COMMISSION DES AFFAIRES CULTURELLES ET DE L'ÉDUCATION
Mercredi 22 septembre 2021
La séance est ouverte à neuf heures trente-cinq
(Présidence de M. Bruno Studer, président)
La commission examine, en deuxième lecture, la proposition de loi, modifiée par le Sénat, créant la fonction de directrice ou de directeur d'école (n° 3981) (Mme Cécile Rilhac, rapporteure).
Nous examinerons cette proposition de loi en séance publique mercredi prochain, après la lecture des conclusions de la CMP sur le projet de loi relatif à la communication audiovisuelle et à la souveraineté culturelle à l'ère numérique.
Mes chers collègues, je suis ravie de rouvrir, en deuxième lecture, le débat sur la proposition de loi créant la fonction de directrice ou de directeur d'école, sujet dont les discussions à l'Assemblée et au Sénat ont confirmé le caractère crucial.
La question de la reconnaissance des missions et des responsabilités des directeurs d'école n'est pas nouvelle. L'amélioration de leurs conditions de travail est essentielle, pour eux mais aussi pour le bon fonctionnement des écoles dont ils ont la responsabilité. Le texte que je vous propose tente d'apporter des réponses. Il crée également la fonction de directrice ou de directeur d'école, dans l'intention de reconnaître une fonction pleine et entière, qui valorise ces acteurs et confirme la priorité donnée à l'école primaire, telle que souhaitée par le Président de la République et appliquée par une politique volontariste depuis quatre ans.
Les missions confiées aux directeurs d'école se sont particulièrement étoffées ces dernières années. Dans 85 % des écoles, les directeurs sont des enseignants qui assurent des responsabilités de direction en plus de leur charge d'enseignement, avec un pouvoir de décision limité et une charge de travail supplémentaire qui s'alourdit au fil du temps. La crise sanitaire a démontré leur investissement et leur professionnalisme. Les directrices et les directeurs d'école ont été un maillon essentiel : d'abord, pour maintenir le lien entre les membres de la communauté éducative et assurer la continuité pédagogique pendant le confinement ; ensuite, pour mettre en place les protocoles sanitaires pendant le déconfinement ; puis pour maintenir les écoles ouvertes depuis lors.
Notre objectif est de rendre effectives des améliorations concrètes pour la rentrée 2022 et les suivantes. Dès cette rentrée, plusieurs mesures s'appliquent déjà afin de permettre aux directeurs d'école de se recentrer sur leur mission essentielle de pilotage. Il s'agit de leur donner plus de temps, de simplifier les procédures et de les accompagner en favorisant les échanges entre pairs.
Pour ce faire, le ministre Jean-Michel Blanquer a décidé, à l'issue de la concertation avec les partenaires sociaux, de pérenniser la prime covid exceptionnelle de 450 euros. Dès le mois de janvier 2021, 45 000 directeurs d'école en fonction ont perçu cette indemnité, qui prend désormais la forme d'une augmentation de l'indemnité de sujétion spéciale (ISS), versée mensuellement. En outre, 600 postes ont été créés et consacrés au renforcement des décharges des directeurs d'école, dont la répartition a fait l'objet d'un large consensus et d'une large concertation syndicale. Ces décharges visent deux objectifs largement partagés : donner plus de temps aux directeurs des petites écoles et rapprocher les conditions d'exercice des directeurs d'école maternelle de celles des directeurs d'école élémentaire. Malgré ces avancées déjà en vigueur, il reste encore beaucoup à faire – c'est la raison de notre présence.
Ma proposition de loi a connu des évolutions introduites par nos collègues sénateurs. Je salue leurs contributions et les améliorations qu'ils ont apportées. Je remercie ceux qui se sont investis pour enrichir le texte, notamment M. Julien Bargeton et M. Max Brisson. Leurs travaux, en séance publique comme en commission, ont permis de faire évoluer la proposition de loi, tout en affirmant plusieurs objectifs.
D'abord, la reconnaissance du directeur d'école, qui passe par l'affirmation de ses missions essentielles. C'est l'objet de l'article 1er, qui renforce son pouvoir d'initiative et de décision. La notion d'autorité fonctionnelle introduite par les sénateurs, loin d'être une aberration, permet d'ancrer dans la loi l'idée qu'une directrice ou un directeur d'école aura désormais la possibilité et le devoir d'agir pour le bon fonctionnement de son école. Je précise que les missions des directeurs d'école demeurent inchangées.
Parenthèse importante visant à rassurer les esprits inquiets, je redis clairement que ce texte n'a aucunement pour objet d'instaurer une quelconque autorité hiérarchique. L'autorité fonctionnelle créée par l'article 1er signifie que la directrice ou le directeur d'école aura l'autorité au sens administratif du terme, c'est-à-dire un pouvoir de décision légalement défini, mais elle ne s'accompagne pas de nouvelles missions, en particulier celle de l'évaluation de ses pairs.
L'article 2 crée un emploi de direction d'école, ce qui permet de reconnaître la spécificité des missions et des responsabilités qui s'y attachent. Cette avancée donne la possibilité d'articuler autrement la fonction de direction avec les missions d'enseignement, de formation et de coordination. Celles-ci sont d'ores et déjà assumées par de nombreux directeurs d'école ; il ne s'agit donc pas de missions supplémentaires. Sur ce point, je vous proposerai une nouvelle rédaction de l'alinéa 8.
La simplification des tâches des directeurs d'école est une nécessité. L'article 2 prévoit de les décharger des activités pédagogiques complémentaires, afin qu'ils se concentrent sur leurs missions de direction. L'article 5 permet d'alléger les tâches d'organisation des élections des représentants de parents d'élèves grâce au vote numérique. L'article 6 attribue à titre principal aux autorités académiques l'élaboration des plans particuliers de mise en sécurité, ce qui constitue une simplification très attendue sur le terrain.
Autre objectif, le soutien aux directeurs d'école se traduit par la création d'un référent de direction au sein de chaque académie. Cet article a été amélioré par nos collègues sénateurs ; il prévoit désormais un ou plusieurs référents. Cette proposition émane d'un réel besoin d'avoir un interlocuteur distinct du supérieur hiérarchique. Celui des enseignants et des directeurs d'école demeure l'inspecteur de l'éducation nationale (IEN) ; rien, dans ce texte, ne modifie cet état de fait.
Ce référent sera demain une personne importante pour les directeurs d'école, qui n'osent pas toujours faire part à leurs supérieurs hiérarchiques de leurs éventuelles difficultés, notamment relationnelles, avec des parents d'élèves, des élus ou même des collègues. Ils ont souvent peur d'être mal vus ou accusés de ne pas faire leur travail. Le référent sera un véritable soutien, tout en demeurant un pair parmi les pairs ayant exercé cette fonction, déchargé de ses missions de direction et d'enseignement pour être à l'écoute de ses collègues.
L'article 2 confère un cadre juridique indispensable à la reconnaissance du métier de directeur d'école, en explicitant les conditions de leur nomination, de leur formation et de l'exercice de leur fonction. Il introduit l'objectif de revalorisation du métier de directeur d'école, en prévoyant qu'une indemnité spécifique leur est attribuée et qu'ils bénéficient d'un avancement de carrière accéléré.
La complexité du tissu des 44 455 écoles publiques exige davantage qu'une réponse globale. Une réflexion au plus près des territoires, des besoins et des spécificités de chaque école est nécessaire, afin de faciliter enfin le travail quotidien des directrices et des directeurs d'école. En adoptant cette proposition de loi, nous reconnaîtrons cette fonction comme pleine et entière. Par-delà les rivalités politiques, ce texte est guidé par un unique objectif : reconnaître la fonction de directeur d'école et en améliorer les conditions d'exercice. L'examen de cette proposition de loi est une première étape d'un très long processus en ce sens.
Cette proposition de loi est le fruit d'un travail collectif. D'abord, le vôtre, madame la rapporteure, pour l'opiniâtreté duquel le groupe La République en marche tient à vous féliciter, depuis votre mission flash sur les directeurs d'école. Ensuite, celui du Sénat, qui a inscrit dans le texte des avancées significatives. Enfin, celui de nos collègues du groupe, qui se sont mobilisés ces derniers mois.
Elle a également donné lieu à une large consultation des acteurs de terrain : faite pour les directeurs d'école, elle l'a été en partie par eux. Elle vise deux objectifs, qui sont également des attentes fortes : créer une véritable fonction de directeur d'école et confier à ce dernier des tâches en cohérence avec sa fonction.
La place du directeur d'école dans nos politiques éducatives est centrale. Les tâches qu'il accomplit sont essentielles au bon fonctionnement des écoles. Il doit s'assurer de la relation avec les parents, de la coordination entre les enseignants, des relations avec l'inspecteur de l'éducation nationale et la municipalité, ainsi que de toutes les dimensions ayant trait à son école. Pendant la crise sanitaire, et jusqu'à aujourd'hui, c'est à eux que nous avons confié la tâche de fermer les écoles quand cela a été nécessaire ; ce sont eux qui ont été chargés d'assurer la continuité pédagogique et d'accueillir les enfants du personnel médical pendant le confinement. Quand nous avons rouvert nos écoles, ce sont eux qui ont dû veiller au respect des protocoles sanitaires. À nous, désormais, de nous montrer collectivement à la hauteur pour valoriser ces femmes et ces hommes.
Alors même que le directeur d'école est au centre du système éducatif, juridiquement, sa fonction n'existe pas. Le directeur d'école est un enseignant chargé de direction. Grâce à l'article 2 de la présente proposition de loi, la fonction de direction est reconnue – et même financièrement, à l'alinéa 3. Au demeurant, la revalorisation a commencé dans le cadre du Grenelle de l'éducation. L'enjeu est aussi de donner au directeur des marges d'autonomie pour faciliter le pilotage de son école et le soulager dans les tâches liées au fonctionnement de celle-ci.
Le fonctionnement collégial de nos écoles maternelles et élémentaires est unique et précieux. Nous souhaitons le conserver, tout en soulageant, en renforçant et en valorisant les directeurs d'école. Créer cette fonction, c'est souligner leur rôle à part entière et prendre en considération leur situation et leurs besoins. Désormais, les spécificités des écoles seront prises en compte, en plus du nombre de classes, pour définir la décharge dont pourront bénéficier les directeurs d'école. Le travail sur les critères de spécificité, tels que les enfants à besoins particuliers et les territoires atypiques, permettra une réelle avancée ; celui sur l'amélioration du régime de décharge en fonction du nombre de classes a d'ores et déjà commencé.
Pour faciliter le recrutement des directeurs tout en s'assurant qu'ils peuvent acquérir de la maturité en tant qu'enseignants, nous avons obtenu l'obligation de justifier de trois ans d'ancienneté au poste d'enseignant, au lieu des cinq prévus en première lecture, pour être inscrit sur la liste d'aptitude à la fonction de directeur d'école. Ainsi, les jeunes enseignants souhaitant s'investir autrement au sein de leur école pourront le faire plus tôt. Ces candidats devront avoir suivi une formation qui garantira une connaissance spécifique des missions de directeur.
Au sein de chaque direction des services départementaux de l'éducation nationale, un référent de direction d'école expérimenté conseillera, accompagnera et aidera les directeurs d'école. À ce sujet, je me félicite du maintien de l'article 3, dont les dispositions sont unanimement saluées. Nous ne pouvons que nous en satisfaire. Il répond de façon pragmatique à un réel besoin du terrain. Il est la preuve de l'aboutissement de l'important travail de concertation réalisé depuis 2018.
La proposition de loi aborde également une préoccupation majeure des directeurs d'école : le besoin d'aide administrative. Elle apporte une première réponse, mais je souhaite aussi que l'État, ainsi que les communes et leurs groupements, participent à la mise en place de l'aide administrative. Nous proposerons un amendement à cette fin.
Dans le même ordre d'idées, la mise en œuvre des plans pour parer aux risques majeurs est très lourde. Ce sujet a été bien identifié par le rapporteur du texte au Sénat, qui a trouvé une rédaction pragmatique de l'article 6.
Enfin, la possibilité offerte aux écoles de recourir au vote électronique pour les élections de parents d'élèves permettra de renforcer leur participation, sans freiner leur implication dans l'école.
En conclusion, le groupe La République en marche se réjouit de débattre à nouveau sur ce sujet, de trouver collectivement des réponses à cet enjeu central pour l'école d'aujourd'hui et de demain, de renforcer les capacités d'initiative et de décision des directeurs et de leur laisser plus d'autonomie, dans le respect du cadre réglementaire.
Il est indéniable que cette proposition de loi est fortement attendue par les acteurs locaux, en raison d'un vide juridique préjudiciable au bon fonctionnement de nos écoles. Le groupe Les Républicains souhaite donc, avec le souci constant de l'intérêt général, accompagner la majorité dans ce travail législatif.
Plusieurs des difficultés rencontrées par les directeurs d'école sont intrinsèquement liées à l'absence de statut. La première d'entre elles découle du fait qu'ils sont des maîtres assurant des responsabilités de direction en plus de leur fonction d'enseignant, sans réel pouvoir de décision. Ils n'ont donc aucun pouvoir hiérarchique sur les autres enseignants. Souvent placés dans une position ambiguë, ils doivent pourtant s'assurer du bon fonctionnement de l'école, sans disposer de l'autorité ou de l'autonomie nécessaires. Le constat est sans appel : le statu quo des enseignants directeurs ainsi que le manque de moyens administratifs et juridiques, ne sont plus en accord avec l'augmentation des responsabilités inhérentes à leur fonction.
Si les avancées acquises lors de l'examen du texte par notre assemblée en première lecture doivent être saluées, l'adoption de plusieurs amendements renvoyant certaines dispositions à des décrets a en partie vidé le texte de sa substance. C'est pourquoi le groupe Les Républicains s'est abstenu. Or, à l'occasion de la navette parlementaire, le Sénat l'a fortement enrichi. Je tiens à saluer le travail des sénateurs, s'agissant notamment de la formation des directeurs d'école, qui devra être certifiante, et des conditions de décharge d'enseignement. Par ailleurs, le Sénat a précisé la nature de l'autorité du directeur d'école, en introduisant la notion d'autorité fonctionnelle, permettant le bon fonctionnement de l'école et la réalisation des missions qui lui sont confiées. Les sénateurs sont aussi revenus, à raison, sur la délégation du temps périscolaire aux directeurs d'école et sur certaines dispositions plus accessoires adoptées par l'Assemblée nationale. Ils ont opportunément précisé qu'il appartient à l'État, et non aux communes ou à leurs groupements, de mettre à la disposition des directeurs d'école, si la taille et les spécificités de l'école concernée le justifient, les moyens permettant de garantir leur assistance administrative et matérielle.
Enfin, permettez-moi de lancer un appel à soutenir les propositions, que nous aurions été susceptibles d'avancer si les amendements de notre collègue Constance Le Grip n'avaient pas été jugés irrecevables, d'offrir aux directeurs et aux directrices d'école la possibilité de choisir les membres de leur équipe pédagogique. Nous les présenterons de nouveau en séance publique.
Chers collègues, vous ne serez pas surpris d'apprendre que notre groupe est favorable à la version du texte adoptée au Sénat, dont il faut conserver les avancées, sous peine de manquer une fois encore ce rendez-vous législatif en faveur des directeurs d'école, ces professeurs dont l'engagement doit être salué, à une heure décisive pour l'école de la République.
. Ce texte est le bienvenu au sein de notre assemblée, alors que, depuis plusieurs années, la question du statut des directeurs et des directrices des écoles de France est au cœur des débats sur la politique publique de l'enseignement scolaire.
Le directeur d'école est privé de cadre juridique cohérent et ne bénéficie pas de la reconnaissance qu'il mérite. Comme l'école elle-même, la fonction de direction a connu d'importantes évolutions. Ces dernières années, les tâches administratives confiées aux directeurs d'école ont été alourdies, sans que leur statut soit révisé. Il est essentiel que nous agissions pour pallier les manques identifiés et pour améliorer la reconnaissance de cette fonction, indispensable au bon fonctionnement de l'école de la République.
Depuis cinq ans, nous menons une politique active visant à améliorer les conditions d'accueil des élèves et les conditions d'exercice des professeurs – citons, par exemple, le dédoublement de classes de primaire. Nous ne pouvons achever cette législature sans faire évoluer le statut de directeur d'école.
Lors de la première lecture, les riches débats au sein des deux assemblées ont permis de faire évoluer le texte dans le bon sens. L'article 1er définit les missions du directeur d'école et crée un emploi fonctionnel, doté d'une formation spécifique et d'une bonification salariale. Les discussions à l'Assemblée nationale se sont principalement concentrées sur la définition du statut et sur la question de savoir s'il faut ou non conférer une autorité hiérarchique au directeur d'école. Nous avons fait le choix de conserver le principe d'un primus inter pares. La rédaction proposée par le Sénat, introduisant la notion d'autorité fonctionnelle, est à même de garantir ce principe tout en reconnaissant le rôle décisionnaire du directeur.
S'agissant de l'article 2, nous avons adopté, en première lecture, l'abaissement de cinq à trois ans de la durée d'expérience nécessaire pour candidater au poste de directeur d'école. Cette mesure permet d'élargir concrètement le vivier de recrutement et de donner une opportunité aux professeurs qui souhaitent s'engager davantage dans leur parcours. Sur ce point, le Sénat est allé plus loin que nous : il propose que, en cas de vacance, les professeurs qui en font la demande puissent être nommés directeur sans être inscrits sur la liste d'aptitude à la fonction de directeur d'école. Cette proposition, qui offre davantage de flexibilité, nous semble intéressante.
