui la structurent. Quatre chapitres thématiques sont définis, et quatre appels à projets nationaux en direction des acteurs de la création de toutes les disciplines, de 2,5 millions d'euros chacun, sont prévus. Ils sont principalement – mais pas exclusivement – pensés pour les jeunes créateurs.
En soutenant le spectacle vivant de manière globale, par les politiques transversales, les politiques de soutien aux structures, les aides aux intermittents, nous aidons les jeunes créateurs. La politique que je souhaite mener pour les artistes-auteurs participe au soutien à la création.
D'autres opérations permettront d'aider les jeunes créateurs. Le projet « Grand tour, l'été des jeunes artistes », envisagé pour l'été 2021, mobilisera 5 millions d'euros. Il permettra d'accorder de la visibilité à plusieurs centaines d'artistes de toutes les disciplines de la création, dans toute la France – je tiens beaucoup à l'aspect territorial des politiques de découverte des jeunes artistes. Ce programme combinera plusieurs modalités d'intervention publique complémentaires : commandes, aides aux projets, appels à projets. Une collaboration avec les médiateurs du protocole des nouveaux commanditaires permettra de mettre à l'honneur de nombreuses initiatives symboliques de la société civile.
Nous voulons actionner tous les leviers pour soutenir les créateurs dans leur vie quotidienne. Les artistes ne peuvent pas créer s'ils n'ont pas les moyens de payer le loyer et la garde des enfants. Nos politiques aident directement les créateurs.
Ma question illustrera concrètement les propos de Constance Le Grip. Le festival international de musique de Wissembourg se déroule actuellement. La situation sanitaire impose des règles strictes, respectées à la lettre. Les salles ne peuvent accueillir que 60 % de leur jauge, et depuis le couvre-feu dans le Bas-Rhin, les concerts ont été fixés à dix-huit heures. Malheureusement, en raison de l'évolution sanitaire négative, le public allemand n'est pas au rendez-vous de ce festival de musique classique de haut niveau, et le bilan financier s'annonce catastrophique.
Que répondre à un organisateur désabusé qui, malgré les vents contraires, a su maintenir à flot un événement remarquable en zone rurale ?
En dépit des aides financières que je vais détailler à nouveau devant vous, les organisateurs sont désespérés. Nous avons tous insisté sur le désespoir du monde culturel, qui voit sa substance lui filer entre les doigts.
Nous allons aider, financer le chômage partiel, apporter des aides de solidarité, prévoir des aides au loyer. C'est important. L'aide complémentaire versée lorsque la jauge n'est pas atteinte doit permettre aux acteurs, chanteurs et danseurs de se produire, aux metteurs en scène de créer et aux techniciens d'accompagner ces manifestations.
En soutien aux festivals, tellement importants pour la vie de nos territoires, nous avons mis en place une cellule spécifique pour faire face à la crise sanitaire. Elle recensera les besoins et y répondra. En juillet 2020, 10 millions de crédits de soutien ont été prévus pour les festivals annulés en raison de la crise du covid-19, ou qui se sont maintenus avec des pertes de recettes très importantes en raison de la limitation de jauge. Ces crédits vont permettre de soutenir 300 organisateurs de festivals, dans tous les domaines. J'ai voulu que ce fonds soit abondé de 5 millions d'euros pour continuer à apporter ce soutien en 2021, dans le cadre du plan de relance.
Au-delà, il faut réinterroger notre modèle festivalier. C'est le but des états généraux des festivals lancés à la rentrée. Nous rassemblons les contributions des nombreux ateliers et nous nous retrouverons à Bourges pour construire des modèles de festivals pérennes. La crise du covid-19 a eu l'effet d'un jet d'acide sur certains modes de fonctionnements qui étaient déjà en grande difficulté. Faisons de cette catastrophe une opportunité pour réfléchir aux moyens de répondre aux besoins du public. Et j'espère que je serais invitée au festival de Wissembourg !
Le pass Culture a été revalorisé en 2021, à hauteur de 50 millions d'euros. Depuis 2019, il est expérimenté dans quatorze départements, dont la Seine-Saint-Denis, auprès des jeunes de dix-huit ans. Il a franchi la barre des 100 000 inscrits et des 500 000 réservations d'offres culturelles en quinze mois. Il répond donc à un réel besoin.
Grâce à une application, les jeunes inscrits bénéficient de 500 euros pendant 24 mois pour réserver des propositions culturelles numériques ou de proximité. Mais les études montrent que seulement 150 euros sont dépensés en moyenne, et que ce ne sont pas toujours les publics les plus éloignés de la culture qui en profitent.
L'évaluation de l'expérimentation préconise une réduction du montant du pass à 300 euros, qui est à l'étude, mais je me réjouis de la généralisation de cette expérimentation. Comment démocratiser l'accès à ce pass pour qu'au-delà des jeunes scolarisés, il profite aux jeunes actifs et aux publics les plus fragiles, notamment les personnes en situation de handicap ?
Je me posais beaucoup de questions sur le pass Culture. J'ai été première vice-présidente de la région Pays de la Loire, qui a inventé il y a quarante-cinq ans le « pass culture-sport ». J'étais militante de cette opération, mais je me demandais pourquoi nous constations des difficultés à l'inscription et à la consommation de ce mécanisme. Je suis revenue sur mon évaluation. La démocratisation et l'accès à la culture des publics les plus éloignés nous obligent, surtout les plus jeunes, dont l'éloignement est révélé par l'étude décennale sur les pratiques culturelles.
Le pass Culture est un outil qui suscite une adhésion grandissante au fur et à mesure de son déploiement. De plus en plus de jeunes y adhèrent et le montant moyen des dépenses augmente : 130 euros par an. Un montant de 300 euros pour deux ans est donc bien calibré. Ce dispositif ne pourra totalement se déployer que lorsque nous en ferons la publicité à destination de l'ensemble de la société. La communication institutionnelle pour un système qui n'est pas généralisé est impossible.
Le crédit de 500 euros est excessif à mon sens. 300 euros correspondent davantage à la consommation des jeunes. Cette somme sera suffisante pour faire du pass Culture un succès. Il reste à travailler à l'apprivoisement du pass Culture pour les jeunes de seize à dix‑huit ans. En outre, à dix-huit ans, certains jeunes sont sortis du giron de l'éducation nationale. Je suis particulièrement attachée à ce public : les jeunes en apprentissage, ceux qui travaillent, et les publics handicapés. L'effort doit porter sur eux. Parfois, ce sont les publics qui en ont le moins besoin qui profitent des politiques de démocratisation culturelle. Il ne faut pas que ce soit le cas du pass Culture.
Je souhaitais savoir comment faire pour que le pass Culture touche les publics les plus éloignés et les plus fragiles. Vous venez de répondre à ma préoccupation.
Nous en avons fini avec la discussion générale sur la mission « Culture ». Nous passons donc à la discussion générale sur les crédits de la mission « Médias, livre et industries culturelles » et du compte de concours financiers « Avances à l'audiovisuel public ».
La mission « Médias, livre et industries culturelles » et le compte de concours financiers « Avances à l'audiovisuel public » ne font pas exception : le budget alloué à ces différents secteurs sera exceptionnel en 2021, car les circonstances le sont.
Avec 606,5 millions d'euros, la mission « Médias » est dotée de près de 20 millions d'euros supplémentaires par rapport à 2020. C'est indispensable, car la crise sanitaire a été un cataclysme pour l'ensemble des secteurs concernés.
La presse a subi de plein fouet une double crise. La crise sanitaire a entraîné la fermeture de nombreux points de vente et l'effondrement du chiffre d'affaires pour le papier. Le secteur a ensuite connu une crise de la distribution, avec la faillite de Presstalis, qui a déposé le bilan au mois d'avril. Une nouvelle structure dénommée France Messagerie lui a succédé, moyennant une réduction massive de ses effectifs et de son périmètre d'intervention. La combinaison de ces deux facteurs a été terrible.
C'est pour y faire face qu'un plan « filière presse » d'une ampleur sans précédent a été décidé, d'un montant de 483 millions d'euros d'ici à 2022. En 2021, 136 millions d'euros y seront consacrés, dont 70 millions d'euros au titre du plan de relance. C'est un plan complet qui aidera la presse à affronter les conséquences de l'épidémie, mais aussi à accélérer sa modernisation. Il prévoit des aides pour les services de presse en ligne, d'autres pour la modernisation des imprimeries de la presse régionale ou encore deux nouveaux fonds en faveur de la transition écologique du secteur et de la lutte contre la précarité.
S'y ajoute le crédit d'impôt abonnement, instauré dans la troisième loi de finances rectificatives pour 2020, qui a été notifié à la Commission européenne. Si l'estimation qui a été faite de son coût paraît élevée, à hauteur de 120 millions d'euros sur deux ans, ce dispositif devrait indéniablement permettre de soutenir la filière presse.
En définitive, nous avons pour la presse un budget de crise autant que de refondation, et je m'en félicite.
Par ailleurs, une évolution semble bien engagée concernant les aides au transport postal de la presse. À terme, il s'agirait de renforcer le soutien au portage, pour une meilleure qualité de service et un coût moindre pour la collectivité.
Certaines questions demeurent néanmoins en suspens, s'agissant des aides à la presse, et notamment des aides au pluralisme. La lumière doit être faite sur les critères d'attribution du label « information politique et générale » (IPG), son évaluation, son éventuel retrait, ainsi que sur les montants exacts accordés d'année en année à chaque titre. Madame la ministre, avez-vous des projets pour améliorer ces aides et renforcer leur évaluation ?
Ces aides sont en hausse, et de nouvelles conventions devraient être conclues d'ici à janvier entre l'État et les médias IPG. Comment intégrer des contreparties écologiques, sociales ou sociétales à ces aides ? Par exemple, un grand travail reste à faire pour améliorer la place des femmes dans les médias de presse écrite.
Le soutien aux médias de proximité est en nette hausse, avec 250 000 euros supplémentaires sur un budget total de 1,8 million d'euros en 2021. Ces médias, souvent nouveaux ou de petite taille, contribuent au lien social de proximité en agissant à destination des jeunes, des quartiers prioritaires de la politique de la ville ou des territoires ruraux.
La Compagnie internationale de radio et de télévision bénéficie d'une dotation de 1,6 million d'euros. L'utilisation de ces crédits pose question, ainsi que la pertinence de leur affectation à cette mission.
Le livre et les industries culturelles bénéficient, quant à eux, d'une hausse de 11,6 millions des crédits de paiement en 2021. Ces sommes permettront de réarmer le Centre national de la musique (CNM) qui, à peine né, a dû faire face à l'effondrement du secteur de la musique. Ses ressources se sont effondrées suite à notre décision d'exempter les spectacles des taxes dont il devait percevoir le montant, mais nous ne mettons pas le CNM en danger, puisque nous renforçons ses capacités à agir. C'est d'autant plus important qu'une décision de la Cour de justice de l'Union européenne relative aux « irrépartissables juridiques » constitue un autre coup de tonnerre, dont les conséquences pourraient s'avérer lourdes sur l'aide à la création dans notre pays. Nous avons tenté d'apporter une réponse à ce problème dans le projet de loi DDADUE.
Enfin, il serait intéressant de nous pencher, lors des prochains exercices, sur la mise à contribution des ventes de matériels d'écoute numériques au soutien à la création. Quel est votre avis sur la création d'une taxe affectée spécifique ?
L'année 2021 sera exceptionnelle pour le livre, avec un net renforcement des crédits de la Bibliothèque de France (BNF) dans le périmètre de la mission, et du Centre national du livre (CNL) dans la mission « Plan de relance ». Après une intervention d'urgence en faveur des auteurs, des éditeurs et des libraires, le CNL pourra poursuivre son soutien à une filière, très affectée par le confinement. C'est particulièrement nécessaire pour les libraires, qui attendent de voir leur chiffre d'affaires se rétablir avant de solliciter les aides pour la modernisation de leur commerce.
Au-delà de ces nouveaux moyens, je souhaite aborder le rabais de 9 % sur le prix des livres dont bénéficient les collectivités territoriales. Certaines d'entre elles souhaitent y renoncer pour mieux soutenir leurs librairies mais les dispositions combinées de la loi de 1981 sur le prix du livre et du code de la commande publique l'interdisent. Qu'envisagez-vous concernant ce rabais de 9 % ? Comment aider les collectivités qui souhaitent soutenir leurs librairies ?
