Madame la ministre auprès du ministre d'État, ministre de l'intérieur, mes chers collègues, ce que les élus locaux attendent de nous aujourd'hui, c'est une écoute et une attention aux interrogations qui sont les leurs quant au transfert de la compétence GEMAPI – gestion des milieux aquatiques et prévention des inondations – , lesquelles se sont peu à peu transformées en inquiétudes alors que l'échéance du 1er janvier 2018 approchait.
Ce qu'ils attendent, ce sont les souplesses et les adaptations aux besoins de leur territoire qu'ils réclament depuis plusieurs années.
Ce qu'ils attendent, c'est la reconnaissance de leur légitimité à participer à des formes de coopération territoriale qu'ils jugent efficaces, même si elles ne sont pas parfaites parce que tous les territoires n'en sont pas au même stade de discussion, d'entraide et de solidarité, quoique tous s'inscrivent de plus en plus dans cette démarche.
Ce qu'ils attendent de nous, collectivement, c'est que nous leur fassions confiance pour mettre en oeuvre les moyens qui leur permettront de répondre à leurs obligations et aux responsabilités qui sont les leurs vis-à-vis des citoyens. Mes chers collègues, soyons au rendez-vous !
Cette proposition de loi déposée par Marc Fesneau et Richard Ferrand, présidents des groupes Mouvement démocrate et apparentés et La République en marche, est une réponse à cette attente, comme en témoignent son examen en commission des lois et celui des amendements qui l'ont complétée. Tous les groupes l'ont discutée, débattue ardemment sur certains points et en définitive adoptée car tous, nous sommes convaincus de son utilité.
Je souhaite vous remercier, madame la ministre, car vous avez personnellement soutenu cette initiative parlementaire lors de la 28e convention nationale de l'intercommunalité. C'est la manifestation, à mon sens, de votre respect du travail parlementaire et de notre capacité, en tant qu'élus de la nation, à dégager des points de consensus sur l'ensemble de ces bancs lorsque les sujets le nécessitent.
Que prévoit cette proposition de loi telle qu'amendée par la commission ?
En premier lieu, que ce qui fonctionne soit préservé : c'est une question de bon sens, les élus locaux le savent bien. C'est la raison pour laquelle les départements – qui se sont fortement impliqués dans la prévention des inondations, souvent sur des territoires meurtris par des crues répétées et dévastatrices – pourront continuer, s'ils le souhaitent et dans le cadre d'une convention signée avec les EPCI, les établissements publics de coopération intercommunale, d'exercer cette compétence au-delà de 2020.
Dans quelques instants, madame la ministre, vous nous proposerez de permettre également aux régions gestionnaires d'ouvrages de conserver leur compétence – nous y voyons une avancée supplémentaire, cette question ayant été longuement débattue en commission.
Par ailleurs, les collectivités locales se sont souvent organisées pour la mise en oeuvre de cette compétence et, plus généralement, de la politique de l'eau. Leurs limites administratives n'étant pas adaptées à la disposition géographique des bassins, elles se sont réunies dans des syndicats mixtes, des établissements publics d'aménagement et de gestion des eaux ou des établissements publics territoriaux de bassin.
C'est au sein de ces établissements qu'elles apprennent à travailler ensemble dans le cadre d'une coopération territoriale si nécessaire à l'efficacité des politiques de gestion des milieux aquatiques et de prévention des inondations. Elles mettent en place des logiques de solidarité entre les zones situées en amont et en aval des bassins, et assurent en cela une réelle protection de leur population.
Mais toutes n'en sont pas au même point. En effet, certaines collectivités ont une histoire commune qui les a conduites à coopérer très tôt. Elles sont souvent des modèles d'organisation, d'ingénierie, et mobilisent adroitement les financements disponibles alors que d'autres n'ont pas été affectées par des phénomènes naturels d'ampleur et ne considèrent pas la nouvelle compétence GEMAPI comme une priorité pour l'aménagement et le développement de leur territoire. Pour ces dernières, la charge résultant du transfert de cette compétence peut sembler lourde alors qu'elles ne sont pas préparées et qu'elles identifient encore imparfaitement la nature de leurs responsabilités.
Cette diversité de situation ne doit pas remettre en question notre objectif : permettre à tous les citoyens de bénéficier d'un même niveau de protection en fonction des risques auxquels ils sont exposés, car il y va de notre responsabilité. Des vies sont en effet en jeu : 18 millions de nos concitoyens sont directement concernés et ce chiffre ne cessera d'augmenter en raison des dérèglements climatiques.
Toutefois, c'est pour répondre à cette diversité et prendre en compte les différents stades de coopération que nous constatons sur nos territoires que nous avons étendu des dérogations qui existaient déjà en matière de GEMAPI pour la délégation de la compétence ou l'adhésion à un syndicat mixte ouvert. En adoptant ces dispositions, la commission s'est pleinement inscrite dans l'objet de cette proposition de loi qui est d'accompagner une transition difficile et un transfert de responsabilité et de charges vers les EPCI au titre d'ouvrages qui, pour nombre d'entre eux, n'ont pas fait l'objet d'un entretien régulier depuis ces dernières années. Alors, oui, nous souhaitons préserver ce qui fonctionne et accompagner les EPCI du mieux que nous le pouvons !
En deuxième lieu, la proposition de loi prévoit que ces derniers ne pourront pas être soumis à un régime de responsabilité de droit commun. En cas de dommage, le juge aurait évidemment apprécié les responsabilités du maire, du préfet et du gestionnaire de l'ouvrage mais il nous a semblé que l'acceptation de cette réforme reposait sur notre capacité à apporter une solution qui, sans exonérer les EPCI de leur responsabilité, ce qui n'aurait pas été acceptable, limitait cette dernière – pendant une phase transitoire – au bon entretien des ouvrages transférés.
Voilà, madame la ministre, mes chers collègues, quelles ont été les priorités de notre commission. Je pense que nous sommes parvenus à un texte équilibré, même s'il reste perfectible, comme l'adoption de certains amendements le montrera dans quelques instants.
À présent, je souhaite remercier l'ensemble des groupes qui ont alimenté notre réflexion et soutenu nos amendements. Je remercie également tous les acteurs de la politique de l'eau et les élus que nous avons auditionnés, qui nous ont apporté des éléments précieux pour nous permettre de bien appréhender les enjeux que soulevait ce transfert. J'adresse également toute ma reconnaissance à vos services, madame la ministre, notamment aux services déconcentrés qui devront accompagner cette réforme, pour les efforts qu'ils ont accomplis afin de préparer les échéances à venir et ceux qui resteront à faire pour lui donner pleinement corps. C'est un long travail qui nous attend, nous en sommes tous conscients.
Je souhaiterais conclure avec un souhait : que nous soyons en mesure d'adopter cette proposition de loi dans les meilleurs délais parce qu'il y a urgence à apporter certaines réponses même si, en cette fin d'année, nous sommes tous mobilisés par différents sujets. Il est de notre responsabilité, en tant que législateur, de donner toute leur portée aux avancées permises par ce texte en faisant de son adoption rapide notre priorité.