Le collectif Bassines non merci est un collectif citoyen informel. Nous n'avons pas de statut officiel ni de salariés. Nous regroupons une trentaine d'organisations très diverses (syndicats, partis, associations), ainsi que des citoyens.
Nous luttons depuis quatre ans contre un dispositif technique de stockage d'eau d'un genre nouveau, les bassines, aussi appelées « réserves de substitution » par les porteurs de projets. Ce dispositif consiste à créer des cratères dans des zones de plaine calcaire, c'est-à-dire à décaisser la roche-mère sur plusieurs hectares et à établir des digues et des talus avec la matière prélevée, puis à bâcher l'ensemble de ces ouvrages, dont certains peuvent couvrir vingt hectares, étant donné que le calcaire n'est pas étanche.
Contrairement à ce qu'affirment les porteurs de projet, les bassines ne se rempliront pas seules, grâce aux précipitations. En réalité, elles seront remplies avec l'eau des nappes phréatiques, grâce à des forages. Il s'agirait donc d'une eau de qualité, qui, en vertu de la loi, devrait être destinée en priorité à la consommation d'eau potable, puis à la préservation des zones humides et des milieux naturels, avant d'être utilisée en tant qu'eau économique. Pourtant, ces bassines ne serviront qu'à fournir de l'eau économique, en particulier de l'eau agricole pour la culture du maïs – entre 30 et 50 % de l'assolement. Or le maïs est une plante très gourmande en eau, qui plus est pendant la saison où l'eau est la plus rare.
À travers ce projet, nous dénonçons la mainmise sur l'eau par des intérêts privés. Le projet, qui vise à stocker huit millions de mètres cubes sur le bassin de la Sèvre Niortaise et dont le coût atteindra 60 millions d'euros pour seize ouvrages, sera financé à 70 % par de l'argent public, dont 50 % proviendront de l'agence de l'eau. La ressource en eau, mais aussi les financements publics, seront ainsi accaparés par quelques-uns. En effet, les bassines concernent 10 % des exploitants du territoire.
Jusque dans les années 1970, l'irrigation n'avait pas cours sur ce territoire. D'ailleurs, il existe encore un savoir-faire paysan qui démontre qu'il est possible de nourrir le territoire sans avoir recours à l'irrigation massive.
Le dossier est aujourd'hui à l'arrêt. Notre collectif met tout en œuvre pour que les travaux ne démarrent pas. Ils auraient dû être lancés incessamment, mais nous avons appris la semaine dernière qu'ils étaient repoussés au 1er septembre prochain.
Les modalités d'action du collectif sont multiples. Nous organisons, par exemple, des manifestations non violentes regroupant plusieurs milliers de personnes. Nous menons également des actions auprès des élus locaux. À ce jour, vingt-cinq communes du bassin versant ont adopté des motions pour exprimer leur opposition de fond à ce projet. Enfin, nous intervenons sur le volet juridique. Chaque projet de bassine est systématiquement attaqué par les associations de protection de la nature, pour qui il est facile de démontrer que le projet contrevient aux directives européennes.
Le projet des Deux-Sèvres est aujourd'hui suspendu à une décision du tribunal administratif de Poitiers. Si le tribunal suit toutes les décisions qui ont été prises sur des projets de bassines équivalents aux alentours, l'issue est évidente et le projet sera rejeté. En dépit de ce risque, l'État semble prêt à commencer les travaux sans attendre les jugements, quitte à ce que de l'argent public soit dépensé inutilement et que de l'argent supplémentaire doive être déboursé pour remettre en état les milieux.