Le cinéma bénéficie d'un soutien massif dans le plan de relance, avec 165 millions d'euros en faveur de toute la filière, auxquels s'ajoutent 50 millions d'euros à destination des salles de cinéma. Ce soutien est crucial, alors que le couvre-feu met une nouvelle fois en danger un secteur déjà lourdement touché par la crise. Vous avez d'ailleurs fait de nouvelles annonces la semaine dernière, notamment la création d'un bonus billetterie venant en soutien aux distributeurs, qui n'ont pas été épargnés par cette crise.
Le budget de l'audiovisuel public est globalement stable. Le compte de concours financiers « Avances à l'audiovisuel public » diminue de 70 millions d'euros, mais 65 millions d'euros de crédits supplémentaires sont prévus dans la mission « Plan de relance ». La baisse de 70 millions d'euros est conforme à la trajectoire financière décidée en 2018, la contribution de l'audiovisuel public au redressement des finances publiques se poursuit donc bel et bien.
Les effets de la crise doivent toutefois être compensés, sinon la situation sera intenable pour les sociétés audiovisuelles publiques. Le plan de relance leur apporte 70 millions d'euros sur la période 2021‑2022, dont 65 millions en 2021. Sur ces 70 millions, 45 iront à France Télévisions et 20 à Radio France, qui ont été très fortement touchées par l'effondrement des recettes publicitaires. ARTE et l'INA bénéficieront chacune de 2 millions d'euros tandis que France Médias Monde et TV5 Monde seront dotées de 500 000 euros.
Les perspectives demeurent pourtant incertaines pour les années à venir. L'effet pour France Télévisions du report des Jeux olympiques de Tokyo, dont la retransmission représente un coût de 20 millions d'euros, suscite des interrogations.
La situation est également préoccupante pour ARTE, qui a procédé à de nombreuses réductions de coûts ces dernières années et doit faire face à la hausse des prix sur le marché des droits de production, en raison de l'activité importante des plateformes. Au-delà de son équilibre financier, c'est son modèle, tourné vers la coproduction d'œuvres originales, qui est menacé.
L'agenda sera également chargé pour Radio France avec la mise en œuvre de son plan social et la poursuite du chantier de la Maison de la radio.
En termes de contenus, l'année a été marquée par l'essor des offres numériques, dont le succès a été indéniable. Il faut favoriser les synergies pour offrir le meilleur du service public.
L'avenir de la contribution à l'audiovisuel public mérite toute notre attention. Vous avez déclaré que les parlementaires pourraient approfondir les réflexions à ce sujet, nous y sommes prêts. Au-delà de la question de son financement, quelle doit être la place de l'audiovisuel public dans notre société, et comment faire reconnaître sa contribution à la culture ?
J'invite notre commission à rendre un avis favorable à l'adoption de ces crédits.
Les secteurs des médias, de la presse, du cinéma et de la musique ont tous été profondément affectés par la crise sanitaire. L'évolution de la situation laisse présager un début d'année 2021 très difficile pour le secteur artistique mais ce PLF 2021 traduit un engagement fort de l'État pour soutenir la reprise d'activité et accompagner la modernisation de l'ensemble de ces filières culturelles.
Le PLF 2021 s'inscrit dans la continuité du PLFR3, qui a prévu 384 millions d'euros pour la presse, le livre, la musique et le cinéma.
Concernant le soutien à la presse et les médias, Le programme 180 est en augmentation de 2,9 % pour atteindre 289 millions d'euros.
Le programme 363 du plan de relance prévoit une enveloppe de 70 millions d'euros en crédits de paiement pour la presse. Elle doit permettre la mise en œuvre d'un véritable plan de filière pour un secteur en crise structurelle, après le soutien apporté à Presstalis et sa transformation en France Messagerie. Ce plan prévoit un fonds de 8 millions d'euros pour encourager la transition écologique ; un fonds de 18 millions d'euros pour la transformation des imprimeries de la presse régionale ; la transformation du Fonds stratégique pour le développement de la presse (FSDP), qui doit structurer la modernisation de la filière ; et le soutien aux marchands de journaux. C'est un plan ambitieux qu'il faudra poursuivre dans la durée. Dans quelle mesure la transformation du FSDP permettra-t-elle de développer la filière ?
La reprise de l'activité des librairies en mai est une bonne nouvelle pour le livre et les industries culturelles. Un soutien est néanmoins nécessaire, et il faut profiter du plan d'urgence pour accélérer leur modernisation numérique. C'est un des axes du plan « filière livre », doté de 30 millions d'euros.
Concernant la musique, l'évolution de la situation sanitaire est inquiétante, mais l'État répond encore présent : le CNM recevra 200 millions d'euros en 2021. J'espère que le fonds de compensation de 100 millions d'euros, qui sera abondé de 55 millions d'euros supplémentaires, partagés avec le fonds de sauvegarde, sera pleinement utilisé. Cela signifiera que les lieux de spectacle vivant sont restés actifs, nous avons collectivement besoin d'eux.
Concernant le cinéma, le plan de 165 millions d'euros doit permettre de compenser les pertes fiscales du CNC pour 60 millions d'euros. Le reste constitue le plan de relance à proprement parler : son champ s'étend des écoles de cinéma au soutien à l'export en passant par l'accompagnement des exploitants les plus fragiles, en particulier les salles d'art et d'essai. Une enveloppe de 30 millions d'euros doit compenser les pertes dues au couvre‑feu. Si des mesures sanitaires plus drastiques devaient être prises, d'autres aides sont-elles envisagées, et faudra-t-il recalibrer celles du plan de relance ?
Concernant l'audiovisuel public, la trajectoire de baisse structurelle des concours publics se poursuit, avec une dotation pérenne en retrait de 70 millions d'euros environ, pour atteindre 3,64 milliards d'euros. Cette baisse est exceptionnellement compensée par une enveloppe de 70 millions d'euros allouée aux opérateurs dans le plan de relance, pour compenser les pertes liées à la crise sanitaire et sanctuariser les dépenses de création. Je suis particulièrement attentive aux différentes réformes et plans de départ mis en œuvre par France Télévisions et Radio France, et notamment à leurs effets sur les équipes en région des réseaux France 3 et France Bleu.
Le budget de la mission « Médias livre et industries culturelles » est exceptionnel à bien des égards. Il répond aux conséquences des crises sanitaire et économique sans précédent que nous traversons. Il s'inscrit dans la suite des mesures d'urgence décidées au cours de l'année, notamment les 384 millions d'euros du PLFR3.
Le budget de cette mission est en hausse de 20 millions d'euros, établissant les crédits de paiement à 606 millions d'euros.
Le programme 180 relatif à la presse et aux médias voit ses crédits augmenter de 8 millions d'euros afin de soutenir ces filières qui font face à une crise structurelle, à laquelle est venue s'ajouter la crise économique.
Les aides directes à la presse et le soutien aux médias de proximité augmentent, tout comme le soutien à l'expression radiophonique locale, pour faire face à une augmentation du nombre de radios autorisées à émettre en FM et DAB +. Je salue également l'augmentation de 43 % du soutien au pluralisme, qui se traduit notamment par 6 millions d'euros d'aide aux titres ultramarins d'information politique et générale et pour les services de presse en ligne.
Le PLFR3 prévoyait la création d'un fonds exceptionnel de 30 millions d'euros en faveur des radios privées des télévisions locales, pour soutenir la diffusion hertzienne et numérique. Certains amendements proposent d'abonder ce fonds exceptionnel, nous aimerions connaître les modalités de sa répartition.
Les crédits du programme 334, relatif au livre et aux industries culturelles, augmentent de plus de 11 millions d'euros. Ils reflètent bien l'ambition du Gouvernement pour le renouvellement et la diffusion de la création.
Les moyens du CNM, qui a démontré toute son utilité lors de sa première année d'existence et dans ce contexte de crise, sont renforcés. Nous poursuivons sa structuration en 2021 en lui allouant 7,5 millions d'euros supplémentaires.
Les crédits alloués à la HADOPI dans la lutte contre le piratage sont stables. Nous nous réjouissons de votre volonté d'inscrire au plus vite dans la loi certaines dispositions sur la régulation et la lutte contre le piratage. J'espère que ce futur projet de loi intégrera également d'autres enjeux essentiels, tels que le must-carry ou l'accessibilité de l'audiovisuel public.
Les économies demandées à l'audiovisuel public sont réduites de 10 millions d'euros, ce qui permet notamment de tenir compte de la continuation de la chaîne France 4, qui a montré toute son utilité pédagogique pendant le confinement.
Vous pouvez compter sur les députés de la majorité pour approfondir à vos côtés la réflexion sur la contribution à l'audiovisuel public. Nous travaillons à une réforme en profondeur de cette redevance, voire à son universalisation, alors que la suppression de la taxe d'habitation arrive à grands pas.
Ces crédits reflètent la volonté du Gouvernement de soutenir les filières du livre, de la presse, des médias et des industries culturelles, ainsi que notre audiovisuel public. Ce budget s'inscrit pleinement dans la démarche de relance de l'économie, à l'heure où les différentes filières ont été durement touchées. Les députés de La République en Marche voteront en faveur de ces crédits.
Au nom du groupe Les Républicains, je tiens à saluer la qualité des travaux de nos rapporteures pour avis, et l'éclairage qu'elles nous apportent.
L'année 2021 sera évidemment une nouvelle année de bouleversements pour les médias. Céline Calvez a d'ailleurs évoqué les conséquences économiques cataclysmiques affectant ce secteur, durement touché par l'épidémie de la covid, qui a bouleversé nos cadres de vie.
Malheureusement, comme dans les lois de finances pour 2020, 2019 et 2018, le Gouvernement a encore choisi de raboter les dotations à l'audiovisuel public. Dans ce projet de budget pour 2021, la ventilation de ces efforts se traduit ainsi par un recul généralisé, de 60 millions d'euros pour France Télévisions, 8 millions d'euros pour Radio France, 2,1 millions d'euros pour ARTE et 0,6 million d'euros pour France Médias Monde. Seul le budget de TV5 Monde reste stable, et celui de l'Institut national de l'audiovisuel (INA) bénéficie d'une hausse de 1,6 million d'euros.
Pour mémoire, la loi de finances pour 2018 avait déjà acté une baisse de 30 millions d'euros et un retrait de 47 millions par rapport au contrat d'objectifs et de moyens (COM) ; celle pour 2019 prévoyait une baisse de 24 millions d'euros, et celle pour 2020, une diminution du budget de 62 millions d'euros par rapport à la loi de finances initiale pour 2019.
Un arbitrage gouvernemental, à l'été 2018, prévoyait qu'entre 2018 et 2022, les ressources publiques affectées à l'audiovisuel public reculent de 160 millions d'euros. En 2021, nous aurons dépassé cet objectif. Dès lors, à quoi ressemblera votre projet de budget 2022 pour le groupe France Télévisions ? Pouvez-vous dès aujourd'hui vous engager à ce qu'il ne baisse pas, pour suivre les engagements que le Gouvernement a pris en 2018 ?
J'en profite pour rappeler, comme je le fais désormais chaque année, le scandale de la taxe sur les opérateurs de communications électroniques, dite taxe Copé, définitivement déviée en 2019 vers le budget de l'État, au détriment de France Télévisions. Même François Hollande n'avait pas été aussi loin ! La taxe Copé échappe ainsi totalement à France Télévisions, alors qu'elle avait été justement créée en 2009 pour compenser la suppression de la publicité en soirée sur les chaînes de l'opérateur.
Ces baisses de budget s'inscrivent ainsi dans un contexte difficile, avec une crise sanitaire sans précédent et une réforme de l'audiovisuel public à l'arrêt, alors qu'elle devait voir l'apparition d'une holding France Médias et permettre aux chaînes de montrer davantage de publicité, y compris ciblée.
Madame la ministre, nous attendons encore davantage de précisions, concernant le futur budget de l'audiovisuel public français, qu'il s'agisse de sa forme administrative, de son budget, de son calendrier ou de ses ressources. Je souhaiterais également vous interroger sur l'avenir de France 4, qui a bénéficié d'un sursis tardif jusqu'en août 2021, après avoir fait preuve, s'il le fallait encore, de son utilité pendant le confinement en proposant des programmes éducatifs. Quel avenir pour cette chaîne ? De quoi dépendra votre décision, et selon quel calendrier sera-t-elle appliquée ?
