Intervention de Yves Giraud

Réunion du jeudi 20 mai 2021 à 16h00
Commission d'enquête relative à la mainmise sur la ressource en eau par les intérêts privés et ses conséquences

Yves Giraud, Directeur d'Electricité de France (EDF) Hydro :

Je suis honoré de faire entendre notre point de vue au nom d'EDF, en tant que directeur d'EDF Hydro. EDF exploite environ 500 ouvrages hydroélectriques en France, filiales comprises. Ces barrages sont très divers, du plus petit installé sur une rivière, au plus grand constituant d'immenses réservoirs d'eau. Ils peuvent retenir des centaines de millions de mètres cubes d'eau. Les barrages ont tous en commun de produire de l'électricité, mais la majorité des barrages sont construits pour d'autres raisons : le stockage d'eau, la régulation des cours d'eau, etc. Ils sont exploités soit sous un régime d'autorisation pour les plus petits, soit sous concession hydroélectrique dès lors que la puissance dépasse 4,5 MW, dans les conditions de la loi du 16 octobre 1919 relative à l'utilisation de l'énergie hydraulique. Nous ne sommes pas à l'image de la CNR sur une gestion multi-usage, mais uniquement sur une production d'hydroélectricité, à laquelle s'ajoutent parfois quelques contraintes.

L'hydroélectricité est pour rappel la première énergie renouvelable dans le monde et en France. En 2020, 75 TWh ont été produits en France, soit plus de la moitié de la production d'électricité renouvelable, couvrant ainsi 13,5 % de la consommation nationale. Cette énergie renouvelable est en outre flexible et stockable, ces particularités lui conférant un rôle stratégique singulier et essentiel dans la transition énergétique. Ces ouvrages jouent par ailleurs un rôle majeur dans la gestion de l'eau, plusieurs étant conçus à cet effet, et parfois même financés par le ministère de l'Agriculture, à l'image du barrage sur la Durance. Ce rôle est d'ailleurs appelé à croître avec le changement climatique, car ce dernier ne génère pas moins d'eau, mais la répartit différemment dans l'espace et dans le temps. L'hydroélectricité avec ses barrages et ses retenues contribue activement à la gestion de ces ressources.

EDF gère une capacité de 7 milliards de mètres cubes d'eau, 70 % des concessions ayant des obligations réglementaires ou contractuelles sur la gestion de l'eau. En moyenne sur les cinq dernières années, 780 millions de mètres cubes ont été relâchés pendant l'étiage, par exemple sur la Durance où les réservoirs permettent d'assurer l'irrigation et la fourniture en eau potable à la région Provence-Alpes-Côte d'Azur. Les réservoirs sont gérés en hiver grâce à des mesures des stations météorologiques de montagne permettant de mesurer l'enneigement. Un niveau d'eau maximal est ainsi visé afin d'assurer le soutien d'étiage pour la saison estivale. Le bassin Adour-Garonne est de même intéressant, un nouveau contrat de coopération ayant été signé en 2020 pour le soutien à l'étiage afin de répondre aux pics de besoins en période de sécheresse ou de canicule. L'étiage soutient pour rappel de même le niveau des nappes phréatiques proches de la rivière et donc indirectement la fourniture d'eau potable.

La gouvernance de cette gestion de l'eau est assurée de manière responsable par l'entreprise, qui est publique, en ayant conscience des enjeux qualitatifs et quantitatifs. En tant que concessionnaires d'hydroélectricité, nous assurons cette mission de manière bénévole, au contraire de la CNR. Des conventions sont ainsi passées avec des pécheurs, des agriculteurs, des responsables de sites touristiques et des responsables industriels, et nous demandons des indemnisations dans certains cas pour notre action en faveur de ces usages.

La gestion de l'eau est par ailleurs assurée en concertation avec les différentes parties prenantes. Nous prenons notre part dans la gouvernance de la gestion de l'eau dans les territoires et les instances afférentes, soit en direct, soit pour le compte de l'Union française de l'électricité (UFE). Chacun y défend ses intérêts, mais ce modèle de gouvernance reste pertinent, car il permet de régler nombre de conflits d'usages au niveau le plus local tout en tenant compte des équilibres à l'échelle du bassin hydrographique. À notre sens, il est nécessaire de progresser dans l'économie de cette gestion de l'eau. En tant qu'hydroélectricien, nous devons veiller à l'équilibre entre la production hydroélectrique et la gestion de l'eau.

Ces ouvrages ont un rôle majeur à jouer dans la transition écologique, car ils permettent d'intégrer davantage d'éolien et de photovoltaïque sur le réseau. Gardons-nous de privilégier l'usage de l'eau pour d'autres besoins que celui de l'hydroélectricité, en cherchant un juste équilibre. À ce propos, le gouvernement porte un projet de quasi-régie pour ces ouvrages hydroélectriques, celui-ci consistant à rendre l'entité EDF Hydro à 100 % publique.

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