Par ailleurs, les Démocrates proposeront d'assouplir l'obligation de formation tous les cinq ans, ajoutée par le Sénat, au profit du simple rappel de la nécessité d'une offre de formation régulière. À l'introduction d'une norme, nous préférons des dispositions favorisant l'installation du dialogue social, afin de laisser au corps enseignant la liberté de s'organiser et de travailler en concertation sur cette question.
S'agissant de l'article 2 bis, notre groupe se positionnera en faveur du rétablissement de sa version initiale. Plus équilibrée que celle adoptée par le Sénat, elle offre à l'État la possibilité de se charger des compétences d'assistance administrative et matérielle, sans lui conférer un caractère obligatoire. En outre, elle intègre les collectivités locales, qui sont les principaux acteurs de la politique éducative dans les territoires, et qu'il est essentiel d'associer aux décisions.
S'agissant des autres dispositions du texte, notre groupe souhaite avancer dans une démarche constructive. Dès lors que les acteurs concernés ont été pleinement associés à son élaboration et que les lectures successives ont permis de réaliser un travail intelligent et construit, nous sommes pleinement convaincus de la nécessité d'aboutir à un vote favorable sur ce texte, qui améliorera la reconnaissance des missions et des responsabilités des directeurs d'école.
Enfin, je vous remercie, madame la rapporteure, chère Cécile, pour votre écoute, de votre travail mené sans relâche et de nos dialogues productifs. Le groupe Démocrates soutient pleinement la proposition de loi.
L'école est cet espace particulier, à la fois sanctuaire permettant le développement des enfants et fenêtre grande ouverte sur le monde. C'est un lieu où les écolières et les écoliers de notre pays peuvent apprendre, se dépenser, penser et développer le vivre-ensemble. Afin d'aiguiller et d'accompagner les enfants dans ce projet exigeant, les personnels encadrants de nos écoles accomplissent un travail formidable, œuvrant quotidiennement à l'épanouissement des enfants dont ils ont la responsabilité.
Parmi ces personnels, les directeurs et les directrices d'école sont le fil conducteur du bon fonctionnement des établissements. Ils défendent le pouvoir d'agir dans un esprit de collégialité et de responsabilité. Des épisodes dramatiques ont accéléré l'agenda social du ministère. Ces événements nous obligent à formuler une réponse politique, à la hauteur de la reconnaissance que nous devons aux directeurs et aux directrices d'école.
Le groupe Socialistes a auditionné plusieurs syndicats, représentants de la profession. Nous avons écouté ce que ces femmes et ces hommes demandent, mais, à l'évidence, vous et nous n'avons pas entendu les mêmes discours, chers collègues de la majorité. Leurs attentes sont très claires : une augmentation du temps de décharge, une simplification des tâches les plus chronophages, une aide humaine dans la gestion de leurs missions et une revalorisation de leur métier. En somme, les directeurs et les directrices d'école réclament toutes et tous un allégement de leurs charges du quotidien, tenant compte de la dégradation de leurs conditions de travail, dans un contexte de plus en plus tendu au fil des ans, caractérisé notamment par l'augmentation du nombre de tâches annexes et par la suppression des emplois aidés. Leurs missions ont été alourdies sans être accompagnées des moyens adéquats. Dans cet environnement exigeant, qui inclut les IEN et les communes, la trajectoire verticale proposée par le Gouvernement ne semble pas être la bonne réponse. Si l'objectif du texte est de répondre à ces attentes, nous le partageons, mais le contenu des articles, tels qu'ils ont été adoptés par le Sénat, ne peut nous satisfaire.
Il en résulterait que les directeurs et les directrices d'école doivent effectuer des missions supplémentaires en matière de formation et de coordination, assorties d'objectifs à atteindre – ils n'en manquent pourtant déjà pas ! Alors même que peu de directeurs d'école évoquent, parmi leurs revendications, la création d'un statut propre, l'instauration d'une autorité fonctionnelle ne répond pas aux enjeux de la profession. S'il est un constat partagé, c'est bien, me semble-t-il, celui de l'appétence pour le travail collégial, mis en œuvre par une autorité reconnue. Il n'est donc pas nécessaire d'inscrire dans la loi un quelconque lien de subordination. Cette disposition risque même d'être une source de tensions inutiles entre enseignants, pour lesquels la notion de relation de pair à pair reste fondatrice. Nous défendrons donc deux amendements visant à la supprimer. Ce mot avait déjà fait débat en première lecture. Madame la rapporteure, si son sens n'est pas précisé dans le texte, il demeurera la raison principale motivant notre position.
Nous nous interrogeons également sur la bonification indiciaire ainsi que sur les indemnités et les primes, qui méritent en effet d'être augmentées. Comment un texte de loi peut-il organiser de nouvelles modalités de rémunération sans passer par la négociation avec les partenaires sociaux, ou à l'issue d'une négociation ayant duré longtemps sans produire de résultats ? De même, les temps de décharge devraient être planifiés et sanctuarisés. Il s'agit de l'une des clés du problème. La quantité de travail consacrée par les directeurs et les directrices d'école à leurs responsabilités ne relève pas d'un calcul purement mathématique, car certaines tâches sont incompressibles. Comme nous l'avons dit lors de la première lecture, les écoles de moins de quatre classes seront toujours confrontées au manque de remplaçants.
En outre, nous proposerons d'introduire de la souplesse dans les conditions d'inscription des enseignants sur la liste d'aptitude à la fonction de directeur d'école, afin de les rapprocher de la réalité du terrain. Parfois, les directeurs et les directrices d'école manquent cruellement de temps.
En conclusion, nous considérons que ce texte participera à une inflation législative qui risque d'être purement déclarative et n'apportera pas les réponses légitimement escomptées par les directeurs et les directrices d'école. Nous serons toujours favorables à l'apport d'une assistance matérielle et humaine aux personnels, dès lors qu'elle a lieu concrètement, grâce à des moyens budgétés et chiffrés. Nous souhaitons, comme toutes et tous dans cette commission, une revalorisation de la fonction, qui a certes été entamée, mais nous ne souhaitons pas qu'elle soit alourdie par davantage de missions. C'est pourquoi notre groupe, pour l'heure, prévoit de voter contre le texte.
Madame la rapporteure, je vous remercie, ainsi que toutes celles et tous ceux qui ont œuvré pour aboutir à cette proposition de loi, et salue votre engagement et votre travail.
La crise sanitaire que nous avons traversée a singulièrement mis en évidence le rôle primordial des directrices et des directeurs d'école dans notre système éducatif. En première ligne, ils ont su gérer l'urgence de la continuité pédagogique. Leur travail a largement débordé les limites de leurs fonctions habituelles. Ils ont dû coordonner leur action avec celle de leurs collègues, maintenir le lien avec les familles et les collectivités locales, assurer l'école à distance et garantir l'ouverture des écoles afin d'éviter le décrochage scolaire. Face aux épreuves, ils sont un socle solide sur lequel nous pouvons compter. J'ai une pensée toute particulière pour les directrices et les directeurs d'école que j'ai eu l'occasion de rencontrer dans les 18e et 9e arrondissements de Paris, notamment ceux qui, en REP et REP+, assurent un avenir à ceux qui démarrent avec un moindre capital social et culturel que les autres. Pour ces élèves, nous avons agi dès 2017, par le biais du dédoublement des classes de CP, de CE1 et de grande section – une grande réforme pour l'égalité des chances.
Dire que les directeurs d'école exercent de nombreuses responsabilités est un euphémisme. La direction d'une école est un engagement à temps plein. Or de nombreux directeurs d'école sont également des enseignants assurant des missions de direction en sus de leur charge d'enseignement, sans réel pouvoir de décision. Afin de remplir correctement leur mission, il leur manque le temps et les moyens adéquats, d'une part, et, d'autre part, la reconnaissance comme telle de leur fonction. Cette situation provoque naturellement des tensions, ainsi qu'un sentiment d'impuissance et parfois de lassitude, à tel point qu'il est devenu difficile d'attirer les jeunes générations. Plusieurs milliers de postes seraient vacants.
L'école est une priorité absolue depuis le début du quinquennat. Elle a fait l'objet de réformes ambitieuses, telles que le dédoublement des classes que j'évoquais à l'instant, la revalorisation des salaires des enseignants, la réforme du bac et de l'orientation, et le programme Devoirs faits. Depuis 2017, le Gouvernement et la majorité se sont également engagés à offrir une reconnaissance ainsi que des moyens financiers, humains et matériels accrus aux chefs d'établissement. Citons notamment l'introduction d'un jour de décharge supplémentaire pour les directeurs d'école et l'alignement du régime de décharge des écoles élémentaires sur celui des écoles maternelles. Citons également l'adoption d'un nouveau système d'accompagnement des directeurs d'école, le renforcement de leur rôle de pilote pédagogique et le versement d'une prime de rentrée de 450 euros en février 2021.
Il convient d'aller encore plus loin en adoptant le présent texte, afin de revaloriser le sens même de leur mission. La proposition de loi que nous examinons s'inscrit dans cette trajectoire. Elle affirme le statut décisionnaire du directeur d'école sur le plan pédagogique et sur le plan de l'organisation quotidienne. Elle se fonde sur des constats de terrain, afin d'apporter des réponses adaptées aux problèmes rencontrés par les directeurs d'école, dans l'intérêt des enfants, de leur avenir, de leur bon développement et de leur épanouissement.
Il était primordial d'inscrire dans le marbre de la loi les missions afférentes à la fonction de directeur d'école. Nous devons légitimer et renforcer leur statut auprès de leur équipe pédagogique et des parents d'élèves, dont ils sont le premier interlocuteur.
Le groupe Agir ensemble considère que la proposition de loi va dans le bon sens. Elle valorise le statut de directeur d'école, notamment en accordant aux intéressés une solide formation préalable. Pilier de l'éducation nationale, les directrices et les directeurs d'école veillent au bien-être de tous et à la réussite de chacun. À nos yeux, il importe que la loi leur accorde une reconnaissance, une légitimité plus grande et des moyens à la hauteur de leur mission. C'est pourquoi nous nous engageons sur ce texte.
Le directeur d'école est un maillon essentiel de notre système éducatif puisqu'il permet d'unir les membres d'une équipe éducative. Or la lourdeur de ses tâches quotidiennes n'est pas reconnue. Il manque cruellement de temps, pris par un travail chronophage – c'était déjà le cas avant la crise sanitaire –, et je tiens à exprimer à chacun d'entre eux toute ma reconnaissance. Lors de l'examen de la loi pour une école de la confiance, nous avons été nombreux à demander une véritable reconnaissance de leur fonction ainsi que les moyens dont ils ont besoin.
Nos directeurs d'école souhaitent avant tout avoir plus de temps pour mener à bien leurs missions essentielles dans le cadre du pilotage de leur établissement et au service de leurs élèves. Il est possible de libérer du temps soit en augmentant les décharges d'enseignement, soit en fournissant une aide administrative. Nous savons que nombre de points relèvent du domaine réglementaire et je salue à ce propos les premières avancées obtenues en matière de rémunération et de décharges, même s'il conviendrait d'aller beaucoup plus loin.
En ce qui concerne l'emploi du temps, l'éducation nationale doit rester à l'écoute des directeurs d'école afin de prendre en compte leurs besoins et d'y répondre rapidement. Je salue les évolutions en ce sens apportées par nos collègues sénateurs afin de prévoir un meilleur accompagnement de nos directeurs tout en précisant à bon escient leurs missions. La notion d'autorité fonctionnelle favorise un juste équilibre entre la reconnaissance nécessaire du statut du directeur d'école et le fait qu'il demeure un enseignant, comme ses collègues.
Je m'interroge sur le sens exact de certains alinéas mais j'espère que nos débats nous permettront d'avancer.
En première lecture, vous m'aviez contredit lorsque j'avais affirmé qu' in fine, ce texte aboutirait à la création d'un nouveau statut pour les directeurs d'école. Je vous avais alors alertée sur le rejet – massif – de ce statut par plus de 89 % des directeurs d'école. Le Président de la République a fini par me donner raison le 2 septembre dernier, à Marseille, en annonçant une grande réforme de l'école du futur et en assumant l'ambition d'un nouveau statut pour les directeurs. J'ai attentivement écouté son discours : si on ne change pas de cap rapidement, il faut s'attendre à une libéralisation encore plus grande du service public de l'enseignement, à commencer par la transformation des directeurs d'école en directeurs des ressources humaines.
Selon le président Macron, les équipes seront recrutées par les directeurs, devenus chefs d'établissement, des dérogations aux rythmes scolaires nationaux seront possibles et un mixage des équipes pédagogiques sera instauré entre les personnels enseignants – relevant de l'éducation nationale, donc – et non-enseignants – employés communaux ou départementaux, etc. Bref, après le code du travail à la carte pour les entreprises, le président Macron nous promet un système éducatif inégalitaire entre les différents établissements scolaires, donc, entre les territoires.
Ce texte n'est à mes yeux qu'un tremplin pour le projet destructeur du Président de la République et de M. Blanquer. Aucun syndicat d'enseignants ne demande la création de cette fonction de directeur d'école telle que vous la proposez. Au contraire, l'intersyndicale réclame l'abandon du texte et davantage de moyens plutôt que davantage de hiérarchie. Après l'examen de la proposition de loi au Sénat, les syndicats ont ainsi publié un nouveau communiqué intitulé « Statut et direction d'école : danger ! Non à une hiérarchie dans l'école ! » Malgré cela, vous persistez à poser les jalons d'un statut des directeurs d'école qui menace l'égalité républicaine et le principe d'uniformité du service public de l'éducation nationale sur l'ensemble du territoire national.
Ce texte ne permet en rien de répondre aux difficultés des directeurs d'école pointées par l'exposé des motifs. Créer cette fonction et instaurer plus de hiérarchie à l'école ne résoudra en aucun cas les problèmes de charges administratives, de gestion de la sécurité, de l'accès à l'école, de l'insuffisance de la décharge de temps ou encore des trop faibles rémunérations pour les directeurs, comme d'ailleurs pour leurs collègues.
Les décharges prévues en première lecture, qui ne concernaient que 25 % des écoles et ignoraient les directeurs des écoles rurales, ont de surcroît été supprimées. Celles que le ministre a octroyées par circulaire ne sont pas à la hauteur et les postes de remplaçants permettant aux directeurs de prendre leurs jours de décharge ne suffiront jamais tant que de nouveaux postes, payés décemment, ne seront pas ouverts au concours.
À quelques mois de l'élection présidentielle, nous constatons que l'école et les conditions de travail et de rémunération des enseignants occupent le débat public, ce qui est une bonne chose. Toutefois, cette proposition de loi illustre une conception de l'école calquée sur le modèle de l'entreprise, dont je ne veux pas. Je préfère défendre le service public de l'école et le fonctionnement collégial et démocratique de l'école primaire.
Face à la surcharge de travail et au manque de moyens, le groupe Le France insoumise considère que l'État doit prendre ses responsabilités en augmentant les décharges, y compris en milieu rural, et en fournissant les aides humaines et matérielles qui s'imposent. Ce texte et la stratégie qui l'accompagne étant en totale contradiction avec ces ambitions, nous voterons contre.
Lors de la première lecture, en juin 2020, nous étions tous conscients des difficultés rencontrées par les directeurs d'école et nous étions animés par une même volonté : l'amélioration de leur quotidien.
Nous abordons cette question très régulièrement, comme ce fut, par exemple, le cas dans le cadre du projet de loi pour une école de la confiance, mais reconnaissons que nous avons grand peine à avancer.
Le mal-être de certains directeurs d'école résulte d'un manque de reconnaissance, alors même que leurs missions et leur charge de travail sont conséquentes et augmentent : faiblesse des indemnités de direction, manque de moyens et de temps. Je ne m'attarderai pas sur les chiffres, que nous connaissons tous : selon les syndicats, près de 4 000 postes de directeurs sont vacants, ce qui représente 9 % des écoles ; 13 % des directeurs d'école indiquent de surcroît ne pas avoir demandé à exercer cette fonction.
Depuis le dramatique suicide de Christine Renon en 2019 et la consultation organisée par le Gouvernement, des premiers pas ont été faits, reconnaissons-le, notamment pour limiter le sentiment de solitude des directeurs et pour pérenniser la prime de rentrée. Ces mesures sont bienvenues mais elles sont évidemment très insuffisantes.
En première lecture, le groupe Libertés et territoires avait souligné l'absence de consensus sur ce texte, en particulier concernant l'emploi fonctionnel, mais cette disposition a été abandonnée. Il n'en reste pas moins que certaines modifications introduites au Sénat ravivent les inquiétudes. Nous savons tous que la profession est très attachée au fonctionnement en équipe et nombre d'enseignants ne souhaitent pas la création d'un statut comparable à celui de chef d'établissement dans le second degré. Or, si l'inscription d'une « autorité fonctionnelle » ne vaut pas « autorité hiérarchique », elle n'est pas pour autant de nature à rassurer. De plus, en quoi cette autorité fonctionnelle modifiera-t-elle les conditions de travail des directeurs ? C'est pourtant cela qui importe : comment améliorer concrètement leurs conditions de travail au quotidien ? Ils ont besoin de plus de temps, de décharges supplémentaires et de supports humains pour gérer la complexité des tâches : administration, sécurité, hygiène, relation avec les familles et les mairies, élèves en situation de handicap ou en difficulté.
