Intervention de Virginie Duby-Muller

Réunion du mardi 26 octobre 2021 à 21h30
Commission des affaires culturelles et de l'éducation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaVirginie Duby-Muller :

Je salue la qualité des travaux menés par nos rapporteures.

Avec ce projet de loi de finances pour 2022, le Gouvernement affiche sa constance dans le rabotage des crédits attribués à l'audiovisuel public. Sans doute en a-t-il fait un objectif du quinquennat. Nous assistons en effet, cette année encore, à une baisse généralisée : France Télévisions perd 15 millions, Radio France 3 millions, et Arte 2 millions. Seules les dotations de TV5 Monde et de l'Institut national de l'audiovisuel (INA) restent stables.

La dotation de France Télévisions, à 2,4 milliards d'euros, est en baisse de 145 millions par rapport à 2021. C'est d'autant plus préoccupant qu'elle avait déjà connu, dans le PLF pour 2018, une diminution de 161,9 millions, supérieure à l'objectif fixé pour cette année-là. Rappelons que ces baisses de dotation étaient envisagées en parallèle de la réforme de l'audiovisuel public, depuis lors semble-t-il passée aux oubliettes, qui devait permettre aux chaînes de proposer davantage de publicité, notamment ciblée, et de créer une holding, France Médias, regroupant tous les médias publics hors Arte et TV5 Monde. Où en est cette holding ? Si elle ne voit pas le jour, comment le groupe France Télévisions pourra‑t‑il amortir de telles pertes financières sans que son fonctionnement ni les contenus en pâtissent ?

Ajoutons que, dès 2023, la contribution à l'audiovisuel public disparaîtra. Mme Calvez le rappelle dans son rapport : « Il y a urgence à définir les contours du financement futur de l'audiovisuel public français, les contrats d'objectifs et de moyens récemment adoptés ne courant que jusqu'à la fin de l'année 2022 et contraignant ainsi les sociétés de l'audiovisuel public à un pilotage à vue. » Qu'envisage donc le Gouvernement pour pérenniser l'audiovisuel public ? Peut-être pourrait-il réaffecter la taxe sur les services fournis par les opérateurs de communications électroniques (TOCE) au financement de France Télévisions, comme le réclament depuis maintenant trois ans les députés du groupe Les Républicains ? Madame la ministre, je ne peux pas croire que vous approuviez le détournement de la taxe télécoms au profit du budget de l'État, vous qui étiez ministre dans le gouvernement qui a fait adopter cette mesure, en 2009, sous Nicolas Sarkozy.

Les aides à la presse connaîtront une forte augmentation, de 53,4 %, due aux 70 millions supplémentaires dédiés à la distribution de la presse. En effet, une réforme du portage de presse est en cours, à la suite des conclusions remises en avril 2020 par M. Giannesini sur la réforme du transport postal de la presse. Elle entrera en vigueur le 1er janvier 2022, sous réserve de l'accord des autorités européennes. La nouvelle aide à l'exemplaire reposera sur deux barèmes, l'un pour les exemplaires postés et l'autre pour les exemplaires portés. L'objectif est d'encourager le passage du postage au portage. Or, pour l'instant, force est de constater que le portage fonctionne mal. Sachant que cette réforme représente un effort de 104,9 millions, tous programmes confondus, comment comptez-vous répartir ces crédits pour qu'ils soient efficients ?

Le soutien de l'État au livre et à la musique est légèrement renforcé, ce qui, en réalité, n'est qu'un retour à la normale du budget des principaux opérateurs. D'ailleurs, dans le programme 334 Livre et industries culturelles, les crédits de l'action 02 Industries culturelles accusent une baisse de 7,81 %, que le Gouvernement justifie par le transfert de crédits accompagnant la fusion du CSA et de la HADOPI au sein de l'ARCOM. Au total, l'ARCOM recevra en 2022 une dotation de 46,60 millions, qui doit lui permettre de couvrir le financement des missions qui lui sont assignées en propre, des missions récemment confiées à la HADOPI par l'ordonnance du 12 mai 2021 sur le droit d'auteur et les droits voisins dans le marché unique, ainsi que des missions attribuées au CSA au cours des dernières années. Ces crédits suffiront-ils à l'ARCOM pour remplir efficacement ces nombreuses missions ?

Madame la ministre, vous nous présentez cette année encore un budget qui ne répond ni aux défis, ni à l'urgence de la situation que connaît l'industrie culturelle et audiovisuelle. Certes, il y a des augmentations de crédits, mais ne nous leurrons pas : elles correspondent à des transferts de crédits ou sont financées par la dette. En septembre dernier, lors de ses audits flash, la Cour des comptes s'est inquiétée du fait que les aides accordées au secteur de la culture, bien que nécessaires, ne fassent l'objet d'aucun dispositif d'évaluation ex post et qu'il n'existe aucun mécanisme permettant de repérer d'éventuels dysfonctionnements. Envisagez‑vous de créer des mécanismes d'évaluation des aides accordées pendant la crise du covid ?

Pour toutes ces raisons, notre groupe a décidé de s'abstenir lors du vote des crédits de la mission.

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