Intervention de Laurent Campos-Hugueney

Réunion du jeudi 8 avril 2021 à 10h45
Commission d'enquête relative à la mainmise sur la ressource en eau par les intérêts privés et ses conséquences

Laurent Campos-Hugueney, porte-parole du collectif Eau bien commun 63, référent Eau à la Confédération paysanne du Puy-de-Dôme :

Je suis installé en maraîchage biologique depuis cinq ans dans les Combrailles suite à une reconversion. J'étais auparavant ingénieur divisionnaire du ministère de l'Agriculture.

Depuis 2019, le collectif Eau bien commun 63 s'est intéressé à la question de l'eau sur l'ensemble du département du Puy-de-Dôme. Le collectif a dénoncé la mainmise sur l'eau opérée par Danone au détriment de la population et des milieux naturels.

Nous nous sommes précisément intéressé au rôle de l'État et des représentants de l'État dans le département en période de sécheresse lorsque la ressource en eau vient à manquer. L'arrêté préfectoral n° 2013-01490 du 22 juillet 2013 définissant les mesures de limitation provisoire de certains usages de l'eau dans le département du Puy-de-Dôme prévoit la répartition des usages et de l'accès à l'eau en cas de sécheresse. Le collectif s'est aperçu que cet arrêté cadre « sécheresse » n'était pas conforme à la réglementation en vigueur, et en particulier à la loi sur l'eau et les milieux aquatiques de 2006. La loi prévoit un usage prioritaire de l'eau pour la population et pour la préservation des milieux naturels humides ; viennent ensuite, si l'eau est disponible en quantités suffisantes, les autres usages tels que les usages industriels et agricoles. À notre grand étonnement, l'arrêté cadre « sécheresse » prévoit tout l'inverse : pour différents motifs tout à fait contestables, des sociétés comme Danone ou Limagrain sont exemptées des mesures de limitation de la consommation d'eau en cas de diminution de la ressource.

Cet arrêté cadre « sécheresse » devait être modifié. Nous avons tenu une première réunion portant sur le travail de modification de l'arrêté cadre en mars 2020. La préfecture a souhaité modifier cet arrêté cadre car elle a constaté une baisse de la ressource en eau liée au changement climatique induisant des périodes de sécheresse de plus en plus longues et intenses dans le département et une moindre recharge en eau. La préfecture a considéré que l'arrêté cadre « sécheresse » jusqu'alors en place était devenu obsolète et qu'il était nécessaire de le modifier. La première réunion a associé le comité départemental de l'eau. Rapidement ensuite, le confinement a interrompu le travail de rénovation de l'arrêté cadre. Finalement, presque un an après la première réunion et sans la transmission d'aucune information depuis, la DDT a convié le comité départemental de l'eau à une nouvelle réunion le 15 janvier 2021. La DDT nous a alors présenté un projet. Nous avons bénéficié d'à peine un mois pour faire part de nos observations : ce temps est très réduit pour un texte d'une trentaine de pages assez complexe et pointu. À notre grande surprise, nous avons constaté que rien n'avait été modifié : des sociétés comme Danone et Limagrain sont de nouveau exemptées du champ d'application de la loi.

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