Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, le sujet que nous abordons aujourd'hui engage des ressorts très profonds et très intimes de chacun, qui y est confronté à la suite d'un échec de sa vie amoureuse. Nous avons donc conscience de traiter un enjeu particulier, aux dimensions complexes, passionnées et parfois confuses, ce qui nous impose de nous départir des postures simplistes.
Ce sujet présente un double aspect. D'une part, de petits êtres en construction, donc fragiles, ont besoin de s'attacher à leurs deux parents et doivent bénéficier du meilleur respect possible de leurs exigences ; d'autre part, la société doit assurer la protection des plus faibles.
Il existe dans notre pays une réelle distorsion entre les textes, les affirmations de principe et la réalité de l'ampleur des situations concrètes. Les textes, tant législatifs que réglementaires, ont permis des avancées indiscutables au fil des années. Depuis la promulgation de la loi du 4 mars 2002, l'exercice en commun par les parents de l'autorité parentale est la règle.
Le maintien de relations personnelles entre l'enfant et ses deux parents n'est pas une faculté mais une obligation. Les parents doivent donc s'informer mutuellement sur l'organisation de la vie de l'enfant et prendre ensemble les décisions importantes à son sujet.
Par ailleurs, la proportion de divorces par consentement mutuel a considérablement augmenté. Depuis la promulgation de la loi du 18 novembre 2016, il n'est même plus nécessaire de se présenter devant un juge pour divorcer : en cas d'accord entre les parties, une convention signée par leurs avocats et déposée au rang des minutes des notaires devrait suffire. Les administrations – l'école au premier chef – ont intégré cette autorité parentale partagée dans leurs méthodes de travail en informant systématiquement les deux parents au sujet de la vie scolaire de leur enfant et en les consultant tous les deux avant toute décision importante.
Ces principes et précautions sont sans doute insuffisants aux yeux de nombreux parents, en particulier les pères qui continuent à considérer qu'ils font l'objet d'un traitement inégalitaire par les tribunaux et que la séparation du couple les prive trop souvent de leur enfant. Ils estiment que la domiciliation de l'enfant chez les deux parents est une condition de l'exercice de leur fonction parentale, voire une compensation à la faillite du couple et une reconnaissance officielle de leur qualité de parent, à égalité avec leur ex-conjointe.
Hommes et femmes font bruyamment valoir leurs droits en matière de garde et d'accès à la double domiciliation. Les voix qui se font entendre actuellement sont plutôt discordantes. Ainsi, certains groupes de revendication féministes soutiennent que les droits des pères l'emportent systématiquement en cas de litige financier. Les porte-parole des mouvements de défense des droits des femmes protestent principalement contre le retard ou l'absence de versement de la pension alimentaire due par les pères.