Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, je me félicite de ce débat, qui a été passionnant. Je vous ai tous écoutés avec beaucoup d'intérêt et je souscris à bien des choses qui ont été dites à cette tribune.
La loi de 1901 a été évoquée à plusieurs reprises, ce qui est bien normal à propos d'un tel sujet. Cette loi a été la première que le Conseil constitutionnel a prise comme référence, en 1971, pour l'élever au rang des principes fondamentaux reconnus par la République comme ayant valeur constitutionnelle. C'est dire qu'au-delà de cette valeur constitutionnelle, elle est aussi une sorte de locomotive de la République et que le génie républicain qui s'est manifesté en 1901 a, d'une certaine façon, atteint sa pointe avancée lorsqu'il a permis la liberté d'association. Comme plusieurs d'entre vous l'ont rappelé, cela fait envie au niveau international, où la France est une référence en matière d'engagement, grâce à nos aînés, grâce à ceux qui, en 1901, ont eu cette vision.
Aujourd'hui, nous en sommes les héritiers. Que cette loi ait plus d'un siècle ne la rend nullement obsolète, bien au contraire. Elle nous amène, en revanche – elle nous oblige même – , à réfléchir à ce que peut être la vie associative au XXIe siècle, et toutes vos interventions montrent que c'est possible.
Les deux principes qui guident mon action de ministre de l'éducation nationale, également chargé de la jeunesse et de la vie associative, sont la confiance – je ne cesse de répéter que nous avons besoin, en France, d'être davantage une société de confiance, ce que nous sommes insuffisamment aujourd'hui – et l'émancipation, la liberté. L'éducation prend sens, en effet, par la liberté qu'elle confère aux enfants, aux adolescents et à toutes les personnes qui en bénéficient. La vie associative prend sens, elle aussi, par cette émancipation qu'elle permet, par la dignité qu'elle restaure, par la confiance qu'elle instaure. Il est donc très important d'être conscients du rôle actuel des associations et de réfléchir aussi à ce qu'il pourrait devenir dans le futur. Cette résolution nous y invite, évidemment.
Je suis en plein accord avec les différents axes mentionnés dans la résolution. Qu'il s'agisse de la simplification, des enjeux de formation et de sécurisation financière, bien évidemment de l'axe éducatif – qui manifeste la complémentarité entre la mission relative à l'éducation, dont j'ai la responsabilité, et celles qui concernent les associations et la jeunesse – , ou encore de l'axe de la professionnalisation, nous pouvons, en effet, comme vous êtes plusieurs à l'avoir dit, nous trouver dans une situation d'unanimité ou du moins de très grand consensus pour améliorer la situation en la matière. Nous sommes donc unis non seulement pour réfléchir, mais également pour agir afin de soutenir la vie associative dans le futur et dans le sens de ces progrès.
Vous avez fait le portrait de la situation actuelle. Je le rappellerai brièvement, sans redondance : on compte aujourd'hui en France 1,3 million d'associations, qui nous disent le degré d'engagement des Français et nous incitent à un certain optimisme à cet égard ; 73 000 nouvelle associations sont créés chaque année – c'est le chiffre de l'année 2016 – , et 42 % des Français âgés de plus de seize ans adhèrent à une association et disent leur désir de se rassembler autour des causes les plus diverses. Les associations participent à une mission de service public. Cette idée était présente dans l'esprit du législateur en 1901 et dans tous les débats qui ont eu lieu par la suite ; elle l'est encore dans notre esprit, dès lors que nous avons une conception large de l'intérêt général, du service public et de ses modalités de réalisation. En outre, 12,9 % des associations sont employeuses. Elles représentent 1,83 million d'emplois, soit 9,8 % des emplois dans le secteur privé. Ayant eu l'occasion de diriger une association employeuse, je sais les difficultés que cela comporte, mais aussi l'utilité que cela revêt.
Le soutien du Gouvernement au développement de la vie associative sera donc très fort. Il se traduit dans le projet de loi de finances, mais aussi dans nos perspectives pluriannuelles, comme l'ont rappelé plusieurs orateurs. Des critiques ont été exprimées, mais aussi une défense de notre approche.
Sans répéter ce que vient de dire très bien à cette tribune M. Bertrand Sorre, je tiens toutefois à rappeler que, dans le cadre de mon programme « Jeunesse et vie associative », nous augmentons cette année de 5,8 millions d'euros la dotation au développement de la vie associative. Ce sont donc 67,6 millions d'euros qui y sont consacrés dans ce budget.
Les crédits destinés au service civique sont en hausse de 16 %, avec 150 000 jeunes accueillis dans ce cadre en 2018. C'est un chiffre considérable, qui alimentera évidemment le dynamisme de la vie associative.
