Mes chers collègues, je suis ravie de rouvrir, en deuxième lecture, le débat sur la proposition de loi créant la fonction de directrice ou de directeur d'école, sujet dont les discussions à l'Assemblée et au Sénat ont confirmé le caractère crucial.
La question de la reconnaissance des missions et des responsabilités des directeurs d'école n'est pas nouvelle. L'amélioration de leurs conditions de travail est essentielle, pour eux mais aussi pour le bon fonctionnement des écoles dont ils ont la responsabilité. Le texte que je vous propose tente d'apporter des réponses. Il crée également la fonction de directrice ou de directeur d'école, dans l'intention de reconnaître une fonction pleine et entière, qui valorise ces acteurs et confirme la priorité donnée à l'école primaire, telle que souhaitée par le Président de la République et appliquée par une politique volontariste depuis quatre ans.
Les missions confiées aux directeurs d'école se sont particulièrement étoffées ces dernières années. Dans 85 % des écoles, les directeurs sont des enseignants qui assurent des responsabilités de direction en plus de leur charge d'enseignement, avec un pouvoir de décision limité et une charge de travail supplémentaire qui s'alourdit au fil du temps. La crise sanitaire a démontré leur investissement et leur professionnalisme. Les directrices et les directeurs d'école ont été un maillon essentiel : d'abord, pour maintenir le lien entre les membres de la communauté éducative et assurer la continuité pédagogique pendant le confinement ; ensuite, pour mettre en place les protocoles sanitaires pendant le déconfinement ; puis pour maintenir les écoles ouvertes depuis lors.
Notre objectif est de rendre effectives des améliorations concrètes pour la rentrée 2022 et les suivantes. Dès cette rentrée, plusieurs mesures s'appliquent déjà afin de permettre aux directeurs d'école de se recentrer sur leur mission essentielle de pilotage. Il s'agit de leur donner plus de temps, de simplifier les procédures et de les accompagner en favorisant les échanges entre pairs.
Pour ce faire, le ministre Jean-Michel Blanquer a décidé, à l'issue de la concertation avec les partenaires sociaux, de pérenniser la prime covid exceptionnelle de 450 euros. Dès le mois de janvier 2021, 45 000 directeurs d'école en fonction ont perçu cette indemnité, qui prend désormais la forme d'une augmentation de l'indemnité de sujétion spéciale (ISS), versée mensuellement. En outre, 600 postes ont été créés et consacrés au renforcement des décharges des directeurs d'école, dont la répartition a fait l'objet d'un large consensus et d'une large concertation syndicale. Ces décharges visent deux objectifs largement partagés : donner plus de temps aux directeurs des petites écoles et rapprocher les conditions d'exercice des directeurs d'école maternelle de celles des directeurs d'école élémentaire. Malgré ces avancées déjà en vigueur, il reste encore beaucoup à faire – c'est la raison de notre présence.
Ma proposition de loi a connu des évolutions introduites par nos collègues sénateurs. Je salue leurs contributions et les améliorations qu'ils ont apportées. Je remercie ceux qui se sont investis pour enrichir le texte, notamment M. Julien Bargeton et M. Max Brisson. Leurs travaux, en séance publique comme en commission, ont permis de faire évoluer la proposition de loi, tout en affirmant plusieurs objectifs.
D'abord, la reconnaissance du directeur d'école, qui passe par l'affirmation de ses missions essentielles. C'est l'objet de l'article 1er, qui renforce son pouvoir d'initiative et de décision. La notion d'autorité fonctionnelle introduite par les sénateurs, loin d'être une aberration, permet d'ancrer dans la loi l'idée qu'une directrice ou un directeur d'école aura désormais la possibilité et le devoir d'agir pour le bon fonctionnement de son école. Je précise que les missions des directeurs d'école demeurent inchangées.
Parenthèse importante visant à rassurer les esprits inquiets, je redis clairement que ce texte n'a aucunement pour objet d'instaurer une quelconque autorité hiérarchique. L'autorité fonctionnelle créée par l'article 1er signifie que la directrice ou le directeur d'école aura l'autorité au sens administratif du terme, c'est-à-dire un pouvoir de décision légalement défini, mais elle ne s'accompagne pas de nouvelles missions, en particulier celle de l'évaluation de ses pairs.
L'article 2 crée un emploi de direction d'école, ce qui permet de reconnaître la spécificité des missions et des responsabilités qui s'y attachent. Cette avancée donne la possibilité d'articuler autrement la fonction de direction avec les missions d'enseignement, de formation et de coordination. Celles-ci sont d'ores et déjà assumées par de nombreux directeurs d'école ; il ne s'agit donc pas de missions supplémentaires. Sur ce point, je vous proposerai une nouvelle rédaction de l'alinéa 8.
La simplification des tâches des directeurs d'école est une nécessité. L'article 2 prévoit de les décharger des activités pédagogiques complémentaires, afin qu'ils se concentrent sur leurs missions de direction. L'article 5 permet d'alléger les tâches d'organisation des élections des représentants de parents d'élèves grâce au vote numérique. L'article 6 attribue à titre principal aux autorités académiques l'élaboration des plans particuliers de mise en sécurité, ce qui constitue une simplification très attendue sur le terrain.
Autre objectif, le soutien aux directeurs d'école se traduit par la création d'un référent de direction au sein de chaque académie. Cet article a été amélioré par nos collègues sénateurs ; il prévoit désormais un ou plusieurs référents. Cette proposition émane d'un réel besoin d'avoir un interlocuteur distinct du supérieur hiérarchique. Celui des enseignants et des directeurs d'école demeure l'inspecteur de l'éducation nationale (IEN) ; rien, dans ce texte, ne modifie cet état de fait.
Ce référent sera demain une personne importante pour les directeurs d'école, qui n'osent pas toujours faire part à leurs supérieurs hiérarchiques de leurs éventuelles difficultés, notamment relationnelles, avec des parents d'élèves, des élus ou même des collègues. Ils ont souvent peur d'être mal vus ou accusés de ne pas faire leur travail. Le référent sera un véritable soutien, tout en demeurant un pair parmi les pairs ayant exercé cette fonction, déchargé de ses missions de direction et d'enseignement pour être à l'écoute de ses collègues.
L'article 2 confère un cadre juridique indispensable à la reconnaissance du métier de directeur d'école, en explicitant les conditions de leur nomination, de leur formation et de l'exercice de leur fonction. Il introduit l'objectif de revalorisation du métier de directeur d'école, en prévoyant qu'une indemnité spécifique leur est attribuée et qu'ils bénéficient d'un avancement de carrière accéléré.
La complexité du tissu des 44 455 écoles publiques exige davantage qu'une réponse globale. Une réflexion au plus près des territoires, des besoins et des spécificités de chaque école est nécessaire, afin de faciliter enfin le travail quotidien des directrices et des directeurs d'école. En adoptant cette proposition de loi, nous reconnaîtrons cette fonction comme pleine et entière. Par-delà les rivalités politiques, ce texte est guidé par un unique objectif : reconnaître la fonction de directeur d'école et en améliorer les conditions d'exercice. L'examen de cette proposition de loi est une première étape d'un très long processus en ce sens.