France Ô n'a malheureusement pas eu la même chance. Je le regrette : c'était pourtant une chaîne utile, alors que les territoires ultramarins ne sont que très peu représentés à la télévision.
Pour ce qui concerne la presse, après une période de baisse, les aides à la presse augmentent, notamment par la création de deux nouveaux dispositifs : une aide spécifique au pluralisme des titres ultramarins, de 2 millions d'euros, et une aide aux services de presse en ligne, de 4 millions d'euros.
Je m'en réjouis car ce secteur est durement touché par la crise. J'avais néanmoins déposé un amendement visant à étendre le champ d'application du crédit d'impôt sur le revenu au titre du premier abonnement à un journal, à une publication périodique au plus mensuelle ou à un service de presse en ligne, à condition qu'ils présentent le caractère d'information politique générale. Ce crédit d'impôt exclut pour le moment la presse de la connaissance, du savoir et de l'emploi. L'amendement visait à étendre le champ d'application du dispositif aux abonnements à des publications telles que La France agricole, qui permet aux agriculteurs de s'informer. Je souhaitais donc recueillir votre avis sur cet amendement, qui a malheureusement été déclaré irrecevable.
Pour terminer, nous saluons la hausse du programme « Livres » et les crédits alloués au CNM.
Pour toutes les raisons que je viens d'exposer, nous avons décidé de nous abstenir.
Je passerai rapidement sur ce qui semble bien fonctionner dans les crédits de cette mission, à savoir l'effort de l'État vers le secteur des médias, du livre et des industries culturelles.
L'abandon du projet de loi relatif à la communication audiovisuelle et à la souveraineté culturelle à l'ère numérique à la suite de la crise sanitaire et le dessaisissement du Parlement au profit du Gouvernement afin de mener à bien ce qui restait de la réforme a entraîné inquiétude et frustration dans le monde des médias. Les enjeux de ce projet de loi étaient la régulation d'un marché numérique qui a vu ses bénéfices exploser au profit de plateformes gloutonnes ; la lutte contre le piratage, qui n'a pas encore les moyens européens de ses ambitions ; et la rémunération des œuvres et des artistes, qui est loin de rétablir un équilibre satisfaisant.
Des actions fortes doivent également être menées autour du livre et du CNL vers des éditeurs, des auteurs, des libraires, qui ont souffert de la crise et d'une concurrence difficile. C'est pour cela que nous défendrons un amendement visant à revenir de façon temporaire sur le rabais de 9 % accordé aux collectivités territoriales pour l'achat de livres. Ces crédits sont estimés à moins de 12 millions, mais ils pourraient être une respiration importante pour ce secteur – la rapporteure pour avis en a parlé.
Lire mieux et lire plus, c'est aussi ouvrir plus longtemps les bibliothèques en ville et à l'université. Il me semble avoir constaté qu'une heure d'ouverture représentait déjà plus de 20 millions d'euros. Nous devrons veiller à ce que cet objectif de favoriser l'accès aux bibliothèques atteigne son but. Nous doutons que les 2 millions ajoutés en 2021 au programme 224 de la mission « Culture » soient suffisants.
Tout aussi essentiel est le soutien aux radios commerciales et associatives locales, qui, par leur rôle de médiateur social et de proximité, ont contribué à maintenir le lien avec les populations depuis le début de cette crise, dans l'Hexagone et en outre-mer. Si le nombre de ces radios bénéficiant d'une aide sélective au titre du programme 180 a légèrement baissé, elles sont près de 700 sur l'ensemble du territoire à développer leurs actions. Il est important qu'un pourcentage de l'aide apportée par le ministère soit clairement identifié pour abonder les crédits de ces radios.
Le secteur du cinéma est aussi en difficulté avec la crise, même s'il résiste. Pour poursuivre en ce sens, nous avons besoin d'un Centre national du cinéma et de l'image animée (CNC) armé, en soutien.
Une question majeure demeure s'agissant de la stratégie du Gouvernement en matière d'audiovisuel public – plusieurs d'entre nous l'ont évoquée. Nous dénoncions déjà la stratégie du Gouvernement pour l'audiovisuel public dans les budgets précédents et les prémices du projet de loi audiovisuel. La cure d'austérité se poursuit cette année encore. Alors que les recettes publicitaires sont en chute libre, la perte du chiffre d'affaires publicitaire est estimée à 55 millions d'euros par rapport aux prévisions initiales. L'audiovisuel public doit en outre faire face à des coûts supplémentaires liés à la crise.
Compte tenu de l'inflation, une baisse de 2,63 % des crédits de paiement est prévue pour l'audiovisuel public en 2021, après une baisse de 3,36 % en 2020 et de 2,56 % en 2019. Radio France voit ses crédits baisser de 2,15 %, en tenant compte de l'inflation, après une baisse de 2,34 % l'année dernière. Quant à France Télévisions, ses crédits baissent de 3,23 % après une baisse de 3,9 % en 2020.
En pleine crise économique, le Gouvernement maintient ses objectifs de réduction d'emplois. Les effectifs de France Télévisions devront diminuer de près de 20 % jusqu'en janvier 2023. Tous les secteurs sont affectés par le double effet du plan de départ et de la crise sanitaire, le réseau régional de France 3 étant particulièrement touché.
Comment comprendre cette stratégie pour France Télévisions, alors qu'elle a pour objet d'être proche de la jeunesse, ambitieuse et accessible ? France 4, qui s'est révélée être un formidable outil pédagogique pendant le confinement, doit-elle être supprimée ? Quand la société doit être près de ses territoires et favoriser la proximité et l'inclusion, le Gouvernement a arrêté les programmes de France Ô. Alors qu'elle vise à soutenir la création française, les dépenses en faveur d'œuvres audiovisuelles européennes et de création originale française sont en baisse.
Nous sommes convaincus que tous ces objectifs ne peuvent être atteints que par une revalorisation des crédits de l'audiovisuel public. Pour ces raisons, nous ne voterons pas ce budget.
Les moyens de la mission « Médias, livre et industries culturelles », incluant le programme 180 « Presse et médias » et le programme 334 « Livre et industries culturelles », sont en hausse de 19 millions d'euros par rapport à 2020. Après une année très difficile pour l'ensemble des professionnels de ces filières, cette augmentation budgétaire est une excellente nouvelle. Ces chiffres sont à relier à l'effort de soutien du Gouvernement face à la crise sanitaire et aux différentes aides sectorielles associées au plan de relance.
Concernant la presse, l'épidémie est venue aggraver la situation du secteur, qui connaissait déjà de grandes difficultés. La transformation profonde des modes de consommation de l'information bouleverse l'équilibre de toute la filière de fabrication et de distribution de la presse imprimée. Elle vient fragiliser son modèle économique, quand, dans le même temps, les fausses informations de pseudo-experts se propagent partout sur les réseaux sociaux.
C'est dans ce contexte que nos politiques publiques ont un rôle décisif à jouer en faveur des médias. Il s'agit de protéger à tout prix leur socle économique, en assurant notamment un meilleur respect du droit voisin ainsi qu'un partage de la valeur plus juste entre les éditeurs de presse et les GAFAN – Google, Apple, Facebook, Amazon, Netflix.
Il est de notre devoir de les accompagner dans cette transformation inéluctable en veillant à leur indépendance, en préservant le pluralisme et en garantissant la liberté d'expression, qui est consubstantielle au débat démocratique et à notre vision du monde. Les récents événements nous ont montré à quel point il est important de sanctuariser, de chérir, de préserver ce droit fondamental si fragile qu'est la liberté d'expression.
Face à la crise, nous saluons le plan spécifique en direction de la presse qu'a annoncé le Président de la République en août dernier. Il permettra, nous l'espérons, de consolider la filière et de lui donner un nouvel élan. Ce sont 377 millions d'euros qui sont mis sur la table, en crédits nouveaux ainsi qu'en dépenses fiscales, afin de relancer l'investissement et d'amorcer les nécessaires transformations.
Au-delà de ces mesures indispensables à la survie du secteur, il nous faut également penser à l'avenir de la presse et de sa distribution. L'été dernier, la cessation de paiement de Presstalis a légitimement amené certains acteurs à s'interroger. Nous sommes nombreux ici à nous en faire le relais. Il y a en effet un enjeu majeur à augmenter les revenus de tous les acteurs du secteur, à revaloriser le travail des vendeurs, à renforcer l'accessibilité de la presse pour le public, et à réfléchir de nouveau à la réutilisation des invendus, afin de minimiser leur impact écologique. C'est toute une chaîne de valeur qu'il convient donc de repenser de manière globale.
C'est pourquoi nombre d'acteurs demandent l'organisation d'une large concertation visant à associer les éditeurs, les vendeurs ainsi que La Poste et les collectivités territoriales. Afin de garantir un cadre transparent et un traitement égal de la distribution à tous les éditeurs et vendeurs de presse, madame la ministre, cette initiative pourrait être placée sous l'égide de votre ministère.
Pour ce qui concerne l'effort de soutien à nos librairies, essentielles à la vie de nos quartiers et au dynamisme d'une vie culturelle de proximité, je voudrais insister sur les 89 millions d'euros investis entre 2020 et 2022. Le Gouvernement a été au rendez-vous.
Je souhaite aussi rappeler que l'audiovisuel public joue un rôle majeur en matière d'éducation, de diversité culturelle, de soutien à la création et de divertissement.
Enfin, je salue votre action en faveur du cinéma et de nos salles, que nous devons toujours aider davantage.
Madame la ministre, le groupe Agir ensemble sait combien le Président de la République et vous-même ont à cœur la protection de notre modèle d'exception culturelle dont participent l'ensemble de ces filières. Nous vous réitérons notre confiance pour relever ces défis et abordons ainsi favorablement l'examen des crédits de la mission « Médias, livres et industries culturelles ». Nous voterons donc pour.
Le groupe Mouvement Démocrate et Démocrates apparentés accueille favorablement la hausse importante des crédits alloués aux programmes qui composent cette mission. En 2021, avec plus de 288 millions d'euros, le programme « Presse et médias » connaît une augmentation de près de 3 % de ses crédits, tandis qu'avec plus de 336 millions d'euros, le programme « Livres et industries culturelles » progresse de 3,7 %.
Les crédits viennent ainsi augmenter les fonds dédiés au soutien à la presse, aux politiques du livre et à l'industrie culturelle en cette période de crise. La France, je le rappelle, a été un des rares pays de l'Union européenne à élaborer un plan de relance pour le secteur de la culture. De ce fait, et parce que nous sommes convaincus que la culture demeure un secteur au cœur de l'activité économique française et européenne, notre groupe, aux côtés de l'eurodéputée Laurence Farreng, défendra le principe d'une relance culturelle pour l'Europe.
Pour ce qui est de la France, par la hausse des crédits apportés à cette mission, le Gouvernement marque son attachement à la liberté de la presse et à son pluralisme. Nous saluons en particulier l'augmentation de 15,81 % à la fois en autorisations d'engagement et en crédits de paiement, des crédits de l'action « Soutien aux médias de proximité ». Durant le confinement, la presse de proximité, une fois encore, a su prouver ses capacités d'adaptation et son immense utilité. Elle a aussi beaucoup souffert.
À ce titre, nous regrettons que la presse locale ne soit pas davantage soutenue et accompagnée, notamment dans sa transition numérique. Le groupe Mouvement Démocrate et apparentés défendra en conséquence un amendement pour mieux soutenir et accompagner la presse quotidienne et régionale (PQR) dans sa transition.
Nous sommes également particulièrement attentifs à l'objectif d'une diffusion, la plus large possible, du livre et des pratiques de lecture, notamment dans les territoires insuffisamment couverts. Nous en mesurons l'enjeu fondamental en termes de réussite scolaire, d'égalité des chances et d'éveil des consciences. L'augmentation des crédits du concours particulier de la dotation générale de décentralisation en faveur des bibliothèques est aussi à saluer, afin d'ouvrir celles-ci davantage. Ce vœu est cher au Président de la République.
Concernant le compte de concours financier « Avances à l'audiovisuel public », le plan de transformation du secteur, annoncé en juillet 2018, demeurera une priorité. Les moyens alloués en 2021 restent conformes à la trajectoire quinquennale définie en 2018, avec un effort d'économies de 80 millions d'euros, ramenés à 70 millions, pour permettre le maintien de la chaîne France 4 en 2021.
