Intervention de Dan Lert

Réunion du jeudi 15 avril 2021 à 16h00
Commission d'enquête relative à la mainmise sur la ressource en eau par les intérêts privés et ses conséquences

Dan Lert, président de la régie Eau de Paris, adjoint à la maire de Paris, vice-président du réseau FEP :

L'eau est gérée par la régie Eau de Paris depuis sa remunicipalisation en 2009. J'aimerais illustrer, par mon témoignage, les atouts de la gestion publique de l'eau en matière d'innovation, de protection de la ressource et d'accès de tous à l'eau.

Eau de Paris a démontré la force de son modèle d'opérateur public dans le domaine de la recherche et du développement. Son laboratoire a joué un rôle moteur, à la fois dans la mise au point de techniques de détection du Sars-Cov-2 dans les eaux usées, et dans la création du réseau Obépine – Observatoire épidémiologique dans les eaux usées.

La Commission européenne cite en exemple ce réseau de surveillance de plus de 150 stations d'épuration, pour sa méthode de suivi non onéreux de la pandémie de Covid-19. La mise en place par Eau de Paris du premier dispositif d'observation de l'épidémie remonte à avril 2020. Des laboratoires privés ayant emboîté le pas au secteur public facturent à présent des services de même nature. Financé par le ministère de la Recherche, Obépine rend ses données accessibles à tous.

Eau de Paris occupe, par ses appels à projets, une place notable dans l'écosystème parisien de l'innovation. La régie s'appuie sur son patrimoine et sur des solutions de basse technologie, sobres à tout point de vue, pour contribuer au rafraîchissement de Paris, au moyen, entre autres, de fontaines brumisantes.

Voilà qui prouve que la recherche et le développement ne sont pas l'apanage des grands groupes privés. Une idée reçue voudrait que les opérateurs publics ne disposent pas de la taille critique pour innover, or notre agilité et notre capacité à coopérer, au service de l'intérêt commun, démontrent le contraire.

Innover, c'est aussi ne pas céder à la tentation de la course à la technologie. Les techniques de traitement de l'eau développées par de grands opérateurs privés, telles que l'osmose inverse basse pression, apparaissent sujettes à caution. Énergivore, cette technique suppose des investissements colossaux qui se répercuteront forcément sur le prix de l'eau, et produit des rejets qu'il faudra traiter, à l'origine d'importantes pertes d'eau.

Notre démarche pionnière de protection de la ressource en eau, engagée dans les années 1990, a franchi un nouveau cap l'an dernier, quand la Commission européenne a autorisé Eau de Paris à mettre en place son propre régime d'aide agricole. Nous souhaitons accélérer la transition agro-écologique dans nos aires d'alimentation de captage, qui couvrent 240 000 hectares sur tout le bassin parisien, dont 80 000 hectares de zones prioritaires, afin de mieux prévenir les pollutions des aquifères à la source et, ainsi, éviter, limiter ou retarder des traitements coûteux. Je salue d'ailleurs le soutien indispensable de l'agence de l'eau Seine-Normandie. En un an, plus de 50 agriculteurs se sont engagés à protéger près de 8 200 hectares supplémentaires.

Eau de Paris a enfin mené une action exemplaire innovante de développement des filières de débouchés en aval avec nos amis d'Eau du bassin rennais.

Rappelons que l'innovation et la transition écologique ne se conçoivent pas sans progrès social. Les coupures d'eau ont été proscrites à Paris bien avant la loi n° 2013-312 du 15 avril 2013 visant à préparer la transition vers un système énergétique sobre et portant diverses dispositions sur la tarification de l'eau et sur les éoliennes, dite loi Brottes. La régie Eau de Paris a volontairement contribué à hauteur de 600 000 euros au Fonds de solidarité pour le logement (FSL), en plus d'accompagner des populations modestes dans le parc privé et social avec des associations partenaires. Nous soutenons des associations d'aide aux sans domicile fixe et aux migrants, et fournissons des accès d'urgence à l'eau avec une réactivité exemplaire. Eau de Paris a enfin contribué à l'établissement d'un centre d'hébergement d'urgence géré par Emmaüs à Ivry.

La reconnaissance de nos engagements en 2017 par le prix des Nations unies pour les services publics dans la catégorie « intégrité, transparence et responsabilité » nous distingue du secteur privé.

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