Le texte propose des mesures positives – décharges, revalorisations indemnitaires – mais elles sont renvoyées à des décrets. Nous saluons également la création d'un référent, car les directeurs ne doivent pas être seuls, ainsi que la réalisation de plans de sécurité par des acteurs compétents. En revanche, il n'apporte pas de solutions satisfaisantes quant à l'absence d'aide administrative et de secrétariat dans certaines écoles. Depuis la réduction considérable des emplois aidés, les mairies, bien souvent, ne peuvent pas se permettre d'y avoir recours alors qu'ils constituent une aide précieuse dans la gestion des tâches administratives. Nous avons regretté que l'article 4 fasse porter à la collectivité territoriale la charge financière de cette aide, ce qui aurait pu entraîner des inégalités territoriales, mais la modification apportée par le Sénat, nécessaire, doit être maintenue.
Notre groupe continue donc d'exprimer de sérieuses réserves sur ce texte qui, finalement, répond peu aux attentes des directeurs d'école. Nous aurions dû nous montrer beaucoup plus ambitieux, voire courageux, dans le cadre d'une nécessaire décentralisation ou, à tout le moins, d'une esquisse de décentralisation des fonctions de directeurs d'école. De la même manière, il conviendra d'aborder la question du transfert de l'autorité hiérarchique des principaux de collège vers les départements et de celle des proviseurs vers les régions. N'ayons pas peur de la décentralisation et de la responsabilisation en matière éducative !
Ce texte est très loin de la proposition de loi initiale et de celui qui avait été adopté en commission en première lecture. Sous la pression du ministère, la majorité avait commencé un rétropédalage spectaculaire dans l'hémicycle, puis le Sénat a essayé d'améliorer la proposition de loi. Or la rapporteure s'apprête à proposer des amendements de suppression.
Ce texte est-il un premier pas vers la définition d'un statut réel des directeurs d'école, comme le préconise d'ailleurs le rapport de 2020 de l'OCDE ? Le groupe Les Républicains y est favorable. J'ajoute que ce même rapport préconise de renforcer le rôle, les pouvoirs et les parcours professionnels de l'ensemble des chefs d'établissement, notamment, de ceux qui exercent dans des zones sensibles.
La notion d'autorité fonctionnelle nous inquiète beaucoup. Les ministres successifs disposeront d'une grande liberté d'application, jusqu'à la possibilité de dénaturer le fonctionnement des écoles publiques. Il nous paraît donc important de poser des garde-fous afin de préserver un mode de fonctionnement horizontal et démocratique au sein de nos écoles.
Dans votre exposé liminaire, pesant chaque mot, vous nous avez assuré que l'autorité fonctionnelle n'implique pas de lien hiérarchique. Pourquoi ne pas, dès lors, le préciser dans le texte, comme vous l'avez fait en séance publique ? Nous ne le comprenons pas, pas plus que nos interlocuteurs sur les territoires.
Avant le rapport de l'OCDE, celui que Valérie Bazin-Malgras et moi-même avons rédigé à l'issue de la mission flash sur les directeurs d'école préconisait la création d'un statut de directeur d'école. Depuis quatre ans que je travaille sur cette question, il me semble toutefois nécessaire d'aller beaucoup plus loin pour l'école du XXIe siècle et de réfléchir au statut de l'école elle-même.
La profession ne demande pas forcément la création d'un statut de directeur d'école. Nous posons un premier jalon en reconnaissant la spécificité de cette fonction, car il me semble primordial de reconnaître la place du directeur d'école dans son établissement et dans son institution. Peut-être pourrons-nous réfléchir demain, plus globalement, à l'avenir de l'ensemble des établissements scolaires, pourquoi pas à partir de l'exemple territorialisé des cités éducatives. Laissons-nous encore le temps de la réflexion !
Article 1er : Missions du directeur d'école
Amendement de suppression AC41 de Mme Muriel Ressiguier.
Nous nous opposons à la délégation de compétences de l'autorité académique aux directrices et directeurs d'école ainsi qu'à la création d'une autorité fonctionnelle pour ces enseignants. Les directeurs d'école, en effet, ne veulent pas d'une autorité fonctionnelle ou hiérarchique, la première induisant de toute façon une autorité décisionnelle, donc implicitement hiérarchique : ils veulent du temps et des moyens humains tout en préservant un mode de travail collégial.
Avis évidemment défavorable à un amendement visant à supprimer un article qui modifie le cadre juridique de l'exercice de la fonction de directeur d'école afin notamment que ceux-ci puissent prendre des décisions pour le bon fonctionnement de leur établissement.
Nous sommes tous attachés à la collégialité au sein des écoles primaires. Ce texte ne modifie en rien l'organisation des conseils des maîtres et des conseils d'école, les deux instances où les décisions sont prises de manière consensuelle, après un dialogue entre les équipes pédagogiques. Ce fonctionnement n'est aucunement remis en cause.
De même, ce texte n'instaure aucune nouvelle chaîne hiérarchique. Les directeurs d'école restent des pairs parmi des pairs mais ils bénéficieront d'un plus grand pouvoir de décision et, surtout, de « signature ». L'inspecteur de l'éducation nationale (IEN) demeure le supérieur hiérarchique des enseignants et des directeurs.
En revanche, nous reconnaissons explicitement les missions des directeurs d'école qui, jusqu'ici, ne l'étaient qu'implicitement. L'article L. 411-1 du code de l'éducation nationale ne mentionne actuellement en effet que « l'exercice des fonctions spécifiques » de ces derniers.
De plus, contrairement à ce que vous dites, ces professionnels demandent une certaine autonomie, non pour eux, mais pour leurs équipes pédagogiques. Ils souhaitent simplement avoir les moyens de piloter les projets de leur école, décidés en son sein, pour elle et pour les élèves. Ils demandent aussi plus d'autonomie afin de pouvoir prendre des décisions plus rapidement, en particulier en matière de sécurité, au lieu de devoir appeler l'IEN. Ce texte permettra de mettre un terme à une espèce d'infantilisation subie par les directeurs d'école depuis des décennies. Être à même de pouvoir décider au sein de son école, ce n'est pas être un chefaillon, comme vous semblez le penser.
Le groupe LR est d'accord avec Mme la rapporteure. La reconnaissance d'une « autorité fonctionnelle » pour le directeur d'école est le moins que nous puissions faire. Je précise donc d'ores et déjà que nous nous opposerons aussi aux amendements visant à supprimer la dernière phrase de l'article 1er.
Nous n'avons manifestement pas les mêmes chiffres ni les mêmes références : environ 3 % seulement des directeurs d'école souhaitent une plus grande autonomie.
Je ne mets pas en cause votre volonté d'améliorer les conditions de travail de ces derniers, mais nous achoppons sur un point : votre vision managériale de l'école. Sans doute convient-il également de prendre le temps de la discussion avec les directeurs, tant les divergences sont grandes entre vos propos et les leurs.
La commission rejette l'amendement.
Amendement AC17 de Mme Jacqueline Dubois.
Les chargés d'écoles représentent 8 % des directrices et directeurs d'école mais ils ne sont pas pleinement reconnus comme tels alors qu'ils en assument les charges. Ce problème se pose en particulier dans les territoires ruraux, où il n'est pas rare que des enseignants du premier degré soient affectés à la direction d'écoles qui ne comptent qu'une classe à plusieurs niveaux.
Or, être en charge d'une école à classe unique, c'est être directrice ou directeur d'école dans les faits mais pas dans les textes. Les formations proposées pour assurer cette fonction ne concernent pas les chargés d'école et, de surcroît, les écarts de rémunérations ne reconnaissent pas l'investissement que demande l'exercice de ces missions qui participent à la cohésion sociale dans les territoires ruraux. Cette situation est injuste et il convient d'y remédier.
C'est une question importante.
Les chargés d'école bénéficient de bonifications indiciaires mais, en tant que tels, ils ne sont pas en effet reconnus comme directeurs d'école. Sans doute leur statut pourrait-il évoluer mais ce texte n'est pas le bon vecteur, car la distinction des classes uniques supposerait demain de distinguer les écoles qui en comptent vingt ou vingt-six et qui ont aussi leurs particularités.
Point d'ores et déjà acquis, la mention des « spécificités de l'école » dans les articles 2 et 2 bis du texte implique la reconnaissance de la particularité des classes uniques – ce qui peut emporter des conséquences en matière de formation.
Je vous invite donc à retirer votre amendement mais peut-être serait-il opportun de soulever cette question devant le ministre, en séance publique. Des avancées sont peut-être possibles sur le plan réglementaire.
Je suis favorable à l'adoption de cet amendement.
Vous faites valoir, madame la rapporteure, qu'il n'est pas possible de distinguer les écoles en fonction du nombre de classes mais, hors classes uniques, toutes les autres écoles ont bien des directeurs à leur tête. Il me semble qu'il s'agit là d'une spécificité unique.
Cet amendement, que je voterai, a le mérite de soulever un problème qui relève presque de la discrimination.
Les départements ruraux comptent de nombreux chargés d'école en raison d'un grand nombre de classes uniques. Mon département de l'Ariège, comme cinquante autres départements ruraux, n'a pas été concerné par les décharges d'enseignement.
Les directeurs de petites écoles à classe unique sont en effet considérés différemment de leurs homologues alors que l'école est une sur tout le territoire de la République. Il en va donc de la continuité du service public et de l'égalité territoriale.
Le groupe Les Républicains votera également en faveur de cet amendement. Aucune discrimination n'est acceptable entre directeurs d'école.
Nous en sommes tous d'accord, le statut de chargé d'école est spécifique et doit être reconnu comme tel. De plus, l'ensemble du territoire est concerné : ma circonscription, très urbanisée, comprend également une école à classe unique.
Une distinction importante, néanmoins, demeure : à la différence des directeurs d'école, le chargé d'école n'a pas à s'inscrire sur la liste d'aptitude. S'il devenait immédiatement directeur d'école, l'inégalité serait patente, ce qui pourrait créer un sentiment d'injustice pour ses collègues qui, eux, ont fait l'effort de s'y soumettre. Prenons garde à ce que nous écrivons dans la loi : nous risquerions une rupture d'égalité.
J'entends votre argument mais il n'en reste pas moins qu'un chargé d'école assume les fonctions d'un directeur d'école. Même s'il s'agit de son premier emploi, il doit pouvoir ensuite accéder à la liste d'aptitude et être reconnu comme directeur d'école, peut-être après deux ou trois ans d'exercice. Faute de le prévoir dans ce texte, qui est un bon support pour reconnaître l'engagement et les qualités de ces derniers, leur statut ne changera pas. Je maintiens donc mon amendement.
Mme Dubois a raison. L'argumentation de Mme la rapporteure est contradictoire avec le texte qu'elle défend. Puisque vous avez ouvert l'accès à la liste d'aptitude, gardez la porte ouverte.
La commission adopte l'amendement.
Amendement AC20 de Mme Béatrice Descamps.
Cet amendement rédactionnel vise à reprendre la même expression – école « maternelle, élémentaire ou primaire » – que celle figurant plus loin dans le texte.
En toute rigueur, il serait peut-être plus harmonieux de retenir les mêmes termes, vous avez raison, mais cela me paraît superfétatoire à ce stade.
Avis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Amendement AC34 de Mme Michèle Victory, amendements identiques AC35 de Mme Michèle Victory et AC45 de Mme Muriel Ressiguier (discussion commune).
Même si nous connaissons votre sincérité et votre engagement sur les questions relatives à l'école, madame la rapporteure, la rédaction du présent article pose un problème. Selon nous et selon beaucoup d'enseignants, la notion d'autorité fonctionnelle ne réglera rien et suscite, au contraire, de nombreuses inquiétudes, car elle crée un risque d'isolement.
Les débats au Sénat donnent l'impression qu'il faudrait clarifier les choses, comme si l'organisation collégiale spécifique au premier degré n'était pas efficace et qu'elle empêchait le directeur d'école d'exercer ses fonctions. Or cela ne nous a pas été signalé.
Les personnes que nous avons auditionnées, y compris les représentants des syndicats les plus favorables à la création d'un statut pour les directeurs d'école, sont relativement opposées à l'instauration d'un pouvoir hiérarchique. Vous nous dites que rien dans le texte ne va dans ce sens, mais ce qui figure dans le présent article n'est absolument pas clair. Reformulons-le de façon cohérente, comme nous l'avions fait en première lecture, pour mettre un terme aux inquiétudes.
Je l'ai dit tout à l'heure. La question de l'autorité hiérarchique est essentielle. Il faut bien préciser les choses.
Je vais enfoncer le clou. Puisque nous avons l'air d'être tous d'accord pour dire que le directeur d'école n'exercera pas d'autorité hiérarchique sur les enseignants, écrivons-le.
La rédaction retenue par les sénateurs, qui fait référence à « l'autorité fonctionnelle », permettra d'avancer sur la question de la délégation de compétences.
Cela peut paraître technique, et je vous prie de m'en excuser, mais je rappelle que lorsque nous avons adopté l'article 1er en précisant que le directeur d'école bénéficierait d'une délégation de compétences pour le bon exercice de ses missions, les syndicats que vous avez auditionnés ont tout de suite craint que cette délégation de compétences n'aboutisse à une délégation de missions, c'est-à-dire que des missions aujourd'hui dévolues à l'inspection descendent au niveau des directions des écoles. Or ce n'est pas le cas. Il s'agissait simplement de dire que, dans le cadre des compétences qu'ils exercent, les directeurs bénéficient d'un pouvoir de signature et de la reconnaissance de leur autorité au sein de l'école.
« Autorité » n'est pas un mauvais mot. Lorsqu'on est aux responsabilités, on fait autorité parce qu'on est la référence, on est la personne compétente, qui prend des décisions. On exerce des responsabilités que les autres enseignants ne prennent pas au sein de l'école. Il me paraît important de préciser qu'il existe une autorité fonctionnelle liée à la délégation de compétences. L'autorité fonctionnelle, dans la rédaction adoptée par le Sénat, encadre même cette délégation de compétences en la liant aux missions du directeur d'école telles qu'elles sont prévues par le référentiel de 2014 – nous ne modifions en rien ces missions. Comme l'a dit Max Brisson au Sénat, autorité fonctionnelle n'est pas autorité hiérarchique.
S'agissant de la forme, écrire dans la même phrase que le directeur d'école exerce l'autorité fonctionnelle et n'exerce pas l'autorité hiérarchique peut prêter davantage à confusion.
Pardonnez-moi d'insister, mais je ne comprends pas votre démonstration. En quoi ajouter que le directeur d'école n'exerce pas d'autorité hiérarchique introduit-il de la confusion ? Pourquoi ne voulez-vous absolument pas entendre parler de la précision fondamentale et très attendue que nous souhaitons apporter ?
Je partage cette interrogation. Vous n'arrêtez pas de dire que l'autorité n'est pas un gros mot, et je suis d'accord avec vous, mais quand on a l'autorité, on décide et donc, implicitement, on a l'autorité hiérarchique. Si ce n'est pas le cas, nous ne comprenons pas pourquoi vous ne voulez pas l'écrire. Cela n'ajoutera pas du flou : bien au contraire, cela clarifiera la situation.
On joue sur les mots. Or chacun d'entre eux a une définition et un sens. « Fonctionnel » n'est pas synonyme de « hiérarchique », tout le monde le sait. Il n'est donc pas nécessaire de préciser que l'autorité fonctionnelle n'est pas l'autorité hiérarchique. On parle de lien hiérarchique lorsqu'un salarié a un supérieur et de lien fonctionnel pour qualifier les relations de travail entre collègues de même niveau.
Si, c'est nécessaire, car il y a de l'inquiétude chez les enseignants. C'est aussi simple que cela.
La commission rejette successivement les amendements.
Amendement AC31 de Mme Anne Brugnera.
Les notions d'autorité hiérarchique et d'autorité fonctionnelle sont connues dans la fonction publique. Nos oppositions jouent de la confusion pour effrayer les directeurs d'école, mais je pense qu'ils ont compris – du moins ceux que j'ai rencontrés dans ma circonscription – qu'il ne s'agit pas d'autorité hiérarchique. Ils ont besoin, en revanche, d'éclaircissements quant à l'obligation de mobilité et à la durée d'exercice qui pourraient être liées à l'autorité fonctionnelle. D'où l'amendement que j'ai déposé.
Ces questions ne sont pas liées à l'autorité fonctionnelle mais, me semble-t-il, à la notion d'emploi fonctionnel qui figurait dans la rédaction initiale de la proposition de loi. Un emploi fonctionnel implique en effet une durée d'exercice limitée et une obligation de mobilité. C'est d'ailleurs pourquoi nous avons enlevé cette notion en première lecture. L'autorité fonctionnelle concerne les missions, ce n'est pas un cadre d'emploi juridique et il n'y aura pas d'incidence en matière de mouvement. Les directeurs et directrices d'école sont titulaires de leur poste et pourront y rester toute leur carrière, mais ils pourront demander leur mutation s'ils veulent en changer. Je vous demande donc de retirer l'amendement.
L'amendement est retiré.
La commission adopte l'article 1er modifié.
La réunion est suspendue de dix heures quarante à dix heures quarante-cinq.
Article 2 : Modalités de nomination, d'avancement, de formation et conditions de travail des directeurs d'école
Amendement AC44 de M. Michel Larive.
Cet article prévoit que la directrice ou le directeur d'école participe désormais à l'encadrement du système éducatif. Or quels sont les personnels d'encadrement ? Le ministère de l'éducation nationale en distingue trois : les personnels de direction, les personnels d'inspection et les personnels d'encadrement administratif. Les directrices et les directeurs d'école seront ainsi assimilés aux personnels de direction, c'est-à-dire aux chefs d'établissement du second degré.