Par ailleurs, afin de compenser les impacts de la crise sur les comptes des entreprises du secteur, un soutien financier exceptionnel de 70 millions d'euros leur sera accordé dans le cadre du plan de relance. Il permettra aux sociétés de l'audiovisuel public de jouer pleinement leur rôle d'amortisseur face à la crise que traverse tout l'écosystème audiovisuel, artistique et culturel.
Pour ces raisons, notre groupe votera les crédits de la mission « Médias, livre et industries culturelles ».
Le groupe UDI et Indépendants salue l'augmentation des crédits de la mission « Médias, livre et industries culturelles », notamment avec la pérennisation des aides pour la presse. Nous nous réjouissons particulièrement qu'une partie de ces aides concerne plus spécifiquement les territoires d'outre-mer. L'année 2020 aura été particulièrement difficile pour le secteur de la presse, avec la reprise en juillet de Presstalis au bord du dépôt de bilan.
Plus globalement, la crise a accentué les questions que l'on pouvait se poser sur le modèle économique du secteur de la presse. Si un tel soutien est normal, notamment en temps de crise, pourra-t-il être accordé durablement par l'État ? Ainsi, le crédit d'impôt sur les abonnements à la presse IPG, instauré cette année, sera renouvelé pour l'année suivante. A‑t‑il vocation à être pérennisé ?
Dans le même ordre d'idées, à la suite d'une décision de l'autorité de concurrence et des tribunaux français, Google est en passe de trouver un accord avec la presse française concernant l'instauration de droits voisins. Cela pourrait constituer une source de revenus non négligeables mais certaines questions méritent d'être soulevées. Ce type d'accord est-il respectueux de l'esprit des directives européennes que nous avons transposées ? Cette stratégie d'accord, pays par pays, comme le fait Google, est-elle souhaitable ?
Une aide est prévue pour le secteur de la presse en matière de transition écologique, notamment sur les questions d'impressions, mais elle ne semble pas exister pour le secteur du livre. Serait-elle nécessaire ou souhaitable ? Des avancées sont-elles imaginables sur ce point ?
Pour ce qui concerne l'audiovisuel public, je souhaiterais revenir sur le rôle crucial qu'a joué la chaîne France 4 durant le confinement, tant pour assurer la continuité pédagogique que pour fournir une explication simple et ludique de la crise que nous traversions. La chaîne a su prouver qu'elle pouvait se montrer utile et, surtout, attirer des téléspectateurs. La récente loi de programmation pluriannuelle de la recherche a été l'occasion de débattre de la place de la science dans la société. Le constat du manque d'informations scientifiques était partagé par tous.
Enfin, je souhaiterais aborder le problème de notre cinéma. Cette crise semble une spirale infernale pour ce milieu, tant pour la diffusion que pour la réalisation. La plupart des films les plus attendus de l'année ont été repoussés. Nous nous félicitons des 30 millions que vous avez récemment annoncés, madame la ministre, pour venir en aide au cinéma après les annonces sur le couvre-feu. Mais comment faire revenir les clients dans les salles obscures si la situation ne s'améliore pas ?
Malgré ces nombreuses interrogations, nous abordons cette mission budgétaire avec une approche favorable.
Les médias doivent avoir les moyens suffisants pour accomplir leur œuvre d'information en toute liberté et en toute responsabilité, sans subir de pressions, qu'elles soient politiques ou économiques. L'augmentation des aides à la presse, prévue dans le programme 180 est insuffisante pour permettre un véritable pluralisme. Elle ne saurait compenser les baisses successives observées depuis l'exercice 2018. Au-delà de la question des montants alloués, c'est notre système d'aide à la presse qui montre ses limites car ces fonds subventionnent, sans contrepartie, quelques grands groupes et banques, qui possèdent aujourd'hui la plupart des titres de presses. Il faut repenser les aides à la presse, qui devraient s'accompagner de mesures en faveur du pluralisme et contre la concentration des médias.
Pour ce qui concerne le programme 334, nous déplorons le manque d'ambition du texte. La crise sanitaire et la crise économique ne doivent pas servir de prétextes pour retarder les décisions politiques dont les artistes auteurs ont besoin.
Par ailleurs, les crédits alloués au CNL restent constants. Celui-ci aurait pourtant besoin d'un soutien supplémentaire pour mener son action en faveur de la création littéraire.
Enfin, si nous sommes pour l'élargissement des horaires d'ouverture des bibliothèques, nous n'acceptons pas qu'il soit réalisé au détriment des bibliothécaires, qui sont de plus en plus fréquemment sollicités pour travailler le soir et le week-end.
En ce qui concerne le secteur audiovisuel public, vous proposez de poursuivre la cure d'austérité que vous avez lancée il y a deux ans, avec une baisse générale de 2,63 %, en tenant compte de l'inflation. Les conséquences, pour France Télévisions notamment, sont préoccupantes car, à la baisse des crédits proposés, s'ajoute une prévision de perte de chiffre d'affaires publicitaire de 55,1 millions d'euros par rapport aux prévisions initiales et d'importants surcoûts liés à la crise sanitaire. De nombreux emplois sont menacés. La Confédération générale du travail France Télévisions (CGT FTV) rapporte déjà une baisse de plus de 6,8 % des effectifs par rapport au 30 juin 2019. Il faut s'attendre à ce que les plans sociaux se poursuivent.
Les choix budgétaires de ce gouvernement paraissent en totale contradiction avec les orientations stratégiques présentées dans le projet annuel de performance. Comment faire de France Télévisions une référence en matière de fiabilité, de pédagogie et de mise en perspective des événements, sans lui fournir les moyens nécessaires pour financer le journalisme d'investigation, trop souvent sacrifié sur l'autel de l'immédiateté et du sensationnalisme ?
Si l'objectif affiché est de renforcer l'ancrage de France Télévisions auprès des jeunes publics, programmer l'arrêt de France 4 n'a pas de sens. Cette chaîne réalise en effet d'excellentes audiences auprès des jeunes.
Enfin, où se trouve la cohérence quand vous dites vouloir tripler le volume horaire consacré aux programmes régionaux à l'horizon 2022, mais que vous mettez fin à la diffusion des programmes de France Ô début septembre ?
Nous, députés du groupe La France insoumise, ne pouvons pas souscrire à un tel flot d'inepties. Le texte proposé ne répond absolument pas aux défis que nous devons relever et manque clairement d'ambition. Nous voterons contre.
Lors de l'examen des crédits de la mission « Culture », j'ai dit que la crise avait souvent révélé des désordres non seulement conjoncturels, mais structurels. La remarque concerne particulièrement la filière de la presse, pour laquelle la crise sanitaire a été une catastrophe que l'on pouvait prévoir de longue date.
Cette crise structurelle dure depuis fort longtemps. J'en veux pour preuve la baisse du chiffre d'affaires de l'ensemble de la presse d'un tiers en dix ans, de 11 milliards d'euros à moins de 7 milliards d'euros, à laquelle deux crises conjoncturelles se sont ajoutées – la crise sanitaire, et la crise de la distribution, avec la faillite de Presstalis.
Le plan de filière, que j'ai présenté lors d'une rencontre organisée par le directeur de L'Humanité, Patrick Le Hyaric, et dont vous avez rappelé l'ambition – 483 millions d'euros –, a rencontré l'adhésion des acteurs, qui ont salué l'effort du Gouvernement tel qu'il avait été annoncé par le Président de la République et moi-même le 28 août.
À travers les différents véhicules budgétaires, nous avons voulu répondre à la fois à l'urgence et à l'exigence structurelle du plan de relance. Sont prévus un fonds, doté de 31 millions d'euros, pour accompagner la restructuration du parc d'imprimerie de la presse, notamment – nombre d'entre vous l'ont souligné – pour la PQR ; le renforcement massif du Fonds stratégique pour le développement de la presse (FSDP), en soutien à l'investissement ; le doublement de l'aide à la modernisation des diffuseurs en investissement, à hauteur de 6 millions d'euros pendant deux ans ; l'aide, à hauteur de 8 millions d'euros pendant deux ans, à la réalisation de la transition écologique pour la presse, une exigence que Mme Calvez a soulevée ; le lancement d'un fonds de lutte contre la précarité de 18 millions d'euros en direction des métiers les plus fragilisés comme les pigistes, les photojournalistes ou les dessinateurs de presse.
En outre, ce plan de filière – sur lequel vous êtes revenus en abordant les mesures du projet de loi de finances – prévoit un crédit d'impôt pour un abonnement à la presse d'information politique et générale (IPG) et de nouvelles aides pour renforcer le soutien au pluralisme.
Le label IPG est attribué par la Commission paritaire des publications et agences de presse (CPPAP). La notion, jusque-là purement réglementaire, a été élevée au rang législatif lors de la récente révision de la loi relative au statut des entreprises de groupage et de distribution des journaux et publications périodiques, dite loi Bichet. Les décisions de la CPPAP peuvent être contestées devant le juge. Elles le sont d'ailleurs très fréquemment et la plupart de ses décisions sont confirmées. L'octroi du label IPG, qui est au cœur de la politique de défense du pluralisme, repose donc sur des critères objectifs et des procédures transparentes.
L'égalité femmes hommes vous tient à cœur, madame la rapporteure pour avis, et je veux vous féliciter du remarquable rapport que vous avez rédigé sur le sujet, qui est un outil à la fois d'analyse et de décision particulièrement précieux. La question est prise en compte dans les aides à la presse, puisqu'elle fait l'objet de 72 conventions cadres, qui ont été signées avec les éditeurs de presse. Afin d'en renforcer symboliquement l'importance et comme vous l'avez proposé dans votre rapport, l'article 2 du décret relatif au Fonds stratégique pour le développement de la presse (FSDP) sera modifié à l'occasion de la prochaine réforme, pour mentionner le respect de la parité entre les femmes et les hommes au sein des entreprises de presse dans les engagements fixés aux conventions cadre.
La Compagnie internationale de radio et de télévision (CIRT) apporte un soutien important à la radio franco-marocaine bilingue Médi1 à travers la mise à disposition de journalistes francophones. Depuis 1980, la CIRT contribue à la coopération diplomatique entre nos deux pays dans le domaine audiovisuel. Le niveau de dotations qui est sollicité pour 2021 – 1,67 million d'euros – est stable depuis 2017. Il permet d'assurer la couverture des coûts salariaux de ces journalistes francophones. La représentation de l'État au sein de l'assemblée générale de la société est assurée par le ministère de l'Europe et des affaires étrangères. La société transmet annuellement au ministère de la culture ses documents comptables ainsi que les informations relatives à ses charges de personnel. Après analyse, à la suite des questions que vous m'avez posées, tout cela m'est apparu transparent, au bon sens du terme, naturellement.
Pour revenir aux aides à la modernisation de la presse, une réforme du FSDP est en cours pour moderniser et simplifier. Les dispositifs d'aide sont renforcés, notamment en faveur des territoires ultramarins et de l'innovation en faveur de la transition écologique. La protection de la propriété intellectuelle et l'amélioration de la formation deviennent de nouveaux objectifs, avec un fonctionnement simplifié. Les taux d'aide devraient être augmentés, de façon transitoire, jusqu'en 2022, pour soutenir l'investissement des entreprises de presse, durement affecté par la crise. Cinq millions d'euros ont donc été votés en loi de finances rectificative pour l'année 2020. Le FSDP verra ses crédits abondés à hauteur de 45 millions d'euros supplémentaires – 22,5 millions d'euros en 2021, comme en 2022.
Je ne suis pas favorable à une modification du rabais maximum de 9 % que la loi Lang fixe pour les achats de livres non scolaires des collectivités locales. Celles-ci ne pourraient pas assumer un renchérissement du prix du livre sans réduire les achats de bibliothèques. Dans le cadre du plan de relance, nous accompagnerons les collectivités locales pour qu'elles puissent enrichir significativement les collections des bibliothèques en affectant 5 millions d'euros par an pendant deux ans. Ces achats bénéficieront mécaniquement aux libraires.
Les collectivités qui veulent soutenir les libraires disposent par ailleurs d'outils, qui ne sont ni assez connus ni assez employés aujourd'hui. Elles peuvent par exemple les exonérer totalement de leur part de fiscalité locale ou les dispenser des mesures de publicité et de mise en concurrence pour leurs marchés de livres non scolaires dont le montant est inférieur à 90 000 euros hors taxes – on peut acheter un grand nombre de livres avec une telle somme ! Je suis à l'écoute des collectivités sur toutes les pistes qui pourraient être envisagées pour augmenter leur marge de manœuvre vis-à-vis des librairies locales. On pourrait par exemple imaginer de relever ce seuil de 90 000 euros, ce qui pourrait être utile à certaines villes moyennes et d'intercommunalités.