Sur ce point, nous comptons faire du service civique un élément central du dynamisme associatif. Il ne s'agit pas de substituer le service civique à des emplois, comme cela a été demandé à cette tribune, c'est une évidence – je rappelle que les contrats aidés, eux non plus, ne devaient pas se substituer à ces emplois.
Puisque nous parlons de complémentarité entre l'éducation et le monde des associations, nous avons souhaité consacrer 10 000 services civiques à l'opération « Devoirs faits » en collège : non seulement ce n'est pas contradictoire avec le point précédent mais cela est tout à fait conforme à la définition des services civiques ; nous devons nous en réjouir. Il ne faut d'ailleurs pas opposer les différents statuts mais les rendre complémentaires.
Le Gouvernement a souhaité privilégier des dispositifs pérennes de soutien financier. C'est le cas avec le crédit d'impôt sur la taxe sur les salaires, dit CITS. Comme vous le savez, cela représente un gain annuel de 500 millions d'euros pour les associations.
En outre, la réduction pérenne des cotisations patronales représente 1,4 milliard d'euros, que l'on retrouvera dans les finances des associations à partir de 2019. C'est évidemment extrêmement important et, même si cela ne se voit pas tout de suite, cela aura un effet majeur sur la vie associative à horizon de deux ans.
Cet effet concernera les moyennes et les grandes associations, nous le reconnaissons : il faudra donc être attentif aux petites associations – d'où les efforts qui sont faits dans le budget, ainsi qu'avec l'amendement que vous avez adopté à l'unanimité, affectant 25 millions d'euros supplémentaires au Fonds de développement de la vie associative. Comme je vous l'ai dit ici même, vous serez évidemment associés à la définition de la façon dont ce Fonds agira dans les temps à venir. Cette définition interviendra à très court terme, en associant les parlementaires qui se sont investis dans cette question.
La vie associative est aussi la vie économique : nous devons inventer le modèle économique du XXIe siècle pour les associations. Nous pouvons être en pointe, à l'échelle européenne comme à l'échelle internationale, pour inventer cette économie de la confiance, dans laquelle les associations ne se considéreront pas comme marginales par rapport à la vie économique. Elles montreront au contraire un chemin d'intérêt général car, in fine, l'économie est au service de l'intérêt général.
Les grands axes de la politique gouvernementale en faveur du développement de la vie associative tendent vers trois objectifs : mieux soutenir et accompagner les associations, dans la lignée de ce que vous avez suggéré ; mieux soutenir le développement des activités d'utilité sociale assumées par les associations ; enfin, mieux reconnaître le bénévolat et développer une société de l'engagement. C'est ce que je ferai aussi en tant que ministre de l'éducation en étant très attentif aux propositions que vous avez faites pour que l'engagement soit reconnu dès l'école, dès le collège, dès le lycée et dès la vie étudiante.
Comme l'a annoncé le Premier ministre, le 9 novembre dernier, un nouveau groupe de travail sur la vie associative et l'engagement est constitué. Il est piloté conjointement par le ministère de l'éducation nationale, représenté par la DJEPVA – direction de la jeunesse, de l'éducation populaire et de la vie associative, dont j'ai la responsabilité – , le Haut-Commissariat à l'économie sociale et solidaire – Christophe Itier a commencé un travail important en la matière – et le mouvement associatif, tout cela dans une logique de co-construction – vous êtes plusieurs à avoir utilisé ce terme, à juste titre.
Ce groupe de travail réunira tous les services de l'État, les représentants des collectivités, les parlementaires et les représentants du monde associatif. Sa réunion de lancement aura lieu le 13 décembre prochain. Une restitution de ces travaux communs sera réalisée au mois de janvier 2018. Le Haut Conseil à la vie associative émettra un avis sur l'ensemble des propositions formulées. Ayant déjà rencontré à deux reprises ses représentants, je suis très optimiste quant à la possibilité du Haut Conseil d'accompagner, y compris d'un point de vue technique et juridique, les axes de travail que vous avez proposés.
Cette stratégie pour la vie associative et l'économie sociale et solidaire sera exposée à l'occasion d'une grande conférence nationale et présentée en conseil des ministres avant la fin du mois d'avril 2018. Je suis certain que vous pourrez y retrouver les grandes orientations que vous avez souhaité défendre au travers de cette résolution.
Sans plus attendre, nous pouvons travailler ensemble. C'est pourquoi je remercie le groupe MODEM de l'inscription de cette proposition de résolution à l'ordre du jour ; je me réjouis beaucoup de la séance de travail que nous avons eue ce matin et je vous invite à adopter largement cette résolution.