Par ailleurs, cet article donnera de nouvelles missions aux directrices et directeurs d'école. La formation et la coordination sont actuellement assurées par d'autres personnels de l'éducation nationale. La majorité et le Gouvernement souhaitent-ils les supprimer pour transférer leurs missions aux directrices et aux directeurs d'école, alors que ces dernières et ces derniers demandent une aide pour les tâches administratives et une augmentation de leur temps de décharge ? À quoi a donc servi la consultation organisée par le ministère si c'est l'inverse de ces demandes qui est décidé ?
Dernier point, les formations prévues par cet article sont déjà obligatoires. Si elles ne sont pas effectuées, c'est que les directrices et les directeurs n'ont pas les moyens de les suivre. C'est de moyens supplémentaires que ces personnels ont besoin et non d'une surenchère législative ou réglementaire qui n'aura aucun effet.
Pour toutes ces raisons, nous demandons la suppression des alinéas 1 à 12.
S'agissant de la participation à l'encadrement du système éducatif, je pense que la nouvelle rédaction de l'alinéa 8 que je vous proposerai vous satisfera, puisque cette mention disparaîtra.
De nombreuses directrices et de nombreux directeurs d'école font, à l'heure actuelle, de la coordination. Cela fait partie de leurs missions. Il est prévu qu'ils coordonnent l'activité pédagogique au sein de leur école. Il existe aussi des coordinateurs de réseau d'éducation prioritaire (REP). Ceux qui sont chargés de le faire sont des directeurs d'école qui bénéficient d'une décharge supplémentaire – souvent, ils n'ont plus de classe. Dans les écoles accueillant les enseignants stagiaires, par ailleurs, le directeur n'est pas maître-formateur mais il est à l'écoute des stagiaires, et il leur sert souvent de conseil et de soutien. Nous voulons que cette mission de formation, actuellement implicite, soit reconnue et que le directeur d'école puisse bénéficier dans ce cadre d'une décharge supplémentaire.
Quant au troisième point, les formations ne sont pas obligatoires avant qu'on soit directeur. Nous demandons que pour le devenir, on bénéficie d'une formation permettant d'être inscrit sur la liste d'aptitude, et surtout nous voulons donner aux équipes pédagogiques la possibilité de demander des formations spécifiques en fonction des besoins, ce qui constitue une avancée.
En adoptant l'article 1er, nous avons supprimé un alinéa du code de l'éducation qui fixe les conditions de recrutement, de formation et d'exercice des fonctions. Supprimer les alinéas 1 à 12 de l'article 2, comme vous le proposez, reviendrait à laisser un vide juridique.
Pour toutes ces raisons, je suis défavorable à l'amendement.
Je n'étais pas au courant, car je ne suis pas dans le secret de la majorité, que vous alliez nous proposer autre chose plus tard. Mais j'aurais dû m'en douter, car il en est ainsi depuis le début du quinquennat. On nous dit : « Vous verrez plus tard, tout ira bien quand nous ferons ceci ou cela ». Soit on nous fait des prix sur un stock de boules de cristal, soit il faut graver des choses dans le marbre à un moment.
Les directeurs d'école assurent de la coordination et d'autres tâches parce qu'ils ont une conscience professionnelle, et non parce que c'est obligatoire. C'est, d'une certaine manière, par défaut puisqu'ils n'ont ni les moyens ni le temps nécessaires. Ils prennent donc sur eux une surcharge de travail. Par ailleurs, le directeur d'école coordonne le fonctionnement de son établissement, mais la coordination proprement dite, telle qu'elle est prévue par les textes régissant l'éducation nationale, revient à d'autres personnels que j'ai cités.
C'est pareil pour la formation, comme vous l'avez dit. Les directeurs s'en occupent par défaut. De même, des professeurs accueillent des collègues et leur expliquent comment fonctionne l'établissement, sans être chargés d'une formation pour autant. En réalité, vous pointez une charge supplémentaire.
S'agissant toujours de la formation, c'est bien des directeurs d'école que nous parlons dans cette proposition de loi.
Quant au vide juridique que vous avez évoqué, laissez-nous faire. Nous allons le combler, ne vous inquiétez pas !
Nous proposerons donc au président Ferrand de rebaptiser Éloi « boule de cristal », puisque l'amendement AC63 que nous examinerons tout à l'heure y figure .
La commission rejette l'amendement.
Amendement AC18 de Mme Jacqueline Dubois.
Dans la continuité de ce que j'ai proposé à l'article 1er, il s'agit de remédier à l'oubli des chargés d'école. Il faut aussi leur permettre de bénéficier d'un emploi de direction, et donc d'une indemnité spécifique et d'un avancement accéléré. La rédaction de l'article permettra d'écarter l'inquiétude que vous avez exprimée, madame la rapporteure, en ce qui concerne la liste d'aptitude.
Je confirme pourtant que cette question se pose sur le plan juridique. Je crains vraiment une rupture d'égalité.
Je vais vous lire le témoignage d'une directrice d'école qui m'a écrit : « Pour avoir accès à la liste d'aptitude à la direction d'école, nous sommes nombreux à avoir préparé et passé un examen oral, exigeant, qui fait suite à un avis de notre inspecteur et à l'évaluation de notre parcours professionnel. Aujourd'hui, la fonction séduisant de moins en moins, de nombreux collègues sont validés sur la liste d'aptitude car ils font fonction, et cela est tout à fait justifié compte tenu de leur investissement et de la charge de travail qui leur incombe, parfois sans prévenir. Mais dans ce cas, je ne peux m'empêcher de penser que le parcours professionnel que nous avons accompli est pour le moins dévalorisé. Nous avons suivi des formations préparatoires, passé un oral d'inspection et un oral d'habilitation mais il n'y a aucune valorisation de ce parcours comparativement à un faisant fonction ou à un chargé d'école ».
Pour accéder à la fonction de directeur d'école, il faut être inscrit sur la liste d'aptitude. Ce que vous proposez créerait des biais pour les faisant fonction et les chargés d'école.
Pour les mêmes raisons que précédemment, je suis défavorable à votre amendement. Je vous demande de le retirer ; à défaut, j'émettrai un avis défavorable.
Je maintiens l'amendement. Je vous assure, madame la rapporteure, que la rédaction de l'article fait que ces personnes ne seront pas inscrites automatiquement sur la liste d'aptitude, mais qu'elles pourront bénéficier d'une reconnaissance.
La commission rejette l'amendement.
Amendement AC2 de M. Lionel Causse.
Les personnels de direction de l'éducation nationale sont soumis à une clause de mobilité. Il faut qu'ils aient trois années d'ancienneté pour demander une mutation et ils doivent bouger au bout de neuf ans. Cet amendement a pour objet d'exonérer les directeurs d'école de ces obligations.
Il y a une confusion. Ce que vous venez de dire s'applique aux chefs d'établissement du second degré. Ils sont nommés à leur poste pour une durée limitée : ils doivent demander une mutation au bout de neuf ans. Pour les directeurs d'école, ce n'est pas le cas. Ils sont titulaires de leur poste. Pour qu'il y ait une mobilité, il faut qu'ils demandent leur mutation. Voilà pour la deuxième phrase de votre amendement.
La première, que vous n'avez pas présentée, est importante mais satisfaite. Vous voulez préciser que l'inspecteur de l'éducation nationale de circonscription demeure le supérieur hiérarchique des professeurs des écoles. Il le restera, même si ce n'est pas inscrit dans la loi – et il en est de même s'agissant des relations entre les chefs d'établissement du second degré et les inspecteurs d'académie – inspecteurs pédagogiques régionaux (IA-IPR). Il n'est aucunement question dans ce texte de remettre en cause la chaîne hiérarchique
Je vous demande de retirer l'amendement, sans quoi j'émettrai un avis défavorable.
L'amendement est retiré.
Amendements AC39 de Mme Michèle Victory, AC4 de M. Lionel Causse, amendements identiques AC59 de la rapporteure, AC33 de Mme Anne Brugnera, AC48 de Mme Maud Petit et AC58 de Mme Anne Brugnera, amendements AC21 de Mme Béatrice Descamps et AC3 de M. Lionel Causse (discussion commune).
L'amendement AC39 permettra d'avoir plus de souplesse en ce qui concerne l'inscription sur la liste d'aptitude : la formation à la fonction de directeur d'école ne sera plus une condition préalable. Cela peut empêcher certaines inscriptions, alors qu'il existe un manque criant de candidats.
La fonction de directeur d'école souffre parfois d'un déficit d'attractivité. Les dispositions de cette proposition de loi relatives aux décharges et au régime indemnitaire tendent à donner davantage de reconnaissance à ceux qui exercent cette fonction. Il convient, par ailleurs, de permettre à de jeunes enseignants volontaires d'y accéder en réduisant l'ancienneté requise. Cette disposition aura notamment pour effet de réduire les affectations à titre provisoire.
Je propose de supprimer la dernière phrase de l'alinéa 4, qui prévoit qu'une formation certifiante est nécessaire pour prendre la direction d'une école dont le directeur bénéficie d'une décharge complète d'enseignement. Cela créerait une différence alors que la fonction de directeur est la même pour tous.
Je propose également de supprimer cette disposition, qui a été introduite par le Sénat. Nous sommes tous d'accord sur la nécessité de formations pour les directeurs d'école, mais la notion de certification ne me paraît pas satisfaisante, et elle crée une distinction qui ne me paraît pas nécessaire.
L'alinéa 4 prévoit déjà que les candidats à la fonction de directeur d'école doivent justifier d'au moins trois ans d'expérience et avoir suivi une formation préparant à l'exercice de cette fonction. Il ne me semble pas nécessaire de rigidifier le dispositif en demandant une formation certifiante supplémentaire pour les directeurs d'école bénéficiant d'une décharge complète d'enseignement. Nous proposons de supprimer cette condition. L'alinéa 10 prévoit une offre de formation régulière pour les directeurs d'école, ce qui me paraît constituer une solution alternative plus en adéquation avec la réalité du terrain.
Je vais retirer l'amendement AC21. Il n'allait pas jusqu'à supprimer toute la phrase, alors que ce serait beaucoup mieux.
La formation des enseignants, notamment en matière d'adaptation à l'emploi, est une clé de la réussite. Les directeurs d'école n'étant pas des personnels d'encadrement et de direction, leur formation ne relève pas de l'Institut des hautes études de l'éducation et de la formation. Il convient de confier une partie de cette mission au réseau Canopé et de mobiliser l'opérateur du ministère de l'éducation nationale pour harmoniser la formation initiale.
Je ne peux pas donner un avis favorable à votre amendement, madame Victory, car je propose de supprimer la dernière phrase de l'alinéa. Par ailleurs, je ne pense pas que vous souhaitiez une distinction entre les directeurs et les directrices d'école en matière de formation.
Nous avons ramené l'ancienneté nécessaire pour être inscrit sur la liste d'aptitude de cinq à trois ans en première lecture, pour les raisons que vous avez évoquées, monsieur Causse. Je propose d'en rester là, afin de laisser aux enseignants le temps de s'habituer à leurs fonctions avant d'évoluer. Je vous demande de retirer l'amendement AC4, à défaut de quoi j'émettrai un avis défavorable.
Même position en ce qui concerne l'amendement AC3. Même si les directeurs d'école ne font pas partie des personnels de direction, ils bénéficient de formations spécifiques. L'article 2 le précise. Canopé est évidemment un partenaire pour la formation des directeurs d'école – et des enseignants –, mais je ne pense pas qu'il soit nécessaire d'y faire référence dans la loi. Sans quoi, qu'adviendra-t-il des autres acteurs qui participent à la formation ?
La formation mentionnée à l'alinéa 4 me semble importante mais je veux bien entendre les arguments de la rapporteure. Ce qui me dérange, en revanche, c'est que vous voulez aussi supprimer l'alinéa 6, qui prévoit, en cas d'emploi vacant, une formation à la fonction de directeur d'école dans les meilleurs délais. Il y a, dans certaines communes, pénurie de directeurs d'école et l'on sait que l'on nomme des personnes contre leur gré parce qu'il faut bien pourvoir ces emplois ; elles ont besoin d'une formation, surtout si elles n'ont que trois ans d'ancienneté.
Autre question : l'école du socle, c'est-à-dire la possibilité d'avoir une direction commune entre un petit collège et une école primaire. C'est quelque chose qui se fait dans l'enseignement privé sous contrat et à laquelle j'ai toujours été favorable. Cet alinéa ne risque-t-il pas de remettre en cause la direction de groupes scolaires par un enseignant du secondaire ?
Je reconnais que le passage de cinq à trois ans représente déjà un effort et qu'il faudrait en évaluer les résultats avant d'aller plus loin. Quant au réseau Canopé, il serait quand même important de le mentionner dans la loi parce que c'est un opérateur public. Je vais voir s'il serait possible d'aller dans ce sens en séance publique. En attendant, je retire mes amendements.
Les amendements AC4, AC21 et AC3 sont retirés.
La commission rejette l'amendement AC39 et adopte les amendements identiques AC59, AC33, AC48 et AC58.
Amendement rédactionnel AC60 de la rapporteure et amendement AC23 de Mme Béatrice Descamps (discussion commune).
Je l'ai dit dans la discussion générale, certains alinéas mériteraient une clarification. C'est le cas de l'alinéa 5.
L'amendement AC23 va trop loin. L'alinéa 5 s'adresse aux directeurs en poste à la date d'entrée en vigueur de la loi : il précise qu'ils seront d'office admis dans les nouvelles fonctions, sans avoir à faire de démarches particulières.
Pourrais-je avoir une réponse à ma question relative à la direction des groupes scolaires, madame la rapporteure ?
Si j'ai proposé cet amendement, c'est que la rédaction me semble floue. Il serait nécessaire de préciser les choses.
C'est précisément l'objet de l'amendement que je propose, madame Descamps !
Monsieur Reiss, nous avons déjà eu cette discussion en première lecture. C'est une question importante mais l'application des dispositions relatives aux directeurs d'école à l'enseignement privé sous contrat relève du domaine réglementaire. Il faudra poser la question au ministre, en séance.
L'amendement AC23 est retiré.
La commission adopte l'amendement AC60.
Suivant l'avis de la rapporteure, la commission adopte l'amendement rédactionnel AC22 de Mme Béatrice Descamps.
Amendement AC30 de Mme Anne Brugnera.
Cet amendement traite des personnes faisant fonction de directeur. Il convient, non seulement de veiller à leur inscription sur la liste d'aptitude, mais aussi de les rendre prioritaires pour obtenir la direction de leur école l'année suivante. Il y a, dans ma circonscription, des enseignants qui ont fait fonction de directeur d'école pendant des années mais qui ont dû abandonner la direction à un nouvel arrivant.
Nous avons déjà abordé le sujet – je vous ai lu tout à l'heure le témoignage d'une directrice d'école. Cette question relève du droit commun et des règles qui régissent les mutations au sein de l'éducation nationale. Quand vous êtes faisant fonction et êtes inscrit sur la liste d'aptitude, vous êtes soumis au barème du mouvement : vous n'avez malheureusement aucune assurance d'être nommé au poste que vous occupiez si d'autres personnes le demandent. Idem, d'ailleurs, pour les enseignants contractuels du premier et du second degré : ils peuvent exercer depuis des années dans un établissement, avec de très bonnes appréciations de la part du chef d'établissement, si un titulaire arrive, ils doivent céder leur poste.
Nous ne comptons pas remettre en question ce mode de fonctionnement. Demande de retrait ou, à défaut, avis défavorable.
C'est en effet une règle qui s'applique à tous les postes de fonctionnaires, au-delà de l'éducation nationale. Je retire mon amendement, mais je reviendrai sur la question, car il s'agit là d'un facteur de reconnaissance important – et l'objet de cette proposition de loi est précisément de reconnaître le travail des directeurs d'école.
L'amendement est retiré.
Amendements AC61 de la rapporteure.
Pourquoi supprimer l'alinéa 6, monsieur Reiss ? Tout simplement parce qu'il est satisfait. Lorsqu'un poste de directeur n'est pas pourvu à l'issue du mouvement – M. Pancher rappelait tout à l'heure qu'il y en avait plus de 4 000 –, on le propose à quelqu'un qui fera fonction de directeur, et cette personne bénéficie d'ores et déjà de quelques jours de formation. Je précise qu'une telle situation peut se produire à la rentrée comme en cours d'année, pour remplacer quelqu'un en congé maternité ou maladie. L'alinéa 6 me semble donc superfétatoire.
Pour notre part, nous trouvons utile la précision apportée par le Sénat. Nous voterons contre l'amendement de suppression.
La commission adopte l'amendement.
En conséquence, l'amendement AC24 de Mme Béatrice Descamps tombe.
Amendements identiques AC62 de la rapporteure, AC49 de Mme Maud Petit et AC55 de Mme Sylvie Charrière.
Il s'agit de supprimer la précision selon laquelle le directeur d'école demande, pour les besoins du projet d'école, des formations « en prenant en compte les orientations de la politique nationale ». Dès à présent, pour obtenir une formation, il faut faire une demande auprès du supérieur hiérarchique, à savoir l'IEN. Celui-ci valide uniquement les formations qui respectent le code de l'éducation et les directives de la politique éducative nationale – c'est d'ailleurs l'une de ses trois missions premières.
Nous considérons, nous aussi, que cette précision n'apporte aucune plus-value et alourdit le texte.
Nous sommes favorables à cette suppression, mais pas pour les mêmes raisons. Nous estimons que, lorsqu'un directeur d'école propose à l'inspection des actions de formation spécifiques à son école, on s'inscrit parfaitement dans la différenciation des territoires. Nous serons sans doute amenés à en reparler à l'occasion de l'examen du projet de loi dit 3DS, relatif à la différenciation, à la décentralisation, à la déconcentration et à la simplification.