La rémunération pour copie privée constitue non pas une taxe – je me bats pour qu'elle ne soit pas injustement considérée comme telle – mais une compensation équitable destinée à indemniser les auteurs, les artistes-interprètes et les producteurs de phonogrammes ou de vidéogrammes du préjudice causé par l'exception légale de copie privée, qui permet aux usagers de supports d'enregistrement de reproduire licitement les œuvres et prestations protégées à des fins de copie privée, sans solliciter l'autorisation des ayants droit concernés. En conséquence, aux termes du code de la propriété intellectuelle, seuls les supports d'enregistrement dotés d'une capacité de stockage, qui permettent la réalisation de copies, sont susceptibles d'être assujetties à la rémunération pour copie privée. Ce n'est donc pas le cas des enceintes bluetooth, qui ne permettent pas cette copie.
L'arrêt de la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) sur les aides des organismes de gestion collective est, si l'on peut dire, un coup de Jarnac car il pourrait remettre gravement en cause le système français de la rémunération équitable, qui permet de ne pas reverser des sommes perçues aux artistes et aux producteurs non européens en raison de l'absence de réciprocité. Ces sommes sont qualifiées « d'irrépartissables ». Elles sont considérables – environ 30 millions d'euros par an – et apportent une contribution remarquable à la production culturelle française. Une mauvaise rédaction de la législation européenne – les pays n'étaient pas nommément cités, mais qualifiés par défaut – a remis en cause le dispositif, dans un contexte déjà très difficile.
Je remercie Aurore Bergé pour son amendement au projet de loi portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne en matière économique et financière, dite loi DDADUE, qui est venu sécuriser pour le passé le système français d'aides à la création et à la production musicale – c'est une première étape.
Une deuxième étape sera de sécuriser définitivement notre système. J'ai déjà fait part à la Commission européenne de ma préoccupation. Thierry Breton m'a assuré qu'il ne devrait pas être trop complexe, pour le législateur européen, de rétablir une rédaction convenable de ce dispositif. Attendons, car, pour avoir été députée européenne dans une vie antérieure, je sais que les procédures européennes ne sont pas faciles.
Venons‑en à la réforme de la contribution à l'audiovisuel public (CAP), un sujet cher à votre président de commission. Vous connaissez cela par cœur : la suppression complète de la taxe d'habitation en 2023 va priver cette contribution de son véhicule de prélèvement.
Différentes pistes de réforme ont été identifiées par le Gouvernement, qui devront faire l'objet d'un travail d'analyse approfondie. En tout état de cause, quel que soit le scénario retenu in fine, la réforme de la CAP devra permettre à l'audiovisuel public de disposer d'un financement pérenne et affecté. C'est la cathédrale conceptuelle qui doit prévaloir, car elle est indispensable à la visibilité pluriannuelle de la programmation budgétaire des entreprises du secteur ainsi qu'à la préservation de leur indépendance.
Par ailleurs, elle ne doit pas se traduire par la création d'un impôt nouveau, en cohérence avec la politique fiscale conduite par le Gouvernement depuis 2017. Le Président de la République s'est exprimé clairement sur le scénario de budgétisation, pour le rejeter. Tout est donc parfaitement clair en ce domaine. Ne faisons pas de faux procès, ce n'est pas cela qui est en cause.
Pour ce qui concerne l'année 2021, le rendement de la CAP combiné aux efforts d'économies demandées au secteur permet de ne pas augmenter son tarif pour les particuliers – 138 euros par foyer dans l'Hexagone, 88 en outre-mer.
Quant à la prorogation du fonds de soutien à la distribution hertzienne et numérique, elle m'apparaît aujourd'hui prématurée, pour plusieurs raisons. Tout d'abord, une reconduction à l'identique impliquerait que le bénéfice du fonds en 2021 soit conditionné à une baisse du chiffre d'affaires entre 2020 et 2021. Or, il y a de fortes chances que le chiffre d'affaires publicitaire des éditeurs soit en croissance en 2021 par rapport à 2020.
En outre, cela est plus gênant, une telle prolongation remettrait en cause l'argumentaire avancé auprès de la Commission européenne dans le processus de notification des dispositifs, toujours en cours à ce jour. Le dispositif a en effet été présenté comme une mesure d'urgence ponctuelle, destiné à pallier la forte baisse du chiffre d'affaires publicitaire de l'année 2020 par rapport à 2019. L'argument tombe : une prorogation remettrait en cause la nature exceptionnelle de l'aide et son caractère proportionné à l'objectif poursuivi. La Commission européenne portera une attention particulière au respect de notre argumentation et de nos engagements.
L'évolution de la crise sanitaire peut faire craindre que de nouvelles mesures soient prises ; elles seraient sans doute nécessaires, si les chiffres étaient confirmés. Il faudra alors – je me battrai pour cela – continuer de soutenir les acteurs culturels. Il est indispensable d'adopter des mesures sanitaires fortes : le combat sanitaire est absolument prééminent. Je ne peux vous en dire plus, sinon pour vous assurer de mon implication totale lorsqu'il s'agit d'accompagner le secteur ; je l'ai démontrée au cours des mois écoulés, et je poursuivrai ce combat.
Madame Duby-Muller, le Gouvernement a souhaité limiter à la presse IPG le bénéfice du crédit d'impôt sur les abonnements car c'est dans ce cadre que le pluralisme de la presse a été reconnu comme objectif de valeur constitutionnelle : c'est bien cette presse qui vise à éclairer le jugement du citoyen dans le débat public, ce dont nous avons bien besoin aujourd'hui. En outre, une extension de cette dépense fiscale aurait un coût élevé.
En ce qui concerne France Ô, on ne peut pas dire qu'elle rendait les outre-mer visibles au sein de France Télévisions : son audience était très faible, y compris dans les territoires ultra-marins ou parmi les habitants ultra-marins de l'Hexagone. Depuis 2017, le Gouvernement a l'ambition d'améliorer la visibilité des outre-mer dans l'ensemble des offres de France Télévisions, qui a été accrue et est garantie par le pacte pour la visibilité signé en juillet 2019, ses vingt-cinq engagements et ses onze indicateurs, d'ailleurs issus de travaux de parlementaires. Le cahier des charges de France Télévisions intègre désormais un nouvel article dédié aux outre-mer qui reprend nombre des engagements du pacte, dont le comité de suivi a pu vérifier qu'ils avaient tous été mis en œuvre.
Peut-on amplifier et accélérer le mouvement ? Certainement. D'ores et déjà, les programmes ultra-marins occupent davantage de place sur les antennes nationales : leur nombre en première partie de soirée a triplé, la quantité de sujets liés à l'outre-mer dans les journaux télévisés de France 2 et France 3 a augmenté de 80 % et les premières audiences du portail numérique dédié, lancé le 3 juin dernier, sont encourageantes.
Toutes les conditions étaient donc réunies pour mettre France Ô – dont la part d'audience, je le rappelle, était de 0,3 % – à l'arrêt le 23 août dernier, ce qui a en outre permis le passage en qualité haute définition de la diffusion en outre-mer de la Première, qui, elle, est vraiment regardée dans les territoires ultra-marins. C'est bien mieux que de maintenir une chaîne ne correspondant aux besoins ni de la population qui y vit, ni des ultra-marins résidant dans l'Hexagone, ni de la population générale. Je suis le dossier de près avec le ministre des outre-mer.
Monsieur Geismar, nous soutenons bien sûr la presse quotidienne régionale : elle bénéficie pleinement des aides au pluralisme comme des aides à la modernisation dans le cadre du FSDP – doté de 50 millions d'euros par le plan de filière –, notamment pour ses investissements numériques. En outre, dans le cadre du plan de relance, la restructuration des imprimeries bénéficiera de 36 millions d'euros. Il me semble, en première analyse, que votre amendement conduirait à accroître les crédits destinés aux médias sociaux de proximité, déjà tout à fait suffisants et rehaussés de 250 000 euros dans le PLF, et non ceux alloués à la PQR.
J'en viens à France 4. De quoi avons-nous besoin ? D'une chaîne pour le confinement, qui supplée à l'impossibilité pour les enfants et les jeunes de se rendre à l'école ? Étant donné la variété des programmes, des filières, des publics considérés, ce serait un rêve absurde. D'une chaîne jeunesse ? Tirer argument de son utilisation pendant le confinement serait alors tout aussi absurde. D'une chaîne éducative ? Nous avons assurément besoin de médias éducatifs qui complètent l'enseignement en période de crise comme en période normale, mais cela suppose de réfléchir de manière globale aux pratiques des jeunes, qui ne regardent plus guère la télévision. Il faut donc se tourner vers d'autres médias, comme on l'a fait en développant l'offre sur smartphone et plus généralement sur internet, avec Okoo et Lumni. Cela permet un accompagnement beaucoup plus varié – Lumni propose déjà 10 000 programmes éducatifs.
Il n'est pas question de revoir les ambitions de France Télévisions en matière d'animation : l'accord que la société a conclu pour la période 2019-2022 avec les organisations représentatives du secteur audiovisuel garantit le maintien d'un haut niveau d'investissement – 32 millions d'euros – dans ce domaine et propose des conditions d'exploitation de ces programmes adaptées au lancement d'une offre numérique destinée aux enfants.
Plaçons-nous du point de vue des enfants et des enseignants. De quoi ont-ils besoin ? Qu'est-ce que nos enfants vont regarder ? De quels outils vont-ils se servir ? Je ne plaiderai pas pour une chaîne dont j'espère qu'elle va servir de moins en moins. On ne peut pas dédier une chaîne au confinement, c'est-à-dire au rôle d'outil éducatif nécessairement parcellaire.
J'ai voulu prolonger l'existence de France 4 pour que cette réflexion puisse avoir lieu autrement que dans l'urgence. Je serai évidemment attentive à vos observations. Mais adoptons une perspective dynamique, en nous demandant quelle sera l'évolution d'ici dix ou quinze ans.
Je suis particulièrement attaché au Centre national de la musique (CNM), ayant été à l'origine du rapport de préfiguration puis de la proposition de loi – votée à l'unanimité – qui ont débouché sur sa création le 1er janvier 2020. Il joue un rôle actuellement indispensable. Je profite de l'occasion pour féliciter ses équipes, qui, sous la responsabilité de Jean-Philippe Thiellay et de Romain Laleix, ont accompli un travail formidable et exemplaire pour s'adapter aux urgences.
À plus long terme, la viabilité du modèle économique du CNM est-elle hypothétique ? Vous avez déjà répondu à propos de la récente décision de la Cour de justice de l'Union européenne et des 25 millions d'euros d'« irrépartissables » qui financent la création par l'intermédiaire des organismes de gestion collective. Mais qu'en est-il de pistes de financement pérennes comme la fiscalité numérique sur Google et YouTube ou de nouvelles recettes sur les équipements audio ?
Merci de saluer la création du CNM et l'action de Jean-Philippe Thiellay – qui a fait ses classes à l'Opéra, c'est dire si c'est un homme de qualité ! En ce qui concerne la pérennité des moyens du CNM, on peut dire que nous l'avons garantie, cette année en tout cas, de façon grandiose – à la hauteur des enjeux et des besoins du secteur.
Je rappelle en effet que le plan de relance alloue au CNM 210 millions d'euros, dont 175 en 2021 et 35 en 2022, pour qu'il mette en œuvre un plan de soutien à la filière musicale. En mars 2020, le CNM a suspendu la perception de la taxe sur les spectacles et mobilisé l'intégralité de ses moyens pour constituer un fonds de secours destiné aux PME du spectacle vivant. En mai, le niveau d'intervention de ce fonds a été relevé et, grâce à une dotation d'1 million d'euros, un fonds de secours à la musique enregistrée et à l'édition musicale a été créé. En juillet, grâce à la dotation prévue en loi de finances rectificative, le CNM a pu bénéficier de 50 millions d'euros supplémentaires et étendre son périmètre d'action. Début octobre a été instauré un mécanisme de compensation des pertes d'exploitation liées aux contraintes de jauge, pour 42 millions d'euros. Les aides financières dispensées dans le cadre de ces fonds ont vocation à compléter les dispositifs de droit commun mis en œuvre par l'État.
