Intervention de Mathias Burghardt

Réunion du jeudi 3 juin 2021 à 13h00
Commission d'enquête relative à la mainmise sur la ressource en eau par les intérêts privés et ses conséquences

Mathias Burghardt, responsable de l'équipe infrastructure et membre du comité exécutif d'Ardian :

Je dirige Ardian infrastructure, créé en 2005 au sein de notre ancienne maison-mère Axa. Ardian est aujourd'hui une société de gestion française indépendante et majoritairement détenue par ses 750 collaborateurs. Nous gérons et conseillons nombre d'organismes publics, d'institutions, de caisses de retraite ou encore d'assurances pour près de 90 milliards d'euros d'actifs à travers le monde. Nous sommes aujourd'hui leader européen et nous situons parmi les cinq premiers acteurs mondiaux dans ce domaine.

Chez Ardian, nous investissons dans des entreprises que nous accompagnons dans leur développement. Cela se traduit par une forte création d'emploi : plus de 13 000 emplois ont été créés en Europe entre 2015 et 2019 au sein des entreprises que nous accompagnons.

Nous encourageons la participation des salariés au capital des sociétés. Cela était une dimension importante de notre projet pour Suez : nous proposions que les salariés puissent détenir jusqu'à 10 % du nouveau Suez.

Nous envisageons le métier d'investisseur dans les infrastructures comme la combinaison d'une expertise financière de long terme et d'une capacité opérationnelle et industrielle très solide. Nous pensons que l'investissement dans les infrastructures est un formidable levier pour soutenir l'économie et accélérer sa transition écologique. Il s'agit aussi d'un enjeu essentiel de souveraineté. Les projets d'infrastructures sont un vecteur d'emploi local ; ils procurent des services essentiels aux usagers et jouent souvent un rôle important dans l'aménagement des territoires dans lesquels ils s'inscrivent. Enfin, les infrastructures sont également des catalyseurs d'innovation.

Nous gérons 15 milliards d'euros d'actifs à travers le monde dans les infrastructures. Nous conduisons des opérations de très grande ampleur, couvrant les secteurs de la transition énergétique et des services à l'environnement, des transports et des télécommunications. Nous sommes ainsi actionnaire fondateur aux côtés de Vinci de la ligne à grande vitesse Tours – Bordeaux, un des plus grands projets d'infrastructure européens. Nous sommes également partenaires d'Électricité de France (EDF) dans Géosel, le deuxième site européen de stockage d'hydrocarbures situé dans l'étang de Berre. Les départements d'Île-de-France ont également fait appel à nous pour proposer au gouvernement une solution innovante dans le cadre du projet de privatisation des aéroports de Paris, aujourd'hui abandonné.

Au niveau européen, je citerai deux exemples qui montrent l'attachement d'Ardian aux partenariats avec les collectivités territoriales. Les municipalités allemandes ont fait appel à nos services pour entrer au capital de la société de services publics allemande EWE et accélérer sa transition énergétique. Nous sommes également actionnaires de la société des aéroports de Milan, majoritairement détenue par la ville de Milan. Ces partenaires nous choisissent pour notre ancrage territorial, mais aussi pour notre grande habitude de partenariat sur le long terme avec les industriels et les collectivités territoriales.

Enfin, nous avons toujours eu à cœur de faire converger autour de nos projets les intérêts de toutes les parties prenantes grâce au dialogue. Il est pour nous primordial de veiller à l'alignement des intérêts de la direction, des actionnaires mais aussi du corps social et des territoires concernés.

J'en viens maintenant à Suez. Lorsque la direction de Suez nous a contactés au mois de septembre en vue de proposer une offre alternative à l'offre de Veolia, portant initialement sur l'acquisition du bloc d'Engie dans Suez, nous avons bien sûr répondu présents. Suez est une très belle entreprise, jouissant d'un savoir-faire reconnu et d'une vision stratégique solide et pertinente.

Dans ce dossier, nous avons toujours suivi une seule ligne : celle de contribuer à trouver une solution négociée et positive pour toutes les parties prenantes afin de conserver le champion français des services à l'environnement.

Nous ne croyons pas à un capitalisme hostile. Nous n'investissons que dans les sociétés qui veulent travailler avec nous et qui nous choisissent comme partenaires. Depuis que nous avons été sollicités par le management de Suez, nous avons fourni tous les efforts possibles pour trouver une solution.

Mais cette solution devait remplir quelques conditions incontournables à nos yeux. Le nouveau Suez devait être doté d'une réelle cohérence industrielle porteuse d'avenir, grâce à un socle français préservé et à une présence internationale suffisante pour lui permettre de conserver son avance en matière de recherche et développement. Nous souhaitions également un soutien de toutes les parties prenantes en faveur de cette solution : la direction, le conseil d'administration et les salariés de Suez. Une solution négociée devait être trouvée avant le mois d'octobre avec le groupe Engie puis avec Veolia.

Le projet qui a été conclu le 11 avril entre Suez et Veolia ne remplissait pas toutes ces conditions. Le périmètre du nouveau Suez était, selon nos analyses, insuffisant. La gouvernance actionnariale choisie pour la nouvelle entité n'était pas conforme à notre projet. Enfin, la proposition n'avait pas le soutien des représentants des salariés. Notre position dans ce dossier a toujours été lisible et rationnelle. Nous assumons tout à fait le fait que l'accord aboutisse sans Ardian et espérons de tout cœur la réussite du nouveau Suez.

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