Intervention de Robert Durand

Réunion du jeudi 8 avril 2021 à 9h45
Commission d'enquête relative à la mainmise sur la ressource en eau par les intérêts privés et ses conséquences

Robert Durand, hydrogéologue :

Ce bassin versant présente de fortes scories. Toute la pluie tombant sur cette surface de scories s'infiltre en profondeur. Contrairement à ce qui vient d'être dit par le BRGM, j'ai étudié toute la climatologie de la zone : la climatologie est restée constante depuis 1922 jusqu'à nos jours. Cela a été confirmé par nos collègues de Météo France lors du dernier comité de suivi du 16 décembre 2020. Ils affirment qu'il n'y a pas d'impact climatique sur cette zone. S'il n'y a pas d'impact climatique, nous devrions donc retrouver les mêmes débits qu'à l'époque. Si l'on applique des calculs tenant compte de la surface de 42 kilomètres carrés du bassin et d'une réserve à 100 millimètres, le bassin versant devrait débiter entre 450 litres et 670 litres par seconde. Cette donnée est importante pour comprendre ce qui devrait normalement s'écouler.

Un article paru dans la revue des huitièmes journées du comité français de l'association internationale des hydrogéologues (AIH) organisées les 11 et 12 décembre 2009, explique aux pages 26 et 27 les éléments suivants : « Le fonctionnement hydrogéologique de ces systèmes est à la fois simple et complexe : la zone sommitale de la chaîne des Puys avec ses cônes de scories joue le rôle de réservoir et de régulateur vis-à-vis des épisodes pluvieux. La capacité de régulation est considérable et se traduit au niveau des résurgences par des fluctuations modestes, sans comparaison avec d'autres systèmes hydrogéologiques ». Le professeur Guy Camus et le géologue Marc Livet poursuivent dans ce même article : « Le bilan hydrologique de 16 à 18 litres par seconde par kilomètre carré en façade ouest donne un débit de 714 litres par seconde ; le bilan de 10 à 15 litres par seconde par kilomètre carré donne un débit de 525 litres par seconde ». L'on s'aperçoit donc que nous devrions avoir des débits conséquents dans les sources de front de coulée.

Tenant compte de l'impact constaté de la galerie du Goulet sur les résurgences à la création de celle-ci en 1929, il existe bien un phénomène anthropique qui diminue le débit des sources de front de coulée. Les forages de Volvic ont été réalisés en amont de la prise du Goulet. Le syndicat mixte des utilisateurs d'eau de la région de Riom (SMUERR) constate une baisse de débit à cette galerie du Goulet : elle est passée de 170 litres par seconde à 135 litres par seconde. D'autre part, à l'époque, le surplus de cette prise du Goulet s'écoulait dans le bassin versant de Volvic. Elle est actuellement dirigée hors du bassin versant : cela diminue encore le débit des sources de front de coulée.

Le professeur Guy Camus a fait prendre une déclaration d'utilité publique (DUP) le 23 septembre 1982 : cette DUP interdit tout nouveau forage en amont du Goulet. Or il apparaît de manière curieuse et incompréhensible que depuis 1982, l'on a non seulement autorisé la création de forages par la Société des eaux de Volvic en infraction avec cette DUP, mais l'on a encore accordé à la Société des eaux de Volvic des augmentations inconsidérées de débit sans conduire aucune étude d'impact (pourtant prévue par la réglementation) et sans se préoccuper de ce qui se passait en aval. Or la DUP de 1982 précisait bien l'obligation de vérifier le droit des tiers – à aucun moment cette obligation n'a été respectée. En tenant compte de la climatologie et des quantités d'eau pompées au niveau du Goulet et par la Société des eaux de Volvic, l'on s'aperçoit de la diminution complète des eaux des fronts de coulée.

Nous ne pouvons plus revenir en arrière. Toutes les études qui pourraient être menées aujourd'hui seront impactées par ce qui s'est d'ores et déjà passé dans la zone. Une véritable étude d'impact nécessite d'arrêter tous les prélèvements et de laisser l'aquifère revenir à un état non perturbé – cela prendra des dizaines d'années.

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