Ces amendements sont de bon sens : chacun pourrait interpréter différemment les orientations de la politique nationale, ce qui risquerait de donner lieu à des dérives. C'est en effet à l'IEN qu'il revient de vérifier que cela correspond bien à la politique décidée par le Gouvernement. La préoccupation du directeur d'école doit être de faire fonctionner son établissement.
La commission adopte les amendements.
Amendements identiques AC63 de la rapporteure, AC50 de Mme Maud Petit, AC54 de M. Pierre-Yves Bournazel et AC56 de Mme Sylvie Charrière.
Je propose de réécrire l'alinéa 8, afin de simplifier, d'alléger et de clarifier le cadre de travail des directeurs d'école. Il s'agit de prévoir une décharge totale ou partielle d'enseignement en fonction, non seulement du nombre de classes de l'école, mais aussi de ses spécificités. C'est une avancée très importante, parce que cela permettra d'accorder des décharges supplémentaires aux directeurs d'école qui pilotent des écoles présentant certaines particularités. Je reprends l'idée des sénateurs selon laquelle cette décharge doit permettre au directeur de remplir effectivement les diverses missions qui lui sont attribuées : coordination, formation, enseignement, direction. Ces missions doivent faire l'objet d'un dialogue entre le directeur d'école et l'inspecteur d'académie ou l'inspecteur de circonscription – il importe de l'inscrire dans la loi.
J'ai supprimé toute référence à une quelconque périodicité dès lors que nous avons, en première lecture, introduit l'obligation d'un tel dialogue. Prévoir qu'il aura lieu chaque année ou tous les deux ans risque de rigidifier le dispositif. Il doit se tenir dès que l'éventualité d'une évolution des missions se présente. Certaines peuvent s'ajouter en cours d'année – par exemple, des missions de coordination ou de formation – et il paraît normal que l'inspecteur en discute avec le directeur d'école pour savoir s'il les accepte ou non.
Enfin, j'ai supprimé la phrase : « Le directeur participe à l'encadrement du système éducatif », car il est apparu, à la suite de nos débats, de l'examen du texte au Sénat et des nombreuses discussions que nous avons eues avec les représentants syndicaux ou les collectifs de directeurs, qu'elle n'apportait rien sur le plan juridique, qu'elle ne pourrait être concrétisée dans les décrets à venir et qu'elle pouvait, de surcroît, laisser entendre que le directeur changerait de statut et deviendrait cadre, donc un supérieur hiérarchique.
Par une rédaction proche de celle adoptée en première lecture par l'Assemblée nationale, ces amendements visent à affirmer plus nettement que les directeurs d'école bénéficient d'une décharge d'enseignement. Les missions de formation et de coordination peuvent intervenir en complément des heures d'enseignement, en plus de pouvoir s'y substituer. Nous prévoyons, en outre, que les conditions d'utilisation de ces décharges sont fixées par le ministère de l'éducation nationale. Enfin, pour ne pas rigidifier le dispositif, nous proposons de supprimer la disposition introduite par le Sénat, qui prévoit une évaluation annuelle de l'utilisation des décharges devant le conseil départemental de l'éducation nationale.
Il convient de consacrer la mise à disposition de journées de décharge d'enseignement – ce que les directeurs d'école réclament à juste titre – et, dans un souci de simplification, de supprimer la disposition introduite par le Sénat, qui prévoit l'évaluation annuelle de l'utilisation des décharges devant le conseil départemental de l'éducation nationale. Nous ferions œuvre utile en adoptant ces amendements.
Ils offrent, en effet, une rédaction bien plus lisible et fluide. J'insiste sur la nécessité d'individualiser les décharges, en fonction des spécificités de chaque école. Cela ne dépend pas uniquement du nombre de classes.
Ces amendements identiques, qui proviennent de bancs différents, ont sans doute été validés en haut lieu. De fait, l'alinéa 8, tel qu'il a été rédigé par le Sénat, pose plusieurs problèmes. Qu'est-ce que « l'autorité compétente en matière d'éducation » qui rend compte de l'utilisation effective des décharges ? D'autre part, ce qui importe, c'est que le dialogue avec l'inspection académique soit effectif ; sa périodicité importe peu.
Je suis, moi aussi, favorable à ces excellents amendements, qui répondent à une demande des directeurs d'école.
Pourriez-vous, néanmoins, préciser ce que vous entendez par « spécificités » d'une école ? Comment la décharge sera-t-elle déterminée ?
Nous pensons qu'ajouter des missions de formation et de coordination alourdira la charge des directeurs d'école.
D'autre part, si les missions sont définies à l'issue d'un dialogue avec l'inspection académique, on court le risque d'individualiser les obligations de chaque directeur.
C'est pourquoi nous ne sommes pas favorables à ces amendements.
Les « spécificités de l'école » peuvent être les besoins particuliers d'un certain nombre d'enfants, l'implantation territoriale, le fait que l'école fasse partie d'un réseau d'éducation prioritaire ou se situe en zone rurale, sa taille etc. Le nombre d'élèves n'est pas forcément le critère le plus important ; nous avons réalisé de grandes avancées dans ce domaine, en particulier grâce au dédoublement des classes de grande section, de CP et de CE1. Si l'on s'en tenait à cela, les dispositifs dont bénéficient aujourd'hui les écoles rurales, en REP et en REP+ disparaîtraient. Le contenu exact de ce que l'on entend par « spécificités » sera, de toute façon, à définir avec les partenaires sociaux au moment de la rédaction des textes réglementaires d'application.
La commission adopte les amendements.
En conséquence, les autres amendements portant sur l'alinéa 8 tombent.
La commission adopte l'amendement rédactionnel AC64 de la rapporteure.
Amendements AC27 de Mme Béatrice Descamps.
Le fait que le directeur ne participe pas aux activités pédagogiques complémentaires (APC) de son école ne doit pas léser les élèves dont il a la charge – je précise que c'est du vécu. Je propose, par conséquent, d'indiquer que l'organisation de ces activités par l'équipe pédagogique permet la prise en charge des élèves du directeur.
La question est d'importance, mais il me semble que l'amendement est satisfait. Je sais qu'il existe des contre-exemples dans votre département mais, dans les écoles de ma circonscription, les élèves des directeurs sont répartis dans les autres classes. Tout cela semble à géométrie variable et inscrire une telle disposition dans la loi risquerait de rigidifier les choses. On devrait pouvoir résoudre le problème de manière réglementaire, au moment de la publication des textes.
Demande de retrait ou, à défaut, avis défavorable.
L'amendement est retiré.
Amendements AC28 de Mme Béatrice Descamps et AC51 de Mme Maud Petit (discussion commune).
Je propose de supprimer l'obligation de formation tous les cinq ans, ajoutée par le Sénat, tout en affirmant la nécessité d'une offre de formation régulière. Plutôt que de fixer une norme rigide, il est préférable de permettre l'instauration d'un dialogue social afin de laisser au corps enseignant la liberté de s'organiser et de travailler en concertation sur le sujet.
Je trouve très intéressante la proposition de Maud Petit. L'adoption de l'amendement AC51 permettrait, de surcroît, de satisfaire la demande de Mme Descamps.
L'amendement AC28 est retiré.
La commission adopte l'amendement AC51.
Elle adopte l'article 2 modifié.
Après l'article 2
Amendement AC43 de M. Michel Larive.
Dans le compte rendu de la consultation des directrices et directeurs d'école organisée par le ministère de l'éducation nationale en novembre 2019, il est indiqué que 44 % d'entre eux consacrent plus de vingt et une heures par semaine aux tâches liées à la direction d'école et qu'ils sont 46 % à y consacrer entre onze et vingt heures. De même, 87 % des directeurs et directrices d'école sont d'accord avec l'affirmation suivante : « Lorsque vous êtes en classe, vous êtes souvent interrompus pour répondre à une sollicitation liée à votre fonction de direction. » L'accroissement du temps de décharge apparaît comme la première piste concrète d'amélioration de leurs conditions de travail.
Si le Gouvernement a choisi de l'augmenter légèrement, cela reste nettement insuffisant. Nous souhaitons, en particulier, appeler l'attention sur les écoles de moins de huit classes, qui représentent 75 % des écoles, principalement en zone rurale : les directrices et directeurs ne bénéficient que de six jours de décharge par an dans les écoles d'une seule classe, de douze jours dans celles de deux à trois classes et il n'y a eu, cette année, aucune amélioration pour les écoles de quatre à huit classes.
Par ailleurs, pour que les directrices et directeurs puissent utiliser ces jours de décharge, il est nécessaire d'accroître les possibilités de remplacement : augmenter le nombre de postes offerts au concours de professeur des écoles, augmenter la rémunération des enseignants afin que les postes ne restent pas vacants, etc. Il est nécessaire de prendre en considération toutes ces conditions pour accroître les décharges dont bénéficient les directrices et directeurs et que le seuil soit enfin respecté. Nous proposons donc qu'un rapport évalue les temps de décharges d'enseignement à mettre en place.
Plusieurs rapports ont déjà été remis, comme celui de la mission flash que j'ai effectuée au nom de cette commission avec ma collègue Valérie Bazin-Malgras ou celui du sénateur Max Brisson, présenté juste avant que nous ne commencions l'examen en première lecture de cette proposition de loi. En outre, le ministre a déjà fait évoluer les décharges, en particulier pour les petites écoles, en doublant le nombre de jours de décharge pour les écoles d'une à trois classes et en faisant en sorte que les écoles élémentaires et maternelles bénéficient du même temps de décharge. Votre demande de rapport ne me paraît donc pas justifiée.
Avis défavorable.
Bien sûr que si, elle est justifiée ! D'ailleurs, vous avez beaucoup hésité sur le nombre de décharges à accorder. Les rapports que vous citez, et que nous avons lus, n'apportent pas les éclaircissements suffisants ; c'est pourquoi nous en demandons un autre. Il s'agit, non de graver tout de suite quelque chose dans le marbre, mais d'être mieux informés sur ce qui se passe sur le terrain.
La commission rejette l'amendement.
Article 2 bis : Assistance matérielle et administrative des directeurs d'école
Amendement AC47 de Mme Muriel Ressiguier.
Nous souhaitons préciser que les représentants des personnels de l'éducation nationale doivent être consultés lors de l'attribution de moyens pour mettre à disposition une assistance administrative et matérielle. La rédaction actuelle de l'article laisse, en effet, entendre que l'État seul détermine, lorsque la taille ou les spécificités de l'école le justifient, quels personnels et matériels sont mis à la disposition des directeurs. Il nous semble indispensable que les personnes concernées soient associées à l'élaboration des critères qui entraînent le déploiement de ces aides.
Je suis d'accord avec vous, c'est précisément pour cette raison que les questions ayant trait à la vie de l'école, dans ses dimensions matérielles et pédagogiques, sont discutées en conseil d'école, où les collectivités territoriales sont représentées. La rédaction du Sénat pourrait en effet laisser entendre que l'État seul détermine ce dont le directeur a besoin pour l'aider dans sa mission. Je pense donc que vous voterez le rétablissement de l'article tel qu'il a été adopté par l'Assemblée nationale en première lecture.
Avis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Amendements identiques AC65 de la rapporteure, AC52 de Mme Maud Petit, AC53 de M. Pierre-Yves Bournazel et AC57 de Mme Sylvie Charrière.
L'amendement AC65 vise à rétablir la rédaction adoptée par l'Assemblée nationale en première lecture.
Dans les textes, les directeurs d'école assument des responsabilités au regard du pilotage pédagogique, du fonctionnement de l'école et des relations avec les parents et les partenaires de l'école. Ils sont nombreux à exprimer leur besoin d'être soulagés de tâches administratives pour mieux assurer leurs missions de pilotage et d'accueil.
En outre, pour le bon fonctionnement de l'école, le directeur d'école échange quotidiennement avec la collectivité locale au sujet de la restauration scolaire, des achats de matériel ou de la sécurité des enfants et de leur famille dans l'école et à ses abords. Il est souvent dérangé dans son travail pour ouvrir la porte de son école – il fait ainsi office de gardien de la structure communale. Une part non négligeable de sa charge administrative relève donc bien de la gestion communale en matière d'équipement, de fonctionnement et d'entretien des écoles.
L'amendement AC57 vise à rétablir la rédaction adoptée par l'Assemblée nationale en première lecture, afin que les communes ou leurs groupements participent à l'apport de moyens permettant de garantir l'assistance administrative et matérielle nécessaire aux directeurs d'école.
Il est gênant que l'article 2 bis associe à l'assistance matérielle, l'assistance administrative : dans ce domaine, la part des communes est plus contestable. Il serait préférable de séparer les deux.
Madame la rapporteure, vous proposez de rétablir la rédaction de l'Assemblée nationale par laquelle l'État et les communes ou leurs groupements peuvent mettre à disposition des directeurs d'école des moyens permettant de leur garantir l'assistance administrative et matérielle.
Le Sénat avait supprimé la mention des communes et confié la mise à disposition de moyens à l'État, en en transformant la possibilité en obligation. Les deux sont mauvais. Un net recul est ici acté, alors que les directeurs et directrices ont besoin de moyens supplémentaires. Acte est également donné du refus de l'État de lutter contre les inégalités entre les territoires, donc entre les écoles – et inversement.
La commission adopte les amendements.
Amendement AC16 de Mme Jacqueline Dubois.
J'appelle une nouvelle fois votre attention sur l'oubli de la situation des chargés d'école. Puisque ces enseignants chargés d'une école à une classe assurent des fonctions de direction sans être directeurs, mon amendement tend à les mentionner afin que soit prise en considération la spécificité de leurs écoles.
Pour les raisons déjà évoquées, je vous suggère de retirer l'amendement. À défaut, avis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Amendement AC46 de M. Michel Larive.
Nous dénonçons la politique du Gouvernement, qui consiste à mettre à disposition des écoles uniquement des apprentis et des jeunes en service civique, c'est-à-dire de la main-d'œuvre à bon marché, qu'il faut former chaque fois car la rotation est importante sur le terrain. Cela est chronophage pour les directrices et les directeurs, qui manquent de temps pour les tâches de direction. Quant aux jeunes, ils sont sous-payés et privés de droits sociaux pour certains.
L'intersyndicale que forment le SNUIPP-FSU, la CGT Educ'action, le SNUDI-FO et Sud Éducation exige du Gouvernement la création de véritables emplois statutaires dans chaque école, le recours aux jeunes en service civique n'étant pas adapté : les missions, de courte durée, sont proposées à des volontaires non formés, mal indemnisés et présents dans moins d'un quart des écoles.
Nous nous associons à la demande. L'État doit affecter dans les écoles en priorité des agents publics titulaires ou stagiaires de la fonction publique lorsqu'il met une aide administrative à disposition.
Je ne souhaite pas rigidifier l'incitation de l'État et des collectivités à mettre à disposition des moyens humains et matériels. C'est un autre débat. Avis défavorable.
Ce n'est pas un débat, c'est un choix politique ! On ne donne pas à l'éducation nationale les moyens de fonctionner correctement. Et, en plus, on va déshabiller la collectivité territoriale !
La commission rejette l'amendement.
Elle adopte l'article 2 bis modifié.
Article 3 : Création du poste de référent direction d'école
Amendement AC29 de Mme Béatrice Descamps.
Il s'agit de préciser que les référents doivent avoir exercé les fonctions de direction durant les trois années précédant leur nouvelle fonction.
La précision sera donnée, le cas échéant, dans le décret. Elle est superfétatoire dans le texte actuel : il faut évidemment avoir exercé la fonction de directeur pour être référent direction d'école.
Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Elle adopte l'article 3 non modifié.
Article 4 (supprimé) : Participation du directeur d'école à l'organisation du temps périscolaire
La commission maintient la suppression de l'article 4.
Article 4 bis (supprimé) : Création d'un conseil de la vie écolière
La commission maintient la suppression de l'article 4 bis.
Article 5 : Élection des représentants des parents d'élèves par voie électronique
Amendement AC19 de Mme Béatrice Descamps et AC1 de M. Stéphane Testé (discussion commune).
Il s'agit d'un amendement d'appel, car il est choquant que le directeur consulte le conseil d'école si les élections des représentants des parents d'élèves n'ont pas encore eu lieu. Il conviendrait de préciser qu'il s'agit du conseil d'école de l'année précédente.
L'amendement AC1 répond à ce questionnement en précisant le moment auquel intervient la consultation du conseil d'école sur le vote électronique pour les élections des représentants des parents.
La précision n'est pas nécessaire. Le conseil d'école peut être consulté à tout moment de l'année et se positionner sur les modalités d'élection des représentants des parents d'élèves. Il entérine la décision, qui prendra effet à la rentrée suivante. Seule une nouvelle consultation du conseil d'école permettrait de revenir dessus.
C'est donc le conseil de l'année précédente qui actera la voie électronique, destinée à réduire la pression administrative qui pèse sur le directeur d'école. Une telle simplification des tâches est attendue.
Demande de retrait.
La commission rejette successivement les amendements AC19 et AC1.
Elle adopte l'article 5 non modifié.
Article 6 : Élaboration du plan de mise en sécurité
Amendement AC40 de Mme Josette Manin.
Il vise à fluidifier et harmoniser l'élaboration du plan prévu à cet article, en s'inspirant de documents existants et de retours d'expérience. Le plan Séisme Antilles, par exemple, qui connaît sa troisième déclinaison depuis 2007, associe un grand nombre d'acteurs publics et privés dans la mise en œuvre de stratégies et d'actions préventives. Il s'agit de bénéficier de retours d'expérience, sans ajouter de dispositifs supplémentaires.
