Intervention de Renée-Lise Rothiot

Réunion du jeudi 22 avril 2021 à 15h30
Commission d'enquête relative à la mainmise sur la ressource en eau par les intérêts privés et ses conséquences

Renée-Lise Rothiot, porte-parole d'Oiseau Nature, membre du collectif Eau 88 :

J'interviens à cette table ronde en tant que citoyenne suivant l'information avec attention. Je tiens à faire part d'une rupture de confiance. Je ne parviens plus à accorder du crédit aux représentants de l'État et aux élus locaux.

Je vous fais part de mon incompréhension face à cette situation au cœur de laquelle les élus et l'État autorisent l'affaiblissement continuel des réserves d'eau, sans agir. Je ne comprends pas davantage cette confusion des intérêts privés et publics, qui perdure. Monsieur Schmitt a mentionné le procès de la Vigie de l'eau, impliquant Mme Claudie Pruvost mais aujourd'hui, les mêmes acteurs se réunissent autour de la table pour valider le nouveau scénario, celui du protocole territorial. Je ne parviens pas à comprendre un tel manque de transparence et de démocratie.

Aussi, les informations qui nous sont transmises me semblent toujours parcellaires et tardives, voire remaniées au fil du temps, éludant les éléments gênants que nous soulevons. Je déplore le manque de débat avec la population, y compris durant les élections municipales. À mon sens, l'enquête publique ne produira pas de meilleurs résultats.

Mon incompréhension tient aussi au fait qu'après cinquante ans de présence du groupe Nestlé, arrivé au capital de la Société générale des eaux en 1970 puis ayant racheté le portefeuille en 1992, nous ne disposions pas d'un bilan de l'action de cette entreprise sur le territoire. Ainsi, nous tirons nos propres conclusions de la situation, à savoir l'épuisement des nappes, la baisse drastique des emplois, passant de 4 500 en 1975 à 900 aujourd'hui. La démographie faiblit à Vittel et les jeunes partent chercher du travail ailleurs.

Je regrette également que nous n'ayons pas davantage d'informations quant aux futures recettes attendues de l'exploitation de la nappe B. L'économie de Vittel repose sur l'eau, qu'il s'agisse des industries annexes de l'embouteillage (bouchons, cartons), de la fromagerie et ses agriculteurs, du tourisme ou du thermalisme. Il est clair que nous sommes dépendants du devenir de la ressource et que si les réserves continuent de faiblir, Vittel pourrait devenir ville morte dans les décennies à venir.

Enfin, je souhaite vous faire part d'un voyage au Canada, au cours duquel nous avons rencontré les peuples autochtones, dits « premiers », vivant autour des grands lacs. Ils nous ont expliqué que pour des décisions touchant aux ressources vitales, telles que l'eau, leur vision prend en compte les sept générations à venir. À Vittel, où l'activité d'embouteillage a commencé en 1870, nous avons dépassé ce stade des sept générations, avec le résultat que nous connaissons. La nappe C s'avère être notoirement en déficit, c'est-à-dire en voie d'épuisement, et nous ne connaissons rien de la réalité des capacités des nappes A et B. Des signes indirects nous laissent à penser que leur état n'invite pas à l'optimisme, la nappe A étant peut-être déjà en voie d'épuisement. En conclusion, je dénonce le fait que nos dirigeants ne fassent pas preuve de sagesse et ne prennent pas en compte les sept générations à venir.

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