Intervention de Jean-Luc Touly

Réunion du mardi 8 juin 2021 à 14h00
Commission d'enquête relative à la mainmise sur la ressource en eau par les intérêts privés et ses conséquences

Jean-Luc Touly, président du Front républicain d'intervention contre la corruption (FRICC) :

Une DSP implique que le délégant contrôle le délégataire par différents moyens, tels que la commission consultative des services publics locaux et la commission de contrôle financier. Depuis la loi n° 95-101 du 2 février 1995 relative au renforcement de la protection de l'environnement, dite loi Barnier, le délégataire doit, chaque année, fournir un rapport sur l'histoire du contrat, la qualité des eaux, l'assainissement et les performances techniques en termes de fuites et de revêtement du réseau. Il revient en outre au délégataire d'indiquer ses dépenses en personnel au service de la collectivité sur le compte annuel de résultat d'exploitation.

Malheureusement, en Guadeloupe, ces documents ne sont pas régulièrement fournis, ou de manière incomplète. Je préconise personnellement de recourir à la régie. Les élus qui optent pour une DSP, à laquelle ils délèguent souvent toutes leurs prérogatives, ce qui amène à se demander pourquoi ils ont souhaité se faire élire, sont tenus d'exercer un contrôle sur le délégataire, ce qui suppose d'embaucher des comptables et donc de recruter des fonctionnaires.

La chambre régionale des comptes souligne, dans ses rapports, que certains contrats de DSP se renouvellent, pendant quarante ans dans certains cas, sans le moindre appel d'offres. Les sociétés privées, que je ne condamne pas par principe, réalisent des bénéfices qui, en l'absence de contrôle, reviennent aux actionnaires sous forme de dividendes ou financent la recherche et le développement.

Curieusement, aucun élu, surtout en outre-mer, ne s'interroge sur cet état de fait. En mai 2015, j'ai demandé au maire de Port-Louis, dont je ne mentionnerai pas l'appartenance politique pour ne froisser personne, de me fournir, en vue d'une conférence publique que je devais prononcer, le rapport annuel de la Générale des eaux. Il ne comprenait pas à quoi je faisais référence. Je lui ai alors montré mon badge de salarié de Veolia. Subitement, ce maire, par ailleurs agent de la Générale des eaux, s'est souvenu de l'obligation pour l'entreprise qui nous employait tous deux de fournir un rapport annuel. Je n'ai toutefois jamais obtenu ce document. Le fait qu'un cadre de la Générale des eaux assume les fonctions de maire d'une commune où le prix du mètre cube d'eau dépasse les 7,80 euros toutes taxes comprises (TTC) pose un vrai problème, de complicité pour dire les choses gentiment. Je comprends la volonté des associations de faire le ménage dans les élus.

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