Je ne me fais donc aucun souci quant aux moyens dont bénéficie le CNM : ils lui permettront de financer un secteur qui est en grande difficulté. Je vous renvoie à l'excellent article paru aujourd'hui dans Le Monde au sujet de la filière musicale.
Le projet de loi de finances pour 2021 a l'étrange particularité de réduire de 70 millions d'euros les crédits alloués aux entités de l'audiovisuel public, mais de doter ces derniers du même montant dans le cadre du plan de relance. Pourquoi ne pas assumer que la trajectoire budgétaire décidée par le Gouvernement en 2018 était une erreur et qu'il faut l'abandonner ?
S'agissant de la CAP, vous avez en partie répondu en nous expliquant qu'une réflexion était en cours à son propos au sein de votre ministère. Elle est indispensable à l'audiovisuel public, mais son fait générateur – le fait de posséder une télévision – est obsolète. Pouvez-vous nous donner des éléments de calendrier à ce sujet ?
Concernant France 4, nous restons opposés à sa fermeture. N'oublions pas que tous les enfants n'ont pas accès à tous les supports média ni à des outils payants.
Entre les 70 millions d'euros de la trajectoire budgétaire de l'audiovisuel public et les 70 millions d'euros du plan de relance, il n'y a rien d'autre qu'une coïncidence, dont je comprends qu'elle puisse être source de confusion. La trajectoire budgétaire de l'audiovisuel public, destinée à rationaliser les dépenses du secteur, prévoyait, à l'origine, une économie de 80 millions, que nous avons ramenée à 70 millions pour tenir compte du maintien de France 4. Puis est arrivée la catastrophe de la crise sanitaire : pour maintenir à flot les finances de l'audiovisuel public, sévèrement malmenées, comme celles de bien d'autres pans du secteur culturel, il a fallu lui allouer 70 millions. Il n'existe donc aucune corrélation entre ces deux mouvements : d'un côté, une trajectoire structurelle ; de l'autre, un sauvetage conjoncturel.
Le rapport au livre et à la lecture est probablement l'un des éléments les plus essentiels à l'émancipation, notamment des plus jeunes. Pourtant, 347 quartiers prioritaires de la politique de la ville restent dépourvus de bibliothèque. Ne devraient-ils pas être prioritaires dans le cadre d'un programme de construction de bibliothèques ?
Nous souhaitons, si les annonces que l'on a pu entendre devaient se confirmer au cours des prochains jours, que les librairies soient considérées comme un commerce essentiel. Je crois pouvoir dire que ce souhait est partagé.
Concernant enfin France 4, nous sommes très attentifs à son maintien, car nous croyons à la télévision, et à la télévision publique, pour préserver le lien avec les plus jeunes. Ne les habituons pas à aller dès l'âge le plus tendre vers d'autres écrans que ceux qui sont le support d'une diffusion linéaire susceptible de les protéger. Il existe une véritable complémentarité entre le linéaire et le non‑linéaire. En tout cas, nous croyons résolument en l'audiovisuel public.
Moi aussi !
Les 15 000 bibliothèques françaises constituent le premier équipement culturel du territoire. Elles sont engagées dans une transformation consistant à proposer de nouveaux services et à prolonger leur durée d'ouverture. Car la bibliothèque ne peut se réduire à un lieu statique où l'on entrepose des livres destinés à être loués pour un temps : ce doit être un lieu d'animation culturelle et de rencontres. La conception un peu poussiéreuse des bibliothèques doit évoluer pour qu'elles apportent quelque chose de plus que les services du numérique.
À la suite du rapport d'Erik Orsenna, le Gouvernement a lancé en 2018 le plan bibliothèques pour encourager cette dynamique. On peut déjà noter plusieurs améliorations. En ce qui concerne les horaires d'ouverture, on comptait, fin 2019, 343 projets aidés ayant conduit à accroître l'amplitude horaire de huit heures trente par semaine dans 623 collectivités. En 2021 et 2022, je poursuivrai la mise en œuvre de ce plan et j'amplifierai le soutien accordé par l'État aux collectivités territoriales pour leurs bibliothèques : grâce au plan de relance, 15 millions d'euros lui sont réservés en 2021, puis à nouveau en 2022, en particulier pour permettre la rénovation énergétique des bâtiments et poursuivre l'extension de leur durée d'ouverture ; ainsi, le soutien de l'État à l'investissement dans les bibliothèques territoriales dépassera pour la première fois 100 millions d'euros.
Pendant le confinement, les bibliothèques ont offert davantage de ressources numériques – parfois, je le reconnais, au détriment de l'imprimé. J'ai donc décidé de soutenir l'achat de livres par les bibliothèques ; 5 millions d'euros y seront consacrés en 2021 puis en 2022. Cela profitera à l'ensemble de la filière. En 2021, 2 millions supplémentaires seront consacrés aux contrats territoire-lecture (CTL), plébiscités par les collectivités et primordiaux pour ramener certains publics vers le livre papier, le vrai livre, de ceux qui vous poursuivent et vous guident toute votre vie – chacun de nous a dans sa bibliothèque un livre chéri, lu et relu, et ce n'est pas toujours Le Petit Prince !
Moi, c'était Le Comte de Monte-Cristo : « attendre et espérer »…
Merci, madame la ministre.
La commission examine ensuite, pour avis, les crédits de la mission « Culture » (Mme Valérie Bazin-Malgras, rapporteure pour avis).
Article 33 et État B
La commission est saisie de l'amendement II-AC72 de Mme Muriel Ressiguier.
Par cet amendement, nous souhaitons supprimer le pass Culture et attribuer ses fonds à un nouveau programme intitulé « Démocratisation de la culture ».
Le PLF pour 2021 propose une montée en puissance du pass Culture pour toucher 200 000 jeunes, c'est-à-dire doubler son public. Une enquête publiée par Mediapart en novembre 2019 révèle pourtant que « le livre arrive en tête des dépenses du pass mais se dirige surtout vers les classiques programmés dans le cadre scolaire, suivi de la musique, dont les trois quarts vont vers la plateforme de streaming Deezer ». De plus, les jeunes n'ont dépensé que 100 euros sur les 500, expliquait Damien Cuier, président de la société pass Culture, le 23 octobre 2019 devant le Conseil national des professions du spectacle.
L'utilité du dispositif pose de plus en plus de questions. Les crédits qui lui sont alloués seraient plus utiles s'ils étaient orientés vers une véritable démocratisation de la culture.
Je ne comprends pas bien la structure de votre amendement : vous créez un programme, « Démocratisation de la culture », pour lui transférer les crédits du programme qui porte quasiment le même nom, « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture ».
Par ailleurs, vous souhaitez supprimer le pass Culture au profit d'un « dispositif [de démocratisation de la culture] plus pertinent ». Mais quel serait ce dispositif plus pertinent ?
Il me semble pour l'instant disproportionné de parler d'un « échec » à propos du pass Culture, et inapproprié de retirer au dispositif l'ensemble de ses financements.
Avis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Elle examine ensuite l'amendement II-AC73 de Mme Muriel Ressiguier.
Les crédits alloués aux musées pour 2021 ne permettront pas de compenser les difficultés qu'ils rencontrent depuis le début de la crise sanitaire. Aux mois de juillet et d'août, leur fréquentation a baissé d'au moins 70 % : leurs pertes liées au confinement n'ont donc pas pu être compensées, bien au contraire. Nous proposons donc de créer un fonds d'aide aux musées afin de les soutenir dans leur activité l'année prochaine.
L'État a joué son rôle d'amortisseur depuis le début de la crise sanitaire, notamment en inscrivant en loi de finances rectificative des mesures d'urgence destinées à ses opérateurs, dont une hausse de leurs subventions afin de leur garantir une trésorerie suffisante et de leur éviter un défaut de paiement. Le musée d'Orsay, le Louvre, le château de Versailles ont reçu des crédits supplémentaires dès 2020. De plus, les crédits de l'action 03, « Patrimoine des musées de France », augmentent de 4 % en 2021. Enfin, le plan de relance prévoit des moyens très importants pour les grands musées nationaux.
Par ailleurs, vous créez un nouveau programme alors que le programme « Patrimoines » comporte une action consacrée aux musées. L'idée d'un fonds de soutien aux musées n'apparaît donc pas pertinente : il est déjà possible de renforcer le soutien budgétaire de l'État aux musées.
Avis défavorable.
Vous étiez beaucoup plus critique vis-à-vis du budget lorsque vous étiez assise parmi vos collègues LR : maintenant, j'ai l'impression d'entendre une rapporteure de La République en marche !
La commission rejette l'amendement.
Elle examine alors les amendements II-AC65 de Mme Brigitte Kuster et II-AC90 de la rapporteure pour avis.
Nous faisons état depuis un certain temps de nos réserves vis-à-vis du pass Culture ; la ministre elle-même en a aussi exprimé quelques-unes. Nous souhaitons donc que 20 millions d'euros soient pris sur les fonds qui sont alloués à la poursuite de l'expérimentation – et dont on a vu qu'ils étaient nettement sous-consommés – pour être affectés au patrimoine.
Mon amendement vise à transférer 10 millions d'euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement du programme 361, « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture », vers le programme 175, « Patrimoines ».
En effet, les crédits de l'action 02, « Soutien à la démocratisation et à l'éducation artistique et culturelle », du programme 361 s'élèvent à 222 millions d'euros et leur utilisation est présentée de façon très floue. Les dispositifs sont multiples et diffus. Parmi ces crédits, 10 millions d'euros pourraient être mieux employés à soutenir l'entretien et la rénovation des monuments historiques appartenant à de petites communes ou à des propriétaires privés. Nous proposons donc d'affecter cette somme à l'action 1, « Monuments historiques et patrimoine monumental », du programme 175, « Patrimoines ».
Je suis par ailleurs favorable à l'amendement II-AC65 : le pass Culture n'a profité qu'à 100 000 jeunes de quatorze départements depuis 2019 ; il aurait dû être étendu en avril dernier, mais le confinement a tout arrêté. Il semblerait que le Gouvernement envisage de revoir ses ambitions en réduisant le montant offert à chaque jeune ; dommage pour ces jeunes à qui l'on promet, depuis 2017, 500 euros de crédit pour leurs 18 ans ! Compte tenu de ces incertitudes, et en attendant que des décisions soient enfin prises, les 20 millions d'euros supplémentaires alloués au pass Culture pourraient être utilisés à bon escient ailleurs, notamment au profit de la restauration du patrimoine.
La ministre a déjà en grande partie répondu tout à l'heure, en justifiant l'abaissement de 500 à 300 euros du montant du pass et en souhaitant sa généralisation, que nous avons tous ou presque appelée de nos vœux. Le dispositif, expérimenté dans certains territoires seulement, souffre en effet d'un manque de lisibilité. En l'état, le budget est donc pertinent. Le groupe La République en marche votera contre les amendements.
Nous sommes nous aussi sceptiques quant à la capacité du pass Culture à atteindre ses objectifs. Surtout, madame la rapporteure pour avis, je n'ai pas compris pourquoi vous étiez défavorable à l'amendement défendu par M. Larive à ce sujet alors que vous approuvez celui défendu par Mme Le Grip, quasi similaire même s'il n'est pas gagé de la même façon.
Ces amendements ne proposent pas la même chose. M. Larive veut supprimer tout financement du pass Culture alors que nous proposons, puisque le dispositif tâtonne, de répartir différemment les crédits dont il bénéficie en en réattribuant une partie à la restauration du patrimoine.
La commission rejette successivement les amendements.
Elle en vient à l'amendement II-AC75 de Mme Béatrice Descamps.
Parce que l'école est souvent, pour les jeunes, le seul accès à la culture, notre amendement vise à lui donner des moyens à cette fin, que ce soit dans des lieux dédiés ou au sein même des établissements. Il s'agit également de permettre aux acteurs culturels de continuer d'exister et de pratiquer leur art pendant la crise sanitaire.
Demande de retrait. S'il est exact que la crise sanitaire a éloigné les élèves de la culture, je ne suis pas convaincue que ce soit là une question d'argent. La crise a freiné beaucoup de projets, les sorties scolaires sont quasiment gelées. Catherine Pégard, présidente de l'établissement public du château de Versailles, actuellement vide, m'a demandé d'inviter les écoles à y envoyer des classes en visite : les enfants y seront bien accueillis, en toute sécurité sanitaire. Plus généralement, il faut emmener les élèves au musée et au spectacle.
