Intervention de Bruno le Maire

Réunion du jeudi 3 juin 2021 à 14h00
Commission d'enquête relative à la mainmise sur la ressource en eau par les intérêts privés et ses conséquences

Bruno le Maire, ministre :

Ce sont deux décisions très différentes : l'une est de nature environnementale, l'autre a un fondement patrimonial. Dès lors que la stratégie d'Engie est de se réorienter vers l'énergie et d'accélérer la décarbonation de ses actifs énergétiques, il n'aurait pas été très cohérent de continuer à s'engager dans des projets liés au gaz de schiste, manifestement contraires à la réduction de l'empreinte environnementale et à l'intérêt social de l'entreprise. Ces arguments étaient suffisants pour faire évoluer la position de M. Clamadieu.

En revanche, du strict point de vue du patrimoine et du périmètre d'Engie, la cession de la participation dans Suez pouvait avoir un sens. C'est pourquoi le président d'Engie a décidé, contre l'avis de l'État, d'aller jusqu'au vote. Je regrette que M. Clamadieu ne se soit pas rendu aux arguments de l'État, qui l'invitait à prendre davantage de temps pour réaliser cette opération dans des conditions amicales. Cela nous aurait épargné les mois de déchirement qui ont suivi entre les deux entreprises, lesquelles laisseront des traces. Ce n'est bon ni pour ces sociétés, ni pour la réputation de grande nation industrielle dont peut se prévaloir la France.

L'État avait-il le pouvoir, par son droit de vote, d'infléchir la décision du président d'Engie ? Non. Nous avions 23,6 % des droits de vote et ne pouvions recourir à l'assemblée générale, puisque les décisions de cession d'actifs se prennent en conseil d'administration et n'ont pas besoin d'être validées en assemblée générale. L'État actionnaire ne peut véritablement infléchir des décisions qui se heurtent à sa conception de l'intérêt général que lorsqu'il dispose d'une minorité de blocage. Je me suis par exemple opposé au projet de fusion entre Renault et Fiat Chrysler Automobiles (FCA) car les conditions que j'avais fixées n'étaient pas remplies. Dans mes fonctions de ministre de l'économie et des finances, j'ai toujours employé la même méthode : la clarté, la transparence, la fermeté et la constance. J'avais indiqué au président de Renault, M. Jean-Dominique Senard, que l'État ne donnerait pas son accord à la fusion si le partenaire japonais Nissan ne votait pas formellement en sa faveur. Cette condition n'ayant pas été remplie, j'ai marqué mon opposition et ai obtenu gain de cause. En effet, si le projet de fusion avait été adopté par le conseil d'administration de Renault, où l'État était minoritaire, j'aurais pu faire usage de ma minorité de blocage devant l'assemblée générale.

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