Intervention de Bruno le Maire

Réunion du jeudi 3 juin 2021 à 14h00
Commission d'enquête relative à la mainmise sur la ressource en eau par les intérêts privés et ses conséquences

Bruno le Maire, ministre de l'économie, des finances et de la relance :

L'eau est un sujet d'intérêt général. C'est un bien essentiel pour nos concitoyens et un service public. Nous avons le devoir de garantir aux Français un accès de la meilleure qualité possible au meilleur prix. L'eau est effectivement un bien stratégique. L'ensemble du secteur représente 28,4 milliards d'euros – dont 30 % sont réalisés à l'exportation –, 5 000 entreprises, 124 000 emplois. C'est l'une des grandes filières industrielles du pays, qui fait appel à plus d'une centaine de métiers et comprend deux champions internationaux : Veolia et Suez.

C'est évidemment, au-delà du commerce, un enjeu majeur pour des secteurs tels que l'agriculture, l'industrie, mais aussi le nucléaire, pour le refroidissement des réacteurs. L'eau a partie liée à la souveraineté. Nous veillons à ce que la France conserve son autonomie sur la gestion de l'eau, en protégeant nos entreprises à travers le contrôle des investissements étrangers. L'eau est source de conflits dans le monde, alors que l'accès à cette ressource devrait être un droit universel. L'Agence française de développement (AFD) en a fait une priorité et investit plus de1 milliard d'euros par an pour offrir un accès à l'eau potable à des millions de personnes dans le monde.

Le dispositif économique actuel permet aux Français d'avoir accès à une offre économe et de qualité. C'est ce qui m'a toujours guidé dans les décisions que j'ai dû prendre depuis onze mois sur la question de l'eau. J'ai poursuivi plusieurs objectifs : maintenir la concurrence entre les acteurs industriels, qui est la condition permettant d'avoir le prix le plus raisonnable possible ; maintenir l'empreinte industrielle dans le pays, qui est un facteur de développement économique ; enfin, garantir l'emploi, parce que c'est l'une des grandes filières industrielles de notre nation. Tels sont les trois principes qui m'ont guidé dans toutes les décisions que j'ai prises.

La situation actuelle est satisfaisante à l'aune de ces trois critères. Nous sommes l'un des pays où l'eau est la moins chère en Europe, à savoir 4 euros le mètre cube, contre 5,21 euros en Allemagne et 6,61 euros au Danemark, d'après les chiffres de l'Office international de l'eau (OIE) pour 2017. Un parallèle peut être fait avec l'électricité, qui est, en France, l'une des moins chères d'Europe.

Nous laissons le choix aux collectivités entre l'exploitation en régie et la délégation au secteur privé. Je ne suis absolument pas favorable à la nationalisation de l'eau qui, en faisant disparaître la concurrence, pourrait conduire à une augmentation des prix et à une dégradation de la qualité de service. Le choix offert entre la régie et la délégation privée garantit le meilleur service au moindre coût pour les consommateurs et assure le respect du principe constitutionnel de la libre administration des collectivités territoriales, qui exclut l'existence d'une structure unique pour la gestion de l'eau. Je rappelle enfin que 58 % des Français sont alimentés en eau grâce à un acteur privé.

Le prix de l'eau a connu une évolution modérée au cours de la décennie précédente et continue à progresser au même rythme. Cela s'explique en particulier par l'application de nouvelles normes et de nouvelles obligations environnementales et sanitaires.

Nous avons décidé, dans le cadre du plan France Relance, de consacrer 300 millions d'euros à la modernisation des infrastructures d'eau potable, à l'assainissement et à la gestion des eaux pluviales. Au sein de cette enveloppe, 220 millions seront affectés à la seule modernisation du réseau d'eau potable. À titre d'exemple, 3 millions seront investis pour la mise à niveau d'une usine de production et de distribution d'eau potable à Touvre, en Charente.

Ces investissements me semblent indispensables pour faire face au risque de sécheresse, lutter contre les sources de contamination de l'eau et déployer des stations d'épuration plus efficaces.

Je souhaite que nos décisions continuent à être guidées par le respect de l'empreinte industrielle, le maintien de la concurrence et la préservation de l'emploi sur nos territoires.

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