J'avais défendu un amendement similaire l'année dernière : il s'agit bien d'aider les écoles, qui manquent de moyens, en temps ordinaire et non seulement en temps de crise, afin d'apporter tous les bienfaits de la culture aux nouvelles générations. Je n'ai parlé de la crise sanitaire qu'à propos du second avantage de l'amendement : le soutien aux artistes.
La commission rejette l'amendement.
Elle en vient ensuite à l'amendement II-AC66 de Mme Béatrice Descamps.
Les scènes nationales, l'un des poumons de la création et de la vie artistiques dans notre pays, ont été, comme de nombreux autres acteurs du milieu de la culture, très affectées par les conséquences de la crise sanitaire, notamment par les annulations de spectacles et les remboursements de billets qu'elles ont entraîné. Nous proposons donc d'attribuer 10 millions d'euros à l'action 1, « Soutien à la création, à la production et à la diffusion du spectacle vivant », du programme 131, « Création », au détriment de l'action 7, « Fonctions de soutien du ministère », au sein du programme 224, « Soutien aux politiques du ministère de la culture ».
La commission rejette l'amendement.
Puis elle est saisie des amendements II-AC86, II-AC84, II-AC82 et II-AC83 de Mme Sophie Mette.
L'amendement II-AC86 a pour objet de soutenir l'architecture et les espaces protégés et, plus particulièrement, la revitalisation des centres anciens : il vise à redonner l'envie de fréquenter les centres bourgs et d'y vivre.
Restaurer l'attractivité des centres bourgs demande des actions fortes en matière d'habitat afin, notamment, de résorber la vacance et les situations d'insalubrité, mais aussi pour le maintien des commerces et des services de proximité, une offre d'équipements adaptée, l'offre culturelle et touristique par l'animation culturelle et la valorisation du patrimoine bâti et paysager, la mobilité, l'accessibilité, le développement économique, la desserte numérique, ou encore pour conforter la présence de centres bourgs dynamiques et animés dans les campagnes et les zones périurbaines.
Il s'agit donc d'une action complète et combinée, agissant sur tous les leviers susceptibles d'améliorer la qualité de vie dans les centres bourgs mais également dans les bassins de vie, de réduire la désertification des centres villes des territoires ruraux et, ainsi, de contribuer à la cohésion sociale des territoires, à leur mise en valeur et à leur attractivité.
Le budget de l'action 2, « Architecture et espaces protégés », du programme 175, « Patrimoines », n'évoluant pas depuis 2018, il faut redéployer des crédits à son profit pour lui donner un nouveau souffle au service de cette politique ambitieuse.
L'action 7, « Fonctions de soutien de ministère », du programme 224, « Soutien aux politiques du ministère de la culture », doit être rationalisée pour pouvoir dégager des fonds. Le ministère doit s'engager davantage dans un processus de réduction des coûts, en particulier immobilier, mais aussi de dépenses de fonctionnement. En redéployant ces crédits, nous n'entravons pas la transmission du savoir : au contraire, cet amendement protège notre patrimoine et assure à tous un accès au savoir. Il permet simplement de réaffecter une partie des crédits alloués aux dépenses d'investissement et de fonctionnement.
Nous proposons donc de redéployer une partie des crédits de paiement dévolus à l'action 7 du programme 224 au bénéfice de l'action 2 du programme 175, l'une des rares lignes budgétaires qui ne connaît pas d'augmentation cette année.
Les autres amendements sont de repli.
Je partage l'ambition de revitaliser les centres anciens de nos villes, mais que sont 4 millions d'euros pour l'ensemble des centres bourgs de France ?
La mission « Culture » n'apporte qu'un soutien à la politique générale du plan national « Action cœur de ville » et du programme « Petites villes de demain », qui dépendent du ministère de la cohésion des territoires. En revanche, de la mission « Culture » relève déjà la dépense fiscale prévue dans la loi Malraux, qui permet une réduction d'impôt sur le revenu au titre des dépenses de restauration d'immeubles bâtis situés dans les sites patrimoniaux remarquables.
De plus, la mission participe à la revitalisation des centres anciens par un soutien à la réhabilitation du patrimoine monumental de ces villes et villages. Le maire de Villiers‑le‑Bois, petite commune de ma circonscription, m'a raconté ses difficultés à faire restaurer l'église du village qui menace de s'écrouler et qui est actuellement fermée. C'est en faveur de ce type de dispositif que le ministère de la culture doit œuvrer, plutôt que pour des actions qui relèvent d'autres ministères.
Demande de retrait.
Les amendements sont retirés.
La commission aborde alors l'amendement II-AC64 de Mme Marguerite Deprez‑Audebert.
Cet amendement propose de soutenir les harmonies musicales, les batteries de fanfares et autres sociétés musicales, en totale adéquation avec l'objectif gouvernemental de corriger la fracture culturelle entre les zones rurales et les métropoles et de démocratiser l'accès à la culture en faveur des citoyens les plus modestes.
Ces formations favorisent en effet la création de lien social, les échanges intergénérationnels, permettent de mettre en valeur les cérémonies patriotiques et contribuent au maintien d'un service public culturel de qualité dans les territoires. Mais leur santé financière est souvent précaire, car les subventions des collectivités locales sont de plus en plus aléatoires.
En raison de la pandémie du covid-19, l'appel à projets initialement prévu pour mars 2020 n'a pas eu lieu. Il apparaît nécessaire de relancer ce dispositif au moyen d'un montant de ressources similaire à celui retenu l'année dernière.
Les fanfares et les harmonies musicales sont effectivement très importantes dans nos territoires ; leur participation aux festivités traditionnelles, notamment, est essentielle.
Cependant, il conviendrait d'examiner la question dans une perspective bien plus large, celle du soutien de l'État aux associations culturelles dans le domaine de la musique. Cela permettrait d'intégrer à la réflexion les chorales ou les orchestres amateurs.
En outre, le contexte sanitaire n'est malheureusement pas favorable aux rassemblements festifs dont la réussite dépend en partie de l'intervention des associations musicales. Il ne me semble donc pas propice à une relance de l'appel à projets initialement prévu en mars 2020. Je soutiendrai un tel dispositif une fois que la situation sera favorable.
J'espère vous avoir convaincue, chère collègue, de retirer votre amendement. Sinon, j'y serai défavorable.
L'amendement est retiré.
La commission est saisie de l'amendement II-AC78 de Mme Béatrice Descamps.
Depuis une quinzaine d'années, les quarante-quatre écoles supérieures d'art et design publiques qui délivrent des diplômes nationaux dans le cadre du LMD se sont réformées pour intégrer pleinement le système de l'enseignement supérieur. Aux termes de la loi Fioraso et de la loi relative à la liberté de la création, à l'architecture et au patrimoine, elles doivent mener des actions de recherche, ce qu'elles font dans le cadre de programmes et de troisièmes cycles financés par le ministère de la culture.
Mais ce financement est resté au stade d'amorce : très sous-dimensionné, il ne comprend pas de part pérenne ; les fonds ne sont distribués que par le biais d'un appel à projets. L'actuelle enveloppe d'1 million d'euros consacrée à la recherche et répartie entre les actions 1 et 4 du programme 361, qui n'a pas évolué depuis de nombreux exercices. Elle ne représente dans les faits que 18 000 euros en moyenne par école pour financer le fonctionnement des unités de recherche, la production, la diffusion et la valorisation des projets, les missions de recherche des enseignants, les troisièmes cycles, les bourses pour les étudiants de troisième cycle : c'est impossible et cela met en péril la validité des diplômes nationaux. En outre, le plan de relance ne prévoit pas de financement complémentaire pour le fonctionnement des écoles supérieures d'art.
La loi de programmation de la recherche est une première étape. Le financement de la recherche culturelle et de la création est dorénavant inscrit à l'ordre du jour du Gouvernement. Nous espérons une nouvelle étape ce soir !
J'ai pu auditionner l'Association nationale des écoles supérieures d'art et je suis sensible à la demande d'alignement du statut de ces écoles sur celui des écoles nationales, sujet à propos duquel les différents ministères se renvoient la balle. Cela me semble un préalable à l'affectation de crédits supplémentaires à la recherche dans ces écoles.
Demande de retrait.
Mme Descamps soulève une question très intéressante et importante, mais l'enjeu est d'abord de savoir de quel type de recherche on parle : outre les écoles d'art, dans d'autres établissements comme l'école du Louvre, les troisièmes cycles, qui devraient correspondre à un doctorat, souffrent d'un déficit d'image. Comme l'a dit la rapporteure, le problème n'est donc pas d'abord budgétaire. Comment accompagner les établissements dans la mise en œuvre de leur projet pédagogique et scientifique pour qu'ils puissent revaloriser leurs diplômes et jouer à armes égales avec l'université ?
La commission rejette l'amendement.
Elle en vient ensuite à l'amendement II-AC89 de la rapporteure pour avis.
Cet amendement vise à permettre la prise en charge des frais d'inscription des étudiants boursiers dans les écoles d'art territoriales.
Contrairement à ce qui est prévu pour les étudiants des universités et des établissements nationaux, l'État ne permet pas aux écoles supérieures territoriales délivrant des diplômes relevant du ministère de la culture d'exonérer les boursiers des frais d'inscription, car il ne leur accorde aucune compensation. Ce serait pourtant cohérent avec l'insistance du Gouvernement sur l'égalité réelle et sur les conditions de vie étudiante.
Je propose donc d'attribuer 2,5 millions d'euros supplémentaires à l'action 1, « Soutien aux établissements d'enseignement supérieur », du programme 361, « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture », pour que les écoles supérieures d'art territoriales puissent exonérer les étudiants boursiers des frais d'inscription. Ces 2,5 millions d'euros sont calculés pour un taux d'élèves boursiers de 45 %, soit 4 275 étudiants, et pour un montant moyen de frais d'inscription de 600 euros.
Ces 2,5 millions seront prélevés sur le programme 175, « Patrimoines », plus précisément son action 1, « Monuments historiques et patrimoine monumental », au titre du financement des travaux du Grand Palais. En effet, l'État a renoncé aux aspects les plus pharaoniques de ce projet sans pour autant revoir à la baisse le budget global des travaux.
Je suis un peu surprise de cet amendement. Il me semble, à la lumière des travaux que j'ai effectués avec Mme Colboc sur les écoles supérieures d'art territoriales, que la situation y est différente de ce qui vient d'être décrit. Il existe bien des systèmes de bourse ; simplement, certaines écoles y recourent, d'autres non, et, surtout, les bourses sont versées avec beaucoup de retard.
La proposition émane des représentants des écoles d'art eux-mêmes : je suis encline à leur faire confiance.
La commission rejette l'amendement.
Elle aborde ensuite l'amendement II-AC88 de Mme Sophie Mette.
Cet amendement vise à proposer une nouvelle répartition des crédits de la mission « Culture » afin de soutenir notre patrimoine linguistique. En effet, les langues régionales font partie intégrante de notre culture, de notre histoire et de notre patrimoine, comme l'indique l'article 75‑1 de la Constitution. Or elles sont en danger d'après l'UNESCO, et l'école comme l'ensemble des politiques culturelles devraient être des relais de leur diffusion. Il convient d'œuvrer à pérenniser leur pratique, car elles contribuent à la vitalité de notre territoire en participant à la valorisation de nos traditions et favorisent la transmission d'une mémoire.
Vous proposez le transfert de crédits vers l'action 3 « Langue française et langues de France » du programme 361 « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture ». Or cette action finance principalement des études, et ne soutient aucun dispositif dirigé directement vers le public. De plus, elle concerne plutôt la francophonie et les mécanismes de soutien à la maîtrise de la langue française que la protection des langues de France.
Il serait plus pertinent de renforcer l'apprentissage des langues régionales dans les établissements scolaires et de soutenir les associations qui les promeuvent, ce qui ne relève pas de la mission budgétaire « Culture ».
J'espère vous avoir convaincue de retirer votre amendement, sinon j'y serai défavorable.
L'amendement est retiré.
La commission émet un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Culture » sans modification.
Puis la commission examine, pour avis, les crédits de la mission « Médias, livre et industries culturelles » (Mme Céline Calvez, rapporteure pour avis).
Article 33 et État B
La commission est saisie des amendements II-AC79 de Mme Aurore Bergé et II‑AC81 de M. Bruno Studer.