Le Sénat est parvenu à une rédaction satisfaisante de l'article, en permettant aux directeurs de s'appuyer sur les documents existants et sur l'expertise des personnes compétentes en matière de sécurité. Il va dans le sens que vous souhaitez : le directeur se fonde sur des documents modèles et indique les spécificités de son établissement ainsi que du territoire.
Mme Manin soulève une question liée à la spécificité des territoires outre-mer, particulièrement aux Antilles, qu'un rapport de la délégation aux outre-mer a récemment mise en lumière. La rédaction du Sénat satisfait sa demande.
Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Amendement AC5 de M. Lionel Causse.
Dans chaque académie, les équipes mobiles de sécurité (EMS), pluridisciplinaires, soutiennent, protègent et sécurisent les établissements qui en font la demande. Elles sont essentiellement mobilisées dans le second degré et auprès des chefs d'établissements. L'amendement vise à inscrire dans la loi la possibilité offerte aux directeurs d'école du premier degré d'accéder à ces équipes et de rendre régulièrement compte au conseil d'école des conditions de sécurisation de l'école.
La précision est importante mais ne relève pas de la loi. Les EMS sont à la disposition prioritairement des établissements du second degré. Elles interviennent à la demande des directeurs d'école, voire des élus locaux, en cas de besoin.
Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.
L'amendement AC5 est retiré.
La commission adopte l'article 6 non modifié.
Article 6 bis (supprimé) : Évaluation de l'impact du numérique sur les tâches du directeur d'école
La commission maintient la suppression de l'article 6 bis.
Elle adopte l'ensemble de la proposition de loi modifiée.
(La réunion est suspendue de onze heures quarante-cinq à onze heure cinquante.)
La commission examine la proposition de loi, adoptée par le Sénat, relative aux bibliothèques et au développement de la lecture publique (nº 4240) (Mme Florence Provendier, rapporteure).
Cette proposition de loi a été adoptée par le Sénat au mois de juin dernier, à l'initiative de la sénatrice Sylvie Robert. Faisant l'objet d'une procédure accélérée, elle sera examinée en séance publique le 6 octobre, avec une seconde proposition de loi du Sénat visant à conforter l'économie du livre et à renforcer l'équité et la confiance entre ses acteurs, que nous examinerons en commission mercredi 29 septembre.
Les bibliothèques constituent le premier équipement culturel en France. Pourtant, elles ne font l'objet d'aucune loi, contrairement aux musées et aux archives. À l'initiative de Sylvie Robert, sénatrice d'Ille-et-Vilaine, la proposition de loi relative aux bibliothèques et au développement de la lecture publique a vocation à consacrer dans le code du patrimoine le rôle central que jouent les bibliothèques dans notre société. Elle fait suite à son rapport au Gouvernement sur l'adaptation et l'extension des horaires d'ouverture des bibliothèques publiques de France ainsi qu'à son rapport d'information, rédigé avec sa collègue Colette Mélot, sur l'extension des horaires d'ouverture des bibliothèques publiques. La présente proposition de loi s'inscrit également dans la droite ligne du rapport d'Erik Orsenna et de Noël Corbin, intitulé « Voyage au pays des bibliothèques. Lire aujourd'hui, lire demain », et à la mission flash d'Aurore Bergé et de Sylvie Tolmont, sur les suites données à ce dernier.
Adoptée à l'unanimité par le Sénat en juin 2021, la proposition de loi a ainsi pour ambition de réaffirmer les missions des bibliothèques territoriales dans l'accès à la culture, à l'information, à l'éducation, aux savoirs et aux loisirs. Le texte consacre également les grands principes qui doivent les guider, tels que l'égal et le libre accès, la gratuité, le pluralisme des collections et la neutralité du service public. Les articles sont volontairement définis en des termes suffisamment larges pour couvrir la pluralité des fonctions et des publics. Par exemple, l'obligation faite aux bibliothèques de garantir l'accès à la culture, à l'information, à l'éducation et aux savoirs inclut des objectifs plus spécifiques, tels que la lutte contre l'illettrisme, l'illectronisme ou encore l'analphabétisme.
Le texte traduit également les évolutions de notre temps, en introduisant le numérique dans les collections des bibliothèques et en offrant d'autres services que ceux directement liés à la lecture publique. Il souligne aussi le rôle central du bibliothécaire, aussi bien dans la médiation et l'accessibilité au savoir, que dans le lien social qu'il tisse.
Le Président de la République, dans son discours du 17 juin 2021, a déclaré la lecture grande cause nationale, reconnaissant de fait que les bibliothèques œuvrent dans l'intérêt de l'ensemble de la société. Comme le soutient Victor Hugo dans Choses vues : « Lire, c'est voyager ; voyager c'est lire ». Les bibliothèques sont les vaisseaux qui nous ouvrent les portes de la connaissance de soi, des autres et du monde. Écrins de liberté, ils jouent ainsi un rôle essentiel au sein de la cité en ce qu'ils cultivent l'ouverture d'esprit, ouvrent le champ des possibles et permettent le vivre-ensemble, en contribuant à la citoyenneté et au plein exercice de la démocratie.
La bibliothèque doit être accessible à tous. J'entends par là qu'il faut aussi garantir l'accessibilité des lieux et des contenus aux personnes en situation de handicap ou, plus largement, aux personnes empêchées. La bibliothèque est un vecteur qui sait se déployer hors les murs : la coopération avec d'autres organismes culturels, éducatifs et sociaux tels que les écoles, les musées, les bibliothèques des prisons et des établissements hospitaliers, les centres d'accueil de la petite enfance, les associations, est au cœur de ses missions. La bibliothèque est aussi un lieu plastique, un troisième lieu, qui s'adapte aux évolutions des technologies et des usages. Le principe de mutabilité pourrait ainsi figurer parmi ses grandes caractéristiques.
Alors que les bibliothèques départementales jouent un rôle structurant dans la mise en réseau des bibliothèques de leur territoire, tant dans l'allocation des documents et objets, que dans le conseil et la formation des bibliothécaires, professionnels et bénévoles, les départements devraient avoir pour interdiction de les supprimer, de cesser de les entretenir ou de les faire fonctionner. Malheureusement, l'amendement que j'avais déposé en ce sens a été déclaré irrecevable au titre de l'article 40 de la Constitution, au motif que la loi ne peut interdire à un département de renoncer à une compétence. On en connaît pourtant des cas.
Tout comme il n'y a pas qu'une vie dans la vie, les livres peuvent avoir plusieurs vies. Afin de favoriser le développement de la lecture publique et faciliter le désherbage réalisé par les bibliothèques, celles-ci devraient avoir le droit de donner des livres à des associations, des fondations ou encore à des organisations de l'économie sociale et solidaire. Cette possibilité aurait tout d'un cercle vertueux : elle éviterait de jeter au pilon des millions de livres et participerait à l'économie circulaire.
Il est temps de consacrer dans la loi le rôle fondamental des bibliothèques, qui contribuent au développement de l'esprit critique, à l'émancipation de l'individu et à l'intégration sociale, autant d'ingrédients essentiels au vivre-ensemble et à notre démocratie.
Je remercie toutes les personnes qui ont participé aux auditions et aux réunions de travail préparatoires, ainsi qu'aux bibliothécaires et aux élus, qui m'ont accueillie avec un immense professionnalisme lors de mes visites.
« Ouvertes à tous, garantes du pluralisme de l'information et de l'égalité dans l'accès au savoir et à la culture, les bibliothèques et médiathèques participent activement à la transmission des valeurs de la République et constituent l'un des piliers de notre démocratie » : c'est par ces mots que s'ouvrait la lettre de mission confiée par la ministre de la culture à Erik Orsenna. L'académicien a alors entrepris un « voyage au pays des bibliothèques », un voyage au cœur de nos villes et de nos villages, auprès des professionnels et des bénévoles, qui sont un réseau essentiel permettant à nos bibliothèques de tenir dans certains territoires. Il a permis de mettre en lumière les 16 500 bibliothèques que compte notre pays, maillage grâce auquel chaque Français se situe à moins de vingt minutes de chacune d'entre elles. Il a aussi conduit à valoriser les missions essentielles qui sont assurées au service de tous les publics, ainsi que de renforcer les moyens octroyés aux bibliothèques, et d'élargir leurs horaires d'ouverture.
Depuis soixante ans, avec la création du ministère de la culture, les politiques culturelles s'articulent autour d'un principe fondateur : garantir à chaque citoyen l'accès à une culture universelle, conçue comme un bien public. C'est bien le cœur des missions qui sont exercées par les bibliothèques.
Elles sont aussi devenues les premiers tiers-lieux de notre pays, permettant d'affermir le lien social dans une société que l'on dit si souvent fracturée, morcelée, entre tous les publics, dans toute leur diversité, et de lutter contre les inégalités sociales et territoriales.
Le texte que nous examinons vient conforter leur rôle et le préciser – il était temps ! D'une part, il clarifie les dispositions relatives aux bibliothèques municipales, intercommunales, départementales, et consacre, pour la première fois dans la loi, leurs missions et leurs principes fondamentaux. D'autre part, il renforce le lien entre les bibliothèques publiques et les territoires, en structurant l'exercice de la compétence de la lecture publique et en favorisant les mises en réseau.
Vous avez mentionné le rôle des bibliothèques départementales. Mon département, les Yvelines, a été frappé par une décision unilatérale, qui a supprimé le réseau des bibliothèques départementales, supprimant toute formation pour les bibliothécaires ainsi que les moyens alloués à certains villages, pour faire vivre la lecture publique et la culture au cœur de nos territoires.
Pour des raisons légitimes, l'amendement que nous défendions n'a pas pu être retenu. Lorsque, dans quelques mois, nous parlerons des enjeux de décentralisation, nous devrons rester vigilants. Décentraliser, c'est aussi prendre le risque que certains élus, malheureusement, se désengagent de la culture. Quand les élus agissent, c'est formidable, mais quand ils se retirent du jour au lendemain et oublient les prérogatives essentielles qui leur incombent pour l'accès de tous à la culture, cela doit nous rassembler. On doit pouvoir, tout en déconcentrant les moyens, affirmer la place qui doit être celle de l'État dans les territoires, notamment dans le service public de la culture.
La présente proposition de loi a été adoptée à l'unanimité au Sénat. Le groupe La République en marche ne peut que souhaiter le même consensus au sein de notre commission et dans l'hémicycle, pour le livre, pour la lecture, pour l'émancipation de tous et pour la culture.
Les bibliothèques sont des temples de la connaissance et de l'expérience sensible du monde. Elles renferment des trésors accessibles à tous, grâce aux principes de liberté et de gratuité d'accès, utilement consacrés par le texte que nous examinons. Jusqu'à présent, notre droit se révélait lacunaire au sujet des bibliothèques, en dépit de la place que ces 15 000 établissements occupent dans notre vie culturelle de proximité. La proposition de loi consacre ces lieux de culture dans le code du patrimoine. Elle en donne une définition législative bienvenue – il était incompréhensible qu'elle n'existe pas.
Il est également juste d'avoir mis en évidence le rôle d'animation, outre celui de conservation, dans les missions dévolues aux bibliothèques. C'est effectivement en créant une effervescence autour des ouvrages que l'on renforce leur attrait. La proposition de loi a ainsi le mérite de lier bibliothèques et développement de la lecture publique, tant ils vont de pair. À cet égard, il est tout à fait pertinent de structurer les politiques en faveur de la lecture publique à l'échelon départemental. Les départements incarnent en effet le mieux les équilibres de chaque territoire.
Confier le maillage territorial aux bibliothèques départementales semble donc une bonne chose. Même si la lecture publique n'est pas une de ses compétences obligatoires, chaque département peut envisager de la soutenir. La mesure a pour corollaire l'élaboration d'un schéma de développement de la lecture publique à l'échelle du département, validé par l'assemblée départementale. Il convient d'associer les élus locaux à une telle politique publique, dans une logique de proximité. Un schéma de développement de la lecture publique élaboré et mis en œuvre au niveau des intercommunalités trouve naturellement des prolongements à l'échelon inférieur.
Le développement de la lecture publique nécessite, par ailleurs, des moyens. Aussi, l'extension du bénéfice du concours particulier Bibliothèques au sein de la dotation générale de décentralisation à l'ensemble des groupements de collectivités territoriales ainsi qu'aux établissements publics de coopération culturelle et aux groupements d'intérêt public gérant des bibliothèques, doit être accueillie favorablement.
Enfin, les principes de pluralisme, de diversité et de renouvellement des collections ainsi que d'égalité d'accès et de neutralité du service public, qui seront désormais ancrés dans notre droit, veillent à assurer la qualité de l'activité des bibliothèques.
L'équilibre et la portée du texte sont appréciables. Adoptée à l'unanimité par le Sénat, la proposition de loi ne peut que recueillir notre assentiment. Le groupe Les Républicains votera en sa faveur, en espérant qu'elle recueillera également l'unanimité dans notre assemblée.
Si la crise sanitaire nous a placés face à de nombreuses difficultés, les débats qui se sont tenus autour des biens essentiels auront été l'occasion de nous rappeler qu'une société ne peut exister sans lecture. Le 17 juin, le Président de la République a ainsi déclaré la lecture grande cause nationale pour 2021-2022. L'objectif étant fixé, il convient, pour l'atteindre, de repenser notre politique publique en faveur de la lecture.
On le sait, la lecture reste une activité dont la pratique et l'accès dépendent fortement de facteurs liés à l'origine sociale. Si, dans la perspective de l'objectif présidentiel, nous voulons toucher l'ensemble des citoyens, les bibliothèques, ancrées au plus près de nos territoires, doivent être au cœur de notre stratégie. Ces dernières années, une réflexion politique a été engagée sur le statut juridique des bibliothèques et les possibles évolutions de leurs missions, donnant lieu à un constat et à la formulation de diverses propositions. Je salue ainsi le travail mené au sein de nos deux chambres, qui a abouti à deux rapports, l'un rédigé par Erik Orsenna et Noël Corbin, l'autre, par Colette Mélot et Sylvie Robert. Leurs conclusions dessinent les contours du texte que nous examinons. Il en émerge une proposition de loi équilibrée, qui, par la révision du statut des bibliothèques et de leurs missions, traduit le mouvement d'ouverture qu'elles ont opéré dans les dernières années.
Le texte s'attache d'abord à un travail de définition au sein du code du patrimoine. La disposition paraît essentielle puisqu'elle participe de la reconnaissance du rôle central des bibliothèques, en tenant notamment compte de leurs missions moins visibles, mais bien réelles. Les articles 2 et 3 consacrent la liberté et la gratuité d'accès aux bibliothèques territoriales, principes qui guident notre politique de développement et d'ouverture à la lecture pour tous. Les bibliothèques départementales ont un rôle structurant dans la mise en réseau des bibliothèques de leur territoire, que ce soit par l'allocation de documents et d'objets ou par le conseil et la formation des personnels. Nous accueillons favorablement la disposition qui vise à garantir l'extension de l'éligibilité de la dotation générale de décentralisation. La mesure, qui ouvre davantage l'accès à une aide financière de l'État, permettra d'accompagner l'ensemble des opérations en faveur des bibliothèques territoriales ainsi que les projets à rayonnement départemental ou régional, favorisant les actions de coopération avec d'autres institutions chargées du développement de la lecture.
Le groupe Mouvement démocrate et démocrates apparentés approuve particulièrement la possibilité pour les bibliothèques de céder à des associations ou à des fondations les ouvrages dont elles n'auraient plus l'usage. La mesure permet de lutter contre le gaspillage de livres, qui est un non-sens, tout comme elle participe à l'économie circulaire. Sur ce point, toutefois, nous soutiendrons la mise en place d'un dispositif qui laisse aux organismes de l'économie sociale et solidaire, tels qu'Emmaüs, la possibilité de revendre des ouvrages cédés.
Pour l'ensemble de ces raisons, notre groupe votera en faveur de l'adoption du texte.
La proposition de loi relative aux bibliothèques et au développement de la lecture publique poursuit trois grands objectifs : la consécration législative de ces établissements ; l'affirmation des grands principes républicains ; le renforcement du lien entre les bibliothèques et leurs territoires. Le fait est suffisamment rare pour être salué, ce texte a été adopté par nos collègues sénateurs à l'unanimité. Il est vrai que le sujet, défendu depuis de longues années, avec ténacité et compétence, par notre collègue sénatrice Sylvie Robert et inscrit à la demande du groupe socialiste, écologiste et républicain du Sénat, a eu le mérite de rassembler largement.
Les bibliothèques constituent un bien commun auquel sont particulièrement attachés les Français et leurs élus. Dans de nombreuses zones rurales, elles représentent même l'essentiel des biens culturels mis à leur disposition. Elles constituent de fait un réseau dense qui fait vivre partout un service public ouvert à tous et renforce l'attractivité d'un territoire, d'où leur importance dans le maillage territorial.
Paradoxalement, les bibliothèques étaient jusque-là le parent pauvre des domaines patrimoniaux, seul secteur culturel à n'avoir pas fait l'objet d'une loi spécifique et à rester dans une forme d'insécurité juridique. Jusqu'en 2017, les dispositions relatives à ces établissements ne traitaient que l'aspect administratif. L'ordonnance du 27 avril 2017 a permis de donner une cohérence au cadre institutionnel des bibliothèques en refondant entièrement le livre III du code du patrimoine. Comparaison n'est pas raison mais ce livre ne comporte que cinq articles, soit douze fois moins que le livre II dédié aux archives – son premier article indique simplement que les bibliothèques des collectivités territoriales et leurs groupements sont organisées et financées par la collectivité ou le groupement dont elle relève. Il était nécessaire d'offrir aux bibliothèques le cadre législatif précis et ambitieux qui leur faisait défaut.