Nous souhaitons prolonger l'activité du fonds de soutien spécifique à la diffusion hertzienne et numérique en faveur des radios privées et des télévisions locales. Leurs recettes publicitaires ont chuté. Or elles constituent un écosystème important dans notre pays. Nous appelons le Gouvernement à prolonger son soutien en 2021.
Vous souhaitez proroger le dispositif exceptionnel de soutien à la diffusion hertzienne, décidé dans le PLFR3.
Ce soutien est une excellente chose, mais deux arguments justifient la fin de ce dispositif. D'une part, le fonds de soutien est défini de telle sorte que pour en bénéficier, les revenus de 2021 devront être inférieurs à ceux de 2020, ce qui ne devrait pas être le cas. D'autre part, ce fonds de soutien a été présenté comme temporaire à la Commission européenne. Le prolonger pourrait remettre en cause l'appréciation de cette dernière.
Cela étant, nous comprenons bien la justification de ces amendements d'appel, la situation des radios privées et des télévisions locales étant très incertaine. Nous pourrons en débattre lors de l'examen du PLFR4 si nous constatons que leur situation est encore pire qu'en juillet, lorsque nous avions voté le PLFR3.
Je pense que nous serons amenés à en discuter dans le PLFR4, car je crains que la situation de nos médias ne s'améliore pas à brève échéance. J'accepte de retirer l'amendement II-AC79.
Les amendements sont retirés.
La commission est saisie de l'amendement II-AC49 de M. Michel Larive.
Les crédits de paiement alloués à la HADOPI sont stables, à 8,65 millions d'euros, mais pour quel bilan ?
Le site Next INpact révèle que la HADOPI a coûté mille fois plus cher qu'elle n'a rapporté à l'État français. En réalité, les usages se sont modifiés : le streaming illégal a remplacé le téléchargement ; les usagers utilisent facilement un réseau privé virtuel qui les localise à l'étranger et l'offre légale s'est développée.
Nous proposons donc de transférer les crédits alloués à la HADOPI à un fonds de soutien aux auteurs et aux créateurs. En effet, la concertation annoncée avec les auteurs et les créateurs sur leur protection sociale, leur régime fiscal et leur représentativité n'a abouti à aucune mesure concrète. Le rapport Racine a été remis au ministre de la Culture début janvier, et nous en sommes toujours à une phase de dialogue, alors que les difficultés des auteurs et des créateurs sont largement connues et que les solutions ont été exposées depuis des mois. Nous proposons donc de créer une ligne budgétaire en faveur des artistes et des créateurs.
Vous appelez à la création d'un fonds de soutien aux artistes et aux créateurs. Le Gouvernement et cette majorité s'attachent à les soutenir par des mesures d'urgence et y consacrant une partie du plan de relance.
Mais votre amendement semble surtout avoir pour objet principal de supprimer la HADOPI. Vous estimez qu'elle a coûté mille fois plus cher qu'elle n'a rapporté : il est étonnant de juger de son utilité à l'aune des amendes qu'elle a perçues. Qui jugerait de l'utilité d'une autorité de police au montant des amendes qu'elle impose ? La HADOPI est utile, car les comportements illégaux cessent dans l'immense majorité des cas après le premier ou le deuxième avertissement. La supprimer nuirait à la lutte contre le piratage.
Nous avons d'ailleurs proposé au printemps la fusion du CSA et de la HADOPI, pour renforcer la lutte contre les différentes formes de piratage. Avis défavorable.
Vous aidez les créateurs par des mesures d'urgence ; moi, je vous propose de créer un fonds pour les aider à long terme.
Par ailleurs, vous prétendez que la HADOPI obtient des résultats : j'aimerais bien les connaître. Qu'on nous les montre, nous pourrons en discuter.
La HADOPI publie ses résultats chaque année et son président, Denis Rapone, saura se rendre disponible pour vous les présenter. J'espère d'ailleurs que nous aurons l'occasion de le revoir très vite pour faire évoluer le cadre de la régulation, puisque la ministre a fait part de sa volonté de présenter un projet de loi en ce sens.
La commission rejette l'amendement.
Elle examine l'amendement II-AC69 de Mme Muriel Ressiguier.
Le système actuel des aides à la presse ne garantit pas le pluralisme indispensable au fonctionnement de notre démocratie. Ces aides sont insuffisantes pour permettre le pluralisme car elles vont directement dans les comptes de milliardaires, de grands groupes et de banques qui possèdent la plupart des titres de presse.
Nous proposons donc la création d'un programme budgétaire intitulé « Pluralisme de la presse », dont les fonds sont prélevés sur ceux alloués à l'HADOPI.
Par cet amendement d'appel, vous entendez dénoncer le système actuel des aides à la presse qui, selon vous, ne garantit pas le pluralisme indispensable à notre démocratie.
Nous sommes évidemment attachés au pluralisme, et il est toujours possible de le parfaire. Mais nous sommes loin de l'image que vous dépeignez : 110 millions d'euros sont consacrés aux aides à la presse, 88 millions aux aides au transport postal, et l'AFP bénéficie également d'un soutien. Ces dotations vont être dopées par le plan de relance, qui y consacre 483 millions d'euros jusqu'en 2022.
Ces aides avoisinent 22 % du chiffre d'affaires du secteur, c'est considérable. Et elles ne bénéficient pas prioritairement aux grands groupes de presse, comme vous le prétendez, à moins de considérer que l' Humanité en fait partie ! L' Humanité a reçu 3 millions d'euros d'aides directes en 2017. Avis défavorable, ou demande de retrait.
Sachez que 90 % de la presse est détenue par neuf milliardaires, nous sommes loin de la pluralité.
Cette obsession de prendre le budget de la HADOPI revient à opposer les auteurs ou la presse à la lutte contre le piratage. Or s'il y a bien un objectif que nous devrions tous partager dans cette commission, c'est celui de lutter contre le piratage, qui est de fait un pillage des œuvres et des créateurs.
En outre, dans la ligne budgétaire créée, qui serait juge de la pluralité de la presse ? Aujourd'hui, les aides à la presse aident toute la presse, sans exclusivité. Cela est d'ailleurs parfois reproché car certains titres peuvent étonner une partie du public, mais ils montrent que c'est justement l'intégralité de la presse qui est soutenue.
Avec votre amendement, quel Politburo décidera de qui est éligible ou non au programme « Pluralisme de la presse » ? Qui aura le droit d'exister et qui ne sera pas soutenu parce qu'il ne serait pas dans la bonne ligne ?
Au contraire, c'est la manière actuelle dont les aides sont attribuées qui assure le pluralisme de la presse.
Cher collègue, permettez-moi de mettre en doute les chiffres que vous avez cités. Ils sont probablement vrais au niveau international, mais nous sommes là pour voter le budget de la France. Aussi, j'aimerais les remettre sur le tapis et parler des tirages par jour. Le premier quotidien national, avec 800 000 tirages par jour, c'est Ouest France, une association. Dire que la majorité des tirages sont détenus par des acteurs privés, c'est oublier les lecteurs de ces exemplaires. La majorité des exemplaires français ne sont pas forcément détenus par des acteurs privés, comme vous le dites.
La commission rejette l'amendement.
Elle en vient à l'amendement II-AC62 de M. Luc Geismar.
Cet amendement vise à soutenir la presse quotidienne régionale dans sa transformation vers une offre numérique. Celle-ci, nous le savons tous, a vécu des difficultés, que la crise du coronavirus et la liquidation de Presstalis ont exacerbées.
Afin d'assurer la vitalité, le pluralisme et le développement de la presse locale ainsi que son ancrage territorial, il est proposé de transférer les crédits du programme 334 « Livre et industries culturelles » vers l'action 5 « Soutien aux médias de proximité » du programme 180 « Presse et médias ».
En allouant 500 000 euros supplémentaires au programme 180, l'amendement vise à soutenir la presse quotidienne régionale dans sa nécessaire transformation numérique. Je vous rejoins entièrement sur ce point. Néanmoins, quelques précisions sont nécessaires.
Ouest France, que M. Le Bohec a évoqué, a perçu 4,5 millions de l'État en 2017 – ce n'est pas rien –, tant dans l'aide au portage qu'au titre du Fonds stratégique de développement de la presse. La PQR est donc tout de même aidée. Le budget pour 2021 prévoit également des mesures importantes.
En outre, l'amendement prévoit d'abonder une ligne consacrée au soutien aux médias de proximité, qui s'adresse aux médias de quartier plutôt qu'à la PQR. La ministre l'a expliqué, lorsqu'elle a répondu à votre question. L'idée serait d'étudier davantage comment la PQR est aidée, pour lui permettre d'atteindre sa pleine extension dans le domaine du numérique. Nous pouvons y travailler.
Je vous suggère donc, monsieur Geismar, de retirer l'amendement. À défaut, j'y serai favorable.
Je le retire. Je souhaite toutefois en discuter avec la ministre en séance pour évoquer à nouveau le soutien à la numérisation de la presse quotidienne régionale.
L'amendement est retiré.
La commission émet un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Médias, livre et industries culturelles » sans modification.
Puis elle examine, pour avis, les crédits du compte de concours financier « Avances à l'audiovisuel public ».
Article 35 et État D
La commission est saisie de l'amendement II-AC85 de Mme Sophie Mette.
Véritable enjeu et atout de soft power, la francophonie doit être soutenue car elle est l'une des clés du rayonnement de la culture française à travers le monde. Il convient de mener une politique publique ambitieuse la concernant.
Le présent amendement, s'il affecte le financement de Radio France, dont la baisse de dotations est un écueil, vise bien à soutenir la francophonie et à marquer l'ambition d'une politique publique en la matière. Il a donc pour objet de redéployer une partie des crédits de paiement dévolus au programme 843 « Radio France » pour les affecter au programme 847 « TV5 Monde ».
Nous sommes naturellement attachés à la francophonie, sur laquelle vous appelez notre attention. Les dirigeants de France Médias Monde et de TV5 Monde ont plusieurs fois exposé ici combien la francophonie guide leur action.
Dans cette perspective, il y a un peu plus d'un mois, TV5 a lancé la nouvelle plateforme TV5 Monde plus, dont les contenus ont été travaillés pour présenter une actualité de la francophonie et l'inscrire dans la création. En outre, France Médias Monde fournit de nombreux exemples de journaux ou de radios qui facilitent l'acquisition du français, quel que soit l'endroit d'où on les écoute ou les lit.
L'idée, je l'ai comprise, n'est pas de dépouiller Radio France. Elle contribue d'ailleurs aussi à la francophonie par ses émissions en direct et ses nombreux podcasts, qui enrichissent notre patrimoine francophone.
Aussi, madame Mette, je propose que vous retiriez l'amendement. À défaut, l'avis sera défavorable.
L'amendement est retiré.
La commission examine l'amendement II-AC70 de M. Michel Larive.
La cure d'austérité pour tout l'audiovisuel public se poursuit cette année encore, alors que les recettes publicitaires sont en chute libre et que le secteur doit faire face à des coûts supplémentaires liés à l'épidémie de la covid-19. Face au cri d'alerte du secteur, le PLF pour 2021 ne prévoit rien. C'est la raison pour laquelle nous avons déposé cet amendement d'appel, qui vise à dénoncer la politique de destruction du service public de l'audiovisuel que mène le Gouvernement.
Vous appelez notre attention sur la défense de l'audiovisuel public. Nous défendons, nous aussi, les sociétés de l'audiovisuel public, non en proposant une nouvelle ligne budgétaire, mais en les dotant et en prenant en considération la crise qu'elles rencontrent. Le plan de relance, je le rappelle, prévoit 70 millions d'euros pour les conforter.
La trajectoire d'économies a été développée en 2018. On peut ne pas comprendre que chaque pan de l'action publique doive contribuer à l'effort de maîtrise de la dépense publique. Pourtant, nous devons tous agir en ce sens.
Cette trajectoire a été respectée, ce qui n'a jamais été le cas auparavant. On peut déplorer qu'elle soit à la baisse, mais elle a permis à l'ensemble des sociétés d'anticiper et d'établir leur stratégie. Ce n'est pas la disette, car les pouvoirs publics sont engagés financièrement auprès de ces sociétés. Mon avis sera donc défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Elle émet un avis favorable à l'adoption des crédits du compte de concours financier « Avances à l'audiovisuel public » sans modification.
La séance est levée à vingt‑trois heures quarante.