Tel est l'objet de cette proposition de loi, bâtie autour de trois grands principes : la liberté d'accès aux bibliothèques des communes et de leurs groupements ; la gratuité de cet accès ; le pluralisme des collections, afin de maintenir la vocation universaliste des bibliothèques. Il s'agit également d'acter les mutations de ces lieux et l'évolution de leurs missions, qui dépassent désormais largement le simple accès aux livres et à la lecture.
Le texte insère huit articles dans le code du patrimoine, destinés à définir le rôle et les missions des bibliothèques des collectivités territoriales et de leurs groupements. En application de la liberté d'administration des collectivités, aucune obligation n'est formulée mais un cadre respectueux des compétences locales est présenté. Le Sénat a donc abouti à un texte équilibré, salué par les associations professionnelles, qui représente un pas supplémentaire dans la reconnaissance de l'importance de la lecture et des bibliothèques mais également des personnels bibliothécaires. En garantissant le droit à l'indispensable pluralisme des goûts, genres et orientations face aux pressions idéologiques et sociétales qui traversent le pays, il conforte également la possibilité de se forger un esprit critique et d'exercer son rôle de citoyen.
Le groupe Socialistes et apparentés votera évidemment et avec grande satisfaction cette proposition de loi, en lui souhaitant de susciter un rassemblement aussi large qu'au Sénat.
Au nom du groupe Agir ensemble, je salue, à mon tour, le travail de la rapporteure ainsi que l'engagement de notre collègue sénatrice Sylvie Robert, qui œuvre depuis plusieurs années afin qu'un texte relatif aux bibliothèques voie le jour. Permettez-moi également de saluer notre collègue sénatrice Colette Mélot.
Le choix du Gouvernement d'engager la procédure accélérée et l'enthousiasme exprimé par les différents groupes de la majorité ou de l'opposition témoignent du consensus suscité par cette proposition de loi. Nous ne pouvons plus nous satisfaire de la place réservée aux bibliothèques dans notre droit. Alors que celles-ci constituent le premier équipement culturel de notre pays, elles n'ont jusqu'à présent fait l'objet d'aucune loi spécifique et seuls cinq articles du code du patrimoine leur sont consacrés. Nous partageons donc pleinement l'ambition de ce texte : inscrire dans le marbre de la loi la place, la vocation et les missions des bibliothèques de notre pays.
Bien plus que de simples équipements culturels, les bibliothèques sont avant tout des carrefours d'échanges, de rencontres, de débats, fréquentés chaque année par 40 % de nos concitoyens. En 2018, avec ma collègue Anne-Christine Lang, nous plaidions pour une plus grande ouverture de ces lieux de vie, de culture et de partage à Paris. L'accès pour tous à la lecture et au monde de l'imaginaire est un enjeu pour l'égalité des chances. Les bibliothèques sont « les lieux du vivre autant que les lieux des livres », pour reprendre les mots de l'académicien Erik Orsenna, coauteur, avec Noël Corbin, du rapport « Voyage au pays des bibliothèques » remis en 2018. Le présent texte s'inscrit dans la droite ligne des préconisations de cet excellent rapport, dont la mise en œuvre a fait l'objet d'une mission flash menée au sein de notre commission par Aurore Bergé et Sylvie Tolmont, en février dernier. Il rejoint ainsi la dynamique impulsée par le Gouvernement et notre majorité depuis 2017, d'abord au travers du plan Bibliothèques, qui a permis d'accroître de 8 millions d'euros les moyens alloués par l'État aux collectivités afin de soutenir les extensions d'horaires d'ouverture, puis avec le plan de relance, qui augmente de 15 millions d'euros en 2021 et en 2022 les crédits affectés aux investissements dans la construction et la rénovation de bibliothèques. Cette dynamique a été confirmée il y a quelques semaines par le Président de la République, qui a décrété, à juste titre, la lecture comme grande cause nationale.
La proposition de loi que nous examinons aujourd'hui présente plusieurs avancées importantes. Les trois premiers articles réaffirment les missions des bibliothèques – accès à la culture, à l'information, à l'éducation et aux savoirs –, mais aussi les principes de liberté et de gratuité d'accès, conditions nécessaires à l'ouverture de ces lieux au plus grand nombre. Les articles 5 et 6 consacrent, quant à eux, le pluralisme et l'actualisation des collections, qui se doivent de refléter la diversité des courants d'idées et d'opinions traversant notre société.
Parce que le numérique a profondément bouleversé les pratiques et la consommation de biens culturels, la proposition de loi intègre ce champ nouveau dans les collections et les usages des bibliothèques, lieux appelés à devenir protéiformes et multiservices. Le texte encourage enfin la montée en puissance des collaborations entre les collectivités et consacre l'action des bibliothèques départementales, qui jouent un rôle essentiel de soutien aux petites structures, notamment en zone rurale.
Pour toutes ces raisons, le groupe Agir ensemble votera avec conviction en faveur de ce texte, qui consacrera dans la loi les principes fondamentaux et le rôle des bibliothèques, porte d'entrée de proximité vers la culture et la lecture. « Ma patrie, c'est la langue française » sont des mots d'Albert Camus. Oui, notre patrie, c'est bien la langue française : diffusons-la à travers nos bibliothèques !
Les plus de 15 000 bibliothèques présentes sur le territoire français sont une chance pour nos concitoyens et l'occasion de créer des liens entre eux, au travers des nombreux livres et œuvres culturelles mis à leur disposition. L'accès à la culture doit être encouragé, notamment pour notre jeunesse, en améliorant l'intérêt des lieux mêmes que sont les bibliothèques : plus seulement temples du livre, elles sont aussi des lieux de travail, d'échanges et de rencontres. J'en veux pour preuve que 50 % des utilisateurs n'empruntent pas de livres. Ainsi la bibliothèque comme lieu de vie peut permettre de retrouver du lien dans un environnement ouvert, entouré de mille richesses. À la fois lieu culturel et social, elle revêt d'autant plus d'importance que, dans une société bousculée par les débats incertains et imprécis, elle permet d'accéder à la connaissance dans le calme et la bienveillance. Je salue donc l'initiative de notre collègue sénatrice Sylvie Robert, qui a déposé cette proposition de loi à la suite de la remise de son rapport sur l'extension des horaires d'ouverture des bibliothèques.
Nos bibliothèques manquaient d'un cadre législatif aussi complet que celui accordé dans le code du patrimoine aux archives et aux musées. Ce texte constitue donc un fondement législatif important, rappelant de grands principes tels que la liberté et la gratuité de l'accès, ou encore la vocation universaliste des collections.
La rédaction de la proposition de loi est très satisfaisante, aussi ne soulèverai-je que deux points, qui seront développés par ma collègue Béatrice Descamps lors de l'examen des amendements. Tout d'abord, l'accès des personnes en situation de handicap doit constituer une priorité pour les bibliothèques, car la connaissance doit être ouverte et adaptée à tous. Ensuite, le renouvellement des collections conduit les bibliothèques à se débarrasser d'anciens livres. Nous devons privilégier une deuxième vie pour ces ouvrages sans nous montrer dogmatiques quant aux acteurs et aux moyens susceptibles d'y participer : il doit pouvoir s'agir d'organismes privés, du moment que cela profite à une association. Je crois d'ailleurs que Mme la rapporteure présentera un amendement en ce sens, ce que nous saluons.
Il est difficile de trouver un juste équilibre législatif pour ces établissements sans brider ou enfermer leurs actions, qui sont multiples. Parce que cette proposition de loi y parvient, le groupe UDI et indépendants la soutiendra.
Il y a dix jours se clôturait la huitième édition des Journées nationales d'action contre l'illettrisme, organisée par l'Agence nationale de lutte contre l'illettrisme. Ce fléau touche environ 2,5 millions de nos concitoyens, qui rencontrent des difficultés importantes dans la recherche ou l'exercice d'un emploi, dans leurs démarches administratives ou leurs gestes quotidiens. Je tiens donc à saluer cette initiative parlementaire à propos des bibliothèques et du développement de la lecture. Ces deux sujets essentiels sont rarement mis à l'honneur et n'ont été que trop peu soutenus par les gouvernements successifs. Je me réjouis donc que l'on puisse débattre en commission et dans l'hémicycle de la politique publique de développement des bibliothèques et de la lecture.
Les réformes de la majorité concernant ce secteur ont été réalisées au détriment de personnels. Ce fut le cas notamment lors de l'extension des horaires d'ouverture des bibliothèques le dimanche, décidée par le Gouvernement en application du rapport Orsenna-Corbin. Dans plusieurs villes, les salariés ont observé que cette extension des horaires d'ouverture n'a entraîné aucun recrutement supplémentaire. Par endroits, des places d'accueil des usagers ont même été supprimées, y compris celles réservées aux scolaires. Pour prendre l'exemple de Paris, la baisse des effectifs a engendré une réduction des horaires d'ouverture en matinée ou pendant les vacances scolaires.
Cela est symptomatique de la méthode de ce gouvernement, qui ne met jamais à disposition les moyens suffisants pour l'application de ses réformes. Certes, le concours particulier Bibliothèques au sein de la dotation globale de décentralisation est passé de 80,4 à 88,4 millions d'euros en 2018, mais ces crédits ne sont pas pérennes puisque le financement ne peut pas excéder cinq ans. On peut donc se demander comment les collectivités vont pouvoir maintenir les emplois créés une fois ce délai écoulé. La seule solution mise sur la table par M. Orsenna, c'est l'embauche de jeunes en service civique ou de contrats précaires, comme si bibliothécaire n'était pas un métier à part entière, spécifique et réclamant des qualifications et des compétences précises. Une bifurcation dans la politique publique en faveur des bibliothèques et du développement de la lecture est donc absolument nécessaire.
Ce texte a le mérite d'inscrire quelques grands principes dans la loi : la gratuité d'accès aux bibliothèques des collectivités territoriales, le pluralisme des collections ou encore le don des livres devenus inutiles. Toutefois, il ne permet pas de répondre aux tensions actuelles dans ce secteur, ne préserve pas les droits des personnels face à l'extension des horaires d'ouverture, n'assure pas l'égalité d'accès aux bibliothèques sur tout le territoire national, ne développe pas les actions hors les murs en faveur de la lecture, n'améliore pas la participation des usagers dans le fonctionnement des bibliothèques et ne protège pas le métier de bibliothécaire titulaire, à l'heure où le nombre de contractuels augmente fortement.
De plus, l'article 2, qui traite du principe de liberté d'accès aux bibliothèques municipales et intercommunales, ne fait pas mention du passe sanitaire. Ce dernier est obligatoire pour accéder aux bibliothèques mais pas aux librairies ou aux centres commerciaux, ce qui crée une première incohérence. La deuxième incohérence, c'est que les bibliothèques universitaires, la Bibliothèque publique d'information (BPI), la Bibliothèque nationale de France (BNF) et les bibliothèques spécialisées ne sont pas soumises à l'obligation du passe sanitaire. Je regrette que l'occasion de dénoncer cette entrave à la liberté d'accès aux bibliothèques et à la lecture n'ait pas été saisie.
Ainsi, ce texte me paraît relativement consensuel mais manque d'ambition pour une véritable politique publique en faveur des bibliothèques et du développement de la lecture. C'est la raison pour laquelle le groupe France insoumise ne s'opposera pas à ce texte mais profitera de l'analyse des amendements pour être force de proposition.
Chapitre Ier Définir les bibliothèques et leurs principes fondamentaux
Article 1er : Missions des bibliothèques territoriales
Amendement AC24 de la rapporteure.
Il s'agit de réaffirmer le principe d'égalité d'accès au service public tel qu'énoncé à l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789. L'accessibilité aux bibliothèques doit être garantie à tous, notamment aux personnes empêchées ou ayant un handicap.
La commission adopte l'amendement.
Amendement AC25 de la rapporteure.
Cet amendement a pour objet d'inscrire dans le texte que l'objectif est de favoriser le développement de la lecture, qui est l'une des missions fondamentales des bibliothèques.
La commission adopte l'amendement.
Amendement AC8 de Mme Aurore Bergé.
Il s'agit de valoriser la médiation culturelle, qui consiste à aller vers les publics pour garantir à tous l'accès aux bibliothèques et l'exercice des droits culturels, et pour assurer la diversification des publics. Les droits culturels sont un fondement très important pour garantir l'accès de tous, non seulement à la lecture, mais aussi à ce que représentent nos bibliothèques. L'objet de cet amendement est donc de renforcer la dynamique du « aller vers » pour garantir la participation de l'ensemble de nos concitoyens.
Je suis très favorable à l'introduction dans le texte de la notion de médiation culturelle. Les bibliothèques sont des lieux de rencontres humaines, où les bibliothécaires jouent le rôle essentiel de passeur de culture, œuvrant à la démocratisation culturelle. En revanche, je suis plus réservée sur l'inscription dans la loi de la notion de droits culturels, énoncée par l'UNESCO et figurant sans définition dans la loi relative à la liberté de la création, à l'architecture et au patrimoine, dite loi LCAP. Ses implications juridiques pour les collectivités territoriales qui gèrent les bibliothèques sont en effet incertaines.
Avis de sagesse bienveillante.
Je suis assez d'accord avec Mme Bergé : la notion de droits culturels est essentielle, car elle institue une nouvelle lecture dans laquelle la culture de chacun est importante. Aller vers, cela marche dans les deux sens, c'est aller les uns vers les autres. Je trouve donc intéressant que des actions soient entreprises sur ce sujet.
Il y a quand même quelques nuances à apporter concernant les droits culturels, certains en profitant pour pouvoir privatiser. Il me semble plus intéressant de parler de droit à la culture.
Je suis tout à fait favorable à ce que l'on fasse référence aux droits culturels. Toutefois, il n'y a pas de définition juridique de cette notion. Madame Bergé, pourriez-vous nous préciser ce point ?
La notion de droits culturels a été consacrée par l'UNESCO et la loi LCAP, adoptée par notre assemblée en 2016, comme le droit de chacun de participer à la vie culturelle. La question n'est pas uniquement d'offrir un accès mais de faire en sorte que chacun puisse se sentir légitime à participer à la vie culturelle. S'agissant des bibliothèques, cet « aller vers » est absolument nécessaire : c'est le corollaire de la médiation et de l'action culturelles.
La commission adopte l'amendement.
Amendement AC26 de la rapporteure.
Cet amendement donne pour mission aux bibliothèques de coopérer avec l'ensemble des organismes proposant une offre culturelle et éducative sur leur territoire : les écoles, les centres d'accueil de la petite enfance, les musées, les bibliothèques des prisons et des établissements hospitaliers, les établissements médico-sociaux, les associations et les fondations qui œuvrent pour la promotion de la lecture. Cette coopération peut prendre la forme de prêts d'ouvrages, d'organisation d'événements ou d'actions de médiation culturelle et sociale.
La commission adopte l'amendement.
Elle adopte l'amendement rédactionnel AC27 de la rapporteure.
Amendement AC11 de Mme Danièle Obono.
Il s'agit de préciser que les bibliothèques sont des outils essentiels de l'éducation populaire. Celle-ci est désormais reconnue par les institutions, si bien qu'il existe une direction de la jeunesse, de l'éducation populaire et de la vie associative. Elle est également mentionnée dans la charte du droit fondamental des citoyens à accéder à l'information et aux savoirs par les bibliothèques.
Créer des outils de l'éducation populaire, c'est considérer, comme Paulo Freire, que « personne n'éduque autrui, personne ne s'éduque seul, les hommes s'éduquent ensemble par l'intermédiaire du monde ». C'est adopter une posture d'accompagnement en partant de là où sont les gens, et non pas de là où on voudrait qu'ils arrivent, en invitant au questionnement et en prenant appui sur le vécu des personnes. Il nous semble indispensable de consacrer les bibliothèques comme des outils essentiels de l'éducation populaire.
L'alinéa 2 de l'article 1er prévoit que les bibliothèques « ont pour missions de garantir l'accès de tous à la culture, à l'information, à l'éducation, à la recherche, aux savoirs et aux loisirs ». Ces missions sont définies de façon suffisamment large et, de fait, incluent l'éducation populaire.
L'amendement étant satisfait, je vous demande de bien vouloir le retirer.
Il n'est pas satisfait. Je vous ai donné la définition de l'éducation populaire : c'est beaucoup plus large que ce que vous avez indiqué.
Tant au Sénat qu'à l'Assemblée, nous avons eu la volonté de retenir la définition la plus large possible, couvrant toutes les dimensions du sujet. Je considère donc que l'éducation populaire entre dans les missions telles qu'elles ont été inscrites dans la proposition de loi.
Vous parlez de volonté et de consensus ; or nous n'avons pas été consultés. Le consensus, c'est avec tout le monde ! Je vais donc m'exprimer et apporter des critiques, parfois très positives – en l'occurrence, c'en était une.
La commission rejette l'amendement.
Amendement AC28 de la rapporteure.
Il s'agit d'inscrire dans la loi le fait que les bibliothèques doivent respecter le principe de mutabilité du service public, en adaptant leurs services aux évolutions des technologies et des usages. Ce principe, dénommé aussi principe d'adaptation, est lié à celui de continuité du service public. Il signifie que l'administration doit continuellement s'adapter aux changements.
La commission adopte l'amendement.
Elle adopte l'article 1er modifié.
Article 2 : Libre accès aux bibliothèques municipales et intercommunales
La commission adopte l'article 2 non modifié.
Après l'article 2
Amendement AC17 de Mme Danièle Obono.
Nous souhaitons que les bibliothèques des collectivités territoriales ainsi que les bibliothèques départementales soient exclues de l'obligation de présenter un passe sanitaire. En effet, le principe de liberté d'accès aux bibliothèques est remis en cause par l'instauration du passe sanitaire dans tous les lieux de culture. Comment le Gouvernement peut-il justifier que l'accès à une librairie ou à un commerce reste libre tandis que l'accès à une bibliothèque ou à une médiathèque est conditionné à la présentation d'un passe sanitaire valide ?
Les bibliothécaires de plusieurs petites et grandes villes ont exercé leur droit de grève afin de dénoncer l'exclusion des publics précaires. Ils refusent également le rôle de contrôle et de filtrage qui leur est imposé. Autre incohérence, les bibliothèques universitaires, la Bibliothèque publique d'information, la Bibliothèque nationale de France et les bibliothèques spécialisées ne sont pas soumises à l'obligation du passe sanitaire. Nous proposons donc que les bibliothèques des communes et des départements ne fassent plus partie des lieux où le passe sanitaire est obligatoire, afin de permettre à toutes et à tous d'avoir accès à la culture et à l'information.
Les exceptions propres aux bibliothèques universitaires, à la Bibliothèque nationale de France et à la Bibliothèque publique d'information relèvent d'une volonté de cohérence du dispositif retenu pour les activités d'enseignement et de recherche, auxquelles le passe sanitaire ne s'applique pas. Les bibliothèques universitaires font partie intégrante du dispositif applicable à l'enseignement supérieur. Quant au public de la BNF et de la BPI, il est majoritairement composé d'étudiants, d'enseignants et de chercheurs. Cette dérogation a été étendue aux bibliothèques territoriales pour les étudiants, les enseignants et les chercheurs.
Je tiens tout de même à souligner l'efficacité du passe sanitaire. L'évolution de la crise sanitaire laisse d'ailleurs espérer un allégement prochain de ce dispositif pour tous les établissements culturels.
Avis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Article 3 : Gratuité d'accès aux bibliothèques municipales et intercommunales
La commission adopte l'article 3 non modifié.
Après l'article 3
Amendement AC15 de Mme Danièle Obono.
Nous proposons d'inscrire dans la loi que l'association des usagers est essentielle afin que les bibliothèques accomplissent leurs missions et soient intégrées dans les quartiers, en particulier dans les quartiers populaires où elles sont parfois le dernier service public encore ouvert avec l'école primaire. Seulement 16 % de la population française est inscrite dans une bibliothèque. Pour garantir l'accès de toutes et tous à la culture, à l'information, à l'éducation, à la recherche et aux savoirs, il est indispensable d'ouvrir les bibliothèques aux usagers, de favoriser leur implication tout en développant des actions dans et hors les murs.
Le métier de bibliothécaire suppose des compétences et des qualifications particulières, ce que rappelle l'article 8. Afin que les choix des bibliothécaires, notamment en matière d'acquisition, fassent partie de la démocratie locale, l'article 7 prévoit que les bibliothèques présentent leur politique documentaire devant le conseil municipal ou l'organe délibérant de l'intercommunalité.
En tout cas, je peux vous assurer que dans toutes les bibliothèques que j'ai visitées, les bibliothécaires avaient à cœur de prendre en compte les attentes des usagers pour constituer leur fond.
Avis défavorable.
Il ne s'agit pas de dire que ce sont les usagers qui décideront des collections qui seront présentées, mais seulement qu'il faut les associer.
La commission rejette l'amendement.
Article 4 : Composition des collections des bibliothèques territoriales
Amendement AC30 de la rapporteure.
Il s'agit d'introduire le mot « livres » dans cette proposition de loi et de supprimer la constitution réglementaire d'une liste des types de documents contenus dans les bibliothèques. D'une part, il revient aux bibliothécaires, qui en ont la compétence, d'apprécier la constitution des collections. D'autre part, la nouvelle rédaction de l'article 4 permet de laisser le champ ouvert à des objets et documents variés comme des imprimantes 3D ou des instruments de musique.
La commission adopte l'amendement.
Elle adopte l'article 4 ainsi modifié.
Article 5 : Pluralisme et accessibilité des collections des bibliothèques territoriales
Amendement AC6 de Mme Albane Gaillot.
Cet amendement vise à assurer une parité des collections présentes dans les bibliothèques des collectivités territoriales ou de leurs groupements lorsque cela est possible. Aujourd'hui, aucune obligation de diversité des collections en termes de genre n'existe. Si des efforts spécifiques locaux peuvent être observés et méritent d'être loués, les femmes demeurent minoritaires au sein des collections des bibliothèques, comme elles le demeurent plus généralement dans la culture française.
Parce que les bibliothèques demeurent une source culturelle majeure pour de nombreux concitoyens de tous âges, il apparaît opportun de favoriser une représentation paritaire des auteurs et autrices dans les collections des bibliothèques. Si cet article garantit une composition pluraliste et diversifiée des collections des bibliothèques, il apparaît nécessaire de préciser la dimension genrée de cette diversité.
Il est bien entendu essentiel que les autrices soient pleinement représentées, mais les principes de pluralisme et de diversité des collections qui sont posés par l'article comprennent celui de la parité : il peut s'agir du pluralisme des opinions, des courants d'idée, des aires géographiques ou civilisationnelles… Oui, la parité est fondamentale, mais la notion de pluralisme la recouvre et la dépasse largement.
Demande de retrait.
Le pluralisme couvre effectivement de nombreuses dimensions, dont celles de l'égalité et de la diversité. Cependant, il vaut toujours mieux écrire les choses, pour formaliser les engagements. Lors des auditions, j'ai à chaque fois posé la question du respect de l'égalité et de la parité dans le choix des collections : à chaque fois, on a évacué le problème et on m'a dit que cela n'entrait pas en ligne de compte en pratique. C'est pourtant un enjeu majeur pour les bibliothèques. Compte tenu de leur rôle dans la transmission du savoir, de la culture, du patrimoine et du matrimoine, il est important que la parité y soit respectée.
Effectivement, alors que le domaine de la culture semblerait devoir être un peu plus paritaire que d'autres, ce n'est pas forcément le cas. Le concept de pluralisme est intéressant, mais il faudrait tout de même réfléchir à une rédaction qui permette d'insister davantage sur la parité.
Je suis entièrement acquise aux valeurs que vous défendez, mais il y a malheureusement des périodes de l'histoire où il y avait moins d'autrices que d'auteurs. En l'état actuel, le texte précise que les collections sont pluralistes et diversifiées. Nous essayons depuis le début d'employer les termes les plus généraux possible. En effet, si l'on introduit le concept de parité, il faudra le faire pour toute une série d'autres ; or si l'on commence à faire des énumérations, l'on va forcément oublier un genre, une esthétique, une langue, une aire géographique… Le pluralisme couvre vraiment l'idée que vous défendez.
La commission rejette l'amendement.
Amendements AC12 de M. Michel Larive et AC13 de Mme Danièle Obono.
Je suis entièrement d'accord avec votre explication, madame la rapporteure. Nos amendements proposent de rendre plus explicite cette exigence de pluralisme dans les collections des bibliothèques des collectivités territoriales. Le premier pose le principe que les collections « doivent être exemptes de toutes formes de censure idéologique, politique, religieuse ou de pressions commerciales. » Le second, qui est un amendement de repli, précise qu'elles « sont indépendantes de toute emprise politique, économique, religieuse ou idéologique. » Cela permettrait d'ajouter l'indépendance à la pluralité.
Nous sommes tout à fait d'accord. Les termes de l'amendement AC12 figurent dans le manifeste de l'UNESCO sur la bibliothèque publique, qui fait référence dans la profession. Je lui donne un avis favorable ; avis défavorable sur le second.
La commission adopte l'amendement AC12.
En conséquence, l'amendement AC13 tombe.
Amendement AC3 de Mme Béatrice Descamps.
En tant qu'établissements recevant du public, les bibliothèques doivent être accessibles aux personnes en situation de handicap. On pense souvent à la rampe ou à l'ascenseur, mais il ne s'agit pas que de l'accès au bâtiment : il existe bien d'autres types de handicap. Il faut assurer aux personnes concernées l'accès aux contenus écrits des collections, par exemple en proposant une partie des fonds en braille ou en version audio, ou en les adaptant aux troubles cognitifs et de l'apprentissage, comme les troubles dys. L'amendement tend à compléter l'alinéa 2 en ce sens.
Même si l'égalité d'accès est prévue à l'article 1er, nous devons en effet être très vigilants quant à la prise en compte des handicaps, car la France a encore beaucoup à faire en matière d'inclusion, y compris dans les bibliothèques. Ainsi, 96 % des contenus demeurent inaccessibles aux personnes empêchées. L'association Valentin Haüy au service des aveugles et des malvoyants ne reçoit de l'État que 40 000 euros de subventions alors qu'elle assume une mission de service public en rendant disponibles pour toutes les bibliothèques des collections adaptées aux besoins des publics handicapés et empêchés. D'autres pays, en Europe du Nord par exemple, ont nationalisé cette activité ou contractualisé avec les associations qui remplissent cette mission.
Je propose que nous réfléchissions ensemble, d'ici à la séance, à une rédaction globale, intégrée à l'article 1er et qui viserait l'ensemble des personnes empêchées et des types de handicap, y compris l'illectronisme ou l'illettrisme par exemple. Dans cette optique, je vous demande de retirer votre amendement.
L'amendement est retiré.
Amendement AC14 de M. Michel Larive.
Nous proposons là que les usagers des bibliothèques soient associés – il n'est pas question de décision – à l'achat des nouveaux titres des collections des bibliothèques. Vous m'avez dit que c'était déjà dans la pratique ; il serait bon de l'acter comme principe. Il nous paraît indispensable de favoriser l'implication du public dans les activités des bibliothèques, en particulier lors de la constitution des collections. Cela permettrait, entre autres choses, de faire revenir du public dans les bibliothèques et de les rendre encore plus attractives qu'elles ne le sont aujourd'hui.
Avis défavorable pour les mêmes raisons que précédemment, sachant que les bibliothécaires sont compétents et que, d'après ce que j'ai vu, ils ont à cœur d'associer les publics concernés à la constitution des collections.
La commission rejette l'amendement.
Elle adopte l'article 5 modifié.
Article 6 : Renouvellement des collections des bibliothèques territoriales
La commission adopte l'article 6 non modifié.
Article 7 : Présentation des orientations générales des bibliothèques à l'assemblée délibérante de la collectivité
Amendement AC5 de Mme Albane Gaillot.
Cet amendement va dans le même sens que le dernier que j'ai présenté. Vous m'avez répondu qu'il n'y avait pas forcément beaucoup d'autrices, mais elles sont pourtant nombreuses ! Parce qu'elles sont méconnues, elles ont justement besoin de visibilité, besoin d'être lues et découvertes. Les bibliothèques ont une place primordiale à tenir. La proposition de loi ancre dans le droit leur rôle dans la culture, dans la transmission de notre patrimoine et de notre matrimoine. Assurer la parité des collections, ou en tout cas se fixer l'objectif d'y parvenir serait une avancée concrète pour faire connaître toutes ces autrices qui sont aujourd'hui complètement invisibles.
Suivant l'avis de la rapporteure, la commission rejette l'amendement.
Elle adopte successivement les amendements rédactionnels AC29 et AC31 de la rapporteure.
Elle adopte l'article 7 modifié.
Article 8 : Qualifications des agents des bibliothèques
La commission adopte l'article 8 non modifié.
Après l'article 8
Amendement AC21 de Mme Danièle Obono.
Nous souhaitons dénoncer le recours grandissant aux contractuels dans les bibliothèques.
Il existe peu de données concernant cette réalité. Nous demandons donc que soit réalisé un rapport dressant un état des lieux du nombre de contractuels exerçant dans les bibliothèques des collectivités territoriales et leurs regroupements, expliquant les raisons pour lesquelles ce ne sont pas des emplois de fonctionnaires titulaires, et estimant le coût de leur titularisation et des actions de formation indispensables à l'exercice du métier de bibliothécaire. Ce rapport devra également brosser un tableau des conséquences de ce phénomène à la fois sur l'organisation des bibliothèques, sur la qualité du service rendu aux usagers et sur les conditions de vie de ces personnels subissant la précarité.
Il serait effectivement intéressant de disposer d'une étude actualisée portant non seulement sur les contractuels, mais aussi sur le recours aux bénévoles, qui jouent un rôle clé dans le fonctionnement des bibliothèques. Je vous propose de retirer votre amendement et de le redéposer en séance afin d'obtenir une réponse de la ministre.
Par principe, je ne retirerai pas cet amendement mais je le redéposerai en séance en gardant bien en tête vos propos. Merci pour cette réponse.
La commission rejette l'amendement.
Chapitre II Soutenir le développement de la lecture publique
Article 9 : Missions des bibliothèques départementales
La commission adopte successivement les amendements AC33, de précision, et AC35 et AC34, rédactionnels, de la rapporteure.
Elle adopte l'article 9 modifié.
Article 10 : Élargissement de l'éligibilité au concours particulier relatif aux bibliothèques de la dotation générale de décentralisation
La commission adopte l'article 10 non modifié.
Article 11 : Schéma de développement de la lecture publique
La commission adopte l'article 11 non modifié.
Article 12 : Cession à titre gratuit de documents détenus par les bibliothèques
Amendements AC36 de la rapporteure, AC4 de Mme Béatrice Descamps et AC16 de M. Michel Larive.
Je vous propose de réécrire complètement l'article 12.
Comme cela a été relevé par nombre d'entre vous, dans un but de renouvellement et d'actualisation de leurs collections, les bibliothèques doivent pouvoir se défaire des ouvrages obsolètes ou usés. C'est ce que l'on appelle le désherbage. Actuellement, la solution la plus sûre juridiquement pour les bibliothèques publiques consiste à jeter ces ouvrages, ce qui n'est évidemment pas satisfaisant. L'enlèvement et la destruction des livres leur sont même parfois facturés.
Dans les faits, les bibliothèques préfèrent les solutions qui offrent une deuxième vie aux livres : vente sous forme de braderie ou don à des associations ou à des acteurs de l'économie sociale et solidaire.
Cet amendement vise à donner un cadre à ces pratiques en permettant aux bibliothèques de l'État et des collectivités territoriales de donner ces livres à des fondations, associations philanthropiques ou entreprises de l'économie sociale et solidaire et en autorisant la revente de ces livres par les bénéficiaires.
Cette disposition a tout d'un cercle vertueux. Elle contribue, en offrant plusieurs vies au livre, au développement de la lecture publique ; elle participe à la création d'emplois, souvent en insertion ; elle permet de reverser une part des éventuels bénéfices tirés de la revente des livres aux collectivités ou à des associations choisies par les bibliothèques.
Je comprends, bien sûr, la philosophie de cette proposition, mais les livres ne doivent pas être vendus, seulement distribués. Le droit empêche les collectivités territoriales de céder gratuitement leurs documents relevant du domaine privé. L'article 12 est une nouvelle exception à ce principe. Je rappelle que, lors de la première lecture au Sénat, le même amendement, proposé par une sénatrice, avait reçu un avis défavorable, y compris de la ministre de la Culture Mme Bachelot.
La commission adopte l'amendement AC36 et l'article 12 est ainsi rédigé.
En conséquence, les amendements AC4 et AC16 tombent.
Article 13 (supprimé) : Gage de recevabilité financière
La commission maintient la suppression de l'article 13.
Elle adopte l'ensemble de la proposition de loi modifiée.
La séance est levée à douze heures cinquante-cinq.
Présences en réunion
Réunion du mercredi 22 septembre 2021 à 9 h 30.
Présents. – Mme Emmanuelle Anthoine, Mme Aurore Bergé, M. Philippe Berta, M. Bruno Bilde, M. Yves Blein, M. Pascal Bois, M. Pierre-Yves Bournazel, Mme Anne Brugnera, Mme Céline Calvez, Mme Danièle Cazarian, Mme Sylvie Charrière, Mme Béatrice Descamps, Mme Jacqueline Dubois, Mme Virginie Duby-Muller, M. Alexandre Freschi, Mme Albane Gaillot, M. Laurent Garcia, M. Luc Geismar, Mme Valérie Gomez-Bassac, Mme Florence Granjus, Mme Danièle Hérin, Mme Sandrine Josso, M. Yannick Kerlogot, M. Michel Larive, M. Gaël Le Bohec, Mme Constance Le Grip, Mme Frédérique Meunier, M. Maxime Minot, Mme Cécile Muschotti, M. Bertrand Pancher, Mme Maud Petit, Mme Béatrice Piron, Mme Florence Provendier, Mme Cathy Racon-Bouzon, M. Julien Ravier, M. Frédéric Reiss, Mme Muriel Ressiguier, Mme Cécile Rilhac, M. Bertrand Sorre, M. Bruno Studer, M. Stéphane Testé, Mme Sylvie Tolmont, Mme Michèle Victory, Mme Souad Zitouni
Excusés. - Mme Géraldine Bannier, M. Bertrand Bouyx, M. Stéphane Claireaux, Mme Annie Genevard, Mme Josette Manin, Mme Sophie Mette, M. Pierre-Alain Raphan
Assistait également à la réunion. - M. Lionel Causse